Chronique de Nestor
 
 
XL. – Guerres de Vladimir. Controverses religieuses (984.)
 
    Année 6492. Vladimir marcha contre les Radimitches. Il avait pour général Voltchy Khvost (queue de loup), et Vladimir l'envoya en avant. Voltchy Khvost rencontra et battit les Radimitches sur la rivière Piestchana. Aussi les Russes se moquent-ils des Radimitches, disant les Piestchaniens s'enfuient devant une queue de loup. Or les Radimitches, qui étaient de la race des Lekhs, s'étaient établis dans ces contrées et ils paient tribut aux Russes; aujourd'hui encore ils nous voiturent un chariot.
    Année 6493. Vladimir partit contre les Bulgares avec Dobrynia son oncle; ils étaient sur des bateaux et Vladimir fit venir par terre des Torks à cheval et il vainquit les Bulgares. Dobrynia dit à Vladimir : «J'ai vu les prisonniers; ils ont tous des bottes; ils ne nous paieront pas tribut; allons chercher des ennemis chaussés d'écorce.» Et Vladimir conclut la paix avec les Bulgares; les deux partis la jurèrent et les Bulgares dirent : La paix sera rompue entre nous quand les pierres nageront, quand le houblon coulera au fond de l'eau.» Et Vladimir revint à Kiev (985).
    Année 6494. Il vint des Bulgares de la foi mahométane disant : «Prince, tu es sage et prudent et tu n'as point de religion. Prends notre religion et rends hommage à Mahomet.» Et Vladimir dit : «Quelle est votre foi ?» Ils dirent : «Nous croyons en Dieu, et Mahomet nous apprend à circoncire les membres honteux, à ne point manger de porc, à ne point boire de vin et à faire débauche après la mort avec des femmes. Mahomet donne à chaque homme soixante-dix belles femmes : il en choisit une belle; il rassemble sur elle la beauté de toutes les autres et elle devient sa femme. Et là on peut, dit-il, se livrer à toute espèce de débauche. Celui qui est pauvre en ce monde le sera dans l'autre.» Et une foule de mensonges pareils que la honte m'empêche de reproduire (986). Vladimir les écouta, car il aimait les femmes et la débauche; il les écouta avec plaisir; seulement ce qui lui déplaisait, c'était la circoncision et l'abstinence de porc et de vin. II répondit : « Boire est une joie pour les Russes et nous ne pouvons vivre sans boire.» Puis vinrent des Niemts de Rome disant : «Nous sommes venus envoyés par le Pape.» Et ils parlèrent ainsi : «Le Pape nous a ordonné de te dire : Ton pays est comme notre pays; mais votre foi n'est pas comme notre foi car notre foi est la lumière; nous adorons le Dieu qui a fait le ciel et la terre, les étoiles, la lune et toutes les créatures et vos Dieux sont de bois.» Vladimir dit : «Quels sont vos commandements ?» – «Jeûner suivant ses forces; manger ou boire toujours à la plus grande gloire de Dieu; c'est ce que dit notre maître Paul.» Vladimir dit aux Allemands : «Allez-vous en, car nos aïeux n'ont point admis cela.» Ayant appris ces choses des Juifs Kozares vinrent et dirent  : Nous avons appris que des Bulgares et des chrétiens sont venus pour vous enseigner leur foi. Les chrétiens croient en celui que nous avons crucifié; pour nous, nous croyons en un Dieu unique, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob.» Et Vladimir dit : «Quelles sont vos observances?» Il répondit : «La circoncision, l'abstinence de la chair de porc et de lièvre, la célébration du sabbat.» Il leur dit : «Et où est votre pays ?» Ils répliquèrent : «A Jérusalem.» Il leur dit : «Est-ce que vous y habitez maintenant ?» Ils répondirent : «Dieu s'est irrité contre nos pères et il nous a dispersés par le monde pour nos péchés, et notre pays a été livré aux chrétiens.» Il leur dit : «Et comment enseignez-vous les autres étant vous-même rejetés de Dieu et dispersés par lui ? Si Dieu vous aimait vous et votre loi, vous ne seriez pas dispersés dans les pays étrangers; voulez-vous que ce mal nous arrive aussi ?» Ensuite les Grecs envoyèrent un philosophe à Vladimir, disant : «Nous avons appris que des Bulgares sont venus pour vous inviter à recevoir leur foi, cette foi qui souille le ciel et la terre; ils sont maudits plus que toute nation, semblables à Sodome et à Gomorrhe sur lesquelles le Seigneur a laissé tomber des pierres brûlantes et qu'il a englouties et submergées. Aussi à ces gens est réservée la ruine quand le Seigneur viendra juger la terre et perdre tous ceux qui ont commis l'injustice et l'abomination; car ils lavent leurs excréments, se mettent cette eau dans leur bouche, l'avalent et en oignent leur barbe en souvenir de Mahomet. Leurs femmes font des choses aussi infâmes et encore pires.» Quand Vladimir entendit cela, il cracha par terre en disant : «C'est une abomination.» Le philosophe dit : «Nous avons appris que des gens sont venus de Rome pour vous enseigner leur foi. Or il n'y a pas une grande différence entre leur foi et la nôtre. Dans le service divin il se servent d'hosties que Dieu ne leur a pas données, car il a ordonné de se servir de pain et il en a donné aux apôtres. Après avoir pris le pain il a dit : «Prenez et mangez : c'est mon corps rompu pour vous.» Et de même ayant pris le calice, il a dit : «Prenez-en tous voici mon sang, le sang du Nouveau Testament répandu pour vous et pour beaucoup, pour la rémission des péchés.» Or ils ne font pas cela et ils altèrent la foi.» Vladimir leur dit : «Des Juifs sont venus à moi et ils m'ont dit : «Les Allemands et les Grecs croient en celui que nous avons crucifié.» Le philosophe répondit : «Il est vrai que nous croyons en lui; car des prophètes ont prédit qu'un Dieu naîtra, et d'autres qu'il sera crucifié, enseveli, qu'il ressuscitera le troisième jour et montera aux cieux. Ils ont tué ces prophètes, ou les ont sciés en deux. Et quand le temps prédit est arrivé, il est venu au monde, il s'est fait crucifier, il est ressuscité et il est monté aux ciel. II a attendu quarante-six ans qu'ils se repentissent, et ils ne se sont pas repentis. Il a donc envoyé contre eux les Romains qui ont détruit leurs villes et les ont dispersés par le monde où ils servent les étrangers.» Vladimir demanda : «Et pourquoi Dieu est-il descendu sur la terre, et a-t-il supporté un tel martyre ?» Le philosophe répondit : «Si tu veux m'écouter, je te dirai à partir du commencement pourquoi Dieu est descendu sur la terre.» Vladimir dit : «Je t'écouterai volontiers.» Et le philosophe se mit à parler ainsi : «Au commencement Dieu le premier jour créa le ciel et la terre. Le second jour, il fit le continent qui est au milieu des eaux; ce jour-là les eaux se divisèrent : une partie s'éleva au-dessus du continent, et l'autre descendit au-dessous. Le troisième jour il fit la mer, les fleuves et les sources et les semences. Le quatrième jour, il fit le soleil, la lune et les étoiles et il en orna le ciel. Voyant cela, le premier des anges, le chef du choeur des anges réfléchit en lui-même et dit : «J'irai sur la terre, je m'emparerai de la terre et je serai semblable à Dieu et j'établirai mon trône sur les nuages du septentrion.» (Is 14,13) Et aussitôt Dieu le précipita du ciel et après lui tombèrent ceux qui lui étaient soumis, le dixième choeur des anges. Or le nom de cet adversaire était Satanael, et Dieu mit à sa place Michel. Satan ayant péché dans ses desseins et ayant perdu sa gloire première s'appela l'ennemi de Dieu. Ensuite le cinquième jour Dieu fit les baleines et les poissons et les reptiles et les oiseaux ailés. Le sixième jour Dieu fit les bêtes et le bétail et les reptiles terrestres; il fit aussi l'homme. Le septième Dieu se reposa après son travail et ce fut le sabbat. Et Dieu fit le paradis à l'Orient dans l'Éden. Il y mit l'homme qu'il avait fait et lui permit de manger de tout arbre, sauf d'un seul, celui de l'intelligence du bien et du mal. Et Adam était dans le paradis; il contemplait Dieu et le louait et s'unissait aux anges quand ils le louaient. Et Dieu envoya un sommeil à Adam et Adam s'endormit; et Dieu prit une côte à Adam et il en fit une femme, et il l'amena à Adam dans le paradis. Et Adam dit : «Voici l'os de mes os, la chair de ma chair;» elle s'appela la femme. Adam donna des noms aux bêtes et aux oiseaux, aux animaux féroces et aux reptiles et un ange le nomma lui et sa femme. Et Dieu soumit à Adam les bêtes féroces et domestiques et il leur commandait et elles lui obéissaient. Le diable voyant combien Dieu avait honoré l'homme en fut jaloux et il se changea en serpent et il alla auprès d'Ève et lui