L'ICÔNE DE LA MÈRE DE DIEU DE TOLGA


(1314)

Fêtée le 8 août

iconeEn 6822 après la création du monde (c'est-à-dire en 1314 ap. J.C.), sous le métropolite de Kiev et de toute la Russie, Pierre (1308-1325 à Vladimir et 1325-1326 à Moscou; fêté le 21 décembre), du temps du saint pieux prince de laroslavl', David Féodorovitch, évêque de Rostov et de laroslavi', Prokhore– connu par certains sous le nom de moine du grand schème Triphon – parcourant son éparchie, se rendit dans le monastère de Saint Cyrille du Lac Blanc; il poursuivit de là sa route, par les voies fluviales, en barque, – en empruntant d'abord un affluent de la Volga, la Cheksna, puis la Volga elle-même jusqu'à laroslavl'. Quand les voyageurs se trouvèrent à environ six kilomètres de Iaroslavl', le soir commença à tomber; ils accostèrent alors pour passer la nuit dans la montagne qui dominait cette même rive de la Volga où se trouve la ville de Iaroslavl'. Ayant gravi la montagne, ils dressèrent la tente. Le camp se trouvait à cet endroit où l'affluent de la Volga, la Tolga, se jette dans la Volga (c'est-à-dire au confluent de la Volga et de la Tolga); tout ce côté était recouvert dune grande forêt. L'évêque se réveilla à minuit et remarqua une lumière il se leva aussitôt et regarda hors de la tente; tous ses compagnons de route dormaient : les prêtres, les clercs, les serviteurs et même ceux qui étaient chargés de monter la garde; une grande lumière illuminait tout l'endroit. S'étant tourné vers la rivière, l'évêque remarqua sur la rive opposée, extraordinairement éclairée, une colonne qui brillait d'une manière inhabituelle (l'acathiste dit "une colonne de feu") il vit auprès d'elle un pont qui arrivait jusqu'à lui au-dessus de la Volga; cette apparition, qui appartenait au mystère, plongea l'évêque dans un émerveillement mêlé de crainte. "O, Maître, Seigneur Jésus grandes et insondables sont les profondeurs de ta miséricorde !", dit en priant l'évêque et, ayant saisi son bâton épiscopal, il sortit de la tente et, comme si de rien n'était, il se dirigea vers le fleuve et monta sur le pont qu'il voyait : en vérité, l'évêque marchait sur l'eau comme sur un arbre, car il n'y avait pas de pont à cet endroit de la rivière, mais, par la volonté de Dieu, l'eau, qui s'était solidifiée, lui paraissait être un pont sous ses pieds. Ayant atteint la rive opposée, l'évêque vit une icône de la très sainte Mère de Dieu, qui tenait dans les bras le petit Enfant, notre Seigneur Jésus Christ; l'icône ne se trouvait pas dans un arbre, mais se tenait miraculeusement dans les airs, à cinq coudées de haut, de sorte qu'on ne pouvait pas l'atteindre du sol avec les mains. L'évêque, après s'être prosterné devant l'icône de la Mère de Dieu, éleva vers la Souveraine du monde des prières ferventes, unies à des larmes; après avoir longuement prié, il revint, en oubliant son bâton près de la colonne éclatante. Reprenant le même pont, pour franchir à nouveau le fleuve, l'évêque retourna dans sa tente. Tout le camp dormait; le voyage de l'évêque était passé inaperçu. L'évêque dormit tranquillement jusqu'au matin. Tous se levèrent avec le jour et on chanta comme tous les jours les matines. Quand ce fut l'heure de se rendre aux barques, les serviteurs de l'évêque commencèrent à chercher le bâton du hiérarque, mais toutes les recherches demeurèrent vaines. Ils dirent alors à l'évêque qu'on ne savait pas où se trouvait sa crosse, bien que la veille au soir elle ait été déposée dans la tente. L'évêque se souvint qu'il avait oublié son bâton de l'autre côté de la rivière; il comprit que le Seigneur désirait que l'apparition miraculeuse mentionnée soit connue de tous; les larmes l'ayant rendu incapable de parler, il montra d'abord du doigt la Volga; puis, parlant avec difficulté, à cause de l'émotion, le hiérarque raconta dans l'ordre, comment il avait atteint la rive opposée de la Volga et ce qu'il y avait vu; puis il donna l'ordre