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chrétiens orthodoxes sous la juridiction de S. B. Mgr. Nicolas archevêque d'Athènes et primat de toute la Grèce |
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SOMMAIRE
LES PéRES DE LÕGLISE : Saint Ephrem le Syrien
DE LA VIE DE SAINT BASILE LE GRAND
PREMIéRE HOMELIE DE L'ARCHEVęQUE PHILARéTE
REClT DU PAPE ET PATRIARCHE JOACHIM D'ALEXANDRIE
UNE INTERVENTION DE SAINT CHARALAMPE
Je publie ce bulletin sur le site sans savoir quand il sera imprim Š Dieu seul le sait. Je viens de rentrer de Paris, o jÕai pass quelques jours afin de rendre visite nos nouveaux fidles, qui habitent dans cette rgion. Tout cÕest trs bien pass. Maintenant il faudra passer la prochaine tape : ouvrir une chapelle. Que le Seigneur nous vienne en aide ! Ici en Grce rien signaler. Je suis toujours affect lÕarchevch et jÕhabite enfin au deuxime tage, o les conditions sont plus vivables. JÕaurai aussi le tlphone fixe ces jours-ci. Vtre en Christ, |
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AVEC NOS FIDéLES RUSSES (LES GORGIENS MANQUENT SUR LE PHOTO) |
Jsus, tant entr dans Jricho, traversait la ville. Et voici, un homme riche, appel Zache, chef des publicains, cherchait voir qui tait Jsus; mais il ne pouvait y parvenir, cause de la foule, car il tait de petite taille. Il courut en avant, et monta sur un sycomore pour Le voir, parce quÕIl devait passer par l. Lorsque Jsus fut arriv cet endroit, Il leva les yeux et lui dit : Zache, hte-toi de descendre; car il faut que Je demeure aujourdÕhui dans ta maison. Zache se hta de descendre, et Le reut avec joie. Voyant cela, tous murmuraient, et disaient : Il est all loger chez un homme pcheur. Mais Zache, se tenant devant le Seigneur, Lui dit : Voici, Seigneur, je donne aux pauvres la moiti de mes biens, et, si jÕai fait tort de quelque chose quelquÕun, je lui rends le quadruple. Jsus lui dit : Le salut est entr aujourdÕhui dans cette maison, parce que celui-ci est aussi un fils dÕAbraham. Car le Fils de lÕhomme est venu chercher et sauver ce qui tait perdu. (Luc 19,1-10)
QuÕest-ce que lÕvangile dÕaujourdÕhui peut nous apprendre ? Commenons un par un :
Jricho, o lÕpisode se passe, est une ville dans la plaine de Moab. CÕest l que le Seigneur a fait voir Mose, sur le mont Nebo, la Terre promise. Mose devait monter sur la montagne, et Zache sur un sycomore pour voir les Merveilles de Dieu. Ė Jricho se passa galement lÕpisode avec Rahab la prostitue et les espions (cf. Jos 6) et cÕest cette mme ville que Josu a maudite, aprs avoir dtruit la ville : ĒMaudit soit devant le Seigneur lÕhomme qui se lvera pour rebtir cette ville de Jricho ! Il en jettera les fondements au prix de son premier-n, et il en posera les portes au prix de son plus jeune fils.Č (Jos 6,26) Cette maldiction a eu son effet car nous lisons dans I Roi (16,34) : ĒDe son temps, Hiel de Bthel btit Jricho; il en jeta les fondements au prix dÕAbiram, son premier-n, et il en posa les portes au prix de Segub, son plus jeune fils, selon la parole que le Seigneur avait dite par Josu, fils de Nun.Č
Dans lÕvangile est relate la gurison de Bartime, un mendiant aveugle, qui tait assis au bord du chemin, la sortie de Jricho. (Mc 10,46) Bartime y tait assis pour mendier et, de son ct, Zache le Publicain savait que le Christ devait passer par l et il monta sur un sycomore afin de Le voir au moins. ĒZache tait mont sur un sycomore, lÕaveugle tait assis le long du chemin; le Seigneur attend lÕun pour le gurir, Il honore lÕautre en daignant descendre dans sa maison.Č (saint Ambroise de Milan)
De Zache il est dit quÕil tait chef des publicains, cÕest--dire plus quÕun simple publicain. Les publicains et les prostitues ont eu la mme mauvaise renomme, mais on les voit se tourner vers Dieu plus facilement que ceux qui se croyaient justifis. Pensons la parabole du Publicain et du Pharisien, que nous lisons dimanche prochain. Matthieu lÕvangliste tait aussi publicain, et nous avons dj mentionn Rahab la prostitue. Il est crit : ŅsÕil refuse aussi dÕcouter lÕglise, quÕil soit pour toi comme un paen et un publicain.Č (Mt 17,18) Donc tre publicain nŌtait pas un titre de noblesse, pas plus quÕtre prostitue. Ce nÕtait donc pas pour rien quÕon se scandalisait quand le Seigneur les frquentait. ĒVoyant cela, tous murmuraient, et disaient : Il est all loger chez un homme pcheur,Č dit lÕvangile dÕaujourdÕhui.
