NUMÉRO 117

mars

2008

Bulletin des vrais

chrétiens orthodoxes

sous la juridiction de

S. B. Mgr. Nicolas

archevêque d'Athènes

et primat de toute la Grèce

Hiéromoine Cassien
Foyer orthodoxe
F 66500 Clara
Tel : 00 30 6949577884
cassien@orthodoxievco.fr

 SOMMAIRE

NOUVELLES

LA VIE ET LA LUMIéRE

ĒQUELQU'UN M'A TOUCHƒČ

LA CHRETIENTE ORTHODOXE DANS LES PAYS GERMANIQUES

SAINT CYPRIEN DE CARTHAGE

QUAND POUTINE VOYAGE EN AVION ...

LETTRE OUVERTE...

 

NOUVELLES

Le bulletin 117 sort dŽjˆ sur le Web mais ne sera imprimŽ que lors de mon retour en France. D'ailleurs, le contenu de ces deux formes du bulletin n'est pas toujours identique, pour des raisons diverses.
Ici, en Grce, rien de nouveau. Je sers dans les paroisses et le reste du temps je suis aux bureaux du Synode. S'il me reste du temps, je peins des ic™nes.
En Afrique tout va bien aussi. J'envisage d'y retourner en ŽtŽ, accompagnŽ d'un Žvque afin de sacrer un prtre au Cameroun et de recevoir le pre Jean, avec ses fidles, au Congo. Le pre Cyrille, gravement malade du diabte, vient de nous quitter pour une vie meilleure. Que le Seigneur lui accorde le repos Žternel !

Il ne me reste qu'ˆ vous souhaiter une bonne continuation du Carme afin pouvoir cŽlŽbrer dans la joie la RŽsurrection de notre Seigneur Dieu.

en Christ,

hiŽromoine Cassien

cruche

LA VIE ET LA LUMIéRE

Le quatorzime dimanche de Luc flamme

Au Nom du Pre et du Fils et du saint Esprit.
Notre Sauveur est venu pour que nous ayons la Vie et la Lumire. La Lumire dans laquelle demeure notre Sauveur, Lui qui est un de la sainte TrinitŽ, cette Lumire dans laquelle demeure Žternellement la sainte TrinitŽ, c'est la Lumire qu'Il est venu donner ˆ nous tous. Il nous avait donnŽ dŽjˆ, par les orbes du soleil et de la lune, la lumire de ce monde. Il nous avait donnŽ la lumire matŽrielle au dŽbut mme de la crŽation. L'ActivitŽ de notre Seigneur Dieu apporta la lumire ˆ un monde obscur et l'ordre ˆ un monde chaotique. C'est ainsi que tout ce qui se rapporte ˆ notre Sauveur est associŽ ˆ la Lumire et ˆ l'Illumination.
Comment Žtait le monde avant l'Avnement de JŽsus ? La Lumire de la sainte TrinitŽ n'Žclairait le monde que faiblement, trs faiblement, obscurŽment. Mais en gŽnŽral, l'espoir du salut, l'espoir d'Žchapper ˆ la tyrannie de la mort et de la corruption, l'espoir d'Žchapper ˆ la corvŽe et ˆ la futilitŽ de la vie, c'Žtait ce qui caractŽrisait la vie de l'humanitŽ avant l'avnement de JŽsus.
Les prophtes et les justes de l'Ancien Testament faisaient conna”tre au peuple, le mieux qu'ils pouvaient et autant que cela leur Žtait permis, la Lumire de la sainte TrinitŽ. Ils essayaient de garder le peuple dans l'attente et l'espoir de l'Avnement du Messie, et mme dans les parties du monde qui n'Žtaient pas touchŽes par les saints prophtes, il y avait quelque communication de cette espŽrance aux sages et aux philosophes de ces temps.
Mais ˆ quelle fin ? La fin pour tous, mme les plus justes, mme notre pre Abraham, mme tous ceux de l'Ancien Testament, mme l'‰me de ce PrŽcurseur de la Lumire, saint Jean Baptiste, quand ils mouraient, leur ‰me Žtait emportŽe dans ces, lieux tŽnŽbreux dÕombre des enfers, ˆ attendre l'Avnement du Messie.
Les tŽnbres, l'injustice, la comprŽhension imparfaite de la Loi de Dieu, la comprŽhension imparfaite de sa VolontŽ pour nous Š toutes ces choses Žtaient dispersŽes quand notre Sauveur vint dans le monde. La gloire de l'Incarnation et de la NativitŽ du Dieu-Homme a dispersŽ toutes ces tŽnbres, car il ne peut pas y avoir de tŽnbres lˆ o est JŽsus; il ne peut y avoir rien de ces ombres, rien de cette obscuritŽ. Rien de cela ne peut exister lˆ o est JŽsus. O qu'Il aille, ses Paroles, sa PrŽsence mme ont diffusŽ la Lumire, l'Illumination, la ComprŽhension sur tous ceux qui avaient des yeux pour voir, dont les yeux de lՉme Žtaient ouverts ˆ Lui.
Et aprs ces jours terribles de sa Passion, quand Il est descendu aux enfers Š et comme un Žclair a illuminŽ mme les coins les plus ŽloignŽs de ce lieu terrible et tŽnŽbreux, o Il a dŽlivrŽ de leurs cha”nes tous les justes, et tous ceux qui L'attendaient depuis des sicles, Il a dŽlivrŽ les ‰mes pour les emmener au paradis, pour les emmener au Royaume Š ce royaume des tŽnbres a ŽtŽ compltement dŽtruit, ce royaume des tŽnbres a ŽtŽ dispersŽ pour toujours et n'avait plus prise sur le genre humain comme avant. Mais maintenant les seuls qui sont condamnŽs ˆ ce lieu sont ceux qui vont lˆ de leur propre volontŽ, qui choisissent les tŽnbres au lieu de la lumire, qui choisissent l'obscuritŽ du pŽchŽ et l'Žgo•sme de ne suivre que leur propre volontŽ. Car ceux-lˆ sont maintenant les habitants de ce lieu tŽnŽbreux.
Mes frres et sĻurs bien-aimŽs, notre Sauveur est venu pour que nous puissions participer ˆ cette Lumire. Il nous l'a donnŽe impartialement, ˆ nous tous, par son Incarnation et par sa PrŽsence ici sur la terre. Qui imaginerait que quiconque, sachant cela, partirait volontairement de la Lumire ? Qui choisirait volontairement les tŽnbres ? Qui prŽfŽrerait vivre dans les tŽnbres?
Mais cela est exactement ce que nous faisons quand nous pŽchons; cela est exactement ce que nous faisons quand nous choisissons de suivre les commandements du malin; nous choisissons de vivre plut™t dans les tŽnbres. Nous fermons nos yeux ˆ la Lumire, car les Ļuvres du diable sont les Ļuvres des tŽnbres. Et si nous voulons continuer dans ces actes, et ces comportements, et ces dispositions, alors que faisons-nous sinon fermer volontairement nos yeux, en fait nous aveugler nous-mmes ˆ la Lumire ?
Ds le tout dŽbut de nos vies, mes frres et sĻurs bien-aimŽs, nous avons l'obligation de chercher la Lumire, et de la chercher avec insistance. Mais vous savez ce qui arrive quand quelqu'un essaye de chercher la Lumire. Vous l'avez vu peut-tre dans vos propres vies. Quand une personne qui a vŽcu dans les tŽnbres, une personne qui a menŽ une vie qui n'est pas ce qu'elle devrait tre, arrive enfin ˆ comprendre, et comme l'aveugle aujourd'hui entend les pas de JŽsus, et comprend que Ēvoici qu'arrive une occasion pour mon salut, JŽsus vient ici prs de moiČ et commence ˆ crier, par la prire, par le ježne, en se tenant ˆ l'Žcart de ses anciens mauvais lieux et de ses anciens compagnons, vous savez ce qui se passe : la mme chose qui arrive ˆ l'aveugle aujourd'hui :
ĒToi, tu vas essayer d'tre un chrŽtien maintenant ! Toi qui es le premier parmi nos compagnons, dans la vie que nous avons, tu vas maintenant nous quitter ? Tu vas prŽtendre tre un chrŽtien ? Quel hypocrite tu es !Č
Et de cette manire ils essaient de museler nos cris adressŽs au Sauveur pour la Lumire. Que devons-nous faire ? Ne devons-nous pas avoir cet homme comme un exemple pour nous ? Car plus les gens essayaient de le faire taire, plus les gens essayaient de le museler, plus fort il criait. Plus fort il suppliait, plus fort il invoquait son Sauveur. Qui parmi nous donc va faire cela afin que nous soyons sauvŽs ?
Mais revenons un peu plus loin en arrire. Parlons de notre responsabilitŽ d'ouvrir les yeux et d'Žclairer nos propres enfants. Un homme trs sage a dit que tous les enfants sont nŽs pieux. Et nous le voyons avec nos enfants. Je le vois dans les enfants qui viennent ici ˆ l'Žglise. Oui, ils font du bruit, mais ce sont des enfants. Je n'ai aucun problme avec les enfants faisant du bruit. J'ai un grand problme avec les adultes faisant du bruit. Mais une Žglise sans le bruit des enfants, une Žglise sans le bruit de leurs cris parfois dŽsordonnŽs, et de leurs mouvements parfois gnants, une Žglise sans cela est une Žglise sans avenir. Ces enfants sont naturellement pieux. Ils crieront et veilleront ˆ ce que quelqu'un les amne pour embrasser les ic™nes. Ils veilleront ˆ ce que quelqu'un les aide ˆ venir et ˆ se prŽparer pour la sainte communion. Ils attendent dans la queue; ils attendent ardemment avec leurs petits bras croisŽs, attendant de recevoir ce don de Lumire, que nous les adultes dans notre lourdeur d'esprit ne voyons pas comme ils voient. Car, gr‰ce ˆ leur puretŽ, ils voient des anges, ils voient des saints, et ils voient beaucoup de choses que nous ne voyons pas, parce que nous sommes devenus blasŽs et notre vue s'est troublŽe, parce que nous sommes pŽcheurs.
Nous avons une Žnorme responsabilitŽ envers ces enfants de cultiver ce don de piŽtŽ en eux. Nous avons une Žnorme responsabilitŽ, parce que ces enfants ne sont pas les n™tres; ils nous sont prtŽs, ils nous sont donnŽs pendant un temps. Ils ne sont pas les n™tres, pas plus que rien n'est n™tre. Ils appartiennent ˆ JŽsus Christ; ils appartiennent ˆ la sainte TrinitŽ, qui nous a rendus dignes d'avoir ces enfants comme consolation, et oui, quelquefois comme distraction, mais encore plus comme occasion de briser notre propre volontŽ, afin que nous ne fassions pas ce que nous voulons faire. Parfois il semble que nous n'arrivons jamais ˆ faire ce que nous voulons faire. Mais cela vient de Dieu aussi. Chaque fois que, ˆ cause de nos enfants, nous ne pouvons pas faire quelque chose que nous voulons faire, cela est un don qui vient de Dieu; cela est une occasion de briser notre volontŽ, de nous humilier et de devenir de meilleurs chrŽtiens. Et quand nous acceptons ce fardeau de bon cĻur, alors Žlever des enfants devient un chemin qui mne au salut et au paradis, un chemin aussi sžr et peut-tre plus sžr que de devenir des moines. On peut s'arrter d'tre un moine un jour; on peut s'arrter d'tre une moniale un jour; mais si on a des enfants, on ne peut s'arrter, jamais.
Par consŽquent, c'est tellement important pour nous de cultiver ce don de piŽtŽ dans nos enfants. Nous sommes toujours si pressŽs le matin. Les enfants doivent tre habillŽs; leur petit dŽjeuners doit tre prŽparŽ; nous sommes toujours en retard; quelque chose d'autre arrive; quelqu'un arrive pour emmener les enfants; il y a tant de choses. Et nous oublions de prendre les enfants dans nos bras et de les amener au coin des ic™nes, et de nous assurer que selon leur ‰ge ils peuvent dire quelques prires, et que selon l'‰ge qu'ils ont, ils prennent le petit morceau d'Žteindront que nous avons gardŽ pour eux, et une petite goutte d'eau bŽnite. Parce que si nous ne faisons pas cela, alors vous devez comprendre que nous aveuglons nos enfants. Qui de nous prendrait avec ses propres mains un instrument abominable et crverait les yeux de nos enfants, les yeux physiques ? Qui de nous ici ? Car rien que dÕentendre cela est horrible; vous frŽmissez seulement d'y penser.
Mais quand nous manquons dÕouvrir les yeux de nos enfants ˆ la beautŽ de l'orthodoxie et ˆ la gr‰ce des saints Mystres, ds un jeune, trs jeune ‰ge, nous faisons exactement cela ˆ des yeux qui sont plus importants que leurs yeux physiques, et ce sont les yeux de leur ‰me. Quand nous manquons de leur donner une occasion de nous voir prier, ježner et nous confesser et venir ˆ la sainte Communion, nous manquons ˆ leur Žgard. Et ils finissent par croire que toutes ces choses, toute cette piŽtŽ de l'orthodoxie qui n'est pas extŽrieure, mais plut™t jaillit de l'‰me du cĻur qui cherche JŽsus Christ, et cherche le salut; ils finissent par croire que toutes ces choses ne sont que pour les enfants; ce n'est pas pour les adultes. 'Quand je serai grand comme mon pre, je ne prierai et ne ježnerai pas, parce que je ne le vois jamais le faire.' Mme si l'enfant ne dit pas cela explicitement, cela est le message.
Il est tellement important pour nous qui sommes plus ‰gŽs, que nous ayons des enfants ou non, que nous Žlevions des enfants ou non, il est tellement important pour nous de donner un exemple ici dans l'Žglise et en dehors de l'Žglise, parce que ces gens qui ont essayŽ de museler cet aveugle aujourd'hui, essayeront demain de museler votre enfant. Ils essayeront de museler nos enfants et nos petits-enfants, de les empcher de chercher l'Illumination, de les empcher de chercher le salut, et de les empcher de chercher JŽsus Christ, le Fils de David, le Messie IncarnŽ, dont nous nous prŽparons ˆ cŽlŽbrer et ˆ commŽmorer la Naissance dans les ftes qui viennent.
Mes frres et sĻurs bien-aimŽs, un chrŽtien doit toujours suivre la voie de la Lumire ; un chrŽtien doit toujours suivre la voie de l'Illumination, l'Illumination qui se rŽpand quand nous observons les commandements. Si nous faisons cela, quelle est notre rŽcompense ? Des hommes sages nous ont avertis et nous ont dit : 'Ne vous dŽsespŽrez pas; ne vous dŽsolez pas quand pour un temps, vos enfants que vous avez ŽlevŽs dans la crainte de Dieu, se dŽtournent de sa Voie. Ayez patience, tout autant que Dieu avait patience avec nous. Ayez patience, et il retournera, parce qu'il verra qu'il n y a rien d'autre. Et s'il est un homme sage, et s'il est une personne ayant lÕintelligence, il comprendra qu'il a besoin de retourner ˆ JŽsus Christ.'
Mais pendant ce temps, nous devons marcher comme des enfants de Lumire par la voie de la Lumire. Nous devons tre comme l'aveugle aujourd'hui. Si quelqu'un essaye de nous faire taire, si quelqu'un essaye de nous empcher de vivre comme des chrŽtiens, alors notre voix doit tre d'autant plus forte. Car notre Sauveur est venu pour apporter le salut. Le monde n'avait pas besoin d'un autre philosophe; le monde n'avait pas besoin d'un autre systme de morale; le monde n'avait pas besoin d'un autre ma”tre qui fonde une autre Žcole. Le monde avait besoin du salut, et JŽsus Christ est venu apporter le salut ˆ tous ceux qui Le cherchent, gardant notre confession de foi orthodoxe face ˆ quoi que soit qui essaye de nous l'enlever, gardant l'orthodoxie comme la prunelle de notre Ļil, comme la chose la plus prŽcieuse dans le monde, la gardant, l'exprimant, et la vivant. Car de cette manire, nos chemins seront droits, et nous tracerons des chemins que nos enfants suivront, et nous leur laisserons le plus grand hŽritage qu'un parent puisse laisser ˆ son enfant, le salut en JŽsus Christ notre Seigneur, Lui qui est le Verbe IncarnŽ du Pre, et qui est adorŽ avec Lui et le saint Esprit, JŽsus Christ qui nous a sauvŽs. Amen.