dit : «Pourquoi ne mangez-vous pas des fruits de l'arbre qui est a milieu du jardin ?» La femme dit au serpent : «Dieu a dit : Vous n'en mangerez pas et si vous en mangez, vous mourrez.» Et le serpent dit à la femme : «Vous ne mourrez pas; mais Dieu sait que le jour où vous mangerez de ce fruit, vos yeux s'ouvriront et vous serez comme Dieu, sachant le bien et le mal.» Et la femme vit combien ce fruit était bon à manger et elle le prit, le donna à son mari, ils en mangèrent et leurs yeux s'ouvrirent, et ils reconnurent qu'ils étaient nus et ils cousirent des feuilles de figuier pour en faire des ceintures. Et Dieu dit : «La terre est maudite dans tes oeuvres et tu mangeras dans la tristesse tous les jours de ta vie.» Et Dieu dit : «Si vous étendez la main et cueillez le fruit de l'arbre de vie, vous vivrez à jamais.» Et le Seigneur chassa Adam du paradis, et il s'assit en face du paradis pleurant et labourant la terre. Et Satan se réjouit de la malédiction de la terre. Voilà la première chute et le châtiment amer : la perte de la vie angélique. Adam engendra Caïn et Abel. Caïn fut laboureur et Abel fut pasteur. Et Caïn offrit les fruits de la terre à Dieu et Dieu ne reçut pas ses présents; Abel offrit les premiers-nés de ses agneaux et Dieu reçut les présents d'Abel. Satan pénétra l'âme de Caïn et l'excita à tuer Abel. Et Caïn dit à Abel : «Allons dans les champs.» Quand ils furent sortis Caïn se dressa et voulut le tuer; mais il ne savait comment faire et Satan lui dit : «Prends une pierre et frappe-le.» Il prit une pierre et le tua; et Dieu dit à Caïn : «Où est ton frère.» II répondit : «Est-ce que je suis le gardien de mon frère ?» Et Dieu dit : «Le sang de ton frère crie vers moi; tu gémiras et tu trembleras pendant le cours de ta vie.» Adam et Eve pleurèrent et le diable se réjouit disant : «Celui que Dieu a honoré, moi je l'ai fait tomber loin de Dieu, et maintenant je l'ai réduit à pleurer.» Et ils pleurèrent Abel pendant trente ans, et son corps ne pourrit pas. Et ils ne savaient pas l'ensevelir. Et par ordre de Dieu survinrent deux oiseaux. L'un des deux creva; l'autre creusa une fosse, y mit l'oiseau mort et l'enterra. Voyant cela Adam et Eve creusèrent une fosse, y déposèrent Abel et l'ensevelirent en pleurant. Adam, à l'âge de deux cent trente ans, engendra Seth et deux filles, et Caïn se maria avec l'une d'elle, Seth avec l'autre, et par ces unions la race humaine se propagea et se répandit sur la terre. Et ils méconnurent leur Créateur, se livrèrent au libertinage et à tous les crimes, au meurtre, à la haine et vécurent comme des bêtes. Noé fut le seul juste de cette race et il engendra trois fils, Sem, Cham, Japhet. Et Dieu dit : «Mon esprit ne sera plus sur ce peuple;» et il dit : «J'anéantirai ce que j'ai fait depuis l'homme jusqu'aux animaux.» Et le Seigneur Dieu dit à Noé : «Bâtis une arche longue de trois cents coudées, large de cinquante et haute de trente; – car en Égypte une sajène s'appelle une coudée. – Noé bâtit l'arche pendant cent ans, annonçant qu'il y aurait un déluge, et on se moquait de lui. Quand il eut bâti l'arche, Dieu dit à Noé : «Fais entrer dans l'arche ta femme, tes enfants, tes brus, un couple de tous les animaux, de tous les oiseaux, de tous les reptiles.» Noé fit ce que Dieu lui avait ordonné. Et Dieu lâcha le déluge sur la terre, engloutit tous les êtres et l'arche flotta sur l'eau. Et quand l'eau se fut retirée Noé sortit avec ses fils, ainsi que sa femme et les femmes de ses fils; et c'est par eux que s'est multiplié le genre humain. Il y avait un grand nombre d'hommes, et ils parlaient une même langue, et ils se dirent l'un à l'autre : «Bâtissons une tour jusqu'au ciel.» Ils se mirent à la bâtir et leur chef fut Nenirod; et Dieu dit : «Voici que les hommes se sont multipliés et leurs pensées sont pleines de vanité;» et Dieu vint et il divisa leurs langues en soixante-douze langues. Mais la langue d'Adam ne fut pas ôtée à Heber; car lui seul n'avait pas pris part à leur folie, disant : «Si Dieu avait dit aux hommes de bâtir une tour jusqu'aux ciel, lui-même l'aurait créée par sa parole, comme il a créé le ciel, la terre, toutes les choses visibles et invisibles.» C'est pour cela que sa langue ne fut pas changée. C'est de lui que viennent les Hébreux.
    Les hommes se divisèrent en soixante-douze nations et ils se répandirent parmi divers pays; et chaque nation prit des moeurs particulières : suivant les leçons du diable les uns sacrifièrent aux arbres, les autres aux sources, les autres aux rivières et ils méconnurent Dieu. Or, d'Adam au déluge, il y a 2242 ans et du déluge à la division des langues 529 ans. Ensuite le diable jeta l'homme dans de plus grandes erreurs; et ils se mirent à faire des idoles, les unes en bois, les autres en cuivre, les autres en marbre, les autres en or ou en argent. Ils s'agenouillèrent devant elles, amenèrent leurs fils et leurs filles et les sacrifièrent et toute la terre fut souillée. L'auteur de l'idolâtrie fut Seroukh; car il faisait des idoles en l'honneur des morts : des empereurs, des héros, des magiciens, des femmes débauchées. Ce Seroukh engendra Tara et Tara engendra trois fils : Abraham, Nachor, Aran. Tara faisait des idoles s'y étant habitué chez son père. Mais Abraham, arrivé à l'âge de raison, regarda le ciel orné du soleil, de la lune, des étoiles, et dit : «En vérité; c'est Dieu qui a créé le ciel et la terre et mon père induit les gens en erreur.» Et Abraham dit : «J'éprouverai les dieux de mon père.» Et il dit : «Père, pourquoi induis-tu les hommes en erreur, fabriquant des dieux de bois ? C'est Dieu qui a créé le ciel et la terre.» Abraham ayant pris du feu brûla les dieux dans leur temple. Voyant cela Aran, frère d'Abraham, emporté par son zèle voulut enlever les idoles et lui-même fut consumé par le feu et mourut avant son père. Jusque là aucun fils n'était mort avant son père, mais les pères mouraient avant leurs enfants : et à partir de lui on vit les fils mourir avant leurs pères.
    Abraham plut à Dieu, et il lui dit : «Va de ta maison dans la terre que je te montrerai; je multiplierai ta famille en un grand peuple et les peuples de la terre te béniront. Et Abraham fit ce que Dieu lui avait ordonné.» Et Abraham prit son neveu Loth : car Loth était son beau-frère et son neveu, Abraham ayant épousé la fille de son frère Aran, Sara : et il vint dans la terre de Chanaan auprès d'un chêne et Dieu dit à Abraham : «Je donnerai ce pays à ta race.» Et Abraham adora Dieu. Or, Abraham avait 75 ans quand il sortit de Caran. Et Sara était stérile. Sara affligée de sa stérilité dit à Abraham : «Aie commerce avec mon esclave.» Et Sara prit Agar et elle la donna à son mari; et quand Abraham eut eu commerce avec Agar, elle conçut et mit au monde un fils qu'Abraham appela Ismaël. Abraham avait 80 ans quand lsmaël naquit. Ensuite Sara conçut et enfanta un fils et lui donna le nom d'Isaac. Et Dieu ordonna à Abraham de circoncire cet enfant et il le circoncit le troisième jour. Dieu aimait Abraham et sa race et il l'appela son peuple, et il les distingua des païens et l'appela sa nation. Et quand lsaac fut devenu grand, Abraham mourut âgé de 175 ans et on l'ensevelit. Isaac à l'âge de 60 ans engendra deux fils Esaü et Jacob. Esaü était méchant et Jacob était juste. Jacob servit sept années chez son oncle pour obtenir sa plus jeune fille, et Laban son oncle ne la lui donna pas disant : «Épouse la plus âgée;» et il lui donna Lia l'aînée. Quant à la seconde il lui dit : «Sers-moi encore sept ans.» Il servit sept nouvelles années pour obtenir Rachel, et il eut pour femmes les deux soeurs qui lui donnèrent huit fils : Ruben, Siméon, Lévi, Juda, Isachar et Zabulon, Joseph et Benjamin; et de deux esclaves il eut Dan, Nephtali, Gad et Asser : et c'est d'eux que viennent les Juifs. Jacob, à l'âge de 130 ans partit pour l'Égypte avec sa famille, comptant soixante-cinq personnes. II vécut 17 ans en Égypte et mourut, et sa race fut en captivité pendant quatre cents ans. Pendant ce temps le peuple juif s'accrut et quand il fut devenu plus nombreux, les Égyptiens l'accablèrent de travaux. Vers ces temps naquit parmi les Juifs Moïse et les magiciens d'Égypte dirent au roi : «Voici qu'est né parmi les Juifs un enfant qui perdra l'Égypte.» Le roi aussitôt ordonna de jeter le nouveaux-nés des Juifs dans le Nil. La mère de Moïse ayant peur de perdre son fils