ĒConsidrez lÕexcessive Bont du Sauveur : innocent, Il Se mle aux coupables; Source de toute justice, Il entre en relation avec lÕavarice qui est la cause de toute perversitČ, nous dit le grand Chrysostome. Et un peu plus loin, il dit : ĒMais Jsus, accus dÕtre le convive et lÕami des publicains, ddaigne ces calomnies pour accomplir son Īuvre; car le mdecin ne peut gurir les malades quÕ la condition de supporter ce que leurs plaies ont de rebutant.Č
Pourquoi le Fils de lÕhomme agit-Il ainsi ? On pourra dire : ĒParce que celui-ci est aussi enfant dÕAbraham.Č Aucune brebis ne ddaigne Celui qui est venu chercher la brebis gare. ĒCar le Fils de lÕhomme est venu chercher et sauver ce qui tait perdu Č prcise lÕvangliste. Saint Jean Chrysostome dit ailleurs : ĒPourquoi me faire un crime de chercher ramener les pcheurs ? Je suis si loin de les har quÕils sont la cause de ma Venue sur la terre; Je suis venu comme mdecin et non comme juge, aussi Je ne ddaigne pas de devenir le convive des malades, et Je supporte la mauvaise odeur de leurs plaies, afin de pouvoir y appliquer des remdes plus efficaces.Č
On parle aussi de la foule dans lÕvangile. CÕest cette foule qui dfendait lÕaveugle de demander Jsus par ses cris de lui rendre la vue, et elle est aussi lÕobstacle qui empche Zache de voir le Sauveur. CÕest cette foule sans nom qui est pousse par ses passions et qui criait plus tard : ĒCrucifie-LeČ, peu aprs avoir cri : ĒHosanna au Fils de David.Č Cette instabilit lui est caractristique car elle se fie lÕapparence. Ē La foule reprsente cette multitude ignorante et tumultueuse qui nÕa pu lever ses regards jusquÕau sommet de la sagesse; aussi longtemps que Zache demeure dans la foule, il ne peut voir Jsus Christ, mais aussitt quÕil sÕlve au-dessus de cette multitude ignorante, il mrite de recevoir dans sa maison Celui quÕil dsirait voir simplement, nous dit saint Cyrille.
Pourquoi Zache dsirait-il voir Jsus ? ĒLa semence du salut avait germ dans son me, puisquÕil dsirait voir JsusČ, dit un autre pre quelque part. Il avait certainement entendu parler du Messie et il voulait en avoir le cĻur net. Quelque chose le travaillait : le remords de sa conscience, la Grce de Dieu.