Pre Anthony Gavalas

 

sentence

ĒQUELQU'UN M'A TOUCHƒČŹ

ŹŹŹŹ

Au Nom du Pre et du Fils et du saint Esprit.
ŹŹŹŹŹ ĒQuelqu'un M'a touchŽ,Č dit notre Sauveur. Quelqu'un de cette grande foule de gens qui L'entourait L'a touchŽ. Et une femme, qui depuis beaucoup d'annŽes avait eu une hŽmorragie, Žtait guŽrie. Et dans sa joie d'avoir ŽtŽ guŽrie, dans son soulagement d'avoir ŽtŽ sauvŽe de cette maladie dŽbilitante et embarrassante, je pense qu'elle avait un regret. Je pense qu'elle avait une chose qui la rongeait probablement pour le reste de sa vie. Qu'est-ce qui m'a pris si longtemps ? Qu'est-ce qui m'a pris si longtemps d'aller lˆ ? Pourquoi est-ce que j'ai perdu tellement de temps ? Pourquoi est-ce que j'ai perdu tellement de temps et de force et d'argent ? Pourquoi est-ce que j'ai tant perdu quand j'aurais pu aller plus t™t ? J'aurais pu aller et tre guŽrie et avoir ma santŽ tout ce temps. Pourquoi est-ce que j'ai attendu si longtemps ?
ŹŹŹŹŹ Car vraiment cette femme avait seulement ce regret. Vraiment cette femme n'avait que cela ˆ se chagriner, parce qu'elle avait ŽtŽ guŽrie. La Source de toute guŽrison, la Source de toute bŽnŽdiction, la Source de vie elle-mme l'avait guŽrie. Pourquoi a-t-elle attendu si longtemps ? Mais cela n'est-il pas une question que tant parmi nous et le monde lui-mme devraient se poser ? Pourquoi attendons-nous si longtemps de venir ˆ JŽsus Christ ?
ŹŹŹŹŹ Nous avons des chagrins; nous avons des soucis; nous avons des maladies. Et nous cherchons par tous les moyens ˆ part JŽsus de les rŽsoudre. Nous sommes fatiguŽs, nous pensons qu'un changement de lieu, un changement de climat va nous rendre notre force. Nous avons des soucis, et nous pensons que si nous nous rassemblons avec une foule de nos copains et allons ˆ quels que soient les endroits ouverts ˆ ces sortes de situations, que ceux-lˆ vont allŽger notre fardeau, et nous serons encore une fois heureux.
ŹŹŹŹŹ Nous pensons que d'une faon ou d'une autre, les choses qui sont de ce monde vont remŽdier aux problmes de ce monde. Il y a une thŽorie sur les gens qui boivent, qui pensent que les rŽsultats de leur ivresse peuvent tre remŽdiŽs en buvant encore plus. Mais tout ce qu'ils font, c'est de dŽtruire leur santŽ, de dŽtruire leurs familles, et en fin de compte, de se dŽtruire totalement. Qu'est-ce qui fait quiconque penser que ces choses qui ont ŽtŽ prŽparŽes, non par Dieu, mais par le prince de ce monde, ces choses qu'il nous a trompŽs en nous faisant penser qu'elles sont les cures de nos chagrins et de nos tristesses et de notre dŽpression; qu'est-ce qui fait quiconque penser que ces choses sont vraiment des cures ? Alors que tout ce qu'elles sont, c'est des moyens de renforcer les comportements qui nous ont amenŽs ˆ cet Žtat. Car qu'est-ce qui est plus dŽprimant qu'une foule de gens quittant un de ces centres de divertissement aprs qu'ils ont bu, aprs qu'ils se sont rendus ridicules, aprs que la musique s'est arrtŽe, et tout ce qu'il y a, c'est l'Žcho de l'orchestre et l'odeur fŽtide de la fumŽe de tabac ? Qu'est-ce qui est plus dŽprimant ? Et pourtant maintes et maintes fois, jour aprs jour, les mmes gens vont aux mmes endroits et ont les mmes rŽsultats. Dans un manuel de psychologie cela est appelŽ aliŽnation mentale. Faire la mme chose ˆ maintes reprises et avoir le mme rŽsultat nŽgatif, c'est de l'aliŽnation mentale, mme par la mesure que la science a donnŽe au mot.
ŹŹŹŹŹ Pourtant combien de personnes cherchent JŽsus Christ premirement ? Combien de personnes cherchent le Ma”tre, notre CrŽateur, notre Sauveur, notre RŽdempteur premirement ? La plupart des personnes, s'ils trouvent JŽsus, Le trouvent aprs qu'ils ont passŽ leurs vies, aprs qu'ils ont dŽpensŽ leur argent, aprs qu'ils ont ŽpuisŽ leur force, dans certains cas brisŽ eux-mmes et leurs familles. Et quand ils trouvent JŽsus, le seul chagrin qu'ils ont, c'est la mme chose qu'avait cette femme guŽrie. 'Qu'est-ce qui m'a pris si longtemps'?
ŹŹŹŹŹ C'est pourquoi nos Pres nous disent de venir au Christ t™t dans nos vies. C'est comme saint IrŽnŽe de Lyon nous dit : 'Donne ˆ ton Sauveur ton cĻur quand il est dans un Žtat doux et docile'. Donne ton cĻur ˆ JŽsus Christ quand il est encore doux afin que Lui, Il puisse le mouler. Parce que, comme nous l'avons dit, nos cĻurs, pareils au reste de nous, sont faits de boue, d'argile. Nous sommes trs, trs btes quand nous disons que maintenant que je suis jeune je vivrai la vie des jeunes, et quand je vieillirai, je me repentirai. J'aurai l'occasion de me confesser. J'aurai l'occasion de venir ˆ la sainte Communion. Mais pour le moment, la vie est pour moi; la vie est pour les jeunes; la vie est pour moi maintenant. En disant cela, les gens ne prennent pas conscience que nos cĻurs d'argile sont cuits, comme je l'ai dit auparavant et je le dirai probablement ˆ chaque autre sermon. Nos cĻurs sont d'argile et ce cĻur d'argile est cuit dur par les feux des passions, et quand on est vieux, c'est trs difficile de changer.
ŹŹŹŹŹ Tant parmi nous sont comme cette grande foule qui pressait JŽsus. Vous avez entendu la description. La foule Žtait si grande autour de JŽsus qu'ils L'ont poussŽ par-ci par-lˆ. Dans certains endroits Il marchait ˆ peine de Lui-mme. La foule L'emportait en Le poussant. Tant parmi nous sont comme cette foule. Nous voulons tre prs de JŽsus, pensons-nous. Nous voulons tre prs de Lui, parce que nous voyons que quelque chose de merveilleux est lˆ. Nous nous approchons; mme nous Le pressons; nous exigeons son temps, surtout dans ces occasions o nous pensons que c'est appropriŽ comme chrŽtiens d'tre trs, trs pieux, au temps de la Semaine sainte, ou quelques jours avant que nous essayions de recevoir la sainte Communion. Nous essayons d'tre pieux en ce temps, et nous nous forons sur JŽsus. Est-ce que vous pensez qu'Il prte vraiment attention ˆ cela ? Ces gens voulaient tre prs de Lui parce qu'ils entendaient de belles choses. Ils voyaient qu' Il faisait des miracles. Ils voulaient tre prs de Lui. Mais aucun d'eux ne L'a touchŽ. Dans cette foule, dans cette multitude de gens, pressant, bousculant, essayant d'avoir son attention, une seule personne L'a touchŽ.
ŹŹŹŹŹ Il y a des passages dans les Saintes ƒcritures qu'on ne s'habitue jamais ˆ lire, et qu'on ne peut jamais lire sans que mme un cĻur de pierre ne soit Žmu. Un de ces passages est la scne entre notre Sauveur et la femme cananŽenne. Elle n'Žtait pas juive; elle n'Žtait pas du peuple d' Isra‘l. Mais elle est venue au Christ en demandant que sa fille soit sauvŽe d'un dŽmon. Mais notre Sauveur, voulant montrer la grandeur de la foi de cette femme, l'a rejetŽe, et lui a montrŽ du mŽpris, et a dit, 'Je ne ferai rien pour toi. Il n'est pas bien de prendre la nourriture des enfants, et de la jeter aux chiens'. Et la femme Lui a rŽpondu, ĒOui, Seigneur. Vous avez raison. Je suis un chien. Mais les chiens ne mangent-t-ils pas des restes et des choses qui tombent de la table des enfants ? C'est tout ce que je demandeČ.ŹŹŹŹŹŹ
ŹŹŹŹŹ Et un autre passage c'est celui d'aujourd'hui. Ce genre de maladie, pas seulement au mois le mois, mais quand la maladie venait sous une forme aussi chronique, elle rendait la femme impure selon les rites. Et elle n'avait aucun droit de s'approcher d'un ma”tre de la loi. Elle n'avait aucun droit d'tre lˆ o elle Žtait. Et pourtant, elle savait trs bien, elle Žtait finalement arrivŽe ˆ la conclusion que cela serait son seul espoir. Cela est le seul endroit o elle sera guŽrie; c'est la seule Personne qui peut l'aider. Et sans Žgard pour son Žtat, telle Žtait sa confiance en Lui et telle Žtait sa foi, qu'elle est venue, non pas devant le Christ, mais derrire Lui. Sa crainte ne venait pas seulement de l'intŽrieur d'elle-mme parce qu'elle savait que ce n'Žtait pas sa place d'tre lˆ, mais parce qu'elle craignait que quelqu'un dans la foule Š et nous avons de telles personnes dans l'Žglise parfois Š que quelqu'un ne lui dise : ĒVous savez, Žcartez-vous de Lui. Vous ne devriez pas Le toucher. Vous tes malade.Č Car nous avons de telles personnes malheureusement dans l'Žglise qui croient qu'ils sont les gardiens et qu'ils peuvent dire aux personnes si et quand ils doivent s'approcher du calice; si et quand ils doivent s'approcher du Christ; qui se chargent d'tre les arbitres de ce qui est juste et de ce qui ne l'est pas. Et elle craignait d'tre dŽcouverte par une de ces personnes qui veulent du bien aux autres, et d'tre humiliŽe publiquement. Mais mme cela elle le surmonta, et elle toucha JŽsus, et fut touchŽe par Lui, et elle fut guŽrie, et elle est un objet de notre gloire et de notre consolation deux mille ans aprs. Cette pauvre femme.ŹŹŹŹŹ
ŹŹŹŹŹ Mes frres et sĻurs bien-aimŽs, il n'y a pas de plus grande consolation que JŽsus Christ. A vrai dire, il n'y a pas d'autre consolation que JŽsus Christ. Il n'y a pas de guŽrison, car si les mŽdecins oprent une guŽrison, c'est par la gr‰ce de JŽsus Christ. Nous sommes instruits de vŽnŽrer le mŽdecin et d'aller ˆ lui, mais de le comprendre comme nous comprenons le prtre, qu'il est les mains de Dieu, pas Dieu. Si jamais nous devons tre consolŽs, notre consolation doit tre JŽsus Christ. Ne vous attendez pas ˆ la consolation; ne vous attendez pas au soulagement; n'attendez rien de la machinerie de ce monde. Parce que la machinerie de ce monde, derrire la scne, est le diable lui-mme. Que ce soit dans un club, que ce soit par n'importe quel moyen que nous avons humainement parlant de chercher notre soulagement. Seul JŽsus, Il a toujours ŽtŽ le Seul; Il a toujours ŽtŽ notre seule consolation, notre seule guŽrison, et notre seul soulagement.
ŹŹŹŹŹ Je vous supplie mes frres et sĻurs; je vous supplie de ne pas perdre une autre seconde de vos vies; je vous supplie de ne pas perdre une autre fraction de seconde de ce don prŽcieux que Dieu nous a donnŽ, ce don qui est le temps. De crainte que, ˆ la fin, quand finalement vous dŽcouvrez le Christ, vous vous lamentiez et vous reprochiez ˆ vous-mmes d'avoir perdu votre temps.
ŹŹŹŹŹ En cherchant notre Sauveur ds maintenant, sans Žgard pour notre impuretŽ spirituelle, car en cela nous avons comme exemple cette femme, sans Žgard pour notre dŽsordre spirituel, cherchons-Le, afin que L'ayant trouvŽ, nous puissions avoir la consolation de Le conna”tre ici dans cette vie, et avoir une part du Royaume qui a ŽtŽ promis ˆ ceux qui L'ont aimŽ et qui ont donnŽ leurs vies ˆ Lui. A Lui, JŽsus Christ notre Seigneur, ˆ qui avec son Pre et le saint Esprit est dž l'honneur et l'adoration dans les sicles des sicles. Amen.ŹŹ