le prit et le mit dans une corbeille, l'emporta et le déposa sur l'eau. A ce moment la fille de Pharaon Fermoufi vint se baigner. Voyant l'enfant pleurer, elle le prit, le garda, lui donna le nom de Moïse et le nourrit. L'enfant était beau et quand il eut quatre ans la fille de Pharaon l'amena à son père. Pharaon voyant Moïse aima cet enfant et Moïse saisissant le roi par le cou, jeta sa couronne et la foula aux pieds. Voyant cela, un magicien dit au roi : «Roi, anéantis cet enfant, sinon il perdra toute l'Égypte.» Et le roi ne l'écouta pas, mais il ordonna au contraire qu'on ne fut plus périr les enfants des Juifs. Quand Moïse fut homme, il acquit une grande importance à la cour de Pharaon et les grands lui portèrent envie. Moïse alors ayant tué un Égyptien qui faisait tort à un Hébreu s'enfuit d'Égypte et vint dans la terre de Madian. En passant dans le désert il apprit de l'ange Gabriel tout ce qui concerne la création du monde, le premier homme, ce qui arriva après lui, et, après le déluge, la confusion des langues, combien chaque homme avait vécu d'années, le cours et le nombre des étoiles, la mesure de la terre et toute la sagesse. Ensuite Dieu lui apparut comme un feu dans un buisson et lui dit : «J'ai vu la misère de mon peuple en Égypte, et je suis descendu pour l'arracher aux mains des Égyptiens et l'emmener de cette terre. Va donc trouver Pharaon roi d'Égypte, et dis-lui : Laisse partir Israël dans trois jours afin qu'il puisse offrir ses sacrifices à Dieu. S'il ne t'écoute pas, je l'écraserai par tous mes miracles.» Moïse alla; Pharaon ne l'écouta pas et Dieu envoya dix plaies sur Pharaon; pour la première les ruisseaux furent changés en sang; pour la deuxième les grenouilles; pour la troisième les moucherons; pour la quatrième les mouches à chien; pour la cinquième la peste sur les animaux; pour la sixième les pustules brûlantes; pour la septième la grêle; pour la huitième les sauterelles; pour la neuvième une obscurité de trois jours; pour la dixième la peste sur les hommes. Ils furent frappés de dix plaies parce qu'ils avaient noyé les enfants des Juifs pendant dix mois. Et quand la peste survint en Égypte, Pharaon dit à Moïse et à Aaron son frère : «Allez-vous en le plus tôt possible.» Moïse rassembla le peuple juif et sortit de l'Égypte. Et Dieu le conduisit à travers le désert jusqu'à la mer Rouge et il les précédait le jour sous la forme d'un nuage, la nuit sous celle d'une colonne de feu. Pharaon apprenant que le peuple s'enfuyait le poursuivit et l'accula au bord de la mer. Voyant cela, le peuple juif murmura contre Moïse, disant : «Pourquoi nous conduit-il à la mer ?» Et Moïse appela Dieu et Dieu dit : «Pourquoi m'appelles-tu ? Frappe la mer avec ta verge. Moïse obéit; et l'eau se divisa en deux, et les fils d'Israël entrèrent dans la mer. Voyant cela Pharaon les poursuivit. Les fils d'Israël passèrent à sec. Quand ils furent arrivés au rivage, la mer se referma sur Pharaon et son armée. Or Dieu aimait Israël. Et ils passèrent ensuite trois jours dans le désert, et ils arrivèrent à Moren; il y avait là de l'eau amère, et le peuple murmura contre Dieu, et Dieu leur montra un certain bois, et Moïse en mit dans l'eau et l'eau s'adoucit; ensuite il murmurèrent encore contre Moïse et Aaron, disant : «Nous étions mieux en Égypte, où nous mangions de la viande, de l'oignon et du pain à volonté.» Et Dieu dit : «J'ai entendu le murmure des fils d'Israël» et il leur donna de la manne à manger. Ensuite il leur donna sa loi sur le mont Sinaï. Tandis que Moïse était sur la montagne ils fondirent une tête de veau et se prosternèrent devant elle comme devant Dieu. Moïse en fit périr trois mille. Et ensuite ils murmurèrent de nouveau contre Moïse et Aaron parce qu'il n'y avait pas d'eau. Et Dieu dit à Moïse : «Frappe le rocher avec un bâton.» Il dit : «Et si l'eau ne jaillit pas de ce roche?» Et Dieu s'irrita contre Moïse parce qu'il ne l'avait pas glorifié : et, à cause de cela et des murmures du peuple, il n'entra point dans la terre promise; mais il mena seulement les Hébreux sur la montagne de Vam et leur montra la terre promise; et Moïse mourut sur la montagne. Et Josué fils de Nun prit le commandement; il entra dans la terre promise, détruisit la race de Chanaan et établit à sa place le peuple d'Israël. Quand Josué mourut, Juda fut juge à sa place; et il y eut quatorze autres juges. Sous leur commandement, ils se mirent à oublier le Dieu qui les avait tirés de l'Égypte et à adorer les idoles. Et Dieu irrité les livra aux mauvais traitements des étrangers. Quand ils se repentirent, il eut pitié d'eux. Lorsqu'il les eut délivrés, ils recommencèrent à adorer les idoles. Ensuite furent juges le prêtre Héli et le prophète Samuel. Et le peuple dit à Samuel : «Donne-nous un roi» et Dieu s'irrita contre Israël et il établit comme roi Saül. Saül ne voulut pas marcher dans la loi du Seigneur, et Dieu choisit David et il le mit à la tête d'Israël; et David plut à Dieu. C'est à ce David que Dieu promit qu'un Dieu naîtrait de sa race. Il commença à prophétiser l'incarnation divine, disant : «Je t'ai engendré de mon sein avant l'étoile du matin.» (Ps 90) Il prophétisa quarante ans et mourut. Après lui régna et prophétisa son fils Salomon qui bâtit un temple au Seigneur et l'appela le Saint des Saints. Il était sage, mais à la fin il s'égara. Il mourut après avoir régné quarante ans. Après Salomon régna son fils Roboam. Après lui, la royauté se divisa en deux parties, l'une à Jérusalem et l'autre à Samarie.
    A Samarie régna Jéroboam, serviteur de Salomon, qui fit deux vaches d'or, l'une à Bethel sur la hauteur, l'autre à Dan disant : «Voici tes dieux, Israël.» Et le peuple les adora et oublia Dieu. De même à Jérusalem le peuple se mit à oublier. Dieu et à adorer Baal, c'est-à-dire le dieu de la guerre qui est Arès et il oublia le Dieu de ses pères. Et Dieu se mit à lui envoyer des prophètes et les prophètes commencèrent à lui reprocher son impiété et son idolâtrie. Ils tuèrent les prophètes, Dieu s'irrita contre Israël et dit : «Je le rejetterai; je prendrai d'autres peuples qui m'écouteront. S'ils pèchent, je ne me rappellerai pas leurs iniquités. Et il se mit à envoyer des prophètes, disant : «Prophétisez le rejet des Juifs et la vocation des Gentils.» Alors Osée commença à prophétiser disant : «Je ferai cesser le règne de la maison d'Israël : je briserai l'arc d'Israël; je ne veux plus avoir pitié de la maison d'Israël; je les rejetterai, je les désavouerai, dit le Seigneur, et ils seront errants au milieu des nations.» (Os 1,4-6) Jérémie dit : «Quand même Samuel et Moïse intercéderaient, je n'aurai pas pitié d'eux.» (Jer 15,1) Et Jérémie dit encore : «Le Seigneur parle ainsi : j'ai juré par mon grand nom, qu'il ne sera plus invoqué parles lèvres des Juifs.» (Jer 44,28) Ezéchiel a dit : «Le Seigneur Adonaï parle ainsi : Je disperserai vous et vos restes à tous les vents; car vous avez souillé mes sanctuaires par toutes vos abominalions : Je vous rejetterai donc et je n'aurai plus pitié de vous.» (Ez 5,10) Malachie dit : «Le Seigneur parle ainsi : Je n'ai plus de complaisance pour vous, car de l'orient à l'occident mon nom sera glorifié chez les peuples; dans tous les lieux on offre à mon nom de l'encens et des offrandes pures; car mon nom sera grand chez les nations : aussi vous livrerai-je à l'exil et au mépris de toutes les nations.» (Mal 1,10-11) Le grand Isaïe dit : «Le Seigneur parle ainsi : J'étendrai ma, main sur toi, je t'anéantirai, je te disperserai et je ne te rétablirai pas.» Et ailleurs : «Je hais vos solennités et vos fêtes à la nouvelle lune, et je n'agrée pas vos sabbats.» (Is 1,13-14) Le prophète Amos a dit : «Écoutez la voix du Seigneur : J'enverrai sur vous des pleurs; la maison d'Israël tombera et ne se relèvera plus.» Malachie a dit : «Le Seigneur parle ainsi : Je jetterai sur vous mon anathème; je maudirai votre culte, je l'anéantirai et je ne serai plus au milieu de vous.» (Mal 2,2) Beaucoup ont prophétisé qu'ils seraient rejetés et Dieu a ordonné à ces prophètes de prêcher la vocation d'autres nations appelées à leur place. Isaïe s'est mis à dire : «Voici que ma loi sortira de moi, et mon jugement éclairera les peuples; ma justice approche; mon salut apparaîtra comme une lumière et les nations espéreront dans mon bras.» (Is 42,9) Jérémie a dit : «Le Seigneur parle ainsi : Je donnerai une