Il courait mme :ŹĒCourant donc en avant, dit lÕvangliste, il monta sur un sycomore pour Le voir, parce quÕIl devait passer par l.Č Il nÕtait pas tide et la parole de lŌApocalypse : Ēparce que tu es tide, et que tu nÕes ni froid ni bouillant, Je te vomirai de ma Bouche,Č ne sÕappliquait pas lui. Cette disposition de cĻur poussa le Sauveur SÕadresser lui et se faire inviter. ĒZache, hte-toi de descendre; car il faut que Je demeure aujourdÕhui dans ta maison.Č ĒZache, de son ct, nÕa point mis le moindre retard, et sÕest ainsi montr digne de la Misricorde de Dieu, qui rend la vue aux aveugles, et appelle ceux qui sont loigns,Č dit saint Cyrille dÕAlexandrie. Saint Ambroise dit : ĒSans tre invit, Il SÕinvite Lui-mme descendre chez lui : Et lÕayant vu, Il lui dit : Zache, descendez vite, etc. Il savait que lÕhospitalit quÕIl demandait serait largement rcompense, et bien quÕIl nÕet pas encore entendu Zache Lui adresser dÕinvitation, Il voyait les sentiments de son cĻur.Č ĒEt Le reut avec joie,Č dit lÕvangile. Il esprait tout juste voir le Messie et voil, Celui-ci daigne descendre dans sa maison, la maison dÕun publicain; il tait donc au comble de la joie.
Ē Voyant cela, tous murmuraient, et disaient : Il est all loger chez un homme pcheur,Č continue lÕvangliste. En entendant ces remarques, Zache se dfend : ĒVoici, Seigneur, je donne aux pauvres la moiti de mes biens, et, si jÕai fait tort de quelque chose quelquÕun, je lui rends le quadruple,Č disait-il au Seigneur. Il tait prt partager son bien avec les pauvres et ce quÕil avait mal acquis, il voulait le rendre au quadruple. Il tait prt faire mme plus que ce que la loi prescrivait et rendre au quadruple. La Loi ne dit que : Ēsi ce quÕil a drobÉ, il fera une restitution au double.Č (Ex 22,4)
Le Christ voyait la disposition de son cĻur tout contrit et, au lieu de lui faire des reproches, Il lui disait : Ē Le salut est entr aujourdÕhuiČ et la suite. La mme attitude compatissante que pour la femme adultre et videmment comme chaque fois que le Sauveur voyait du repentir sincre. Comment peut-Il faire autrement Celui qui nous parle dans la parabole du Fils prodigue de ce pre dont la misricorde est conditionne par lÕamour paternel. Notre justice nous est plutt base sur des raisonnements humains et sur des apparences comme ce mtier de publicain, qui causait du scandale nos semblables.
Pourquoi lÕglise a-t-elle mis cette pricope de lÕvangile juste avant le Triode ? Par pur hasard ? Il nÕy a pas de hasard ni dans lÕglise ni dans lÕconomie de Celui qui est venu faire la Volont de Celui qui LÕa envoy. CÕest cette Volont divine qui dirige lÕglise et qui a dirig les pas du Seigneur. Voil la raison de fond. Il y a certes des raisons secondaires, mais, au lieu de tout vous mcher, je laisse chacun de les trouver. Pour finir, il ne me reste qu' vous souhaiter que chacun de nos pas soit galement dirig par la Volont divine.
Archimandrite Cassien
Athanase Fradeaud
Saint Ephrem le Syrien
(ft le 28 janvier)
Le saint que nous allons suivre aujourdÕhui sur le chemin de Ēsa vie en ChristČ ne se voit pas connu dans toute sa plnitude dans lÕOccident post-orthodoxe. Certes, son nom continue de figurer dans les ĒpatrologiesČ o lÕon en dit grand bien, mais o son rayonnement est comme limit, tant lÕon souligne quÕen fait Ēil nÕa pas creus trs avant dans le dogmeČ et ne sÕest pas livr des spculations philosophiques et thologique. On oublie ainsi lÕaphorisme bien connu nous apprenant ĒquÕil est meilleur de se purifier pour Dieu que de parler de DieuČ, tout comme la simple sagesse qui nous apprend quÕil convient de se purifier avant dÕaborder le sujet le plus sublime qui soit. Cet tonnement ne doit pas nous surprendre, car le R.P. Guette le signalait en son temps en crivant dans son ĒHistoire de lÕgliseČŹ: ĒQuoique la Vrit rvle ne puisse progresser, puisquÕelle est lÕexpression mme de lÕętre infini, lÕintelligence peut progresser dans sa connaissance. Seulement, la base fondamentale du progrs dans la connaissance du dogme, cÕest quÕil reste dans sa nature, autrement, il y aurait changement et non progrsČ. Et saint Ephrem qui ne se livrait aucune spculation correspond ce que le mme auteur ajoute en lÕespceŹ: ĒLes Pres de lÕglise par leurs immortels ouvrages, o lÕessence des dogmes tait respecte, dveloppaient dans lÕglise une intelligence suprieure des doctrines divines et levrent lÕesprit humain une hauteur quÕil nÕa pas dpassČ. Tout ceci est valable bien sr pour tous les Pres selon leur charisme propre; nous verrons quÕil en fut de mme pour saint Ephrem lorsquÕil utilisa le talent quÕil avait reu.