Pre Anthony Gavalas

sentence 3

La chrŽtientŽ orthodoxe dans les pays germaniques

1. LÕORTHODOXIE EN OCCIDENT


La plupart des Occidentaux Š tant orthodoxes que non-orthodoxes Š identifient lÕorthodoxie avec des ƒglises nationales de lÕEurope de lÕEst et du Moyen-Orient. Ceux qui vivent dans des pays dÕOccident et foulent du sol sacrŽ ne sont mme pas conscients que sous leurs pieds repose un hŽritage chrŽtien vibrant, qui fut, pendant de longs sicles, identique en esprit et presque impossible ˆ distinguer en pratique de la chrŽtientŽ de lÕOrient.
Dans les pays aujourdÕhui germanophones, une vraie orthodoxie chrŽtienne, plus ou moins Žtendue, fut prŽsente, depuis les premiers jours de la foi jusquÕau grand schisme de 1054. Il est possible non seulement de la dŽcouvrir dans des Žcrits anciens et des Žtudes archŽologiques, artistiques et autres, mais aussi dÕavoir lÕexpŽrience de sa prŽsence vivante par la vŽnŽration de saintes reliques aux endroits o elles sont encore conservŽes et honorŽes, de mme que par la lecture de ces Vies de saints qui furent rŽdigŽes par les disciples immŽdiats et non embellies plus tard.


2. LÕARRIVƒE DE LA FOI CHRƒTIENNE


LÕarrivŽe de la foi chrŽtienne dans les pays germanophones fut un processus progressif, sՎtendant sur 800 ans. Au dŽbut du premier millŽnaire, une grande partie de lÕEurope occidentale Žtait peuplŽe de Celtes. Les Romains avaient conquis de vastes territoires du continent et avaient commencŽ de faire des raids dans ce que lÕon appelait alors la Germanie, contrŽe o des tribus germaniques sՎtaient Žtablies ˆ peu prs ˆ la mme Žpoque. Aprs leur dŽfaite lors de la bataille de la Fort de Teutobourg en lÕan 9, les Romains furent incapables de rŽaliser leur ambition de conquŽrir toute lÕEurope occidentale : ils durent rester ˆ lÕouest du Rhin et au sud du Danube, sans pouvoir implanter leur civilisation dans une partie importante de lÕAllemagne actuelle. Cela fut dŽterminant pour lÕexpansion de la foi chrŽtienne, qui fut reue bien plus t™t par les territoires romains, plus accessibles, que par les germaniques.
Nous nous concentrons dans cet article sur la manire dont lÕorthodoxie chrŽtienne arriva dans les pays et les contrŽes aujourdÕhui germanophones. Il ne faut pas oublier que ces pays nÕexistaient pas pendant la pŽriode apostolique. Il fallut en fait plusieurs longs sicles pour que les dŽplacements de populations et de frontires, les guerres et lՎvolution des langues eussent fait leur Ļuvre. Le rŽsultat en fut un mŽlange de peuples celtiques, germaniques et romains ˆ lÕOuest, qui parlaient lÕancien franais, et de plusieurs royaumes germaniques ˆ lÕEst, o lÕon parlait lÕancien allemand, et o le latin fut employŽ seulement dans lՃglise. Et il fallut encore plusieurs sicles de plus pour que les pays actuels dÕAllemagne, de Suisse, dÕAutriche, de Luxembourg et de Liechtenstein eussent ŽmergŽ avec approximativement leurs frontires actuelles.