nouvelle loi au peuple juif; je mettrai la loi dans sa conscience; je serai son Dieu et il sera mon peuple.» (Jer 31,31-34) Isaïe dit : «Les choses anciennes sont passées, et je vous en annonce de nouvelles, et, avant qu'elles n'arrivent, elles vous sont révélées. Chantez à Dieu un cantique nouveau : à ceux qui me servent sera révélé un nom nouveau qui sera béni sur toute la terre. Ma maison sera appelée maison de prière pour tous les peuples.» (Is 42,9-10) Il dit encore : «Le Seigneur montrera son bras saint à toutes les nations, et toutes les limites de la terre verront le salut qui vient de notre Dieu.» (Is 56,5) David dit : «Louez le Seigneur, vous toutes, ô nations, louez-le vous tous, ô peuples.» (Ps 117,1) Dieu dans son amour pour les nouvelles nations leur a dit qu'il viendrait lui-même à elles, qu'il se ferait homme et chair, qu'il souffrirait pour la faute d'Adam; et ils ont prophétisé l'incarnation divine. David d'abord a dit : «Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Asseyez-vous à ma droite jusqu'à ce que je réduise mes ennemis à vous servir de marchepied.» (Ps 109,1) Et ailleurs : «Le Seigneur m'a dit : Tu es mon fils, je t'ai engendré aujourd'hui.» (Ps 2,7)  Isaïe a dit : «Ce n'est pas un envoyé, ni un messager, mais Dieu lui-même qui viendra nous sauver.» (Is 35,4) Et encore : «Voici qu'un enfant nous est né dont la puissance est dans son bras; et on l'a surnommé le grand conseiller des anges; sa puissance est grande, et sa paix n'a point de fin.» (Is 5,7) Et encore : «Voici qu'une vierge concevra et enfantera un fils et son nom sera Emmanuel.» (Is 7,14) Michée a dit : «Toi, Bethléem, maison d'Ephrat ! tu es petite parmi les milliers des Juifs; mais c'est de toi que naîtra celui qui sera l'ancien parmi les princes d'Israël; son origine date des jours de l'éternité. Il les livrera jusqu'au jour où la mère enfantera et le reste de ses frères reviendra avec les fils d'Israël.» (Mi 5,2-3) Jérémie a dit : «Voici notre Dieu, et aucun autre ne lui sera comparé; il a trouvé toutes les voies de la science, il les a données à Jacob son serviteur, puis il s'est manifesté sur la terre et il a vécu avec les hommes.» Et encore  : «L'homme existe : qui devinera ce qu'est Dieu, comment l'homme meurt ?» Zacharie dit : «Ils n'ont point écouté mon fils et je ne les écouterai pas, dit le Seigneur.» (Za 7,13) Osée dit  : «Le Seigneur parle ainsi : Mon corps viendra d'eux.» Ils ont prédit aussi sa passion. Ainsi Isaïe dit : «Malheur à leur âme parce qu'ils ont conçu de mauvais desseins disant : Tuons le juste.» Et il dit encore : «Le Seigneur dit : Je ne résiste pas; je ne m'oppose point en paroles; j'ai tendu mon dos aux coups, mon visage aux soufflets, et je n'ai point détourné mon visage des crachats.» (Is 50,5-6) Jérémie dit : «Allons, mettons du bois dans son pain : effaçons-le de la terre des vivants.» (Jer 11,19) Moïse dit au sujet de son crucifiement : «Vous verrez votre vie suspendue devant vos yeux.» (Dt 68,66) Et David a dit : «Pourquoi les nations se sont-elles troublées ?» (Ps 2,1) Isaïe a dit : «Il sera conduit à la mort comme une brebis.»  (Is 53,7) Esdras dit : «Que Dieu soit béni : en étendant ses bras, il a sauvé Jérusalem.» Et ils ont parlé de sa résurrection. David dit : «Lève-toi, Seigneur, juge la terre, car tu es l'héritier de toutes les nations.» Et encore : «Le Seigneur s'est levé comme d'un sommeil.» Et encore : «Que Dieu se lève et que ses ennemis soient dispersés.» (Ps 67,8) Et de nouveau : «Lève-toi, Seigneur Dieu; que ta main se lève.» (Ps 68,65) Isaïe a dit : «Vous qui demeurez dans l'ombre de la mort, la lumière brillera sur vous.» (Is 9,2) Zacharie : «Par le sang de ton testament, tu as fait sortir des prisonniers du fossé où il n'y a pas d'eau.» (Za 9,11)  Beaucoup ont prophétisé sur lui et tout s'est accompli.
    Vladimir dit alors : «En quel temps cela s'est-il accompli ? Cela est-il déjà arrivé, ou doit-il seulement arriver ?»
    Le philosophe répondit : «Tout cela s'est accompli quand Dieu s'est incarné : car d'abord, comme je l'ai déjà dit, quand les Juifs tuèrent les prophètes et que leurs rois transgressèrent la loi, il les livra à l'esclavage, et ils furent amenés en captivité en Assyrie à cause de leurs péchés; ils y furent esclaves pendant soixante-dix ans. Ensuite ils retournèrent dans leur pays, et il n'y avait pas chez eux de roi; mais ce furent des prêtres qui les gouvernèrent jusqu'au règne de l'étranger Hérode qui les gouverna. Sous son règne, en l'année 5500, Gabriel fut envoyé à Nazareth, à la vierge Marie, de la race de David et lui dit : «Réjouis-toi bienheureuse, le Seigneur est avec toi.» Et à la suite de cette parole, elle conçut dans son sein le Verbe de Dieu, et ayant enfanté un fils, elle l'appela Jésus. Et des Sages vinrent de l'Orient disant : «Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? car nous avons vu son étoile dans l'Orient et nous sommes venus l'adorer.» Quand Hérode eut entendu cela, il eut peur et tout Jérusalem avec lui. Il appela des gens instruits dans la loi et des anciens du peuple, demandant  : «Où le Christ est-il né ?» Ils lui dirent : «A Bethléem, ville de Juda.» Hérode ayant appris cela envoya des messagers disant : «Tuez tous les enfants mâles jusqu'à l'âge de deux ans.» Ils allèrent et tuèrent quatorze mille enfants. Marie eut peur et cacha son enfant. Joseph prit l'enfant; ils s'enfuirent en Égypte et y restèrent jusqu'à la mort d'Hérode. En Égypte, un ange se montra à Joseph disant : «Lève-toi, prends l'enfant et sa mère, et va-t-en dans la terre d'Israël.» Il partit et s'établit à Nazareth. Quand il fut homme et arrivé à l'âge de trente ans, il commença à faire des miracles et à prêcher le royaume du ciel, et il choisit douze hommes qu'il appela ses disciples; et il se mit à faire de grands miracles : à ressusciter les morts, à purifier les lépreux, à rendre les jambes aux boiteux et la vue aux aveugles, et à faire beaucoup d'autres miracles, ainsi que l'avaient prédit les prophètes disant : «II a guéri nos maladies et porté nos douleurs.» (Is 53,4) Et il fut baptisé dans le Jourdain par Jean, montrant aux hommes nouveaux leur régénération. Et quand il fut baptisé, les cieux s'ouvrirent et l'Esprit plana au-dessus d'eux sous la forme d'une colombe, et une voix se fit entendre disant : «Voici mon fils chéri en qui j'ai mis toute ma complaisance.» Il envoya ses disciples prêcher le royaume des cieux, et la contrition des péchés. Voulant accomplir la prophétie, il se mit à prêcher comment le fils de l'homme doit être martyrisé, crucifié et ressusciter le troisième jour. Comme il enseignait dans le temple, les prêtres et les savants, pénétrés d'envie, cherchèrent à le faire périr, et l'ayant saisi le conduisirent au gouverneur Pilate. Pilate ayant reconnu qu'il avait été arrêté quoique innocent, voulut le relâcher; mais ils lui dirent : «Si tu le relâches, tu n'es pas ami de l'empereur.» Pilate alors ordonna qu'on le crucifiât. Ils saisirent Jésus, le conduisirent sur la montagne du crâne (Golgotha) et l'y crucifièrent. La terre s'obscurcit de la sixième heure à la neuvième, et, à la neuvième heure, Jésus rendit l'âme; le voile du temple se déchira; beaucoup de morts ressuscitèrent et il leur ordonna d'aller au Paradis. On détacha Jésus de la croix, on le mit dans le tombeau; on scella le tombeau et on y mit des gardes de peur que ses disciples ne l'enlevassent pendant la nuit. Le troisième jour il ressuscita; après sa résurrection, il se montra à ses disciples leur disant : «Allez chez toutes les nations, enseignez-les, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du saint Esprit.» Il passa avec eux quarante jours, se faisant voir après sa résurrection. Quand les quarante jours furent passés, il leur ordonna d'aller sur le mont des Oliviers et là il se montra à eux, les bénit et leur dit : «Restez dans la ville de Jérusalem jusqu'à ce que je vous aie envoyé la promesse de mon père.» A ces mots il s'éleva vers le ciel. Ils l'adorèrent, retournèrent à Jérusalem et restèrent dans le temple. Quand cinquante jours se furent écoulés, l'Esprit saint descendit sur les apôtres. Après avoir reçu le don de l'Esprit saint, ils se répandirent par toute la terre, enseignant et baptisant avec l'eau.
    Vladimir dit alors au philosophe  : «Pourquoi est-il né d'une femme, a-t-il été crucifié sur le bois et baptisé dans l'eau ?»