Ephrem le Syrien naquit Nisibe en Msopotamie, raison pour laquelle il est parfois nomm Ephrem de Nisibe par certains. Attir trs tt par la Vrit chrtienne, il dut subir trs jeune une rude preuve. En effet, cause de son amour pour la Bonne Nouvelle du Christ, il suscita lÕire de son pre qui tait prtre paen. Ce dernier le chassa dÕailleurs de la maison paternelle. Cette preuve, Dieu la changea en bndiction, puisquÕil inspira au saint vque Jacques (mmoire le 13 janvier) qui le recueillit et lÕinstruisit comme son fils spirituels. CÕest ainsi que le jeune Ephrem put sÕimbiber entirement de lÕexemple de son matre, la manire dont une mche de veilleuse sÕimbibe de lÕhuile qui la contient. Il ne manqua pas de tirer son miel de vertus non seulement dÕun tel enseignement, mais aussi de tels exemples. Son application dans les exercices spirituels lui obtint du Seigneur bien des dons spirituels, comme celui de pouvoir gouverner les mouvements de son me et ne pas laisser la moindre pense mauvaise prendre possession de son esprit. Le dpouillement quÕil pratiqua, selon les prceptes de lÕvangile, pour imiter les aptres, lui obtint de Dieu la componction et les larmes continuelles, propos desquelles les Pres ont ditŹ: ĒLorsque les larmes viennent, tout cesse, mme la prireČ. Pendant des annes, les eaux purificatrices de ses larmes ne cessrent de couler, tant ses yeux purifis avaient t transforms en sources intarissables. Et cet homme difi sut dlivrer un enseignement si purificateur que bien des larmes de repentir coulrent plus tard des yeux de ses fidles auditeurs. Ce qui contribue sa gloire et obtint la reconnaissance imprissable de ceux quÕil remit alors sur la voie droite.
CÕest vers lÕge de vingt ans quÕil reut le baptme. Il se retira alors au dsert, fuyant le trouble de la ville, afin de vivre dans lÕhsychia. Il passait de lieu en lieu, sans sÕarrter nulle part, en suivant lÕinspiration du saint Esprit qui lui servait de guide, lÕamenant l o Il le voulait pour sa sanctification et celle de ses frres. En suivant son chemin, il le parsemait dÕexemples vertueux. LÕun dÕeux servit dÕoccasion de repentir une femme qui se prostituait. La rencontrant, il fit mine dÕaccepter ses propositions et, lÕinvitant le suivre, lÕamena sur la place publique, au lieu de rechercher un lieu discret pour cacher le pch. Ė la prostitue qui lui demandait pourquoi il lÕamenait l, et pourquoi il nÕavait pas honte dÕexposer une telle situation aux yeux des hommes, Ephrem rponditŹ: ĒMalheureuse, tu crains le regard des hommes et tu ne crains pas le Regard de Dieu qui voit tout et jugera tout au dernier jour, nos actions et nos penses les plus secrtes.Č Saisie de crainte, la malheureuse femme se repentit et se laissa conduire vers un lieu o elle pourrait faire son salut. CÕest ainsi quÕil parvint la ville dÕdesse la recherche dÕun compagnon avec lequel il pourrait mener la vie anglique et lutter dans le stade asctique du monachisme.
