LA NEO-MARTYRE CATHERINE (ROUTTI) DE MANDRA PRÈS D'ELEFSINA (ATTIQUE)
(+ 15 NOVEMBRE 1927)

Traduit du bulletin grec officiel de l’Église des V.C.O., le KGO, Novembre 2000

Mandra en Attique. Lieu qui connut d'héroïques, mais aussi de tragiques événements. Lieu qui offrit à notre époque matérialiste une nouvelle héroïne de notre foi, la jeune martyre Catherine Routti.
Il est connu de tous les chrétiens que des fleuves de sang ont été versés pour que la vraie foi en Christ soit affermie. Mais pour qu'elle soit aussi conservée loin de l'influence des nouveautés hérétiques, il fallut encore que soit versé du sang de martyr.
Venez maintenant, ô chrétiens, vous qui portez patiemment le rejet du monde et qui répondez au nom d’«ancien-calendaristes», venez tous connaître comment nos pères et nos frères, qui vécurent les premières années du schisme, ont lutté et comment ils ont glorifié l'Église des V.C.O. en nous donnant la possibilité de vivre librement et honnêtement, et d'adorer notre Dieu.
Observons donc comment se sont déroulés les tristes événements de Mandra, c'est-à-dire comment commença et finit tragiquement la vigile solennelle qui eut lieu en l'honneur des saints archanges, à l'aurore du 8 Novembre 1927, dans l'église du même nom à Mandra.
Depuis la veille de la fête, de pieuses femmes de Mandra, dont la courageuse défenseur des traditions des saints pères, Catherine Routti, préparèrent l'église, de sorte que la fête qu'elles attendaient avec tant de dévotion ne soit privée de rien. Elles avaient aussi pris soin à l'avance de faire appeler un prêtre de même foi — les célébrants étaient très rares et par conséquent très demandés. Une commission était partie pour Athènes dans ce but, et voilà que tôt la veille elle revint avec une charrette, accompagnant le confesseur d'éternelle mémoire, le prêtre p. Christophe Psallidas. L'accueil qui fut offert en l'honneur du célébrant qui arrivait fut enthousiaste. Tous les habitants réjouis lui souhaitèrent la bienvenue alors que les cloches de toutes les églises sonnaient joyeusement. Tels étaient l'amour et l'honneur des premiers combattants pour les prêtres de même foi.
Les vêpres commencèrent calmement et solennellement. Elles auraient continué aussi calmement ainsi que toute la vigile jusqu'à la fin, si les forces de l'ordre n'avaient pas fait leur apparition en encerclant l'église avec de mauvaises intentions. On peut alors se poser une question : pourquoi cet assaut ? Dans l'église, il ne se trouvait aucune personne illégale. On n'y cachait pas de bandits. Seuls de dignes observateurs des traditions des pères s'étaient réunis pour glorifier leurs saints en tout honneur. Que demandaient donc les forces de l’ordre avec tant d'insistance ? Elles voulaient tout simplement accomplir l'ordre de l'archevêque schismatique d'Athènes : arrêter le prêtre célébrant et disperser la multitude des fidèles.
Les forces de l'ordre avaient peut-être reçu des directives mais les chrétiens de Mandra devaient accomplir les ordres divins, et ne pas permettre la moindre perturbation de la fête. Ainsi les portes de l'église furent fermées et l'office continua avec plus de componction. Parce qu'il se déroulait sous la menace des armes. Les policiers frappaient avec fureur. Ils frappaient n'importe où. Aux portes, aux fenêtres, aux murs ! Ils cassaient des carreaux ! Et nous sommes pourtant au 20e siècle. La civilisation se développe. Et on est supposé pouvoir user des droits individuels et religieux en toute liberté. Quelle belle vérité ! Nous nous trouvons de plus sur la sainte terre de la Grèce chrétienne orthodoxe.
Les fidèles priaient dans l'église, calmement et pieusement. Dehors, les policiers des schismatiques se démenaient, hurlaient et disaient des obscénités.
Au-dedans, les fidèles demandèrent au Seigneur du renfort pour supporter leur injuste persécution. Dehors, les policiers demandèrent du renfort d’urgence pour atteindre leur but sacrilège. Ils avaient vraiment besoin de renfort ! Oui, car comment arrêter un prêtre doux et innocent ? Comment affronter des fidèles sans armes ?