    Le philosophe lui répondit : «Parce que au commencement, le genre humain pécha par une femme; car le diable trompa Adam par l'entremise d'Ève; et il perdit le paradis; mais Dieu s'est vengé du démon; et c'est par une femme qu'il a été vaincu pour la première fois, parce qu'Adam a été chassé du paradis par la femme. Dieu s'est donc incarné dans une femme pour faire entrer les croyants dans le paradis. Et il a été crucifié sur le bois, parce que c'est après avoir mangé le fruit du bois que l'homme a perdu le paradis. Dieu a subi la mort sur le bois afin que le démon fût vaincu par le bois, et que les justes fussent sauvés par le bois vivifiant. Il a été régénéré par l'eau, parce que sous Noé, quand les péchés des hommes redoublèrent, Dieu envoya le déluge sur la terre et engloutit le monde sous l'eau. En effet le Seigneur a dit : «Parce que j'ai d'abord châtié avec l'eau les hommes, à cause de leurs péchés, maintenant je purifierai avec l'eau ces péchés, et je les régénérerai avec l'eau.» Ainsi le peuple juif se purifia dans la mer des mauvaises coutumes des Égyptiens, parce que l'eau fut la première chose existante; car il a été dit : «L'Esprit de Dieu planait sur la face des eaux;» or maintenant on est baptisé avec l'eau et avec l'Esprit. La première figure eut lieu par l'eau, comme le démontre l'exemple de Gédéon; quand un ange vint lui ordonner de marcher contre les Madianites, il étendit, pour l'éprouver, une toison sur le sol et dit à Dieu : «S'il y a de la rosée sur toute la terre et que la toison soit sèche, je croirai en lui,» et il en fut ainsi. Or cela signifie que les nations étrangères étaient d'abord à sec et les Juifs humides, et ensuite la rosée vint chez les étrangers, c'est-à-dire le baptême leur fut donné et les Juifs restèrent dans la sécheresse. Et les prophètes ont prédit que la régénération viendrait par l'eau. Les apôtres ont enseigné dans le monde la foi divine, et nous Grecs, nous avons reçu leurs enseignements. Le monde entier croit conformément à leur foi. Or Dieu a fixé un jour dans lequel, venant du ciel, il jugera les vivants et les morts, et rendra à chacun suivant ses actes : aux justes le royaume du ciel, une beauté ineffable, une joie sans fin et la vie éternelle : aux pécheurs, les tourments du feu, un ver qui ne sommeille jamais et des tortures sans fin. Tels sont les tourments qu'éprouveront ceux qui ne croient pas en Jésus Christ notre Seigneur : ceux qui ne sont pas baptisés brûleront dans le feu.»
    En disant ces paroles il montra à Vladimir une toile sur laquelle était peint le jugement dernier; il lui montra à droite les justes allant joyeusement au paradis, à gauche les pécheurs allant aux tourments. Vladimir soupira et dit : «Heureux ceux qui sont à la droite, malheur à ceux qui sont à la gauche !» Le philosophe dit : «Si tu veux être à la droite avec les justes, fais-toi baptiser.» Vladimir, réfléchissant à cela, lui dit : «J'attendrai encore un instant; car je voudrais méditer sur toutes les croyances.» Et Vladimir, après lui avoir fait beaucoup de présents, le congédia avec grand honneur.
 
 
XLI. – Ambassade de Vladimir chez les Bulgares, les Allemands et les Grecs (987).
 
    Année 6495. Vladimir appela ses bojars et le conseil de la ville et dit : «Voici que les Bulgares sont venus à moi en disant  : Reçois notre loi. Ensuite sont venus les Allemands et ils ont fait l'éloge de leur loi. Après eux les Juifs sont venus. Et enfin les Grecs sont venus, blâmant toutes les religions, mais louant la leur, et ils ont longuement parlé de la création du monde, de l'histoire du monde entier, et ils parlent avec esprit; c'est merveille et plaisir de les entendre; et ils disent qu'il y a un autre monde. Ils disent : Celui qui reçoit notre foi, ne mourra jamais pour l'éternité; mais s'il reçoit une autre foi, il brûlera dans l'autre monde au milieu des flammes. Quel est votre avis et que dites-vous de cela ?» Les bojars et le conseil dirent : «Tu sais, prince, que personne ne blâme ce qui est à lui, mais qu'au contraire chacun le loue. Si tu veux t'éclairer avec soin, envoie quelques-uns de tes hommes étudier les différents cultes et voir comment chacun honore Dieu.» Et ce discours plut au prince et à tout le monde; on choisit des hommes sages et éclairés au nombre de dix et on leur dit : «Allez d'abord chez les Bulgares et étudiez leur foi et leur culte.» Ils partirent et virent des actions infâmes et le culte comme ils le font dans leurs mosquées, et ils retournèrent dans leur pays. Vladimir leur dit : «Allez maintenant chez les Allemands, et observez de même, et ensuite vous irez chez les Grecs.» Ils allèrent donc chez les Allemands et, après avoir observé chez eux le service divin, ils allèrent à Constantinople et vinrent trouver l'empereur. L'empereur leur demanda ce qui les amenait; ils lui racontèrent tout ce qui s'était passé. L'empereur apprenant cela fut joyeux et il leur fit beaucoup d'honneur ce jour-là. Le lendemain il envoya un message au patriarche disant : «Il est venu des Russes pour étudier notre foi; prépare l'église et ton clergé, revêts ton costume pontifical afin qu'ils voient la gloire de notre Dieu.» Alors le patriarche appela son clergé; on célébra les solennités suivant l'usage, on brûla de l'encens, et on chanta des choeurs. Et l'empereur alla avec les Russes à l'église, et on les fit placer dans un endroit spacieux; puis on leur montra les beautés de l'église, les chants et le service de l'archiérée, le ministère des diacres, en leur expliquant l'office divin (947).
    Pleins d'étonnement ils admirèrent et louèrent ce service. Et les empereurs Basile et Constantin les appelèrent et leur dirent : «Allez dans votre pays,» et ils les congédièrent avec de grands présents et avec honneur. Quand ils revinrent dans leur pays, le prince appela les bojars et les anciens. «Voici que les hommes envoyés par nous sont revenus : écoutons ce qu'ils ont appris.» Et il leur dit : «Dites devant nous où vous avez été et ce que vous avez vu.» Ils dirent : «Nous avons été d'abord chez les Bulgares et nous avons observé comment ils adorent dans leurs temples; ils se tiennent debout sans ceinture; ils s'inclinent, s'assoient, regardent çà et là comme des possédés, et il n'y a pas de joie parmi eux, mais une tristesse et une puanteur affreuses. Leur religion n'est pas bonne. Et nous sommes allés chez les Allemands, et nous les avons vus célébrer leur service dans l'église et nous n'avons rien vu de beau. Et nous sommes allés en Grèce et on nous a conduits là ou ils adorent leur Dieu, et nous ne savions plus si nous étions dans le ciel ou sur la terre; car il n'y a pas de tel spectacle sur la terre, ni de telle beauté. Nous ne sommes pas capables de le raconter; mais nous savons seulement que c'est là que Dieu habite au milieu des hommes; et leur office est plus merveilleux que dans les autres pays. Nous n'oublierons jamais sa beauté; car tout homme, lorsqu'il a goûté quelque chose de doux, ne peut ensuite supporter l'amertume. Aussi nous ne pouvons plus vivre ici.» Les bojars répliquèrent : «Si la religion grecque était mauvaise, ta grand-mère Olga, qui était la plus sage de tous les hommes, ne l'aurait point reçue.» Vladimir répondit : «Où donc recevrons-nous le baptême ?» ils répondirent : «Où il te plaira. »
 