Il nÕy resta que quelques annes, avant de retourner au dsert continuer la lutte. CÕest dans son hsychia quÕil lui fut accord la grce de voir le grand saint Basile dans une vision, Ētel une colonne de feu unissant la terre au cielČ. Il dsira alors vivement de le connatre, dirigea ses pas vers la Cappadoce et arriva desse le jour de la Thophanie au moment mme o le saint hirarque clbrait la divine Liturgie. Assistant lÕhomlie du saint vque, il vit une colombe blanche pose sur son paule et comprit combien Basile tait inspir par lÕEsprit divin. CÕest par un signe semblable que saint Basile fut averti de la prsence dÕEphrem, recevant aussi de Dieu la connaissance de sa vertu. LÕenvoyant chercher, il rpondit la requte du saint ermite qui lui demanda dÕobtenir de Dieu pour lui la grce de parler la langue grecque, comme sÕil la possdait de naissance. Ce que saint Basile obtint pour lui, avant de lÕordonner diacre. Puis, Ephrem retourna dans sa patrie.
Le saint diacre syrien refusa toujours dÕtre lev au sacerdoce et encore moins lÕpiscopat. Son humilit extraordinaire cet gard se signala tout particulirement lorsquÕon vint le chercher dans le dsert afin de lÕlever lÕpiscopat. Il quitta alors sa solitude pour la place publique, o il simula si bien la folie, que le projet de lÕlire fut abandonn. Il se cacha alors dans une solitude dÕo il ne sortit quÕaprs avoir appris que lÕon avait choisi un autre candidat.
Entre 338 et 387, une longue et cruelle guerre svit entre les Romains et les Perses. Ė cette occasion, des perscutions frapprent implacablement les chrtiens, tenus comme allis des Romains. Le cĻur paternel dÕEphrem sÕen mut tant quÕil retourna Nisibe pour assister, consoler et soutenir ses frres, tant en paroles quÕen actes. La grce qui demeurait en lui tait si grande que, lorsquÕil sÕadressait aux fidles assembls, sa langue nÕavait pas le temps de traduire tout ce que Dieu lui inspirait. Il tait alors comme pris de bgaiement et oblig dÕadresser au Seigneur cette prire peu communeŹ: ĒRetiens, Seigneur, les flots de ta GrceČ. LorsquÕil nÕtait pas occup la prdication et aux tudes, il se mettait au service de tous, en vritable et saint diacre.
Lorsque ses ennemis lÕassigrent en 338, la cit de Nisibe fut dlivre grce ses prires et celles du saint vque Jacques. Mais en 363, elle finit par tomber aux mains des Perses. CÕest alors que saint Ephrem, comme beaucoup dÕautres chrtiens, partit pour desse afin de ne pas vivre sous la domination paenne. L, pendant les dix dernires annes de sa vie, il partagea son temps entre lÕinstruction de ses disciples venus lui de toutes parts, la prdication et la rdaction de nombreux crits. Il continua aussi lÕĻuvre exgtique amorce dans lÕcole fonde Nisibe par le saint vque Jacques, desse, que lÕon appela ds lors Ēcole des PersesČ. Ses disciples principaux y furentŹ: Mar Abba, auteur dÕun commentaire sur les vangiles et dÕcrits exgtiques, Znobius, diacre dÕdesse, auteur dÕptres et de traits contre Marcion et Pamphiles, et dÕune ĒVieŹde saint EphremČ, Paulonas, auteur de traits contre les hrtiques et dÕhymnes sacres, ainsi que Symon, Habraam et Maras dont les crits taient fort apprcis dans lÕglise syriaque.
Son Ļuvre
En prose, nous ne possdons plus que ses Ļuvres exgtiques. Saint Ephrem avait comment toute la Bible, sauf sans doute les livres deutrocanoniques de lÕAncien Testament. Sont parvenus jusquÕ nous ses commentaires sur la Gense et trente-deux chapitres de lÕExode, des fragments du Pentateuque, Josu, les Juges et les quatre livres de Rois, Job, et tous les Prophtes. On note aussi le ĒCommentaire de lÕvangile concordantČ ou ĒDiatesseronČ, et un autre sur les ptres de saint Paul, sauf celle Philmon.