à ses serviteurs d'aller dans un endroit qu'il leur indiqua et qui se trouvait de l'autre côté de la Volga et d'y prendre son bâton pastoral. Les serviteurs s'y rendirent et au cours de leurs recherches ils découvrirent, dans la forêt, l'icône de la très pure Mère de Dieu, mais elle n'était déjà plus dans les airs elle se trouvait sur le sol entre des arbres; la crosse de l'évêque était auprès de l'icône. Ayant vénéré la sainte icône et pris le bâton pastoral, ils revinrent vers le hiérarque et lui racontèrent qu'ils avaient vu l'icône de la très sainte Mère de Dieu. L'évêque reporta alors à plus tard le voyage vers laroslavl', et traversa la Volga avec ses gens; lorsqu'il vit l'icône de la très sainte Mère de Dieu, il reconnut aussitôt celle qui se tenait dans les airs la nuit précédente, entourée d'une illumination qui avait l'aspect d'une colonne. Dans la joie et l'allégresse spirituelles, le hiérarque se mit à genoux; il éleva une prière pleine de ferveur à la très sainte Mère de Dieu et embrassa pieusement sa sainte icône. Tous ceux qui l'accompagnaient ne purent s'empêcher de pleurer de joie et, après avoir vénéré la sainte icône, ils prièrent avec zèle la Mère de Dieu.
Cette apparition miraculeuse de l'icône de la très sainte Mère de Dieu eut lieu le 8 août, jour où on célébrait la mémoire de saint Emilien, l'évêque de Kizik (Kizik se trouve sur la presqu'île de la Propontide, dans la mer de Marmara. Saint Emilien reçut la couronne de confesseur du Christ sous Léon l'Arménien qui était iconoclaste 813-820).
Le saint hiérarque Prokhore, sans perdre un instant, commença à nettoyer de ses propres mains l'endroit où la sainte icône était apparue; il abattit les arbres de la forêt et les prépara pour construire une église; ceux qui l'accompagnaient suivirent avec zèle son exemple; ils mirent en, chantier une petite église. La renommée de l'apparition miraculeuse et des événements qui lui étaient liés atteignit laroslavl' une foule importante se hâta vers le lieu où se trouvait l'évêque; parmi ceux qui vinrent, il y avait des hommes d'église et des gens du monde, des vieux et des jeunes, des riches et des pauvres, des gens en bonne santé et des malades. En voyant l'icône de la très sainte Mère de Dieu, ils furent emplis d'une joie indicible et prièrent avec zèle chacun s'efforça d'aider ceux qui bâtissaient l'église – l'un abattit un arbre, un autre travailla avec ceux qui construisaient le bâtiment etc … Quand ce fut terminé, l'évêque, ce même jour, vers le soir, consacra l'église et y déposa l'icône miraculeuse; puis, il célébra un office dans la nouvelle église; il la dédia à l'Entrée au Temple de la très sainte Mère de Dieu et institua de fêter l'apparition de son icône le 8 août.
Tous les infirmes qui assistèrent à cette célébration reçurent, par la grâce de la très sainte Mère de Dieu, la guérison. L'évêque ordonna alors qu'il y ait un monastère auprès de l'église; il désigna aussitôt l'higoumène de ce monastère. On construisit à l'endroit de l'apparition miraculeuse de l'icône, un bâtiment, d'abord assez petit, puis comme sa célébrité ne cessait de grandir, on agrandit le monastère. Celui-ci, qui est gardé par Dieu, existe aujourd'hui; il est connu sous le nom de "De Tolga", à cause de l'affluent de la Volga, la Tolga, qui se jette à cet endroit dans la Volga.
Une multitude de miracles s'accomplirent à partir du jour de l'apparition de l'icône miraculeuse de la très sainte Mère de Dieu. On ne peut mentionner ici que les plus remarquables d'entre eux. Le 16 septembre 6900 (1392), sous l'higoumène Germain, quand le prêtre fit son "vozglass" (il s'agit de la conclusion à voix haute d'une prière récitée à voix basse par le célébrant) aux matines, avant la neuvième ode du canon : "Magnifions par nos chants la Mère de Dieu et la Mère de la Lumière !" soudain, du myron s'écoula de la main droite de la très sainte Mère de Dieu et l'église s'emplit d'un