Ce que nous croyons, l'icône l'exprime, le représente (le rend réellement présent) par l'art, c'est-à-dire par les couleurs et les formes, selon saint Basile. C'est une forme d'expression comme le chant ou l'écriture. Sur le plan artistique, elle est toujours plus ou moins parfaite, comme les autres expressions que je viens de mentionner. Mais dans son contenu, elle doit être parfaitement orthodoxe, sinon elle exprimera une croyance erronée, une hérésie. L'icône n'exprime pas seulement la vérité de la foi, mais la rend réellement présente. Dans l'icône se trouve la grâce (autrement dit : les énergies) et la personne représentées. Ce qui distingue cependant l'icône du saint représenté, c'est la nature qui est celle du bois, du métal, des couleurs etc. S'il n'y avait pas de différence de nature, l'icône serait une idole. Du fait qu'elle rend présent même la personne, la place au-dessus de l'écriture, qui contient uniquement la grâce divine, les énergies comme la sagesse, la vérité, etc.
La présence dans l'icône est réelle tout en étant mystérieuse et c'est une présence autre que celle dans la sainte Communion où précisément la nature du pain et du vin est abolie et où ne reste plus que leur aspect, l'apparence, qui contient la nature et la Personne divino-humaines.
C'est à saint Grégoire Palamas que revient le mérite d'avoir su distinguer entre la personne, la nature et les énergies, en traitant de notre communion avec Dieu dans la prière. Cette même théologie avec son vocabulaire peut s'appliquer à d'autres domaines de l'Église, comme l'iconographie.
Si l'icône exprime la foi orthodoxe, cela suppose que l'iconographe possède aussi cette foi, car il ne peut communiquer que ce qu'il a. Il ne suffit pas d'être un peintre habile, de maîtriser la technique, d'avoir des connaissances théoriques, il faut avoir la foi vivante qui nous est donnée dans l'Église lors du baptême, sinon l'icône sera vide de contenu, sans profondeur, pour le dire crûment, une singerie. Cela s'applique également au chantre, au prêtre, au théologien. Ils peuvent parfaitement maîtriser les instruments, mais il leur manquera la vie de la grâce. Par contre, celui qui possède la foi orthodoxe, donc le charisme, même s'il n'est pas un génie, ce qu'il peint, chante ou écrit, est vivant. Celui qui vit la même foi, le saisit, tandis que quelqu'un d'extérieur ne saura juger que d'après ses critères manquant l'essentiel.
L'icône est donc une communion avec Dieu, le monde transfiguré, le paradis céleste. Elle est peinte par et dans l'Église, ce n'est donc que dans l'Église que l'on peut communier parfaitement à son mystère, comme à celui de l'écriture sainte et de tout le reste. C'est même un monde clos, plus ou moins incompréhensible et contradictoire pour quiconque n'a pas la lumière de la vraie foi et n'a pas crucifié ses sens et sa raison.