3. LA CHRƒTIENTƒ SUR LES FRONTIéRES ROMAINES AU TEMPS DES APļTRES ET DES MARTYRS


Pendant les trois premiers sicles, la foi chrŽtienne se rŽpandit rapidement dans toutes les directions depuis JŽrusalem. Les premiers ap™tres et leurs disciples transmirent ce quÕils avaient vu, vŽcu et entendu Š la Vie, la Mort et la RŽsurrection de JŽsus Christ, de mme que ses enseignements. LÕespoir que tout cela apporta ˆ ceux quÕil touchait, avec, en plus, le mode de vie des premiers chrŽtiens, en contraste flagrant avec ce quÕils voyaient autour dÕeux, fut contagieux. La foi se rŽpandit dÕabord par les groupes de familles de Juifs dispersŽs dans lÕEmpire Romain, puis peu ˆ peu, de famille en famille dans diffŽrents groupes de pa•ens. Elle arriva dans les parties de lÕEmpire Romain qui sÕappelaient les Gaules (aujourdÕhui la France et les rŽgions Rhin et Moselle de lÕAllemagne), le Noricum (Bavire du sud et Autriche du nord), et la RhŽtie (Suisse et parties de lÕAllemagne) par les mmes voies. ˆ beaucoup dÕendroits, il existe des signes qui indiquent que des disciples des ap™tres furent envoyŽs ˆ ou par ces territoires, bien que nous nÕen ayons pas de rapport Žcrit. En Suisse, on dit que saint Beatus fut baptisŽ ˆ Rome par lÕap™tre BarnabŽ et puis envoyŽ par lÕap™tre Pierre pour ŽvangŽliser en Suisse. Il existe de semblables traditions, selon lesquelles lÕap™tre Pierre aurait pu venir ˆ Trier et ˆ Cologne dans la rŽgion rhŽnane.
Beaucoup de chrŽtiens qui vinrent ˆ la frontire romaine dans les pays dont nous parlons faisaient partie de lÕarmŽe romaine ou Žtaient des fonctionnaires romains; dÕautres Žtaient des marchands, venus de Grce ou de Syrie. Comme il y avait beaucoup de soldats (et mme des officiers) germains dans lÕarmŽe romaine, quelques-uns parmi eux avaient bien pu adopter aussi la foi chrŽtienne. Le premier miracle rapportŽ dans un pays germanophone fut le rŽsultat de la prire de chrŽtiens de lÕarmŽe romaine. Le 11 juin de lÕannŽe 172, dans le pays qui est maintenant le nord de lÕAutriche, lÕarmŽe romaine Žtait restŽe sans eau potable un jour de grande chaleur pendant quÕils combattaient les Markmanni et Quadi barbares. LÕarmŽe Žtait sur le point de succomber ˆ la chaleur lorsque, en rŽponse ˆ la prire des soldats chrŽtiens, Dieu envoya un orage rafra”chissant les Romains et effrayant les barbares, qui essuyrent alors une dŽfaite cuisante.
Bien que la persŽcution des chrŽtiens nՎtait pas aussi farouche en Occident quÕen Orient, il y avait cependant des temps de persŽcution. En 177, il y eut beaucoup de martyrs ˆ Lyon (France); comme il y avait presque certainement des communautŽs chrŽtiennes dans les citŽs proches le long du Rhin, comme les citŽs (germaines) de Cologne et de Mayence, il est fort possible que quelque chose de semblable y ežt lieu aussi. Une persŽcution de chrŽtiens eut lieu Žgalement sous les empereurs DioclŽtien et Maximien (dŽbut du 4e sicle). Parmi ceux qui donnrent leur vie pour la foi ˆ cette Žpoque, furent saint Maurice et la lŽgion thŽbaine, ces chrŽtiens dÕAfrique martyrisŽs dans une rŽgion de la Suisse actuelle, dÕautres membres de cette lŽgion, qui stationnaient ˆ divers autres endroits, y compris Cologne, Bonn et Xanten (Allemagne), la martyre Afra dÕAugsburg, sainte Ursule, la vierge martyre de Cologne avec ses compagnes, et le soldat martyr Florian et ses 40 compagnons ˆ Lšrsch (Autriche).
LÕimportance de ces premiers martyrs pour lÕexpansion de la foi chrŽtienne et la piŽtŽ du peuple fut Žnorme. Ds que lÕempereur Constantin cessa la persŽcution des chrŽtiens en 313, des Žglises furent construites ˆ lÕendroit du repos des martyrs, et elles devinrent des lieux importants de plerinage. Les gens y accouraient pour chercher consolation et guŽrison, sachant quÕils avaient leurs propres hŽros spirituels dans ces bienheureux, qui avaient offert le sacrifice ultime dans leur propre pays.

4. DE CONSTANTIN AUX INVASIONS BARBARES


Au commencement du 4e sicle, la jeune ƒglise de cette Žpoque Žtait vibrante en matire de foi, mais petite en nombre. Elle Žtait reprŽsentŽe dans toutes les citŽs de lÕEmpire Romain, mais elle se rŽunissait dans des Žglises maisons et elle Žtait matŽriellement pauvre Š le clergŽ dut souvent se trouver du travail sŽculier pour vivre. Cela allait changer sous Constantin. Aprs sa victoire sur Maxence en 312 sous le signe de la Croix, dont il avait eu une vision, il cessa de persŽcuter les chrŽtiens et commena ˆ les protŽger. Pendant toute sa vie, il accorda la libertŽ, des subsides et des immunitŽs ˆ lՃglise et convoqua le premier Concile oecumŽnique pour Žtablir lÕunitŽ entre les chrŽtiens.
Pendant quelques annŽes, Constantin, comme son pre avant lui, Žtait le chef de la moitiŽ occidentale de lÕEmpire Romain, et avait la citŽ de Trier (Allemagne) pour sa capitale. Nous devons ˆ ce fait les trŽsors spirituels extraordinaires qui se trouvent aujourdÕhui dans cette ville. Sa mre, sainte HŽlne, ayant voyagŽ jusquÕen Palestine et dŽcouvert la vraie croix, ramena un de ses clous ˆ Trier. LՎvque Antiochus, quÕelle avait appelŽ dÕAntioche pour servir ˆ Trier, ajouta au trŽsor les reliques de lÕap™tre Matthias. Le chef de sainte HŽlne elle-mme y repose aussi, de mme que la sandale de lÕap™tre AndrŽ, les reliques de sainte Anne, mre de la toute sainte Enfantrice de Dieu, et les reliques de beaucoup de saints locaux.
Bien que Constantin ne for‰t personne ˆ devenir chrŽtien, la chrŽtientŽ augmenta rapidement sous lui et ses successeurs. Les gens furent attirŽs par le saint exemple des chrŽtiens de mme que par lÕentraide et la chaleur de la communautŽ dÕun groupe chrŽtien. DÕautres causes de conversion Žtaient lÕinfluence des Žpouses chrŽtiennes et les nombreux miracles Š surtout des guŽrisons Š qui sÕopŽraient par les prires des saints et des supplications aux tombeaux des martyrs et asctes. En mme temps cependant, quelques-uns devinrent chrŽtiens simplement pour gagner les faveurs de lÕempereur, se rendant compte que le baptme pouvait tre un passeport pour obtenir un rang, du pouvoir et de la richesse. LÕÓåge dÕHypocrisieÓ, qui avait commencŽ alors, dura 100 ans. Il fut pourtant un stimulant pour le mouvement le plus pur et le plus vŽritablement orthodoxe du temps Š celui du dŽbut du monachisme.


5. LE MONACHISME DANS LA GAULE DES 4e ET 5e SIéCLES


En ƒgypte, la rŽaction ˆ ce christianisme diluŽ fut le dŽpart pour le dŽsert de nombre dÕhommes et de femmes qui voulurent prŽserver le caractre dÕoutre-monde de la foi chrŽtienne, celui dont ils avaient fait lÕexpŽrience au temps de la persŽcution. Peu aprs cela, des esprits semblables de lÕOccident lurent la Vie de saint Antoine et les vies dÕautres citoyens du dŽsert, ou, comme saint Cassien, apportrent leur propre expŽrience de la vie ascŽtique ˆ lÕOccident et en Žcrivirent des livres. Et lÕOccident eut aussi ses propres grands asctes Š saint Martin de Tours (  397) et ceux qui vinrent du monastre insulaire de LŽrins (dŽbut du 5e sicle); saints Romain (  460) et Lupicin (  480), qui dŽbutrent comme ermites dans les Montagnes du Jura de la France actuelle pour fonder ensuite des monastres sur place et dans les contrŽes qui sont la Suisse dÕaujourdÕhui. Toutes les parties des futurs pays germaniques, qui faisaient partie alors de lÕEmpire Romain, furent affectŽes par ce mouvement; ceux qui poursuivaient une vraie qute de la vie en Dieu savaient o aller pour se dŽvouer pleinement au Christ.


6. LES MIGRATIONS DES TRIBUS GERMANIQUES ET LA FIN DE LA DOMINATION ROMAINE

Cette poussŽe positive de lÕorthodoxie, du moins telle quÕelle affectait les pays germaniques, souffrit un grave contrecoup au dŽbut du 5e sicle, lorsque plusieurs tribus germaniques Š en raison de leur croissance, de leur expansion ainsi que de lÕavancŽe des redoutables Huns Š envahirent le territoire romain. Tout dÕabord, des troupes romaines furent retirŽes de la frontire de la Germanie pour protŽger Rome; ensuite Rome elle-mme tomba et lÕEmpire dÕOccident nՎtait plus. Des tribus germaniques traversrent les fleuves Rhin et Danube. Pour les chrŽtiens romains, la vie devint bouleversŽe et pleine de dangers. Les Žglises furent souvent dŽtruites et remplacŽes par des temples pa•ens, et lÕactivitŽ ŽvangŽlisatrice ˆ peine Žclose se fana pratiquement. Quelques-uns des chrŽtiens se retirrent dans des forteresses romaines et construisirent mme des Žglises ˆ lÕintŽrieur des murs; quelques-uns furent tuŽs; ceux dÕAutriche tinrent bon tant quÕils le purent, puis sÕenfuirent en Italie.
Un saint extraordinaire qui Žmergea au milieu de ces temps troubles, pour guider et protŽger le reste des chrŽtiens dans la rŽgion de lÕAutriche du nord et de la Bavire, fut saint SŽverin. Il apparut dans une petite ville comme humble ermite et plerin, priant dans les Žglises locales et vivant dans la maison dÕun vieillard. Ė une occasion, il exhorta tout le monde ˆ ježner, ˆ prier et ˆ donner des aum™nes sÕils voulaient Žviter lÕinvasion. Comme ils ne lՎcoutrent pas, il Ņsecoua la poussire de ses piedsÓ et passa ˆ la ville suivante. Plus tard, le vieillard chez qui il avait logŽ arriva aux portes de la citŽ tout effrayŽ et en grande crainte Š la prŽdiction de SŽverin fut accomplie; son logeur fut le seul survivant de la premire citŽ. Les habitants de la deuxime ville, qui, eux, suivirent le conseil de SŽverin, furent ŽpargnŽs dÕune pareille destruction.
Ce fut le dŽbut dÕune mission extraordinaire, au cours de laquelle toute une rŽgion vint se faire guider par la clairvoyance de SŽverin pour sa sŽcuritŽ et son salut. Il fonda des monastres, fut conseiller de rois, libŽra des captifs, nourrit et vtit le peuple. Il savait quand un combat allait tre victorieux et quand il Žtait, au contraire, temps de fuir. Il apprenait encore et encore au peuple ˆ se remettre ˆ Dieu au lieu de se fier ˆ leurs propres forces, ˆ tre humble et ˆ tre gŽnŽreux du peu quÕils possŽdaient. Ė la fin, tous ceux qui restaient se rassemblrent dans la mme rŽgion et sÕenfuirent sains et saufs en Italie.
Il y eut aussi des martyrs du Christ tuŽs par les barbares envahisseurs, nous connaissons le nom de quelques-uns, comme les saints Crescent, ThŽonest, Aureus et Maximus, tous originaires de Mayence.
Dans les citŽs plus grandes, lՎvque resta avec quelques chrŽtiens. CՎtaient souvent eux qui transmettaient la culture romaine aux barbares, ce qui leur valait le respect de ces derniers. Mais lÕabsence des officiers romains militaires et civils fit que les Žvques prenaient sur eux de plus en plus de t‰ches sŽculires, avec le rŽsultat dÕune baisse du niveau spirituel.


7. LA CONVERSION DES FRANCS


La tribu germanique connue comme les Francs vivait dÕabord prs, puis ˆ lÕintŽrieur des frontires romaines, et beaucoup dÕentre eux servaient dans lÕarmŽe et le gouvernement romains, y possŽdant mme de hauts rangs. Aprs la chute de lÕEmpire dÕOccident au 5e sicle, ils devinrent rapidement le pouvoir dominant et conquirent le reste de la Gaule. Alors commena ce que lÕon pourrait appeler Ņla conversion en sens inverseÓ : au lieu des conquŽrants imposant leur religion ˆ la population celto-romaine, les Francs qui les c™toyaient dans leur vie de tous les jours absorbaient et imitaient leur culture et leur religion. Au dŽbut cela signifiait ajouter les dieux romains aux leurs propres; ensuite quelques-uns devinrent chrŽtiens sous Constantin; cloviset finalement, lors du baptme de Clovis en 498/99, un grand nombre des hommes de Clovis le suivirent aussi dans les eaux baptismales, et beaucoup dÕautres en firent de mme plus tard.
La conversion de Clovis fut dŽterminante aussi pour les tribus germaniques installŽes dans les contrŽes que Rome nÕavait jamais conquises. Quand la conqute de Clovis se poursuivit pour inclure une grande partie de lÕAllemagne et des parties de lÕAutriche actuelle, cela ouvrit la porte ˆ lՎvangŽlisation de ces territoires, puisquÕils furent alors sous la protection dÕun roi chrŽtien.


