VIRGINITÉ

Saint Grégoire de Nysse

Lettre indiquant le contenu des vingt-trois chapitres : ceux-ci sont une exhortation à la vie vertueuse.

1. Ce traité a pour but d'inspirer aux lecteurs le désir de la vie vertueuse; mais comme la vie commune implique, selon le mot du divin apôtre, bien des tiraillements, il doit suggérer la vie dans la virginité comme une porte pour introduire à cette noble manière de se conduire. On sait en effet combien ceux qui sont embarrassés dans la vie commune s'appliquent difficilement à la vie divine pour méditer sur elle en toute quiétude, et qu'au contraire ceux qui ont entièrement renoncé à la vie troublée jouissent d'une grande aisance pour se consacrer sans tiraillements aux tâches sublimes. Mais le conseil, par lui-même, manque trop de force persuasive, et le simple discours n'entraînerait pas facilement quelqu'un à faire oeuvre profitable, si l'on n'avait d'abord montré la noblesse de l'action à laquelle on excite l'auditeur. C'est pourquoi le traité commence par les éloges de la virginité avant d'aboutir à un conseil. De plus, comme la beauté de chaque objet s'éclaire en quelque manière par comparaison avec ses contraires, on a dû rappeler aussi les embarras de la vie commune. Puis, en bonne méthode, on a glissé une description de la vie "philosophique", et prouvé que l'homme engagé dans les soucis du monde ne pouvait y atteindre. Mais les désirs du corps s'atrophient chez ceux qui ont renoncé : il était donc dans la logique de rechercher l'objet véritablement désirable dont l'auteur de notre nature nous a rendus capables. Cela découvert, dans la mesure où c'était possible, il a encore paru logique d'inventer une méthode pour atteindre ce bien suprême.

2. Ainsi donc, c'est la vraie virginité, celle qui est pure de toute souillure de péché, qui a été trouvée conforme à un tel dessein, si bien que le milieu du traité, malgré des apparences de digressions, tend tout entier à l'éloge de la virginité. Quant aux règles particulières d'un tel genre de vie, pratiquées par ceux qui poursuivent avec application ce noble idéal, nous les avons omises en ce traité pour fuir les longueurs excessives, et c'est d'une manière universelle que les préceptes assez généraux de notre exhortation ont embrassé d'une certaine manière chaque chose en particulier, de façon à ne rien négliger du nécessaire et à fuir les longueurs. Mais les gens ont coutume de mettre plus d'empressement à prendre une profession quelconque, s'il y voient des hommes qui s'y sont déjà acquis du renom : il a donc fallu aussi faire mémoire des saints qui se sont illustrés dans le célibat. Et puisque, pour pratiquer avec succès la vertu, la voix d'un vivant et les bons exemples en acte ont un autre pouvoir que les récits exemplaires, nécessairement, vers la fin du traités, nous nous sommes souvenus de notre très pieux évêque et père, comme du seul maître capable de nous donner de tels enseignements. On ne l'a pas mentionné nommément, mais on a laissé entendre à certains indices que c'était lui qui était désigné. Discrétion voulue, afin que les lecteurs futurs qui se rendront ce traité familier ne jugent pas le conseil inutile, sous prétexte qu'il ordonnerait aux jeunes de fréquenter un homme déjà mort, mais afin qu'uniquement attentifs aux qualités qui se doivent rencontrer dans le guide d'une telle vie, ils se choisissent pour leur direction ceux que la grâce de Dieu désigne à chaque époque pour présider à la vie vertueuse : ainsi donc, ou ils trouveront celui qu'ils cherchent, ou ils n'ignoreront pas quel il doit être.

Voici l'enchaînement des idées :

1. La virginité dépasse les éloges.

2. La virginité est la perfection propre de la nature divine et incorporelle.

3. Rappel des embarras du mariage et indication donnée par l'auteur qu'il n'est pas célibataire.

4. Toutes les absurdités de la vie tirent leur origine du mariage. Portrait de l'homme qui a renoncé pour de bon à ce genre de vie.

5. Il faut faire plus de cas de l'impassibilité de l'âme que de la pureté du corps.

6. Élie et Jean ont pratiqué la stricte discipline de ce genre de vie.

7. Le mariage n'est pas au nombre des choses condamnées.

8. Il atteint difficilement le but, celui dont l'âme est partagée entre de nombreux soucis.

9. C'est chose difficile à changer, en tout domaine, que l'habitude.

10. Quel est l'objet véritablement désirable ?

11. Comment parvenir à l'intelligence de la beauté véritable ?

12. Celui qui s'est purifié verra en lui-même la beauté divine. On parlera aussi dans ce chapitre de la cause du mal.

13. Le soin de soi-même commence avec l'affranchissement du mariage.

14. La virginité l'emporte sur la puissance de la mort.

15. La vraie virginité s'observe en toute occupation.

16. De quelque manière qu'on sorte de la vertu, on court un égal danger.

17. Il est imparfait relativement au bien, celui qui manque ne fût-ce qu'à

une seule des choses intéressant la vertu.

18. Il faut que toutes les puissances de l'âme regardent vers la vertu.

19. Souvenir de Mariam, soeur d'Aaron, parce qu'elle fut la première en la pratique de cette perfection.

20. Il est impossible de servir les voluptés corporelles et de récolter en même temps la joie selon Dieu.

21. Celui qui a choisi de vivre selon cette stricte discipline doit être étranger à toute espèce de plaisir du corps.

22. Il ne faut pas pratiquer l'abstinence au delà du nécessaire : c'est d'une manière semblable que s'opposent au perfectionnement de l'âme la prospérité excessive du corps et son accablement sans mesure.

23. Quiconque veut apprendre l'exacte discipline de ce mode d'existence doit s'instruire près de celui qui l'a pratiquée avec succès.