XLII. – Siège de Khérson. – Mariage de Vladimir. – Exposé de la fol chrétienne (988).
 
    Année 6496. Quand une année se fut écoulée, Vladimir marcha avec son armée contre Khérson, ville grecque; et les Khersonésiens s'enfermèrent dans la ville. Et Vladimir s'établit de l'autre côté de la ville, dans la baie, à une portée de trait de la ville. Et les habitants combattirent énergiquement contre lui. Vladimir bloqua la ville et le peuple était épuisé, et Vladimir dit aux habitants : «Si vous ne vous rendez pas, je resterai ici trois ans s'il le faut.» Ils ne l'écoutèrent pas. Vladimir alors rangea son armée en bataille et ordonna de faire une chaussée vers la ville. Tandis qu'ils la faisaient les Khersonésiens, ayant miné les murs de la ville, enlevèrent les terres amoncelées, les apportèrent à la ville et les entassèrent au milieu de la ville; mais les soldats continuèrent leurs travaux et Vladimir persista. Or, un homme de Cherson, du nom d'Anastase, lança une flèche sur laquelle il avait écrit  : «Il y a derrière toi des sources à l'Orient dont l'eau arrive par des tuyaux; creuse là et tu intercepteras l'eau.» Vladimir apprenant cela regarda le ciel et dit : «Si cela s'accomplit je me ferai baptiser.» Et il ordonna aussitôt de creuser au-dessus des tuyaux et il coupa l'eau; et le peuple épuisé par la soif se rendit. Vladimir entra dans la ville avec sa droujina. Et Vladimir envoya des messagers aux empereurs Basile et Constantin, disant : «Voici que j'ai conquis votre célèbre ville; j'ai appris que vous avez une soeur vierge; si vous ne me la donnez pas, je traiterai votre capitale, comme j'ai traité cette ville.» Les empereurs s'affligèrent de ce message et lui envoyèrent cette réponse : «Il n'est pas convenable que les chrétiens se marient avec les païens. Si tu te fais baptiser, tu obtiendras ce que tu demandes et, en outre, le royaume du ciel, et tu auras la même foi que nous; mais si tu ne veux pas te faire baptiser, nous ne pouvons te donner notre soeur.» Ayant entendu cela, Vladimir dit aux députés des empereurs : «Dites aux empereurs que je me ferai baptiser; on m'a déjà enseigné votre religion, et j'aime vos croyances et vos rites tels que me les ont exposés des hommes envoyés par vous.» Les empereurs, ayant entendu cela, se réjouirent, décidèrent leur soeur, nommée Anne, à ce mariage et envoyèrent des  messagers à Vladimir, disant : «Fais-toi baptiser et nous t'enverrons notre soeur.» Vladimir dit : «Que l'on vienne avec votre soeur me baptiser.» Les empereurs, ayant entendu cela, envoyèrent leur soeur avec quelques prêtres et quelques dignitaires. Elle ne voulait point partir : «Je vais aller, disait-elle, comme en esclavage chez les païens : mieux vaudrait mourir ici.» Ses frères lui dirent : «C'est par toi que Dieu amènera la nation russe à la pénitence et sauvera l'empire grec d'une guerre cruelle; tu vois combien la Russie a déjà fait de mal aux Grecs, et elle en fera encore maintenant si tu ne pars pas;» et ils la décidèrent avec peine. Elle monta donc sur un vaisseau, embrassa ses parents en pleurant, et s'en alla par la mer. Quand elle arriva à Cherson, les Chersonésiens sortirent pour la saluer, l'amenèrent dans la ville et l'établirent dans le palais. Or, par la permission de Dieu, Vladimir à ce moment eut les yeux malades, et, privé de la vue, il était dans une grande inquiétude et ne savait que faire. Et la princesse envoya lui dire : «Si tu veux guérir de ce mal, fais-toi baptiser le plus tôt possible; sinon, tu ne guériras point.» Vladimir entendant cela dit : «Si ceci s'accomplit, en vérité le Dieu des chrétiens sera un grand Dieu;» et il se fit baptiser. L'évêque de Cherson, après avoir annoncé la nouvelle au peuple, le baptisa, avec les prêtres de la princesse, et dès qu'il mit la main sur lui, il vit aussitôt. Vladimir, se voyant si subitement guéri, loua Dieu, disant : «C'est maintenant seulement que je connais le vrai Dieu.» Quand donc sa droujina eut vu cela, beaucoup se firent baptiser. Il fut baptisé dans l'église de Saint-Basile, et cette église se trouve à Cherson, au milieu de la ville, à l'endroit où les Chersonésiens tiennent leur marché. Le palais de Vladimir existe encore aujourd'hui près de l'église, et le palais de la princesse est derrière l'autel. Après le baptême, Vladimir épousa la princesse. Des gens mal informés disent qu'il fut baptisé à Kiev, d'autres à Vasiliev, d'autres encore ailleurs. Quand donc Vladimir eut été baptisé à Cherson, les prêtres lui exposèrent la foi chrétienne parlant ainsi : «Ne te laisse pas entraîner par les hérétiques, mais crois ainsi disant : Je crois en un seul Dieu, le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre, etc... et ensuite : Je crois en un seul Dieu, le Père, qui n'est pas né, en un Fils unique qui est né, en un saint Esprit qui procède : trois personnes complètes, pensantes, distinctes par le nombre et la personnalité, non par la divinité; car elle se sépare sans se diviser, et elle s'associe sans se confondre. Dieu le Père non engendré est toujours, dans sa paternité sans commencement, principe et cause de toute chose, …, parce qu'il n'est pas engendré, que le Fils et l'Esprit; car de lui est né le Fils avant tous les siècles; l'Esprit saint procède sans temps et sans corps. Il est tout ensemble Père, Fils et Esprit. Le Fils qui est une personne pareille au Père, sans commencement, ne se distingue du Père et de l'Esprit que parce qu'il a été engendré. L'Esprit est très saint : par son essence il ressemble au Père et au Fils, et il existe toujours. Le Père a la paternité, le Fils a la filialité, l'Esprit la procession : car ni le Père ne passe dans le Fils ou dans l'Esprit; ni le Fils dans le Père ou l'Esprit; ni l'Esprit dans le Père ou le Fils; leurs propriétés sont incommutables. Il n'y a pas trois divinités; il n'y a qu'un Dieu; car la divinité est une en trois personnes. Le Fils est sorti, par la volonté du Père et de l'Esprit, pour le salut de la créature, du sein du Père sans pourtant le quitter, pour descendre, comme une semence divine, sur la chaste couche d'une vierge; il a reçu ensuite un corps animé de vie, doué de parole et de raison, et il est devenu le Dieu incarné; il est né merveilleusement sans que la virginité de sa mère en souffrit. Il n'a subi ni trouble, ni altération, ni transformation; mais il est resté ce qu'il était. Il est devenu ce qu'il n'était pas; il a pris la forme d'un esclave réellement et non en apparence, semblable à nous en tout, hormis par le péché : car c'est par sa volonté qu'il est né, par sa volonté qu'il a désiré, par sa volonté qu'il a eu soif, par sa volonté qu'il a souffert, qu'il a eu peur, par sa volonté qu'il est mort réellement et non en apparence. Toutes ses souffrances ont été réelles et l'humanité ne peut même les soupçonner. Il s'est laissé crucifier; il a souffert la mort quoique innocent; il est ressuscité dans son corps, il est monté aux cieux sans que ce corps se corrompit; il s'est assis à la droite du Père, et il viendra de nouveau avec gloire juger les vivants et les morts. Comme il est monté avec son corps, il viendra de même avec son corps. En outre, reconnais un seul baptême par l'eau et par l'esprit; approche-toi du très saint sacrement; crois dans le vrai corps et le vrai sang; reçois les traditions de l'Église, et honore les vénérables icônes; honore le vénérable bois de la croix, toutes les croix ainsi que les saintes reliques et les vases sacrés. Crois aussi dans les sept conciles dont le premier a eu lieu à Nicée, composé de trois cent dix-huit pères qui ont maudit Arius et proclamé la foi pure et sans tache. Le second a eu lieu à Constantinople; il était composé de cent cinquante pères qui ont maudit Macédonius qui niait la divinité du saint Esprit, et ont proclamé l'unité de la Trinité. Le troisième a eu lieu à Éphèse; il était composé de deux cents pères : ils ont anathématisé Nestorius et proclamé la sainteté de l’Enfantrice de Dieu. Le quatrième concile a eu lieu à Chalcédoine; il était composé de six cent trente Pères; il ont maudit Eutychès et Dioscore, et ont proclamé vrai Dieu et vrai homme notre Seigneur Jésus Christ. Le cinquième concile a eu lieu à Constantinople; il était composé de cent soixante-cinq pères; ils ont anathématisé les écrits d’Origène et Évagre. Le sixième concile a eu lieu à Constantinople; il était composé de cent soixante-dix pères; ils ont anathématisé Sergius et Cyr. Le septième concile a eu lieu à Nicée; trois cent cinquante pères ont maudit ceux qui n'honorent pas les icônes. Ne reçois pas l'enseignement des Latins; leur science est vicieuse, car ils entrent à l'église sans s'agenouiller devant les images; ils restent debout, s'inclinent, après s'être inclinés, tracent une croix sur la terre, la baisent et, après s'être levés, se tiennent debout dessus; ils baisent donc la croix en s'inclinant, ensuite ils la foulent aux pieds. Or les apôtres n'ont pas donné cette tradition, mais d'après leur tradition on doit baiser la croix qui est debout, et l'on doit aussi baiser les images; car Luc, l'évangéliste, en peignit le premier et les envoya à Rome, et, comme nous l'apprend Basile, l'image rappelle à la forme originale. En outre ils appellent la terre leur mère : or, si la terre est leur mère, le ciel est leur père; car au commencement Dieu créa le ciel et la terre. Pourquoi dit-on : «Notre père, qui es aux cieux ?» Si donc dans leur idée la terre est une mère, pourquoi cracher sur votre mère ? Vous l'embrassez donc d'abord, puis vous la souillez ensuite. Auparavant les Romains ne faisaient pas cela; mais ils prenaient part à tous les conciles où l'on se réunissait de Rome et de tous les diocèses. Ainsi au premier concile contre Arius à Nicée, Sylvestre envoya de Rome des évêques et des prêtres; Athanase en envoya d'Alexandrie; Métrophane en envoya de Constantinople : c'est ainsi qu'ils purifièrent la foi. Au second concile, Damase vint de Rome, Timothée d'Alexandrie, Mélèce d'Antioche, Cyrille de Jérusalem et [de Constantinople] Grégoire le Théologien. Au troisième concile vinrent Célestin de Rome, Cyrille d'Alexandrie, Juvénal de Jérusalem; au quatrième, Léonce de Rome, Anatole de Constantinople, Juvénal de Jérusalem ; au cinquième, Vigile de Rome, Eutychius de Constantinople, Apollinaire d'Alexandrie, Domnus d'Antioche. Au sixième concile vinrent Agathon de Rome, Georges de Constantinople, Théophane d'Antioche, Pierre le moine d'Alexandrie; au septième concile, Adrien de Rome, Tarasius de Constantinople, Politien d'Alexandrie, Théodoret d'Antioche, Elias de Jérusalem. Tous ces prélats se réunissant avec leurs évêques ont redressé la foi. Après le septième concile Pierre le Bègue vint à Rome avec d'autres, s'empara du siège de Rome et corrompit la foi. Il se détacha des sièges de Jérusalem, d'Alexandrie, de Constantinople et d'Antioche. Ils troublèrent toute l'Italie, répandant diverses doctrines. Ils ne professent pas une seule confession de foi, mais plusieurs; car parmi les prêtres les uns servent n'ayant qu'une femme, les autres en ayant sept : ils se séparent les uns des autres en beaucoup de points. Défie-toi de leur doctrine. Ils absolvent des péchés pour de l'argent et il n'y a rien de pire que cela. Dieu te préserve de ces choses là !» (988).