8. MISSIONNAIRES DE GAULE

Les premiers ˆ venir sur ce nouveau territoire de mission furent des moines et des prtres du royaume des Francs dÕOccident, qui avait moins souffert des invasions. De la fin du 6e ˆ la premire moitiŽ du 8e sicles, ils vinrent dans le but de rŽtablir la foi chrŽtienne le long du Rhin, et de lÕapporter pour la premire fois aux autres territoires. De ceux-ci furent le saint Žvque Evergislus de Cologne et saint Goar, Žgalement sur le Rhin; de mme que les saints Emmeram, Erhard et Corbinian en Bavire.


9. LES MISSIONNAIRES IRLANDAIS

Ė peu prs en mme temps, des missionnaires commencrent ˆ venir dÕIrlande. LÕIrlande, qui nÕavait jamais ŽtŽ conquise par les Romains, ni vaincue par les envahisseurs germaniques, avait reu la foi chrŽtienne au 5e sicle, surtout par saint Patrick, et le culte du Christ y Žtait florissant. Courageux, lettrŽs et extrmement disciplinŽs dans leur ascŽtisme, les moines irlandais vinrent sur le continent seuls ou en petits groupes ˆ partir du 6e sicle. Les uns sÕinstallrent dans les forts, dans des cavernes, ou sur des ”les et devinrent des ermites ou de saints hommes locaux. Dans beaucoup de cas, on ne sait presque rien dÕeux aujourdÕhui, mis ˆ part leur nom. DÕautres, comme saint Colomban, fondrent des Žtablissements monastiques de grande importance. (Lui et ses douze compagnons commencrent trois monastres en France et de lˆ, des moines se dispersrent pour fonder dÕautres monastres en France et en Suisse.) Son disciple saint Gall, un homme trs Žrudit et trs humble, sÕinstalla prs du lac de Constance et devint lÕilluminateur de la Suisse, apportant la foi chrŽtienne pour la premire fois au peuple des montagnes et des vallŽes de la rŽgion. La cŽlbre abbaye de Saint-Gall fut construite plus tard ˆ lÕendroit de ses labeurs par un autre saint, natif cette fois du pays Š saint Otmar.
Un compatriote de saint Gall, saint Fridolin, travailla de la mme faon dans la rŽgion du Haut-Rhin ˆ convertir les Allemani dans ce qui est maintenant le coin sud-ouest de lÕAllemagne. La foi et lՎrudition, de mme que lÕagriculture et les techniques artistiques quÕils apportaient sur le continent, contrastaient grandement avec le niveau de spiritualitŽ chrŽtienne et de culture restantes, lˆ o toutes les Žcoles avaient disparu et les citŽs et routes romaines avaient ŽtŽ en partie dŽtruites, en partie tombŽes en ruine. Et bien sžr, les grands territoires qui nÕavaient jamais ŽtŽ sous Rome Š comme aussi la plupart des nouveaux peuples qui sՎtaient rŽcemment installŽs en Gaule, en Noricum et en RhŽtie Š nՎtaient pas du tout familiers de la vie chrŽtienne.
Pendant 500 ans, les Irlandais ne cessaient de venir, et formaient souvent lÕaxe de lÕorthodoxie, de la saintetŽ et du renouveau chrŽtiens, en mme temps quÕils prŽservaient les trŽsors culturels par leur habiletŽ dans lÕart et dans lՎcriture. Plusieurs saints bien connus des terres germaniques que lÕon croit de souche irlandaise sont : saints Virgil et Rupert de Salzburg; saint Kilian de WŸrzburg, ap™tre de la Franconie; saint Arbogast de Strasbourg, saint Albuin (Wittan), ap™tre de la Thuringe; et saint Aldo, fondateur dÕAltomunster en Bavire.
Mais ce furent les Anglo-Saxons Š revenus sur le continent pour convertir leurs propres frres germaniques (les anciens Saxons, comme ils les appelaient), ainsi que les Frisiens et dÕautres Š qui devaient complŽter la conversion de lÕAllemagne.

10. LES MISSIONNAIRES ANGLO-SAXONS ET LEURS DISCIPLES

Les Angles et les Saxons germaniques avaient conquis lÕAngleterre et, par les efforts ŽvangŽlisateurs venant de Rome et de lÕIrlande, furent convertis au christianisme au 7e sicle. EnflammŽs de zle chrŽtien, un certain nombre dÕentre eux conurent le dŽsir de partir pour le continent afin dÕapporter la Parole de Dieu ˆ leurs frres pa•ens. Pour le territoire qui devait devenir lÕAllemagne, le plus important de ces missionnaires fut le grand saint Boniface, Bonifaceconnu comme lÕilluminateur de lÕAllemagne. Cet homme puissant et complexe se donna entirement ˆ la correction des erreurs, corruptions et hŽrŽsies dans les restes de lՃglise quÕil rencontra. Il entra avec audace dans des contrŽes non encore ŽvangŽlisŽes, o les Germains pratiquaient encore le sacrifice humain, la divination et le culte des dŽmons, et il Žtablit de lÕordre dans une ƒglise ravagŽe par la guerre et qui avait ŽtŽ souvent ŽvangŽlisŽe seulement dÕune faon erratique par des moines vagabonds. Il avait une capacitŽ merveilleuse dÕattirer ˆ lui des aides fortes : lors de ses voyages ˆ Rome, il persuada trois futurs saints qui Žtaient ses compatriotes de le rejoindre en Allemagne (les saints Willibald, Wunibald et Lull). Par sa correspondance avec des abbesses anglaises, il fut capable dÕinspirer ˆ de saintes femmes le travail dÕouvrir des monastres sur la terre allemande et dՎvangŽliser les femmes (les saintes Leoba et Walburga sont parmi celles qui vinrent). Il souffrait de la solitude et de la tristesse dՐtre loin de sa patrie, mais ne cessa jamais de servir ceux auprs de qui le Christ lÕavait appelŽ comme ministre.
Ė la fin de sa vie, il avait Žtabli des ŽvchŽs ˆ Mayence, ˆ Ratisbonne, ˆ EichstŠtt et ˆ Salzburg; il avait rŽformŽ un clergŽ souvent dŽcadent et chrŽtien seulement de nom, et il avait baptisŽ et commencŽ ˆ Žduquer un grand nombre de personnes. Aprs avoir dŽsignŽ saint Lull comme son successeur, il quitta les principaux centres de son activitŽ (les terres germaniques de Thuringe, de Hesse et de Bavire), prenant avec lui son linceul dÕenterrement. Comme vieillard dŽjˆ, il alla en Frise, o lui et quarante-deux autres furent martyrisŽs par les pa•ens, aprs des labeurs missionnaires couronnŽs de succs. Il est enterrŽ dans son monastre de Fulda en Allemagne.


11. LA CONVERSION DE LÕALLEMAGNE DU NORD

Les Frisons et les Saxons occidentaux Žtaient les tribus principales au nord de lÕAllemagne actuelle. Ils sÕattachaient ˆ leurs dieux pa•ens dÕautant plus quÕils identifiaient la chrŽtientŽ avec la dŽfaite par une puissance Žtrangre. Il est vrai que Charlemagne (qui rŽgnait ˆ cette Žpoque Š fin du 8e sicle) avait de fortes raisons politiques de convertir les Saxons, qui, de leur position sur les terres c™tires de la Mer du Nord, attaquaient son royaume. Mais, contrairement ˆ ses fameux prŽdŽcesseurs, lÕempereur Constantin et le roi Clovis, il utilisa de la force brutale pour essayer dÕen venir ˆ bout, ce qui ne provoqua que de la rŽvolte. Heureusement, de vrais saints travaillaient aussi dans ces contrŽes pour convertir le cĻur et lÕesprit du peuple au Christ par lÕamour et la douceur.
Les ŽvangŽlisateurs les plus anciens connus furent saint Swidbert et les deux saints Ewald. Saint Swidbert ŽvangŽlisa les Brucktuari, une tribu saxonne, bien que plus tard ils fussent dispersŽs par des invasions. Les saints Ewald le Noir et Ewald le Blanc Žtaient des missionnaires anglo-saxons qui tentrent de convertir les Saxons. Pendant quÕils espŽraient rencontrer le chef local, ils furent tuŽs par ses hommes, qui ne voulaient pas abandonner leurs dieux pa•ens.
Saint Luidger, ˆ la fois gr‰ce ˆ ses qualitŽs personnelles quÕau temps plus tardif de son travail, avait le plus de succs parmi les missionnaires aussi bien chez les Frisons que chez les Saxons. Providentiellement, son grand-pre avait quittŽ le royaume des Frisons quand ceux-ci Žtaient encore des barbares, car son caractre gentil et impartial Žtait incompatible avec leurs manires cruelles. Lui et toute sa famille devinrent ensuite chrŽtiens dans le pays des Francs.
Quand la Frise de lÕouest (les Pays-Bas) fut conquise par les Francs (chrŽtiens), la famille retourna dans la rŽgion dÕUtrecht. Leur foyer Žtait ouvert aux grands missionnaires chrŽtiens de lՎpoque, et Luidger, encore jeune garon, y rencontra saint Boniface, peu avant le martyre de ce dernier. Son histoire familiale et ces rencontres avec des missionnaires lui donnrent lÕinspiration dÕapporter la foi chrŽtienne aux barbares. Sa facilitŽ dÕexpression en langue frisonne et sa familiaritŽ avec les coutumes et croyances frisonnes, comme lÕexcellence de son Žducation monastique ˆ Utrecht et ˆ York (Angleterre), augmentaient encore ses qualifications. Quand les Frisons de lÕest (en Allemagne du nord) furent Žgalement soumis par les Francs, Luidger reut, comme terres de sa mission, cinq districts frisons qui avaient ŽtŽ violemment opposŽs au christianisme. Ils consentirent ˆ devenir chrŽtiens si on leur envoyait un ma”tre qui pžt parler leur langue. En dŽpit dÕavoir ŽtŽ obligŽ de les quitter ˆ deux reprises ˆ cause de soulvements, Luidger rŽussit ˆ convertir cette rŽgion, en se dŽplaant sans cesse et en construisant de petites Žglises et des monastres en bois. Plus tard il dŽclina lÕoffre de lՎpiscopat de la prestigieuse citŽ de Trier afin de pouvoir Žtendre ses activitŽs missionnaires aux Saxons des contrŽes voisines, qui venaient aussi dՐtre conquis par les Francs sous Charlemagne. Ici, il finit par accepter lÕoffice Žpiscopal et devint le premier Žvque de Munster. En dernier lieu, il construisit un grand monastre selon le modle bŽnŽdictin ˆ Werden sur la Ruhr (prs de lÕactuel Essen), dont les moines venaient de Frise, de Saxonie et de Franconie; cÕest Žgalement le lieu o il choisit dՐtre enterrŽ et o ses reliques sont toujours vŽnŽrŽes. Un peu plus au nord, un autre missionnaire Š lÕanglo-saxon saint Willehard, premier Žvque de Bremen Š apporta la bonne Nouvelle du Christ au territoire qui comprend Bremen et Oldenburg.