En vers, son Ļuvre est immense et la tradition nous parle de Ētrois millions de versČŹ! Parmi ceux qui nous sont parvenus, notons deux sries de cinquante-six et quatre-vingts discours dirigs contre les hrsies. La premire srie contre les hrsiarques Bardesane (que sa curiosit malsaine pour lÕastrologie le conduisit une forme de gnosticisme), Marcion (dont lÕhrsie consistait opposer la loi comme Ļuvre dÕun dieu juste et lÕvangile comme Ļuvre dÕun dieu bon) et Mans. La deuxime srie tait dirigs contre Ēles scrutateursČ, nom donn aux hrtiques sÕattaquant la Trinit ou lÕIncarnation. Notons aussi sept sermons Ēsur la perle de la foiČ, trois autres Ēsur la foiČ, le discours contre les Juifs, un autre sur lÕIncarnation, quatre chants contre Julien lÕApostat et deux autres discours dirigs contre les hrtiques et les Juifs. Il a aussi trait du libre arbitre, se montrant trs orthodoxe dans ses expositions et ses ouvrages de polmique.
Quant aux homlies, on peut rappeler douze sermons sur divers passages de lÕAncien Testament, douze discours sur le Paradis et dix discours sur Joseph vendu par ses frres. Les discours sur la Vie du Seigneur sont une partie importante de son Ļuvre avec vingt-deux sermons sur la Nativit, quinze sur la Thophanie et quarante et un autres sur dÕautres mystres de la Vie du Christ. Sans oublier vingt homlies sur lÕEnfantrice de Dieu et dÕautres encore sur les aptres, les martyrs et les confesseurs.
Dans cet ensemble se trouvent aussi beaucoup de matires morales et asctiques et ces ouvrages passent pour ses meilleurs compositions. Viennent aussi toute une srie de traits sur la vie chrtienne, monastique et sacerdotale, dont, entre autres, soixante-seize exhortations la pnitence. Ses crits portent le cachet de sa vertu, tant il sÕest montr plein dÕardeur pour les vertus chrtiennes et la perfection de la vie monastique.
Son Ļuvre le fait considrer comme lÕun des plus minents pres de lÕglise; les plus grands vques sÕhonoraient dÕtre en rapport avec lui, et le grand saint Basile louait sa science. Palladius le nomme avec saint Sabbas comme lÕun des plus illustres moines de la Msopotamie. Thodoret en parlait comme de Ēla lyre du saint EspritŹet le canal par lequel les eaux de la grce coulaient sur les SyriensČ. Sozomne constate que, sans avoir tudi dans sa jeunesse, Ephrem devint si habile dans lÕart dÕcrire quÕil surpassa les crivains grecs eux-mmesŹ: Ēsi lÕon traduit ceux-ci en syriaque Š dit-Š ils perdent aussitt leur style; tandis que ceux dÕEphrem traduits en grec conservent toutes leurs beauts originalesČ. Ses crits taient si estims que lÕon les lisait, en Syrie, aprs les saintes critures.
On comprend mieux ici pourquoi ce monde le considre autrement que le font les chrtiens orthodoxes. Pour les uns, le charisme de saint Ephrem est trop facilement rduit de bonnes rptitions, mais lÕglise nÕoublie pas que la transmission de la Foi est un charisme particulier et un don qui possde plusieurs degrs. CÕest parce que ce charisme tait visible chez le saint diacre Ephrem et parce que ses dons en pareil domaine taient minents quÕil a t reconnu par la conscience de lÕglise comme cette Ēlyre du saint EspritČ, qui a su faire bien le bien quÕil devait faire. CÕest parce que le saint diacre parlait de lÕabondance de son cĻur purifi que lÕglise se reconnut dans ses compositions, qui entrrent plus tard dans les livres liturgiques de lÕglise syriaque. CÕest pour cela surtout que lÕglise reconnut en lui lÕun des plus grands parmi les Pres. Avec cet exemple, nous devons aussi mieux nous souvenir que la transmission des textes liturgiques est celle dÕune riche catchse et dÕune sainte thologie, qui doivent nous rendre attentifs lÕglise lors des offices.
Aprs avoir secouru ses compatriotes lors de la famine de 372, saint Ephrem, qui avait crit de si belles hymnes sur le Paradis, rendit son me Dieu lÕanne suivante, en 373. Il partit vers sa bienheureuse destine ternelle, entour par bien des moines et d'asctes qui avaient quitt le lieu de leur pnitence pour lÕassister lors de son dpart. Il termina aussi humblement que saintement son stade asctique en demandant ceux qui lÕaimaient de ne point l'honorer par de brillantes funrailles, mais de dposer son corps dans la fosse rserve aux trangers, en lui offrant, au lieu de fleurs et d'aromates, le soutien de leurs fidles et orthodoxes prires.