 
XLIII. – Les idoles sont détruites. – Baptême du peuple russe (988).
 
    Ensuite Vladimir, avec l'impératrice, Anastase et les prêtres de Cherson prit les reliques de saint Clément et de Théba, son disciple, ainsi que les vases sacrés et les images du culte. Il bâtit à Cherson l'église de Saint-Jean-Baptiste sur une éminence qu'on avait élevée au milieu de la ville avec la terre de sa chaussée, et cette église dure encore aujourd'hui. Il prit aussi deux statues de cuivre et quatre chevaux de cuivre qui maintenant encore sont devant la sainte Mère de Dieu;les ignorants les croient en marbre. Comme présent nuptial pour la princesse, il rendit Cherson aux Grecs et revint lui-même à Kiev. Quand il arriva il ordonna de renverser les idoles. Il fit brûler les unes et jeter les autres au feu. Il ordonna d'attacher Péroun à la queue d'un cheval et de le traîner du haut en bas au-dessous de Borytchev jusqu'au ruisseau; et il enjoignit à douze hommes de le battre avec des bâtons, non pas qu'il estimât que le bois eût quelque sentiment; mais pour faire affront au démon qui, sous cette forme, avait trompé les hommes, et pour le punir de ses tromperies. «Tu es grand, Seigneur, et tes actions sont merveilleuses.» (Ps 144) Hier il était honoré par les hommes, aujourd'hui le voici insulté. Tandis qu'on le traînait le long du ruisseau jusqu'au Dniepr, les païens pleuraient sur lui; car ils n'avaient pas encore reçu le saint baptême. Or, après l'avoir tramé, ils le jetèrent dans le Dniepr. Vladimir disait à ses serviteurs : «S'il s'arrêtait quelque part, repoussez-le du rivage jusqu'à ce qu'il ait passé les cataractes, alors vous le laisserez.» Le vent le jeta sur une grève qui depuis a été appelée la grève de Péroun, nom qu'elle porte encore aujourd'hui. Ensuite Vladimir fit répandre l'annonce suivante par toute la ville : «Quiconque demain, riche ou pauvre, misérable ou artisan, ne viendra pas au fleuve pour se faire baptiser tombera en disgrâce auprès de moi.» Entendant ces paroles le peuple vint avec joie, se réjouissant et disant : «Si cette religion n'était pas bonne, le prince et les boïars ne l'auraient pas reçue.» Le lendemain Vladimir vint avec les prêtres de la princesse et ceux de Cherson sur le bord du Dniepr, et un peuple innombrable se rassembla, et entra dans l'eau : les uns en avaient jusqu'au cou, les autres jusqu'à la poitrine; les plus jeunes étaient sur le rivage, les hommes tenaient leurs enfants, les adultes étaient tout à fait dans l'eau, et les prêtres debout disaient les prières. Et c'était une joie dans le ciel et sur la terre de voir tant d'âmes sauvées. Or le démon gémissant disait : «Malheur à moi, me voilà chassé d'ici; je pensais établir ma résidence ici parce que les apôtres n'y ont point enseigné, et que ce peuple ne savait rien de Dieu; je jouissais du culte qu'on m'offrait; et me voilà vaincu par des ignorants, non par les apôtres ou par les martyrs; je ne régnerai plus dans ce pays.» Quand le peuple fut baptisé, ils retournèrent chacun à leur maison. Vladimir se réjouit de ce qu'il avait connu Dieu, lui et son peuple, leva les yeux au ciel et dit : «Dieu, créateur du ciel et de la terre, regarde ce peuple nouveau, et donne-lui de te reconnaître comme le vrai Dieu, ainsi qu'ont fait les pays chrétiens. Fortifie en lui la vraie foi, rends-la inébranlable; sois-moi en aide contre l'ennemi : puissé-je, confiant en toi et en ton royaume, triompher de sa malice.» Il dit cela et ordonna de bâtir des églises et de les établir aux endroits mêmes où se trouvaient les idoles. Il bâtit l'église de Saint-Basile sur l'éminence où se trouvait l'idole de Péroun et d'autres, et où le prince et le peuple leur faisaient des sacrifices. Il ordonna d'établir dans les villes des églises et des prêtres, et d'inviter tout le peuple à se faire baptiser dans toutes les villes et dans tous les villages; puis il envoya chercher les enfants des familles les plus élevées, et les fit instruire dans les livres. Les mères de ces enfants pleurèrent sur eux, car elles n'étaient pas encore affermies dans la foi ; aussi pleurèrent-elles sur eux comme sur des morts. Or par cet enseignement s'accomplit en Russie la prophétie qui dit : «En ce temps les sourds entendront la voix des Écritures et la langue des bègues se déliera.» (Is 19,18) Car ce peuple d'abord ne connaissait pas les paroles de l'Esprit saint; aussi Dieu dans sa puissance et dans sa grâce en eut pitié, comme a dit le prophète : «J'aurai pitié de qui je voudrai.» Or il a eu pitié de nous en nous donnant le baptême de la régénération et de la rénovation spirituelle par sa miséricorde divine et non par nos mérites. Béni soit le Seigneur Jésus Christ qui aime les peuples nouveaux et les éclaire par le saint baptême. Aussi nous tombons devant lui, disant : «Seigneur Jésus Christ, que te donnerons-nous pour tous les biens que nous pécheurs avons revus de toi ? Nous ne sommes pas en état de répondre dignement à tes bienfaits : car tu es grand et tes actes sont admirables; tes grandeurs n'ont pas de fin; tes oeuvres te loueront de génération en génération.» (Ps 34,3-4) Je dis donc avec David : «Venez, réjouissons-nous dans le Seigneur, crions vers le Seigneur notre Sauveur; marchons devant lui en chantant, en confessant combien il est grand, combien son amour est éternel, comment il nous a sauvés de nos ennemis, c'est-à-dire des vaines idoles.» (Ps 92) Et nous dirons encore avec David : «Chantez au Seigneur un chant nouveau, chantez-le, vous toutes les nations, chantez le Seigneur, bénissez son nom : prêchez de jour en jour le salut qui vient de lui; proclamez sa gloire parmi les nations, ses miracles parmi tous les peuples; comme le Seigneur est grand et glorieux et comme sa grandeur n'a pas de fin.» (Ps 5,1-4)
    Quelle grande joie ! Ce n'est pas seulement une âme, ni deux qui ont été sauvées, car le Seigneur a dit : «Quelle joie il y a dans le ciel lorsqu'un seul pécheur se repent !» (Mt 15,10) Non, ce n'est pas un ni deux, mais une multitude innombrable qui est revenue au Seigneur, éclairée par le saint baptême. Comme dit le prophète : «Je verserai sur vous l'eau pure, et vous vous purifierez de vos idoles et de vos péchés.» (Ez 36,25) Un autre prophète a dit : «Qui, comme Dieu, pardonne les péchés et remet les fautes ? car il se plaît dans la miséricorde et tourne ses regards sur nous; il a pitié de nous, il engloutit nos fautes dans l'abîme.» (Mi 7,18-19) Saint Paul a dit : «Frères, nous tous qui sommes baptisés dans le Christ, nous sommes baptisés et ensevelis dans sa mort par le baptême, afin que, comme le Christ est ressuscité d'entre les morts dans la gloire de son père, nous puissions entrer dans la rénovation de la vie.» (Rom 6,3) Et plus loin : «Les choses anciennes sont passées et les nouvelles se sont élevées : maintenant notre salut s'est approché : la nuit est passée, et le jour s'est approché.» (Rom 13,12) Grâce à la foi de notre prince Vladimir, nous avons gagné la grâce dont nous sommes fiers et par laquelle nous vivons; maintenant délivrés du péché et devenus serviteurs du Seigneur, vous avez recueilli pour fruit la sainteté. Nous sommes donc obligés de servir le Seigneur, nous réjouissant en lui; car David a dit : «Servez le Seigneur avec crainte et réjouissez-vous avec tremblement.» (Ps 2,11) Nous élevons donc notre voix vers le Seigneur notre Dieu, disant : «Béni soit le Seigneur qui ne nous donne pas en proie à leurs dents. Le filet a été rompu et nous avons échappé aux ruses du diable; et sa gloire a péri bruyamment, et le Seigneur dure loué par les fils de la Russie qui célèbrent la Trinité, et les démons sont maudits par les hommes fidèles et les femmes pieuses qui ont reçu le baptême et la pénitence pour la rémission des péchés, par le nouveau peuple chrétien élu de Dieu.»
    Vladimir fut éclairé, lui et ses fils et son peuple; car il avait douze fils : Vycheslav, Iziaslav, Iaroslav, Sviatopolk, Vsevolod, Sviatoslav, Mstislav, Boris, Gleb, Stanislav, Pozvizd, Soudisav. Il établit Vycheslav à Novogorod, Iziaslav à Polotsk, Sviatopolk à Tourov, Iaroslav à Rostov. Quand l'aîné Vycheslav mourut à Novogorod, il établit Iaroslav à Novogorod, Boris à Rostov, Gleb à Mourom, Sviatoslav chez les Drevlianes, Vsevolod à Vladimir, Mstislav à Tmoutorakan, et Vladimir dit : «Il n'est pas bien qu'il y ait si peu de villes autour de Kiev;» et il établit des villes fortifiées sur la Desna et sur l'Oster, sur le Troubèje et la Soula, sur la Stougna, et il se mit à rassembler des hommes vaillants parmi les Slaves, les Krivitches, les Tchoudes, les Viatitches, et il en peupla ces villes. Car il avait la guerre avec les Petchénègues, et il combattit avec eux, et il les vainquit.