12. LA PRUSSE
La dernire partie importante de lÕAllemagne actuelle ˆ ŽvangŽliser fut la Prusse, ˆ lÕEst. Cependant, ce ne fut jamais une rŽgion orthodoxe, parce que jusquՈ une Žpoque assez tardive, le peuple maintint ses croyances pa•ennes et sÕopposa violemment au christianisme, en tuant les deux premiers missionnaires qui vinrent ˆ leur territoire Š saint Adalbert de Prague (  997) et saint Bruno de Querfort (  1007). Ils ne devinrent chrŽtiens que convertis de force par les catholiques romains en 1249.
Nous connaissons aussi plusieurs Allemands qui avaient quittŽ leur propre pays et devinrent des saints orthodoxes en Russie. Les plus remarquables de ceux-ci sont les fols-en-Christ saint Procope dÕOustioug, saint Isidore et saint Jean le MisŽricordieux, de Rostov tous les deux, ainsi que les deux martyres royales : la tsarine Alexandra et la grande duchesse ƒlisabeth.


Margaret Bauman

sentence 2

LES PERES DE LÕEGLISE
(suite)

SAINT CYPRIEN DE CARTHAGE (200-258)
ftŽ le 16 septembre

En continuant de fouler les chemins de sagesse de nos saints pres, nous allons emprunter maintenant ceux de lՃglise dÕAfrique. Ė lՎvocation de ce nom, notre mŽmoire chrŽtienne se remplit du souvenir magnifique de cette ƒglise locale dont nous pouvons encore voir les vestiges matŽriels mlŽs aux ruines de lՎpoque romaine.
Le nom de Carthage, dont une carte des antiques ŽvchŽs nous montre le rayonnement au 3e sicle, rayonnement illustrŽ par le fait quÕun concile de cette rŽgion pouvait rŽunir trois cents Žvques, reste liŽ au nom du grand saint Cyprien, que lÕon compte parmi les premiers du groupe des grands Africains thŽologiens.
Rappelons brivement que, par sa position topographique, lÕAfrique romaine appartenait ˆ la partie occidentale de lÕempire et que, ds le deuxime sicle, il y avait plus de vie chrŽtienne lˆ que dans le reste de lÕOccident. La civilisation romaine sÕy Žtait dŽveloppŽe largement depuis la conqute de Carthage, mais lÕesprit dÕopposition politique contre Rome sÕy Žtait perpŽtuŽ. LՃglise africaine Žtait en relation fraternelle avec le seul centre apostolique de lÕOccident Š lÕancienne Rome Š, mais elle se rattachait Žgalement ˆ Alexandrie et par elle, ˆ la part orientale de la romanitŽ orthodoxe. Le vieil antagonisme punique avait forcŽment survŽcu ˆ lÕhumiliation de Carthage; lՃglise elle-mme sÕen ressentait dans de justes limites et se montrait moins disposŽe que les autres ƒglises occidentales ˆ subir lÕinfluence de lՃglise locale de Rome. Voilˆ, brivement retracŽ, le cadre historique de la vie de notre saint.
Thascius Caecilius Cyprianus naquit ˆ Carthage, ville que lÕon peut situer ˆ proximitŽ de lÕactuelle Tunis, entre lÕan 200 et lÕan 210. Ses parents appartenaient ˆ la noblesse pa•enne de cette Žpoque. Leur richesse permit au jeune Cyprien de suivre de bonnes Žtudes et de recevoir une excellente Žducation. De cette Žpoque Cyprien avoue que sa jeunesse fut peu chaste, dans une lettre adressŽe ˆ Donatus. Toutefois ses Žtudes furent brillantes et sa conduite honnte, ce qui lui permit dÕoccuper la fonction de rhŽteur. Il y excella dÕailleurs puisque son talent et sa renommŽe lui acquirent une bonne rŽputation tant parmi les pa•ens que les chrŽtiens de Carthage. Tout naturellement il put donc se lier avec tout ce que Carthage comptait dÕesprits de valeur. Cependant, cette rŽussite humaine ne comblait pas les aspirations de son ‰me Žprise dÕabsolu, qui demeurait, elle, insatisfaite.
Ce ne fut pourtant quÕen 246 quÕil se joignit au Christ, alors quÕil Žtait dŽjˆ rhŽteur cŽlbre. LÕartisan de sa conversion fut le vieux prtre Caecilius, dont le nom est passŽ ˆ la postŽritŽ gr‰ce ˆ son illustre converti. Celui-ci lui mit entre les mains les saintes ƒcritures et la gr‰ce fit le reste. La lutte contre le vieil homme fut cependant ‰pre et dure pour transformer cet homme de bonne mondanitŽ, marchant sur les voies de la cŽlŽbritŽ, en chrŽtien dŽsireux de suivre la voie Žtroite de lՎvangile, qui mne au Royaume des cieux. Il a dÕailleurs racontŽ cette partie de son stade en sa lettre ˆ DonatusŹ: ĒJÕerrais, en aveugle, dans les tŽnbres de la nuit, ballottŽ au hasard sur la mer agitŽe du monde, je flottais ˆ la dŽrive, ignorant de ma vie, Žtranger ˆ la vŽritŽ et ˆ la lumire. ƒtant donnŽ mes mĻurs dÕalors, je croyais difficile et malaisŽ ce que me promettait pour mon salut la BontŽ divine. Comment un homme pouvait-il rena”tre pour une vie nouvelle par le baptme de lÕeau du salut, tre rŽgŽnŽrŽ, dŽpouiller ce quÕil avait ŽtŽ et, sans changer de corps, changer dՉme et de vieŹ?Č (cf. Ė Donatus, 3-4).
Et cette lutte lui permit de vivre rŽellement comme celui qui par le baptme Ēa revtu le ChristČ. Cette conversion qui fit grand bruit ˆ Carthage nÕempcha pas le changement de vie de Cyprien dՐtre radical, dans la pure ligne de sa vie o il nÕavait jamais rien fait ˆ moitiŽ.
CÕest ainsi quÕil renona aux lettres profanes, se mit ˆ vivre dans la continence et ˆ se consacrer ˆ deux lecturesŹ: la sainte ƒcriture et lÕĻuvre dŽjˆ Žcrite de son contemporain Tertullien, qui eut sur lui une grande influence. Il sÕinterdit ds lors jusquՈ la lecture des auteurs pa•ens. De fait, on nÕen relve aucune citation dans ses Žcrits postŽrieurs. Selon les conseils de perfection du Seigneur, il fit don de la plus grande partie de ses biens aux pauvres, avant mme de recevoir le baptme.
Le nouveau baptisŽ se retira mme dans la solitude pour se livrer ˆ la prire et ˆ lÕascse. Il continua aussi ˆ sÕinstruire ˆ la lecture des grands Žcrivains ecclŽsiastiques, tout spŽcialement avec les Ļuvres de Tertullien. Saint JŽr™me nous apprend quÕil lÕappelaitŹ: Ēle ma”treČ. Leur caractre Žtait cependant dissemblableŹ: autant Tertullien pouvait tre emportŽ et violent dans son zle, autant Cyprien restait ma”tre de lui et patient. SÕil considŽra comme son ma”tre le talentueux Tertullien, il ne le suivit pas lors de sa dŽviation vers lÕhŽrŽsie montaniste.
CÕest sans doute pendant la premire partie de sa vie chrŽtienne quÕil faut placer son ŽcritŹĖ Donatus. On y sent le dŽsir du rŽcent converti, soucieux de rendre gr‰ce ˆ Dieu pour la transformation que produisit en lui le baptme.
Cette vie authentiquement chrŽtienne lui valut dՐtre choisi pour le sacerdoce par le clergŽ et le peuple chrŽtiens de Carthage. CÕest ainsi quÕil fut ordonnŽ prtre en lÕan 248. Son zle Žtait tellement grand quÕil fut Žlu Žvque de la ville de Carthage Ēpar le Jugement de Dieu et le suffrage du peupleČ comme lՎcrivit son biographe. Il succŽda au prŽcŽdent Žvque nommŽ lui aussi Donatus, malgrŽ lÕopposition de cinq prtres qui le trouvaient encore nŽophyte. Tout disposait cet Žlu de la synergie divine au gouvernement. Chez lui la clairvoyance et le discernement sÕallient ˆ la modŽration, comme la douceur ˆ la fermetŽ. Cet Žvque possŽdait donc les qualitŽs dÕun conducteur de troupeau. Tout aussit™t, il se mit ˆ le conduire et ˆ le rŽformer selon les impŽratifs ŽvangŽliques, se consacrant au relvement de la discipline et ˆ la rŽforme des mĻurs. CÕest probablement ˆ cette Žpoque quÕil Žcrivit son ouvrage Ė Demetrianus, sÕadressant au pa•en vicieux et malfaisant qui portait ce nom et ne cessait de calomnier les chrŽtiens et de fatiguer lՎvque lui-mme par dÕinsolentes visites. Le jour vint o Cyprien jugea bon de le rŽfuter en stigmatisant ses dŽfauts publics et ses calomnies. Il fit alors remarquer que Demetrianus accusait ˆ tort les chrŽtiens dՐtre les flŽaux qui dŽsolaient le monde et lÕAfrique.
Son Žpiscopat fut court selon lÕaune du temps. Neuf ans seulement. Cyprien avait ŽtŽ choisi pour cette Žpoque. En lui se vŽrifie cette parole scripturaireŹ: ĒLe juste, mme sÕil meurt avant lՉge, trouvera le repos É Devenu parfait en peu de temps, il a fourni une longue carrireČ, qui dŽcrit bien ce que fut lÕadministration (au sens de lՎvangile) Žpiscopale de saint Cyprien.
La premire partie de son Žpiscopat fut courte. Ds 250, la cruelle persŽcution de Dce vint radicalement modifier sa t‰che pastorale. Les pa•ens de Carthage nÕavaient pas oubliŽ la conversion de lÕancien et cŽlbre rhŽteur. Ils lui en gardaient une sourde rancune et voulaient le faire livrer aux lions. Mais lÕheure nՎtait pas encore venue pour Cyprien de donner ˆ son troupeau lÕexemple du tŽmoignage sanglant. Dieu lui rŽservait une autre heure pour cela et, comme nous le savons, Il aime que le bien se fasse au moment quÕIl a dŽsignŽ et ne reoit pas ceux qui sÕexposent audacieusement et tŽmŽrairement dÕeux-mmes ˆ la persŽcution.
Cette Žpreuve trouva les chrŽtiens de Carthage dans des conditions encore fragiles. Ils manquaient de cette force spirituelle que leur Žvque nÕavait pu encore leur insuffler compltement. Humainement, beaucoup de ces nouveaux chrŽtiens Žtaient des riches commerants et des fonctionnaires, ayant, comme on le dit aujourdÕhui, Ēbeaucoup ˆ perdreČ. La persŽcution ne put que paniquer ces chrŽtiens et ces pasteurs affadis. On en vit se prŽcipiter au Capitole pour y sacrifier aux idoles, sans mme y avoir ŽtŽ appelŽs. On y vit des notables, des esclaves, et mme des prtres et des Žvques. DÕautres, se croyant plus malins, signaient des billets attestant quÕils avaient sacrifiŽ, sans pour autant lÕavoir fait, pour se mettre ˆ lÕabri.
Pour Žviter dÕattirer sur son peuple, par sa prŽsence, une violence encore plus grande des persŽcuteurs, Cyprien dut se retirer aux environs de Carthage. Il peut continuer de correspondre avec son troupeau ŽprouvŽ et lÕencourager. Une vingtaine de ses lettres se rapportent aux quatorze mois de cette Žpoque. Cette absence provoqua naturellement des commentaires malveillants tant ˆ Carthage quՈ Rome. Certaines lettres de saint Cyprien justifient son attitude.
Plusieurs confesseurs souffrirent la mort pour la foi. Parmi eux, se trouvait le confesseur Mappalicus. Aussi, dans sa huitime lettre, lՎvque de Carthage sՎcriaŹ: ĒHeureuse est notre ƒglise, honorŽe de la divine MisŽricorde, illustrŽe par le sang glorieux des martyrs. Autrefois elle Žtait blanche par les Ļuvres de ses enfants; aujourdÕhui, elle est devenue rouge du sang des martyrs; les lys et les roses sÕentrelacent dans sa couronneČ.
Avant mme le retour de Cyprien ˆ Carthage, se posa le problme relatif ˆ ceux qui avaient faibli pendant la persŽcution, et de grandes discussions commencrent ˆ leur sujet. Il fallait rŽgler bien des cas dŽlicats, beaucoup de chrŽtiens ayant apostasiŽ pendant la persŽcution. Quels quÕaient ŽtŽ la grandeur de leur faute et leur degrŽ de responsabilitŽ, certains cherchaient ˆ rentrer dans lՃglise sans se soumettre ˆ la pŽnitence exigŽe. DÕautres sÕassuraient de billets de rŽconciliation au rabais. Quelques prtres de Carthage les avaient admis ˆ la communion avec trop de prŽcipitation et avant que lՎvque ne se fžt prononcŽ sur la conduite ˆ tenir ˆ leur Žgard.
