PSAUME 128

"Souvent, dès ma jeunesse, ils m'ont persécuté, peut dire Israël." v. 1.

"Souvent ils m'ont persécuté, c'est qu'en effet ils n'ont pu rien contre moi." (Ibid. 2). Un autre interprète traduit : "Mais ils n'ont rien pu contre moi."

 

1. Ce psaume se rattache encore au précédent. Comme la reconstruction du temple était interrompue, et que les travaux ne se terminaient point, le psalmiste ranime les espérances des Juifs et prévient leur découragement. Il veut que le passé soit pour eux le garant de l'avenir, et il leur met ces paroles à la bouche. Quelle est leur signification ? Les ennemis des Juifs les ont souvent attaqués, mais ils n'ont jamais pu les anéantir, ni remporter sur eux une victoire complète. Et cependant ils les ont emmenés captifs, ils les ont transportés dans une terre étrangère, et ont été leurs vainqueurs dans bien des combats. Il est vrai, mais ce n'est point à leurs propres forces, mais aux crimes des Juifs qu'ils étaient redevables de la victoire. D'ailleurs, ils n'eurent pas constamment le dessus; jamais ils ne purent anéantir la race des Juifs, ni détruire sans retour leur cité, ni perdre entièrement leur nation; mais à des victoires momentanées que Dieu leur accordait sur son peuple succédaient d'éclatantes défaites. Et comment les Juifs en devenaient-ils victorieux ? Par le retour à leur ancienne prospérité. C'est ce qu'un autre interprète traduit de la sorte : "Mais ils n'ont pu l'emporter sur moi," "Les pécheurs ont fait passer sur mon dos le soc de la charrue, ils y ont prolongé leurs iniquités." (Ibid., 3). Que signifient ces paroles ? Ce n'est pas comme au hasard qu'ils m'ont tendu des pièges, mais ils ne cessaient de former contre moi des complots combinés avec adresse, d'ourdir leurs trames artificieuses et de m'attaquer en secret. Ces paroles : "Sur mon dos," sont l'expression figurée ou de la dissimulation et de la perfidie, ou d'une violence qui ne connaît point de bornes. C'est-à-dire, ils ont essayé de briser ma puissance. Une autre version, au lieu de : "Ils travaillaient," porte : "Ils ont labouré," pour montrer le soin extraordinaire qu'ils mettaient à tendre des pièges au juste. "Ils ont prolongé leur iniquité. " Que veut dire ici le psalmiste ? A la violence inouïe de l'attaque, ils ont joint une grande persévérance. Ils ont employé un temps considérable, ils ont fait de ces embûches leur oeuvre capitale, et s'en sont occupés avec une constance opiniâtre. Mais tous ces efforts ne leur ont servi de rien, grâce non pas à mes propres forces, mais à la Puissance de Dieu. Aussi, le psalmiste se hâte-t-il de montrer celui qui élève le trophée et qui est l'auteur de la victoire. "Le Seigneur qui est juste, tranche la tête des pécheurs." (Ibid., 4). Une autre version, au lieu de : "La tête," porte : "Les cordes," c'est-à-dire, les ruses, les artifices, les perfidies. Remarquez qu'il ne dit pas : "Il a brisé, " mais : "Il a tranché," c'est-à-dire, son opération a été décisive, il a réduit à néant leurs complots. En effet, lorsqu'ils commencèrent à rebâtir la ville, ils furent assaillis par une foule d'ennemis qui voyaient leur entreprise d'un oeil profondément jaloux, et qui renouvelèrent leurs attaques non pas une ou deux fois, mais à plusieurs reprises différentes. L'Église a été soumise aux mêmes épreuves, elle ne faisait que de naître, et déjà elle se voyait de tous côtés l'objet d'attaques incessantes. D'abord, ce fut de la part des rois, des peuples et des tyrans, puis vinrent les attaques. insidieuses des hérétiques sous diverses formes. En un mot, de toutes parts on lui déclarait la guerre la plus violente et la plus acharnée. Mais tous ces efforts furent inutiles, ses ennemis furent honteusement défaits, et l'Église reste toujours florissante.

"Qu'ils rougissent, qu'ils retournent en arrière, tous ceux qui haïssent Sion." (Ibid., 5). Une autre version porte : "Qu'ils soient renversés en arrière." "Qu'ils deviennent comme l'herbe des toits qui se dessèche avant qu'on la recueille." (Ibid., 6). "Qui jamais ne remplit la main du moissonneur." Suivant une autre version : "La paume de la main." "Ni les bras de celui qui recueille les gerbes. (Ibid., 7). "Et dont les passants ne disent pas : La bénédiction du Seigneur soit sur vous, nous vous bénissons au nom du Seigneur." (Ibid., 8). Le psalmiste termine cette exhortation par une prière; le récit des événements passés, joint à cette invocation, a pour but d'inspirer de la confiance à l'auditeur, en lui montrant l'injustice de cette guerre. Elle avait pour cause en effet, l'envie et la haine, et c'est ce qui lui fait dire : "Qu'ils rougissent et qu'ils retournent en arrière, tous ceux qui haïssent Sion." C'est-à-dire, qu'ils soient non seulement vaincus, mais qu'ils le soient d'une manière honteuse et ridicule. Qu'ils deviennent, a-t-il dit, comme l'herbe des toits; il continue cette meule figure en les comparant non seulement à l'herbe, mais à l'herbe des toits. Sans doute, l'herbe qui croit dans un champ fertile passe bien vite; mais pour montrer le peu de valeur de ses adversaires, il les compare à l'herbe qui croit sur les toits, et tire ainsi une double preuve de leur fragilité, de la nature de l'herbe et du lieu où elle pousse. Telles sont, dit-il, les attaques de ces ennemis qui n'ont ni racine ni fondement, ils sont comme l'herbe qu'on voit presqu'en même temps fleurir, et puis tomber et se flétrir d'elle-même. Telle est aussi la prospérité de ceux qui passent leur vie dans le crime. Voilà ce que deviennent les choses les plus brillantes de cette vie, elles frappent un instant notre vue et puis elles s'évanouissent, parce qu'elles n'ont ni fondement, ni force. Gardons-nous d'y attacher notre coeur, mais que la considération de leur fragilité nous fasse désirer les biens éternels et immuables, qui sont à l'abri des vicissitudes du temps. Puissions-nous les mériter par la Grâce et la Miséricorde de notre Seigneur Jésus Christ, auquel soit la gloire avec le Père et le saint Esprit dans les siècles des siècles. Amen.