Le jour allait bientôt se lever. Dans l'église, la plupart des fidèles avaient communié et attendaient la fin de l'office et, quand ils auraient pris la bénédiction du prêtre, ils le conduiraient à une maison proche pour qu'il se repose. Mais comment cela se ferait-il puisque dehors guettaient les prétoriens des schismatiques ? Les fidèles venaient juste de prendre en eux une force, le Christ. Plus rien ne leur faisait peur. Ils avancèrent sans crainte. Les portes s'ouvrirent. Les fidèles commencèrent à sortir. De pieuses femmes de Mandra formèrent un mur vivant qui entourait le prêtre en danger. Dans l'obscurité, les policiers des schismatiques se ruèrent contre elles comme des bêtes sauvages. Ils exigèrent la reddition du prêtre. Mais pourquoi ? Telle fut la question justifiée des fidèles. Avait-il commis un crime, avait-il fraudé ou profané ? Non ! Rien de tout cela ! Et pourtant, ils le demandaient ! Et alors ? Qui allait le livrer ? Il n'y avait pas de Judas !
«Vous ne pourrez prendre notre prêtre qu'en passant sur nos cadavres !» dit une ferme et forte voix de femme. C'est Catherine Routti, qui avait laissé à la maison mari et enfants pour défendre le prêtre. Les menaces des armes ne l'effrayaient pas et c'est pourquoi elle cria, décidée.
Les policiers ne purent pas rompre la chaîne. Ils se mirent donc à faire feu pour les effrayer. Ils réussirent quelque peu grâce à cela. Une bonne partie des fidèles s'éloigna, mais le mur vivant autour du prêtre demeura sans crainte. Mais bientôt celui-ci allait aussi plier à cause de l'agression sauvage et inhumaine des forces de l'ordre, dont une balle atteignit la tempe du confesseur de bienheureuse mémoire Angélique Katsarelli.
Cependant Catherine Routti, l'âme de la défense, ne recula pas. Elle blâma courageusement les schismatiques jusqu'au moment où un policier brandit la crosse de son fusil pour frapper le prêtre. Et alors, Dieu Très-Haut, quelle témérité, quel sacrifice de soi ! Dès qu'elle vit le geste criminel, Catherine se jeta pour sauver le prêtre en le couvrant de son propre corps, et ce fut donc elle qui reçut le coup mortel derrière la tête. Catherine tomba sur le sol de l'église, le teignant de son sang de martyr, alors qu'on l'entendit pour la dernière fois murmurer : «Ma Toute-Sainte !»
Les femmes relevèrent avec émotion et anxiété son corps ensanglanté et, après que son époux ait été prévenu, on la transporta à l'hôpital «Evangélismos» d'Athènes. On transporta aussi à l'hôpital, avec Catherine, la blessée Angélique Katsarelli, qui en sortit quelques jours plus tard.
Catherine souffrit sept jours entiers, immobile, sans même pouvoir parler. Elle demanda par des gestes un crayon et du papier pour écrire, à grand-peine, à son époux de prendre soin de ses petits anges, ses deux enfants, qui avaient le premier quatre ans et le deuxième quelques mois.
Le 15 Novembre 1927, premier jour du Carême de l'Avent, à 4 heures du matin, elle rendit son âme de martyr dans les mains du Christ.
Le Conseil Administratif de la Sainte Communauté V.C.O. d'Athènes mobilisa toutes ses annexes pour que le plus de fidèles possible se trouvent à son enterrement.
Des témoins oculaires de l'enterrement encore en vie nous ont relaté que ce qu'ils ont vu ce jour-là n'était pas un enterrement mais la sainte litanie d'une relique de martyr. Des milliers de fidèles suivirent la procession portant les uns des fleurs, les autres des cierges et d’autres encore des palmes.
La martyre n'a plus besoin de nos honneurs passagers. L'honneur que l'on doit lui rendre est celui que nous indique saint Jean Chrysostome : «Hommage au martyr, imitation du martyr».
Prenez donc courage, chrétiens, et suivez l'exemple de cette jeune mère de 27 ans, qui versa son sang pour notre sainte foi.
La néo-martyre Catherine constitue l'honneur et la gloire de l'Église des V.C.O., et elle sera proposée en toute circonstance comme exemple de foi, d'amour, de renoncement à tout et de sacrifice pour les traditions des pères.
Catherine ! Notre époque n'a pas employé des potences, des fournaises, des épées. Elle a employé la crosse du fusil pour t'effrayer. Quelle pauvre arme, en vérité, pour te faire renier une foi si vivante ! Et pourtant, toi, tu as donné ta vie pour elle. Que tes intercessions nous donnent de la force et que tes prières défendent le corps de notre Église orthodoxe de toute flèche ennemie lancée perfidement.