ModŽrŽ dans la forme, Cyprien se montra intransigeant sur le fond, montrant mme une certaine rigueur. Il ne poussa pas cependant le rigorisme au-delˆ des bornes; il ne mŽprisait pas les faibles et, pour dŽsigner ces apostats, il se servit du titre adouci deŹlapsi, cÕest-ˆ-dire les tombŽs. Mais il voulait que lÕon respect‰t les lois de lՃglise sur la pŽnitence et les droits de lՎpiscopat. Il sÕexprime sur ce dernier point avec dÕautant plus dՎnergie quÕil Žtait ˆ lÕabri de tout soupon dÕavoir abusŽ de son autoritŽ, ŽcrivantŹ: ĒJe pourrais dissimuler, comme je lÕai dŽjˆ fait, le mŽpris de notre Žpiscopat; mais cela est impossible lorsque plusieurs dÕentre vous trompent notre communautŽ fraternelle et nuisent aux tombŽs sous prŽtexte de veiller sur leur salutČ.
Tandis que des prtres se montraient trop faibles vis-ˆ-vis des tombŽs, dÕautres se montraient trop rigoureux. Ils Žcrivirent ˆ Rome pour accuser leur Žvque Cyprien de faiblesse et de l‰chetŽ. Mais Cyprien sut dŽjouer de telles embžches, et mme les Romains, au final, se h‰trent dՎcrire ˆ Cyprien avec les mŽnagements et le respect quÕil mŽritait.
Comment avait agi saint CyprienŹ? En suivant lÕinspiration de lÕEsprit saint, qui lui montra la voie royale de la vŽritŽ qui se tient entre deux extrmes. Il repoussa donc la fausse indulgence de certains confesseurs qui rŽclamaient la rŽconciliation immŽdiate des tombŽs, mais il ne voulut point leur enlever tout courage et toute espŽrance de relvement. Soucieux de leur administrer le mŽdicament qui leur convient et qui sauve, il dŽcida que les tombŽs seraient soumis ˆ une longue et sŽvre pŽnitence selon la gravitŽ de leur faute. Cette pŽnitence Žtait ˆ vie pour ceux qui avaient sacrifiŽ sans contrainte. Cependant, dans le cas dÕune nouvelle persŽcution, ces derniers pouvaient tre rŽintŽgrŽs dans lՃglise par lÕeucharistie, afin dՐtre fortifiŽs pour les nouveaux combats. Il excommunia les schismatiques qui, refusant cette dŽcision, se grouprent autour du la•c Felicissimus. Les cinq prtres, qui sՎtaient jadis opposŽs ˆ lÕordination Žpiscopale de Cyprien, rejoignirent ces partisans et constiturent lÕun dÕeux, Fortunatus, comme ĒŽvqueČ de Carthage. Les autres opposants au saint Žvque, qui refusaient toute rŽconciliation des tombŽs, se placrent sous la direction du montaniste Maximus, qui se prŽtendit, lui aussi, ĒŽvqueČ de Carthage.
cyprien
Ce schisme fut Žteint par lÕeffrayante peste qui ravagea lÕempire et la ville de Carthage en 253-254. Ce fut lÕoccasion, pour saint Cyprien, de relever le courage des habitants de Carthage, terrorisŽs par cette horrible catastrophe. Ė leur intention, il rŽdigea alors son traitŽ De la mortalitŽ qui, comme toutes ses autres Ļuvres, contiennent les conseils les plus sages parce quÕils sont empreints dÕune modŽration qui nÕest pas faiblesse.
La paix revenue, trois conciles se rŽunirent ˆ Carthage en 255-256, pour rŽgler tous les problmes internes de lՃglise.
Dans lÕun dÕeux, saint Cyprien qui le prŽsidait y lut un discours qui devint son traitŽ De lapsis (Des TombŽs). On trouve, dans cet ouvrage, les rgles adoptŽes par le Concile de Carthage. En effet, cette assemblŽe Žpiscopale adopta des canons qui furent acceptŽs par lՃglise universelle et qui correspondaient aux dŽcisions dŽjˆ dŽcrites de saint Cyprien.
Nous allons voir maintenant comment, pendant cette pŽriode troublŽe, saint Cyprien fut le hŽraut de lÕunitŽ de lՃglise. Le prestige du saint Žvque de Carthage allait croissant avec les annŽes, tant les ƒglises locales le voyaient dŽfendre tant lÕunitŽ de lՃglise que celle de lՎpiscopat. Il sÕautorisait aussi de sa propre ƒglise de Carthage et en remarquait la profonde correspondance avec celle de toute lÕuniversalitŽ catholique.
Saint Cyprien exposait clairement comment la chaire de Pierre ˆ Rome, Ēƒglise principale dont lÕunitŽ sacerdotale est sortieČ, faisait de cet ap™tre la simple figure de lÕunitŽ apostolique et pas autre chose. Dans son traitŽ De lÕUnitŽ de lՃglise, il Žcrivait : ĒPour manifester lÕunitŽ, le Seigneur a voulu que cette unitŽ tire son origine dÕun seul. Certainement, les autres ap™tres Žtaient ce que fut saint Pierre, ils avaient tous le mme honneur et la mme puissance que luiČ. Tout le brillant traitŽ de saint Cyprien se ramne ˆ cette idŽe force, et ce nÕest quÕen interprŽtant des phrases isolŽes du saint que lÕon a pu tenter de lui faire dire autre chose, voire dÕinterpoler ses textes, sans habiletŽ dÕailleurs, puisque cela fut reconnu par bien des savants postŽrieurs.
Tout cela se traduisait par des actes, puisquÕil arriva que les ƒglises locales fassent appel ˆ lui, faute dÕun traitement adŽquat de leurs problmes par lՎvque de Rome. LՃglise de Carthage, en la personne de son Žvque, sÕopposait donc aux opinions personnelles de ce sige lorsquÕelles ne correspondaient pas ˆ celles de lՃglise orthodoxe catholique. LÕOccident avait alors les yeux fixŽs sur Carthage.
LorsquÕune dispute sՎleva au sujet de la validitŽ du baptme des hŽrŽtiques, Cyprien se rŽfŽra ˆ la tradition de lՃglise de Carthage, tout comme aux canons apostoliques. Celle de Carthage ne reconnaissait pas le baptme des hŽrŽtiques, au moins depuis Agrippinus, lՎvque du lieu de la seconde moitiŽ du 2e sicle, et, ˆ nÕen pas douter, Agrippinus ne pouvait que se rŽfŽrer ˆ une tradition locale plus ancienne. Tertullien, prtre de Carthage, nÕenseignait pas une autre doctrine. Les conciles dÕAsie mineure dÕIconium et de Synnades enseignaient la mme doctrine. Cette dernire nՎtait rien dÕautre que lՎcho des 45e et 46e canons apostoliques o le baptme des hŽrŽtiques est formellement rejetŽ. Il lÕest Žgalement dans le c. 15, livre 6 des Constitutions apostoliques. Dans le 46e canon apostolique, nous lisons : ĒNous ordonnons quÕun Žvque ou un prtre qui aurait acceptŽ le baptme ou le sacrifice des hŽrŽtiques soit destituŽ car, quel accord entre Christ et BŽlial, ou partage entre le fidle et lÕinfidleČ.
Cyprien avait pourtant abordŽ les questions dans leur intŽgritŽ. Ainsi, lorsquÕon lui objectait que lÕon avait admis quelquefois des hŽrŽtiques sans les baptiser, il rŽpondait sainement. Pour ceux-lˆ Š disait-il Š, Dieu, dans sa Puissance et sa MisŽricorde, a pu les sauver et ne pas les priver des gr‰ces accordŽes aux enfants de lՎglise, mais ce nÕest pas une raison, parce que lÕon sÕest trompŽ quelquefois, de se tromper toujours. ƒtienne de Rome, qui soutenait lÕopinion contraire ˆ celle de Cyprien, invoquait la pratique des hŽrŽtiques qui ne baptisaient pas ceux qui venaient ˆ eux. Cyprien qui trouvait curieux de se rŽfŽrer ˆ la fausse tradition des hŽrŽtiques ne pouvait que rŽpondre : ĒVient-elle de lÕAutoritŽ du Seigneur et de lՎvangile ou des ordonnances et des lettres des ap™tres ?É Elle est vraiment belle et lŽgitime, cette tradition que nous enseigne notre frre ƒtienne. Il nous la fait apprŽcier en disant quÕelle est une imitation de celle des hŽrŽtiques. Ainsi, lՃglise de Dieu, lՃpouse du Christ, doit imiter les hŽrŽtiques dans lÕadministration des sacrements; la lumire doit emprunter aux tŽnbres; les chrŽtiens doivent faire ce que font les antichristsČ (Žp”tre 41 ˆ Juba•anus).
LՎpoque 255-256 compta trois conciles ˆ Carthage, o ces problmes furent solutionnŽs.
Devant lÕunivers entier, saint Cyprien avait tŽmoignŽ de la rgle catholique qui sÕappliqua tant au baptme quՈ toutes les questions. Aux Žvques de Numidie, il rŽpondait ˆ propos du problme citŽ : ĒTrs chers frres, lorsque nous nous sommes rŽunis en concile, nous avons lu votre lettre o vous nous demandez si lÕon doit baptiser les hŽrŽtiques et les schismatiques lorsquÕils viennent ˆ lՃglise catholique qui est une et vŽritable. Quoique vous teniez sur ce point ˆ la rgle catholique comme nous, vous avez voulu nous consulter, et nous rŽpondons, non point en exprimant notre opinion ou une doctrine nouvelle, mais celle qui a ŽtŽ enseignŽe par nos prŽdŽcesseurs comme par les v™tres, et qui consiste ˆ affirmer que personne ne peut tre baptisŽ en dehors de lՃglise, parce quÕil nÕy a quÕun baptme, lequel se trouve dans la sainte ƒglise. Le prtre doit purifier et sanctifier lÕeau avant quÕelle puisse laver les pŽchŽs; or lÕeau peut-elle tre purifiŽe par celui qui est impur et qui nÕa pas lÕEsprit saintŹ?Č.
Pendant tout son Žpiscopat, Cyprien sÕest signalŽ par beaucoup de lettres et de courts traitŽs qui composent un monument capital de la littŽrature patristique latine et surtout de la doctrine de lՃglise orthodoxe. La beautŽ et lՎlŽgance de son style le placent aussi parmi les plus grands Žcrivains du troisime sicle. Outre ses traitŽs majeurs sur De Lapsis/ Les TombŽs et De lÕUnitŽ de lՃglise, on compte des ouvrages tels que De la jalousie et de lÕenvie, De la conduite des vierges, De la prire dominicale, De la vanitŽ des idoles, Sur les avantages de la pudeur, Des bonnes Ļuvres et de lÕaum™ne et dÕautres traitŽs pastoraux de la meilleure facture. Mais lÕheure choisie pour lÕultime tŽmoignage approchait. Dieu, qui nÕavait pas voulu que Cyprien souffr”t le martyre au dŽbut de son Žpiscopat, lui en signalait lÕheure approchante. En 256, alors que les querelles ecclŽsiologiques nՎtaient point encore totalement rŽsolues, lÕempereur ValŽrien dŽclencha une nouvelle persŽcution. ƒtienne de Rome et Cyprien de Carthage furent alors unis par un mme courage en confessant la foi. ƒtienne fut mis ˆ mort en 257. Cyprien fut dÕabord arrtŽ et exilŽ ˆ Curubis (au sud-est de Carthage) le 30 aožt 257. De lˆ, il consacra le peu de temps quÕil lui restait ˆ vivre aux soins de son troupeau comme de son ƒglise. Il distribua aux pauvres tout ce quÕil possŽdait encore. Il organisa aussi des secours pour tous les chrŽtiens emprisonnŽs aux travaux forcŽs dans les terribles mines de Sigus. Recevant en songe que son heure allait sonner de revtir la tunique de pourpre du martyre, il voulut confesser le Christ ˆ Carthage, sige de lՃglise o il avait ŽtŽ appelŽ par la VolontŽ de Dieu et le suffrage chrŽtien du troupeau. Le proconsul Maximus Gabrius fit arrter le saint et le fit amener ˆ Sexti, village tout proche de Carthage. Il comparut avec dignitŽ devant ses persŽcuteurs et, aux accusations portŽes contre lui, il rŽpondit : ĒFais ce que tu as ˆ faireČ. Le proconsul pronona alors la sentence : ĒThascius Cyprianus aura la tte tranchŽe. Ainsi nous lÕordonnonsČ. Le saint et vaillant Žvque rŽpondit : ĒDieu soit louŽŹ!Č.
Depuis lÕarrestation de leur Žvque, les fidles Žtaient accourus lˆ o il Žtait emprisonnŽ. Quand il marcha vers son supplice, tous lÕaccompagnaient disant : ĒAllons, mourons avec luiČ. ArrivŽ au lieu dÕexŽcution, Cyprien fit donner vingt-cinq Žcus dÕor ˆ lÕexŽcuteur et se dŽpouilla de sa tunique lui-mme. Le prtre Julianus lui banda les yeux. Il reut, sans trembler, le coup de la mort qui lui ouvrait les cieux. Les fidles restrent prs du lieu de son martyre, puis, le soir venu, ils lÕemportrent dans un champ appartenant ˆ Macrobius Cabdidus sur le chemin de Mappalia. Il y fut b‰ti deux Žglises dŽdiŽes ˆ notre saint. Elles existaient encore au temps du bienheureux Augustin.

