Mémoire du saint hiéromartyr Denys lÕAréopagite
fêté le 3 octobre
Saint Denys vivait à Athènes à l'époque des apôtres. Il était de famille riche et noble et avait acquis une telle sagesse et une telle vertu par les moyens que lui procuraient la science païenne, qu'il avait été choisi comme l'un des neuf conseillers de l'Aréopage, tribunal suprême en matières criminelles. Lorsque, guidé par le saint Esprit, le grand Apôtre Paul vint proclamer la bonne nouvelle du Salut à Athènes c'est Denys qui l'invita lui-même à prendre la parole sur l'Aréopage. Du haut de ce rocher qui surplombe la ville, le pauvre monteur de tentes dénoua les sophismes des philosophes et révéla clairement aux Athéniens que le «Dieu inconnu», dont leur raison naturelle leur avait donné une vague intuition, était «le Seigneur du ciel et de la terre, qui a fait le monde et tout ce qu'il renferme, et qui n'habite pas des temples faits de Ia main de l'homme, comme s'il avait besoin de quoi que se soit, lui qui dispense à tous les êtres la vie, le souffle et toutes choses» (Cf. Actes 17, 23 sv.). Il leur annonça que l'homme est fait à l'image de Dieu et est appelé à participer à la vie divine elle-même en Jésus-Christ, son Fils, qui s'est incarné, est ressuscité des morts et reviendra pour juger le monde. En entendant parler de résurrection des morts, la plupart de ses auditeurs, l'intelligence enténébrée par les préjugés de la sagesse humaine, se moquèrent de saint Paul. Néanmoins quelques hommes eurent alors le coeur touché par ces paroles de vie éternelle et devinrent croyants. Parmi eux se trouvaient saint Hiérothée et saint Denys. En entendant parler de la Passion du Sauveur et des prodiges qui accompagnèrent sa mort, le sage Denys se souvint qu'en effet plusieurs années auparavant, alors qu'il se trouvait à Héliopolis en Égypte avec d'autres sages, il avait assisté un jour à une éclipse du soleil qui défiait toutes les lois de l'astronomie. Il s'était alors écrié: «Ou Dieu souffre, ou c'est la fin du monde!" Ainsi préparés à reconnaître celui en qui, quand il le veut, les lois de la nature sont vaincues, Denys et son maître Hiérothée écoutèrent avec avidité l'enseignement du saint Apôtre et lui demandèrent le baptême.
Après quelque temps, Paul partit pour de nouvelles tribulations en laissant saint Hiérothée comme évêque d'Athènes. Tel l'aigle qui peut regarder en face l'éclat du soleil, Hierothée pénétrait les mystères divins, mais il livra peu de chose par écrit: préférant initier oralement et dans le secret son disciple Denys aux ineffables contemplations que Dieu lui accordait. A la mort de Hiérothée, Denys devint à son tour évêque d'Athènes et reçut de Dieu la grâce de pouvoir révéler par écrit les sublimes enseignements de ses maîtres sur l'infinité inexprimable de la nature divine - à laquelle conviennent seulement des expressions négatives et antinomiques (théologie apophatique ou négative)- et sur la richesse inépuisable de sa révélation par ses Noms et ses Énergies (théologie affirmative ou cataphatique). Il décrivit comment le monde sensible et le monde intelligible sont unis à Dieu en une grandiose disposition hiérarchique. Il expliqua comment la hiérarchie de l'Église - de d'évêque au moine - reproduit sur la terre les neuf ordres angéliques et distribue à chacun la divine lumière selon le degré de sa purification. Certains l'ont accusé d'avoir emprunté le langage des philosophes néoplatoniciens, mais l'Église orthodoxe, illuminée par les rayons lumineux de son enseignement, croit, quant à elle, que ce sont plutôt ces derniers qui lui ont emprunté le leur; sans parvenir d'ailleurs à montrer, comme de divin Denys, que Celui qui est au-delà de tout nom et de toute essence et qui demeure dans «la ténèbre supralumineuse», est apparu dans la chair pour nous faire participer à sa lumière.
Denys parvint à un si haut degré dans la contemplation, qu'il fut jugé digne d'être compté parmi les apôtres et fut mystérieusement transporté à Jérusalem pour la célébration des funérailles de la Mère de Dieu. De retour pour quelque temps à Athènes, il s'employa à convertir les païens et à guider avec sagesse son troupeau spirituel. Vers la fin du règne de Néron (+ 68), il se rendit à Rome pour rendre compte de ses missions à son maître Saint Paul. II assista à son martyr et repartit pour la Grèce. Il revint à Rome sous le pontificat de saint Clément et, sur l'ordre de ce dernier, partit avec ses disciples, le prêtre Rustique et le diacre Eleuthère, pour évangéliser la Gaule.1 Après avoir proclamé la Parole de vérité dans de nombreux endroits, Denys s'installa à Paris, qui était encore une petite ville plongée dans les ténèbres de l'ignorance et du paganisme. II y construisit une petite église, dans laquelle il célébrait les saints Mystères et proclamait les grandeurs de Dieu. Il accomplit là de nombreux miracles, si bien qu'en quelque temps ses disciples se multiplièrent et partirent répandre le saint Évangile en Grande-Bretagne et jusqu'en Espagne. La renommée de saint Denys attira la jalousie du démon, qui fit informer l'empereur Dométien (vers 96) que cet évêque grec qui proclamait un nouveau Dieu voulait fomenter le désordre et la révolte contre son autorité. On essaya vainement de persuader Denys et ses compagnons de renier le Dieu pour lequel ils vivaient et désiraient mourir. Aussi, ce fut pour eux une joie d'apprendre qu'on les condamnait à avoir la tête tranchée. Dieu ne se contenta pas de donner au saint évêque la grâce de la connaissance et de l'enseignement, il voulut aussi montrer par son martyre que, par la foi, les chrétiens ont vaincu la mort. Lorsqu'on trancha la tête de Denys, à la stupeur de tous les assistants, il se releva, prit sa tête entre ses mains et marcha ainsi pendant deux milles, jusqu'à ce qu'il rencontre une femme vertueuse du nom de Catoula, à qui il remit cette précieuse relique. Le crâne de saint Denys est maintenant vénéré dans le monastère de Dochiariou au Mont-Athos, à la suite d'un don de l'empereur Alexis Comnène ( 11e s).
1 Selon une autre tradition, saint Denys, premier évêque de Paris, serait distinct de saint Denys l'Aréopagite. Envoyé de Rome en Gaule au troisième siècle, il est vénéré dans la tradition occidentale parmi les sept évêques, apôtres de la Gaule.