SAINTE OLIVA, VIERGE ET MARTYRE, À PALERME

(Vers le 9 e-10 e siècle)
 
fêtée le 10 juin

 Oliva était née en Sicile de parents nobles : aussi quand elle fut accusée de christianisme auprès des juges païens, ceux-ci, considérant la noblesse de sa famille, n'osèrent pas la condamner à mort. Ils l'envoyèrent seulement en exil, et la reléguèrent à Tunis, ville d'Afrique. Elle vécut quelque temps en ce lieu, au milieu des pauvres et des indigents : ayant un jour rencontré un boiteux tout malade, elle fut touchée de compassion, et s'approchant de lui, elle lui dit : «Si tu voulais croire en Jésus Christ et en sa doctrine, sans aucun doute, tu recouvrerais la santé de l'âme et du corps.» Le malheureux répondit : «Je croirais volontiers en lui, s'il me rendait la santé.» La vierge lui mit alors la main sur la tête, et il redevint sur-le-champ sain et robuste.
Le pauvre, au comble du bonheur, se garda bien de tenir caché un bienfait si insigne; et il allait criant partout qu'il n'y a point d'autre Dieu que celui qu'adorait Oliva. Venant alors à rencontrer un de ses anciens compagnons d'infortune, il lui dit : «Si tu veux être guéri, crois en Jésus Christ; puis-je te conduirai à la jeune fille qui par ses mérites et par la puissance et la vertu de Jésus Christ, m'a délivré de mon infirmité.» L'autre répondit, en se moquant, que cette jeune fille qu'il nommait et ce crucifié ne pourraient pas plus le guérir qu'ils ne pourraient à l'instant même le rendre aveugle. «Est-ce que cet homme, ajoutait-il, n'a pas été condamné juridiquement par les Juifs à mourir sur une croix ? Et tu oses lui attribuer assez de puissance pour rendre instantanément à la santé ceux qui croient en lui ?» Il avait à peine achevé de vomir ces blasphèmes, qu'il s'aperçut qu'il avait perdu la vue. Contraint par son châtiment de reconnaître son erreur, il se mit à solliciter avec larmes le secours qu'il avait repoussé dédaigneusement : «Mon frère, dit-il, j'ai péché gravement, en refusant de croire à tes paroles; je t'en prie et t'en conjure, conduis-moi à cette jeune fille, qu'elle me pose la main sur la tête, et rende la vue à mes yeux, car je crois en Jésus Christ.» On le conduisit à la bienheureuse Oliva qui, étendant la main, le toucha et le délivra sur-le-champ non seulement de sa cécité, mais de son infirmité antérieure. Ce double miracle accompli, les deux amis se mirent à publier tous deux les louanges de notre Seigneur Jésus Christ, à exalter sa doctrine, et en même temps à célébrer les vertus de la bienheureuse Oliva. Ils firent si bien qu'on les arrêta; puis on les fit mourir au milieu de divers supplices, et ils eurent ainsi l'honneur de cueillir la palme d'un glorieux martyre.
Quant à la bienheureuse Oliva, comme elle était jeune, on la fit promener ignominieusement par toute la ville, puis on l'envoya en exil. On la fit transporter au centre d'une horrible et épaisse forêt, loin de toute habitation humaine; et là, au milieu des repaires des lions et des serpents, elle vécut quelques années aussi paisiblement et agréablement que si elle se fût trouvée dans une cité populeuse : ces animaux sauvages, en effet, la révéraient comme leur maîtresse.
Il arriva alors que des seigneurs de Tunis passèrent en chassant dans cette région de la forêt qu'habitait la bienheureuse Oliva : frappés de sa grâce et de sa beauté, ils osèrent essayer de porter la main sur elle. Mais la sainte, se munissant du signe de la croix, leur cria : «Par la vertu de mon Sauveur Jésus Christ, je vous défends de me toucher et de me faire la moindre violence. Si vous l'osez, je vous avertis que l'ange de Dieu qui depuis sept ans m'a préservée dans cette solitude de la morsure des bêtes féroces, sévira également sur vous, et vous fera mourir par le glaive de la sentence divine.» En entendant ces paroles, les nobles chasseurs se prosternèrent à terre devant la bienheureuse vierge, et la prièrent de leur ordonner tout ce qu'elle voulait; car ils étaient à ses ordres. «Oui, ajoutèrent-ils, nous croyons qu'il n'y a point d'autre Dieu que celui qui t'a conservée saine et sauve, au milieu de cette vaste et horrible solitude, par une nourriture non terrestre, mais angélique; à ce qu'il paraît, ce Dieu t'a fait par ce moyen une si grande grâce que tu sembles appartenir plus au ciel qu'à la terre. »
La bienheureuse Oliva comprit, par ces paroles, qu'un rayon de la lumière divine venait de briller dans le coeur de ces hommes; elle s'appliqua donc à le fortifier et développer par ses enseignements et ses exhortations, si bien que, inondés de la pleine lumière de la foi chrétienne, ils demandèrent à être régénérés dans les ondes du baptême. La sainte, après avoir satisfait leur désir, les renvoya à la ville, bien déterminés à y prêcher la doctrine du Christ, et espérant par ce moyen conquérir la palme du martyre. C'est ce qui arriva, en effet.
