L'iconographie byzantine - je laisse de côté l'iconographie décadente - se distingue par son homogénéité qui n'a rien à voir avec l'uniformisme. Celui qui s'y connaît un peu voit tout de suite l'origine de telle ou telle icône. Chaque pays, même chaque région, chaque génération, chaque école iconographique et chaque iconographe a quelque chose de particulier qui le distingue des autres. Cette particularité ne touche pourtant pas à l'essentiel, au contenu, mais à la forme seule.
C'est comme des pierres dans un édifice qui forment l'ensemble. Je dirais des pierres naturelles, non taillées, dont chacune à sa forme, taille, aspect et beauté propre mais aussi ses limites et défauts même. Rien à voir avec des briques qui sont toutes sorties d'un moule - uniformes et monotones.
Cette diversité dans l'iconographie byzantine ne nuit nullement à l'unité car elle ne porte que sur ce qui est extérieur, secondaire, esthétique et ne touche pas au contenu spirituel.
Chaque peuple, époque et personne apporte ainsi à travers sa mentalité, culture et histoire quelque chose qui lui est propre, quelque chose d'unique. Il n'y a rien de monotone et rien de discordant non plus. Rien de statique dans l'aspect artistique et rien d'instable dans le contenu spirituel. C'est le mouvement stable pour employer une expression des pères.
Cette immuabilité dans le contenu de l'icône n'est rien d'autre que l'éternité présente et cette diversité dans l'expression n'est que la roue du temps qui tourne. C'est le propre de ce qui est terrestre de bouger et le propre du céleste d'être stable. Il y a donc mouvement et stabilité à la fois dans l'icône. Dire que l'iconographie byzantine est figée est tout simplement un signe d'ignorance. Comment, d'ailleurs peut-on dater une icône sans analyse chimique, en préciser le pays d'origine et l'école iconographique ? Précisément à cause de cette mouvance dans l'aspect esthétique et artistique. Une analyse chimique démontre en plus que les procédés, pigments, techniques, etc. sont particuliers à chaque époque et région. La qualité a aussi ses hauts et ses bas dûs à mille facteurs : prospérité économique ou temps de persécution, affaiblissement de la foi ou renouveau, etc.
J'ai dit plus haut que chaque icône a aussi, à peu d'exception près, ses défauts, des défauts bien sûr qui ne concernent pas le contenu spirituel. C'est normal, car l'iconographe n'est pas nécessairement un génie et la peinture d'une icône est liée aux conditions terrestres qui ne sont plus paradisiaques. Mais dès qu'il y a des défauts dans l'essentiel, le contenu, alors l'icône s'égare de la Tradition et tourne à la cacodoxie comme l'iconographie décadente qui n'est qu'une influence hétérodoxe qui pour sa part a perdu cette stabilité dans l'éternité pour devenir terrestre et soumise au temps.
Si donc l'iconographie byzantine perd sa stabilité, elle meurt, et si elle perd son mouvement, elle meurt également. "Que celui qui peut comprendre comprenne," comme dit l'évangile.
hm. Cassien