ÉLOGE SUR l’APÔTRE PAUL

 
AVANT-PROPOS 

    Chrysostome nous paraît avoir mentionné ses discours sur saint Paul, au commencement de son homélie sur les Calendes, en disant : «Naguère, quand nous célébrions la gloire du bienheureux Paul, vous éprouviez une telle allégresse qu'on eût dit qu'il était là sous vos yeux. Je me proposais de revenir aujourd'hui sur ce sujet; mais j'ai dû porter mon attention sur un autre, qui réclame plus impérieusement ma parole, puisqu'il s'agit de remédier aux désordres de toute la cité. Ceux qui désirent entendre l'éloge de Paul doivent avant tout imiter sa vertu, pour être plus dignes d'écouter un tel éloge.» Il est évident qu'il est question de discours déjà prononcés et d'autres qui le seront ensuite, ayant pour objet les louanges de Paul. Hermant pense toutefois que l'orateur veut parler en cet endroit des quelques mots qu'il avait dits à la gloire de l'apôtre dans l'homélie sur la demande des fils de Zébédée, n° 3. Tillemont rejette cette opinion, mais pour prétendre que l'homélie à laquelle il est fait allusion est celle sur le choix d'une épouse, où Paul est aussi parfois loué. Les expressions que nous avons reproduites ne sauraient en aucune façon être entendues d'un éloge accidentel comme on en trouve tant dans les discours de Chrysostome, quel qu'en soit le sujet; elles n'ont un sens qu'en s'appliquant à plusieurs panégyriques de saint Paul, c'est-à-dire aux homélies dont nous nous occupons en ce moment. 
    Il est indubitable que ces homélies ont été données dans la ville dite d'Antioche; l'orateur le montre clairement dans la quatrième, puisqu'il y parle d'un temple d'Apollon situé dans le faubourg de Daphné, et sur lequel la foudre était tombée. Quant à l'année, on ne peut rien établir de certain ni même de très probable. Si l'on pouvait s'en tenir au calcul de Tillemont, qui veut que l'homélie sur les Calendes soit de l'année 387, on sortirait de cette incertitude; car, d'après ce que nous avons dit, cette homélie se place pour le temps entre celles qui sont consacrées à la gloire du grand apôtre : il en est une au moins qui la précède, et les autres la suivent. Malheureusement l'opinion dé ce critique n'est appuyée sur aucune raison solide, ainsi que nous l'avons remarqué à propos de cette même homélie. Tout ce qu'il nous est permis d'affirmer en vertu du passage cité plus haut, c'est que les discours sur saint Paul ont dû précéder et suivre les calendes de janvier. 

    Il nous reste à dire quelque chose de l'auteur d'une traduction latine assez connue des érudits. On ne saurait guère douter que cet écrivain, nommé Anianus, ne soit ce diacre pélagien de Géléda, qui assista au synode de Diospolis et composa plusieurs livres pour soutenir les erreurs de Pélage : c'est ce qu'a démontré d'une manière frappante Jean Garnier, Dissert. I, après Mafius Mercator, cap. 7. Tous les documents se réunissent pour établir cette opinion, deux lettres en particulier, adressées à deux pélagiens, un prêtre et un évêque, Evangelus et Orontius. Nous donnons ici la première, et nous réservons la seconde pour la mettre en tête du commentaire sur saint Matthieu, dont le même Anianus déclare avoir traduit les huit premières homélies. Ainsi s'expliquent les noms odieux de manichéens et de traductions par lesquels il désigne saint Augustin et les autres catholiques qui soutenaient la doctrine de la grâce. Anianus, du reste, n'avait traduit les discours de notre saint docteur, que parce qu'il s'imaginait pouvoir les faire servir aux opinions pélagiennes. C'est ce qu'on voit en examinant de près certains passages de la lettre qui va suivre. On n'y trouvera pas sans doute une négation formelle de la grâce intérieure; car les pélagiens étaient habiles à dissimuler leurs erreurs sous les artifices d'une insidieuse phraséologie. Mais on y voit les accusations qu'ils dirigeaient contre Augustin et les catholiques : il savoir, de mettre la volonté de l'homme sous le joug de la nécessité, d'anéantir le libre arbitre. Il ne peut donc rester aucun doute sur l'identité du diacre Anianus.
Traduction de J. Bareille

1867