parfum merveilleux; tous ceux qui étaient présents dans l'église ne purent s'empêcher d'être étonnés et emplis de crainte à la vue de ce miracle, tout en glorifiant Dieu et sa très pure Mère. On célébra, après les matines, un molébène à la très Sainte Mère de Dieu et, quand on arriva à la fin du molébène, au moment où on chante : "Souveraine, accepte la prière de tes serviteurs", du myron s'écoula du pied gauche du petit Enfant très pur que la Mère de Dieu tenait dans ses bras; ainsi deux sources se présentèrent aux yeux des fidèles qui se trouvaient dans l'église la main droite de la très sainte Mère de Dieu et le pied gauche du Christ – d'où s'écoulait miraculeusement du myron, à partir d'une seule icône. Ce merveilleux miracle ne pouvait pas ne pas éveiller de la joie spirituelle chez l'higoumène et les frères : ils
s'agenouillèrent en pleurant devant la très pure Mère de Dieu et enduisirent leur front d'un myron qui était doté d'une grande force curative : ceux qui étaient en mauvaise santé – quelle que fût la maladie dont ils souffraient – recouvraient la santé immédiatement après avoir reçu l'onction du myron.
Quelque temps après cet événement miraculeux, un boyard, qui s'appelait Nikita, fut envoyé par le grand prince de Moscou dans la région du Lac Blanc : quand il arriva avec sa femme et ses serviteurs à Iaroslavl', il monta dans une barque pour poursuivre son voyage par la voie fluviale. Ce boyard avait un fils unique, qui était un enfant – il n'avait pas encore quatre ans; l'enfant tomba malade durant le voyage et mourut. On conduisit alors le petit cadavre jusqu'au monastère de Tolga pour l'y enterrer. Les parents de l'enfant décédé pleurèrent amèrement devant l'icône de la très sainte Mère de Dieu, d'autant plus amèrement que c'était leur unique enfant. Ayant fait la toilette du corps, ils s'occupèrent de préparer la tombe et ce qui était nécessaire à l'enterrement; ces démarches affligeantes s'achevèrent vers dix heures du soir. Lorsqu'après le molébène habituel on commença à chanter les cantiques funèbres, le petit garçon se ranima d'une manière inattendue et poussa un cri; tous furent simultanément effrayés et réjouis; les parents étaient particulièrement heureux. Ils ne savaient pas comment remercier le Seigneur et sa très pure Mère après avoir vu leur enfant vivant et en bonne santé.
Il y eut, une fois, dans le monastère, avec la permission de Dieu, un grand incendie l'église s'embrasa si rapidement que les frères ne réussirent pas à ouvrir les portes de l'église et on ne put rien sortir de l'édifice; tout le bâtiment brûla avec tout ce qui se trouvait à l'intérieur. Tous songèrent avec affliction que l'icône miraculeuse avait subi le même sort. Mais on trouva, après l'incendie, d'une manière inattendue, la sainte icône dans un fourré près du monastère, totalement intacte et entourée d'une luminescence : bien sûr, la sainte icône n'avait pas pu être arrachée à ce grand embrasement par des mains d'hommes, mais par des anges. Les frères reçurent avec joie la sainte icône et se mirent sans tarder à construire une nouvelle église, plus grande et mieux ornée que la précédente. On peut voir, aujourd'hui, la belle église et le monastère. La grâce de la très pure Mère de Dieu et toujours Vierge Marie ne cesse pas d'accomplir des miracles par l'intermédiaire de sa sainte icône, comme s'il s'agissait d'une source, guérissant les malades et chassant des gens les esprits malins.
Ces miracles ont été décrits d'une manière détaillée dans le monastère; nous n'en avons choisi que quelques-uns et nous les avons écourtés. Nous nous prosternons devant l'icône vénérable de la très pure Mère et Vierge Marie, que tous les chrétiens devront toujours vénérer, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen.

Ce texte est extrait du Synaxaire de saint Dimitri de Rostov.


Extrait du livre :
Les fêtes et les icônes de la Mère de Dieu dans l’Église russe