 
XLIV. – Expédition de Vladimir contre les Pechénègnes. – Fondation de Bielgorod (991).
 
    Années 6497-6498-6499. Ensuite Vladimir vécut dans la religion chrétienne. Il conçut le projet de bâtir une église de pierre à la très sainte Vierge; il envoya chercher des architectes en Grèce et se mit à la bâtir. Quand l'église fut achevée, il l'orna de tableaux, et confia cette église à Anastase de Cherson et désigna des prêtres de Cherson pour y célébrer les offices : il donna tout ce qu'il avait recueilli Cherson, des images, des vases d'église, des croix (989-99).
    Année 6500. Vladimir fonda la ville de Bielgorod et la peupla avec des habitants des autres villes et y amena un grand nombre de peuple, car il aimait cette ville (991).
 
XLV. – Guerre avec les Petchénègues. – Duel d'un Russe et d'un géant petchénègue. – Fondations pieuses et libéralité de Vladimir (991-96).
 
    Année 6501. Vladimir marcha contre les Croates; et quand il revint de la guerre contre les Croates, voilà que les Petchénègues arrivèrent de l'autre côté de la Soula. Vladimir marcha contre eux et les rencontra sur la Troubèje, près du gué où est aujourd'hui Péréïaslav. Vladimir était d'un côté et les Petchénègues de l'autre, et aucune des deux armées n'osait franchir la rivière, et le prince des Petchénègues vint jusque sur la rive, appela Vladimir et lui dit : «Envoie un de tes hommes, j'enverrai un des miens : ils lutteront ensemble; si c'est le tien qui est vainqueur je ne te ferai pas la guerre pendant trois ans; si le mien est vainqueur, alors nous ferons la guerre pendant trois ans.» Et ils retournèrent chacun de leur côté. Vladimir revint au camp et envoya des hérauts disant : «N'y a-t-il pas ici un homme qui veuille se battre avec les Petchénègues ?» Et on n'en trouva nulle part. Le lendemain les Petchénègues vinrent et amenèrent leur homme, et aucun des nôtres ne se présentait. Vladimir commença à s'affliger et envoya par toute l'armée. Et un vieillard vint auprès du prince et lui dit : «Prince, j'ai mon fils cadet à la maison; je suis venu ici avec les quatre autres, et lui est resté; depuis son enfance personne ne l'a jamais vaincu. Un jour je le réprimandais tandis qu'il tannait un morceau de cuir, il s'emporta contre moi et avec ses mains déchira le cuir en lambeaux.» Le prince entendant cela se réjouit et envoya aussitôt chercher le jeune homme. On l'amena au prince et le prince lui dit tout. Il répondit : «Prince, je ne sais si je peux me mesurer avec lui; qu'on m'essaye; n’y a-t-il pas ici un taureau grand et fort ?» On trouva un taureau grand et fort, et il ordonna qu'on l'irritât; on mit sur ce taureau des fers rouges, on le lâcha, l'animal passa à côté du jeune homme qui lui saisit le flanc et en arracha la peau et la chair autant que sa main en pouvait contenir. Et Vladimir lui dit  : «Tu peux combattre avec ce Petchénègue.» Le lendemain les Petchénègues vinrent et se mirent à crier : «N'avez-vous point d'homme ? Voici le nôtre.» Vladimir ordonna aux soldats de s'armer pour la nuit, et les deux hommes avancèrent pour lutter. Les Petchénègues avaient envoyé le leur qui était extraordinairement fort et terrible. L'homme de Vladimir marcha à sa rencontre, et le Petchénègue à son aspect se mit à rire; car il était d'une taille moyenne. On mesura un espace entre les deux armées; ils en vinrent aux mains et s'enlacèrent; le Russe serra le Petchénègue dans ses bras au point de l'étouffer et le jeta contre terre. Les Russes se mirent à crier et les Petchénègues s'enfuirent. Les Russes se mirent à les poursuivre en les massacrant et les chassèrent. Vladimir se réjouit, bâtit une ville sur le gué et l'appela Péréïaslav parce que ce jeune homme y avait acquis de la gloire (pereïa-slavu). Vladimir fit de lui et de son père deux grands dignitaires. Vladimir retourna à Kiev victorieux et avec une grande gloire (993).
    Années 6502, 6503, 6504. Vladimir voyant l'église achevée y alla et pria Dieu disant : «Seigneur Dieu, regarde du haut du ciel, contemple-nous et viens visiter ta vigne, et termine ce qu'a commencé ta main droite; que ces peuples dont tu as éclairé le cour te reconnaissent comme le Dieu juste, regarde ton église que j'ai bâtie, moi ton esclave indigne, sous l'invocation de la Vierge qui t'a enfanté. Si quelqu'un prie dans cette église, écoute sa prière, et remets tous ses péchés par l'intercession de ta sainte mère.» Et après avoir prié, il parla ainsi : «Je donne à cette église de la sainte mère de Dieu la dixième partie de mon bien et de mes villes.» Puis il écrivit une malédiction et la déposa dans l'église disant : Si quelqu'un viole ce serment, qu'il soit maudit.» Et il donna cette dîme à Anastase de Cherson, et il offrit ce jour-là une grande fête à ses bojars et aux anciens de la ville et fit beaucoup d'aumônes aux pauvres.
    Ensuite les Petchénègues vinrent vers Vasiliev et Vladimir sortit contre eux avec une petite troupe, et quand ils se rencontrèrent ne pouvant leur tenir tête il s'enfuit, se cacha sous un pont et eut peine à se dérober aux ennemis. Alors Vladimir fit voeu d'établir à Vasiliev l'église de la Transfiguration du Seigneur; car c'était le jour de la Transfiguration du Seigneur qu'eut lieu cette rencontre. Vladimir ayant ainsi échappé bâtit une église et célébra une grande fête : il fit brasser trois cents mesures d'hydromel, appela les bojars, les posadniks et les anciens de toutes les villes, une grande multitude de peuple et distribua aux pauvres trois cents grivènes. La fête dura huit jours et il revint à Kiev le jour de la Dormition de la sainte mère de Dieu, et là il célébra une nouvelle fête ayant convoqué un peuple innombrable. Voyant que son peuple était chrétien, il se réjouit dans son corps et dans son âme et célébra ces fêtes chaque année. Or il aimait les paroles de l'Écriture : un jour il entendit lire dans l'évangile : «Bienheureux les miséricordieux; car ils trouveront miséricorde,» et ailleurs : «Vendez vos biens et donnez-les aux pauvres,» et encore : «Ne gardez pas de trésors sous la terre où la pourriture les détruit et où les voleurs tes enlèvent; mais recueillez des trésors dans le ciel où ni la rouille ne les corrompt, ni les voleurs ne les enlèvent;» et David qui dit : «Heureux l'homme qui aime et qui donne.» (Ps 40,2) Il entendit aussi Salomon qui dit : «Celui qui donne aux pauvres prête à Dieu.» (Pro 19,17) Ayant entendu cela, il ordonna à tous les pauvres et à tous les misérables de venir au palais du prince et de prendre tout ce dont ils auraient besoin : à boire, à manger et des peaux de martre du trésor du prince. Il donna encore l'ordre suivant, disant : «Les faibles et les souffrants ne peuvent venir jusqu'à mon palais.» Il donna donc l'ordre d'amener des voitures et d'y mettre du pain, de la viande, du poisson, des fruits divers, de l'hydromel dans des tonneaux, du kvas dans d'autres et voulut qu'on le promenât par la ville en s'informant où il y avait des malades ou des pauvres incapables de marcher; on donna à ces malheureux tout ce dont ils avaient besoin. En outre, toutes les semaines voici ce qu'il faisait à ses gens : chaque jour il leur offrait dans la grande salle du palais un festin où venaient les boïars, les officiers de la cour, les centurions, les décurions et les hommes les plus distingués, soit sous les yeux du prince, soit en son absence; à ce festin il y avait beaucoup de viande de bétail et de gibier; il y avait de tout en abondance. Or, un jour qu'ils avaient largement bu, ils se mirent à murmurer contre le prince en disant : «On nous traite mal, nous mangeons avec des cuillers de bois et non d'argent.» Vladimir ayant appris ces paroles ordonna de fondre pour sa droujina des cuillers d'argent, disant : «Avec de l'or et de l'argent je ne trouverai pas une droujina et avec ma droujina je trouverai de l'or et de l'argent : car mon aïeul et mon père ont gagné de l'or et de l'argent avec leur droujina.» Car Vladimir aimait sa droujina; il délibérait avec elle sur l'administration du pays, sur les guerres à entreprendre, sur les institutions du pays. Et il vécut en paix avec les souverains voisins, avec Boleslav le Lekh, avec Étienne de Hongrie, avec Oldrich de Bohème; et il y avait entre eux paix et amitié. Vladimir vivait dans la crainte de Dieu : cependant le nombre des brigands augmentait et les évêques dirent à Vladimir : «Le nombre des brigands augmente, pourquoi ne les punis-tu pas ?» Il leur dit : «J'ai peur de pécher.» Ils lui répliquèrent : «Tu es établi par Dieu pour punir les méchants et favoriser les bons; il faut punir les brigands, mais après les avoir convaincus de leur crime.» Vladimir supprima la vira (wehrgeld) et se mit à punir les brigands. Et les évêques et les anciens dirent : «Nos guerres sont nombreuses; s'il y a une vira qu'elle serve pour acheter des armes et des chevaux.» Vladimir dit : «Qu'il soit ainsi.» Et il vécut suivant les prescriptions de son père et de son aïeul (994-96).