Avant de parler de la perspective dans l'iconographie, je voudrais dire quelques mots sur les différents systèmes de perspectives dont la peinture profane se sert et se servait aux cours des siècles. Quatre systèmes sont en usages dont voici la description :
- La perspective linéaire.
Découverte au 15e siècle, elle a comme base la perspective perceptive. Pourtant, elle en ignore certaines particularités et se tient plutôt à une conception cérébrale. En partant d'un seul point, elle s'élargie régulièrement à l'infini. Elle donne une illusion d'espace, de profondeur. C'est la perspective de la photographie et du borgne.
- La perspective perceptive.
Elle, au contraire, est propre à l'homme doté de la faculté de ses deux yeux. C'est ainsi qu'on voit en réalité et non selon une idée abstraite. Les lignes sont d'abord parallèles pour ensuite converger avec la perspective linéaire. Elles font une légère courbe.
- La perspective axométrique.
Elle est employée dans les dessins techniques. C'est une perspective qui fait abstraction de l'entourage et représente l'objet en soi. Il n'y a pas de lignes de fuite. Toutes les lignes sont parallèles. Pourtant, on a l'impression que plus les lignes sont loin, plus elles s'agrandissent.
- La perspective inversée.
C'est la perspective linéaire mais à l'envers pour le dire simplement. Le point de départ n'est pas le spectateur, mais il est de l'autre côté et tout s'ouvre vers le spectateur.
Après cette brève description des différentes perspectives, abordons maintenant la perspective dans l'art iconographique. Disons tout de suite, qu'à part la perspective perceptive, toutes les perspectives figurent sur l'icône. Comme je l'ai maintes fois dit, l'iconographie est symbolique et dépasse la nature telle que les yeux de la chair la perçoivent. C'est une perception spirituelle qui a d'autres critères, d'autres lois. L'iconographe se sert donc de la perspective selon son inspiration et ses intentions.
Parfois c'est la perspective linéaire, mais qui ne donne pourtant pas l'illusion de l'espace, car elle est contrebalancée par la perspective inversée ou axométrique. L'icône est toujours présence et non fuite et c'est la perspective inversée qui sait le mieux le dire.
Dans la même optique, le Christ et les saints ne sont jamais représentés de profil, ce qui empêcherait toute communion et inversement, le diable n'est jamais présenté de face car incapable de vraie communion.
Celui qui prie devant l'icône, qui la contemple, est passif et c'est la représentation qui parle, qui s'avance vers lui. Il n'est pas le centre mais le centre est de l'autre côté, en Dieu. De même, il n'y a jamais un seul point de départ dans l'icône, pas plus qu'une seule source de lumière, car Dieu est partout présent; Il ne se limite pas à un lieu précis.