Athanase Fradeaud

Voici son martyr.

Bibliographie :
Sources chrŽtiennes
Ė Donat et La Vertu de Patience, vol. unique N” 291 28 Ū
La Bienfaisance des aum™nes N” 440 26 Ū

sentence

MOSCOU, 27 mars - RIA Novosti. Les sŽnateurs russes ont critiquŽ mercredi la fte "vulgaire" et "consumŽriste" de la Saint-Valentin en proposant de la remplacer par une fte "russe" consacrŽe ˆ deux saints de l'Eglise orthodoxe.
Les membres du comitŽ pour la politique sociale du Conseil de la FŽdŽration (chambre haute du parlement russe) ont unanimement approuvŽ mercredi l'idŽe d'instaurer le 8 juillet une fte des Saints Pierre et FŽbronie, patrons de la famille et de l'amour conjugal chez les chrŽtiens orthodoxes russes.
A Mourom, ville natale des Saints Pierre et FŽbronie ˆ l'est de Moscou, leur fte est dŽjˆ cŽlŽbrŽe depuis quelques annŽes: au lieu de cadeaux de Saint-Valentin, ce sont des cadeaux de Sainte-FŽbronie qui y sont offerts.
"Nous avons tous besoin d'une fte cŽlŽbrant l'amour conjugal et le bonheur familial qui soit fondŽe sur les traditions culturelles nationales. Gr‰ce ˆ cette fte, nous donnerons aux jeunes l'exemple de la morale, de la puretŽ et de la chaleur humaine", a dŽclarŽ la prŽsidente du comitŽ pour la politique sociale, Valentina Petrenko.
Pierre et FŽbronie vivaient ˆ Mourom ˆ la charnire des XIIe et XIIIe sicles. Issu d'une famille princire, Pierre a voulu Žpouser une paysanne, FŽbronie, mais les boyards Žtaient contre leur union. Le jeune homme a prŽfŽrŽ quitter le tr™ne de Mourom pour s'unir ˆ sa bien-aimŽe. Aprs une vie conjugale longue et heureuse, tous deux sont morts le mme jour ˆ moins d'une heure d'intervalle, en 1228. L'Eglise orthodoxe russe considre cette famille comme modle de la fidŽlitŽ conjugale.
Le patriarcat de Moscou a souvent critiquŽ la fte "occidentale" de la Saint-Valentin, cŽlŽbrŽe le 14 fŽvrier, estimant qu'elle banalisait l'idŽe de l'amour pour en faire un "produit de consommation".
http://fr.rian.ru/society/20080327/102370144.html

 

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poutine

poutine

Lettre ouverte ˆ un frre en Christ

Cher frre en Christ notre Sauveur,
J'aimerais te dire quelque chose qui va peut-tre t'aider ˆ faire ton travail comme le veut ton pre spirituel.
Je sais que ce n'est pas toujours facile, car moi-mme aprs tant d'annŽes d'orthodoxie, je ne commence que maintenant ˆ en entrevoir vaguement la possibilitŽ et le bienfait Ń je veux dire : de l'obŽissance.
L'obŽissance veut dire tout simplement d'abandonner nos bonnes idŽes, nos faons de faire "parfaites", "raisonnables", non pas parce qu'elles sont mauvaises en elles-mmes, mais parce que nous nous y attachons Š sans mme nous en apercevoir parfois Š comme ˆ quelque chose de bien Š selon notre entendement charnel, Žvidemment.
Or, comme je l'avais appris des sĻurs Š ˆ l'Žpoque o je me croyais pourtant obŽissante ! Š "l'obŽissance n'est pas Žvidente", "l'obŽissance n'est pas logique" (je les cite texto).
Je t'ai racontŽ, je crois, mon histoire personnelle au sujet d'une erreur monumentale que je devais laisser un jour, malgrŽ mon meilleur entendement, et en pleurant de rage ˆ cause du complet ridicule de la faute, dans un texte que pre Cassien m'avait demandŽ, de plus, de corriger !
On ne pouvait me demander un plus grand sacrifice, ˆ moi qui depuis mon enfance Žtais forte en orthographe et fire de l'tre, et qui, de plus, pensais tre utile ˆ la cause de l'orthodoxie en corrigeant le bulletin de pre Cassien !
Et je me rappelle lui avoir demandŽ ce jour-lˆ si lui, en tant que parfait cuisinier, mettrait, par obŽissance, des sardines ˆ l'huile dans des Žclairs au lieu d'une crme au chocolat, au cas o l'archevque lui dirait de le faire.
Et il m'a rŽpondu simplement : "Oui".
ƒvidemment, je ne voulais pas le croire. Rien ne me paraissait plus insensŽ que d'obŽir dans un cas aussi flagrant de btise, voire de folie.
J'argumentais longuement et dŽsespŽrŽment avec pre Cassien, sans comprendre qu'en l'occurrence, l'erreur dans le texte n'avait aucune importance pour lui; ce qui importait Žtait mon apprentissage de l'obŽissance.
Quand j'y pense maintenant, je compare cela (toutes proportions gardŽes, bien sžr !) ˆ la folie en Christ. Nous devons devenir comme les fols en Christ pour apprendre l'obŽissance ou plut™t : si nous avions l'humilitŽ nŽcessaire ˆ l'obŽissance, de telles folies nous deviendraient d'une grande facilitŽ.
C'est aussi la folie de la croix : tu es ŽprouvŽ maintenant dans ton obŽissance. Tu dois sacrifier une partie de tes bonnes idŽes, ta belle faon de faire, tes compŽtences etc. qui te paraissent de si "bonnes" choses ˆ garder.
Mais tu ne sais pas encore que ce que tu sacrifies en obŽissant ainsi n'est que les bandelettes recouvrant le cadavre du vieil homme en toi, qui, comme Lazare, est dans le tombeau depuis quatre jours et sent dŽjˆ.
Tu ne vois pas encore que le Christ, qui veut nous ressusciter, faire de nous des hommes nouveaux, vivant de sa Vie ˆ Lui et pas de nos passions, commence par faire enlever ces bandelettes, dont nous nous Žtions liŽs d'ailleurs nous-mmes et auxquelles nous tenons par surcro”t, en disant ˆ nos pres spirituels : "DŽliez-le et laissez-le aller".
Crois-moi, ces bandelettes une fois enlevŽes, nous serons capables de nous abandonner enfin au Christ en toute libertŽ.
Cette libertŽ est d'un trs grand prix. Elle efface nos soucis inutiles, nos angoisses, nos attachements qui nous rendent malades, alors que si peu de chose nous est demandŽ pour acquŽrir un tel trŽsor.
Et nos facultŽs, nos talents n'en seront pas anŽantis pour autant, bien au contraire : eux aussi brilleront d'une vie nouvelle et serviront plus facilement encore la cause de l'orthodoxie.
Je sais que cela fait un peu (ou mme parfois trs, trs) mal que de nous sŽparer de ce que nous aimons, de ce que nous croyons anodin, voire bon et louable, mais qu'est-ce ˆ c™tŽ de ce que nous recevons en Žchange ?
Pense ˆ notre Tarso... et sois dŽterminŽ ˆ tre un tout petit peu fou pour l'amour du Christ. Tu verras que cela vaut la peine.

Bien affectueusement en Christ, K.

P. S. Je pense aussi ˆ un moine du monastre de la Transfiguration de Kouvara, que nous connaissions en France quand il Žtait encore dans le monde.
C'Žtait un chef d'entreprise ˆ l'air assez mondain, un homme trs soigneux, toujours trs bien mis, presque maniaque pour l'Žtat parfait et la propretŽ de ses vtements.
Quand nous le rev”mes quelques annŽes plus tard sur la terrasse du monastre, il vint nous accueillir vtu d'un habit monastique plut™t usŽ, dŽlavŽ, et comme le serveur d'un restaurant un peu minable, nous demanda ce que nous voulions comme rafra”chissements. Ayant "pris les commandes", il retourna dans la cuisine lorsque nous v”mes, au dos de son habit, une Žnorme pice de tissu noir rapportŽe.
Je me disais que c'Žtait sžrement une croix qu'il a acceptŽ de porter ainsi par obŽissance, lui qui Žtait si maniaque autrefois de l'Žtat de ses vtements.
Tu sais mieux que quiconque que les moines sont des modles pour les la•cs.