Chapitre 16

1. Mais innombrables sont, durant notre vie, les écarts vers le péché, et de mille façons, les Écritures nous signalent cette multitude. "Nombreux", dit le psalmiste, "sont ceux qui me poursuivent et m'oppriment" (Ps 117,157, et encore "nombreux sont ceux qui d'en haut combattent contre moi" (Ps 55,3), et beaucoup d'autres textes semblables. Eh bien, peut-être est-il possible de le dire au sens propre : nombreux sont ceux qui intriguent avec des desseins adultères pour corrompre ce qui est en toute vérité un mariage honorable et un lit nuptial sans souillure. Et s'il faut même par leur nom énumérer ces adultères, adultère la colère, adultère la cupidité, adultère l'envie, la rancune, l'inimitié, le dénigrement, la haine; et tous les vices qui sont catalogués par l'Apôtre comme "contraires à la saine doctrine" (1 Tim 1,10) sont une énumération d'adultères. Eh bien supposons qu'une femme, belle entre toutes et désirable, ait été pour ces qualités accordées en mariage à un roi, et qu'elle soit en butte aux intrigues de certains impudiques à cause de sa beauté, une telle femme les assiduités de ces corrupteurs et qu'elle les dénonce à son mari légitime, elle est chaste, n'a de regards que pour ce seul époux et les tromperies des impudiques ne trouvent pas accès près d'elle. Mais si elle cède à l'un de ces intrigants, la chasteté qu'elle garde par rapport aux autres ne la soustrait pas au châtiment, car il suffit pour sa condamnation que la couche conjugale ait été souillée par un seul. Ainsi l'âme qui vit pour Dieu ne s'éprendra d'aucune des choses qui ont pour elle une trompeuse apparence de bien, et si elle a accepté de souiller son coeur par une passion, alors elle a rompu elle aussi les clauses de son mariage spirituel. Et comme, selon l'expression de l'Écriture, "la sagesse n'entrera pas dans une âme fourbe" (Sag 1,4), ainsi peut-on dire en toute vérité : l'époux excellent ne peut venir habiter dans une âme irascible, dénigrante, ou affectée de quelque autre défaut semblable.

2. Qu'inventer pour accorder ensemble ce qui est étranger par nature et sans point commun ? Entends l'Apôtre enseigner qu'il n'y a aucune "union entre la lumière et les ténèbres", (2 Cor 6,14) ou entre "la justice et l'iniquité", ou, pour le dire en un mot, entre tout ce que nous concevons et nommons à propos du Seigneur, selon la diversité des points de vue considérés en lui, et tout ce que nous concevons à l'opposé dans le vice. Si donc il est impossible d'unir des choses incompatibles par nature, l'âme saisie par un vice est absolument étrangère au bien et incapable de cohabiter avec lui. Qu'apprenons-nous donc par là ? Que la vierge chaste et raisonnable doit se tenir à l'écart de toute passion qui atteint l'âme en quelque manière, et se garder pure pour l'époux qui se l'est unie légitimement, "elle qui n'a ni tache, ni rides, ni rien de tel" (Eph 5,27) : car il n'est qu'une route, droite, véritablement étroite et resserrée, qui n'admet pas les écarts d'aucun côté, et le fait d'en sortir, d'une manière et de l'autre, comporte un égal danger de chute.