Cependant, la renommée de la bienheureuse Oliva allant toujours s'accroissant, le préfet de Tunis donna ordre à ses satellites de se mettre à la recherche de la jeune fille. Mais les soldats, en trouvant la sainte, trouvèrent en même temps la lumière de la foi. Oliva leur enseigna donc la vraie religion et en fit des chrétiens; puis elle se rendit en leur compagnie en la présence du préfet. Elle lui demanda la première, avec un aplomb imperturbable, pour quel motif il la mandait. Le juge comprenait que ce n'était pas la crainte, ni le désir de plaire qui avaient déterminé la jeune fille à venir, puisqu'elle avait réussi à prendre dans les filets de la foi du Christ ceux mêmes qu'on avait lancés à sa poursuite, et qu'elle les avait rendus prêts à subir pour la conservation de cette foi le supplice de la mort, le juge répondit, en feignant : «Jeune fille, je ne puis croire que c'est par ton oeuvre que ces hommes ont été ainsi pervertis, et mis à l'envers.» La bienheureuse Oliva : «Je n'ai nullement perverti ces hommes; mais je les ai fait passer de l'état de damnation à celui du salut.» Le juge : «Eh bien ! alors, si je viens à découvrir que ce que tu dis là est la vérité, je te ferai mourir ainsi que tes compagnons sous les coups et dans les tourments.» La bienheureuse Oliva : «Ni ces hommes, ni moi, ne redoutons tes tourments : car notre Seigneur lui-même nous donne cet enseignement dans son évangile : Gardez-vous de craindre ceux qui tuent le corps, mais ne peuvent tuer l'âme; mais plutôt craignez celui qui peut précipiter et perdre dans les feux de l'enfer et le corps et l'âme.»
Stupéfait à la vue du courage et de l'audacieuse liberté de la jeune fille, le préfet ordonna de la jeter dans un noir et infect cachot et de l'y laisser sans boisson ni nourriture. Mais Dieu vint au secours de celle qu'abandonnaient les hommes; et un ange la réconforta par des aliments et surtout par de délicieux entretiens. Quant aux satellites qu'elle avait convertis à la religion du Christ, ils demeurèrent fermes au milieu des tortures, et reçurent la couronne du martyre.
Quelques jours après, on tira de prison la bienheureuse Oliva, et on l'amena devant le tyran; elle eut alors à subir toutes sortes d'interrogatoires et d'outrages; mais elle méprisa les insultes, et sut par la sagesse de ses réponses confondre ses interrogateurs; à tel point que bon nombre des assistants embrassèrent la foi véritable. Vaincu dans les discussions, le tyran eut recours aux coups. Il ordonna de la frapper avec des fouets plombés, jusqu'à ce que ses chairs mises en lambeaux laissassent à nu les os et les côtes. L'ordre barbare fut exécuté de point en point; mais la bienheureuse Oliva n'en continua pas moins à prêcher la foi chrétienne.
Quand le juge vit que ces moyens ne lui réussissaient pas, il eut recours à d'autres : Il ordonna de préparer le chevalet, d'y suspendre la jeune fille, et puis de lui déchirer tout le corps avec des peignes de fer; mais il n'obtint aucun succès. Il la fit donc détacher du chevalet, et jeter dans une chaudière d'huile bouillante. La bienheureuse Oliva se mit à chanter les louanges de Dieu, au milieu du liquide embrasé, qui ne lui fit aucun mal et ne lui enleva rien de sa gaieté ordinaire : l'unique résultat
de ce dernier supplice fut qu'elle sortit ointe d'huile de la chaudière.
À la vue de ce prodige, le tyran s'acharna sur sa victime, comme si l'eût été une proie toute nouvellement livrée à sa fureur. Il la fit de nouveau attacher au chevalet, et commanda de lui brûler les flancs avec des torches enflammées : ointe  
d'huile comme elle est, se disait-il, le feu aura plus d'action sur elle. Mais les flammes ne lui firent aucun mal; bien plus, elles cicatrisèrent les quelques plaies qui lui demeuraient des tortures précédentes. Les bourreaux, jetant alors leurs torches, se convertirent subitement au Christ, et reçurent la couronne du martyre. La bienheureuse Oliva suivit de près ses nouveaux disciples : car, sur l'ordre du tyran, elle fut sur-le-champ exécutée par le glaive. Son âme, sous la forme d'une blanche colombe, qu'aperçurent tous les assistants, fut portée au ciel par la main des anges, au chant des hymnes et des cantiques. Son corps fut ravi à Tunis par des chrétiens qui avaient été convertis par l'héroïque vierge, transporté en Sicile, et enseveli près des murs de la ville de Palerme. Puisse le Christ notre Seigneur, qui vit et règne dans les siècles des siècles, nous faire parvenir aux joies du ciel, par les souffrances et les mérites de cette bienheureuse vierge ! Amen.