Que ce grand confesseur de notre sainte foi dblaie et rende ais, par ses intercessions, pour nous tous le chemin du Paradis.
BibliographieŹ:
ĒSources ChrtiennesČ :
ŠŹCommentaire de lÕvangile concordant ou Diatesseron (N” 121) 31 Ū
Š Hymnes sur la Nativit (N” 459) 38 Ū
Š Hymnes sur le Paradis (N” 137) 20 Ū
ditions monastiques deŹBellefontaineŹ:
Š Hymnes sur le jene 11,43 Ū
Š Hymnes sur lÕpiphanie 11,43 Ū
(Mt 18,12 et Luc 15,11-29)
En lisant la parabole du Fils prodigue et de la Brebis gare, on constate une certaine contradiction : Le pre du fils prodigue resta la maison en attendant que le fils revienne, et pour la brebis perdue, on voit le berger qui va la recherche de la brebis.
Les paraboles indiquent la ralit d'une manire plus ou moins parfaite Š par certains aspects seulement. Dans la premire parabole (celle du fils prodigue), est souligne la libert de l'homme prendre le chemin de la perdition et dans la seconde (celle de la brebis gare), on voit l'extrme Sollicitude de Dieu notre gard, qui va jusqu'aux antres les plus profonds de nos pchs afin de nous sauver.
Donc, les deux paraboles se compltent sans se contredire. Mais allons encore un peu plus loin.
Le pre du fils prodigue ne suivait pas celui-ci pour le retenir de force, mais attendait patiemment son retour. On peut s'imaginer qu'il regardait chaque jour le long du chemin dans l'espoir de voir le fils revenir. Ds que le pre vit finalement le repentir du fils, Ēil courut et se jeta son couČ. Cette attitude montre la libert du fils Ń qui n'tait pas un esclave Ń, et galement le discernement du pre qui laissait son fils faire cette mauvaise exprience afin de le rendre sage.
Chez la brebis gare, le sens est autre : une brebis est ignorante et cherche facilement l'herbe qui lui plat. Elle ignore le danger du prcipice et des fauves et s'gare ainsi de la protection du troupeau. Notre ignorance est vise par cette parabole. Le pch nous est doux, nous minimisons les consquences et fermons facilement les yeux au moment de nous garer. Ce n'est qu'aprs que nos yeux s'ouvrent, comme pour les protoplastes : ĒLes yeux de l'un et de l'autre s'ouvrirent, ils connurent qu'ils taient nus, et ayant cousu des feuilles de figuier, ils s'en firent des ceintures.Č (Gn 3,7) ĒLe pasteur cherche sa brebis gare et la rapporte sur ses paules, parce qu'elle tait incapable de revenir; cette brebis, animal dpourvu de raison, est donc la figure de l'homme imprudent qui, victime de ruses trangres, s'est gar comme une brebis,Č dit saint Jean Chrysostome. (Hom. sur le pre et ses deux fils.)
ĒLorsque le pasteur eut retrouv sa brebis, il ne la chtia point, il ne la ramena pas au bercail avec violence, mais il la chargea sur ses paules, et la porta avec tendresse pour la runir au troupeau : Et lorsqu'il l'a trouve, il la met avec joie sur ses paules,Č dit saint Grgoire de Nysse. Donc ni le pre du fils prodigue ni le bon pasteur ne contraignent l'gar, et tous deux l'accueillent sans rserve.
L'vangliste Luc nous relate successivement la parabole de la brebis gare, ensuite celle de la drachme perdue et en troisime lieu celle du fils prodigue. Si chaque parabole avait exactement le mme sens, pourquoi ne pas se contenter d'une seule parabole ? Mais prcisment chaque parabole souligne des aspects diffrents et complmentaires.
Dans chaque parabole, le Christ prcise le nombre : cent brebis, dix drachmes et deux fils. Il y a des gars et perdus et d'autres qui ne le sont pas. La joie par contre tait chaque fois pour la premire catgorie Ń ce qui doit rendre plein d'espoir le pcheur, pourvu qu'il se repente.
Dans les trois paraboles, le Seigneur demande se rjouir avec Lui. Il ne veut pas Se rjouir tout seul d'avoir retrouv ce qui tait perdu mais en invite d'autres se rjouir avec Lui.
Pour conclure : Il n'y a donc pas de contradictions dans les paraboles du Sauveur mais complmentarit, car chaque parabole ne sait exprimer que certains aspects et une partie seulement de la ralit.
Archimandrite Cassien
DE LA VIE DE SAINT BASILE LE GRAND
Une fois une pauvre femme, qui avait t lse par un magistrat, se plaa sur le chemin de Basile, tomba ses pieds, et le supplia dÕcrire une lettre dÕintercession au magistrat, car elle savait quÕil avait de la considration pour lui. Prenant une feuille de parchemin, il crivit la lettre suivante : ĒCette pauvre femme sÕest adresse moi en disant que ma requte aurait beaucoup dÕimportance tes yeux. Si cÕest vraiment le cas, prouve-le par des actes et fais-lui misricorde !Č Ayant fini dÕcrire, il tendit la missive lÕinfortune qui se rendit chez le magistrat. Ce dernier rpondit au saint de la faon suivante : ĒConformment ta lettre, saint pre, je voudrais bien tre misricordieux envers cette femme, mais je ne puis le faire, car elle est soumise lÕimpt gnralČ. Alors le saint rpondit en ces termes : ĒSi tu voulais mais ne pouvais pas, cÕest bien; mais si tu pouvais et ne voulais pas, alors Dieu te comptera toi-mme au rang des ncessiteux, de sorte que tu ne puisses plus faire ce que tu veux !Č Les paroles du saint ne tardrent pas se raliser. Peu de temps aprs, lÕempereur se fcha contre le magistrat en apprenant quÕil opprimait le peuple, et le fit jeter en prison pour quÕil ddommage tous ceux quÕil avait opprims. Le magistrat sÕempressa de faire parvenir Basile une lettre pour le prier dÕavoir piti de lui et dÕintercder en sa faveur auprs de lÕempereur. Six jours plus tard, on reut lÕordre de librer le prisonnier. Comprenant la misricorde dont le saint avait fait preuve son gard, le magistrat se prcipita chez lui pour le remercier et rendit la pauvre femme le double de ce quÕil avait exig dÕelle.
Du plus lev au plus bas, du plus fondamental au plus futile, de la vertu au pch, il nÕy a souvent quÕun pas. Extrait du journal de saint Jean de Kronstadt |
de l'archevque Philarte (Goumilevsky) de Tchernigov (1805-1866)
La prdiction finale de sa Mort par le Sauveur et le dpart de Judas pour Le trahir (mercredi saint).
Mt 26,1-5, 14-16 (Marc 14,1-2, 10-11; Luc 22,1-6
Depuis les premiers sicles du christianisme, le saint jene du Grand Carme a t ddi la Passion du Sauveur sur la Croix. Et combien il est ncessaire, combien il est salutaire d'tudier le rcit de la Passion de notre Seigneur sur la Croix ! L'aptre Paul en tmoigne son propre sujet : "Car je nÕai pas eu la pense de savoir parmi vous autre chose que Jsus Christ, et Jsus Christ crucifi". (I Cor 2,2). Voil quel point il considrait importante la connaissance du Christ crucifi ! Comment ne pas savoir nous-mmes, comment ne pas tudier les Souffrances salutaires du Christ sous leur forme exacte et complte ? Peut-il y avoir quoi que ce soit de plus cher, de plus important pour nous, que la Passion de notre Sauveur ? L'Aptre appelle le Christ crucifi "Puissance de Dieu et Sagesse de Dieu" (I Cor 1,24). Quel sujet vaste et lev que le Christ crucifi ! Les caractristiques les plus particulires de Celui qui avait t promis au genre humain par l'ancienne rvlation se ralisrent avec toute l'exactitude dans l'histoire de Jsus souffrant sa Passion. Combien de consolation, combien de pouvoir il y a dans la foi en Christ ! La Passion de Jsus est la quintessence de toute sa vie, si pure, si sainte et divine. C'est la lumire de cela que son Amour pour les gens, sa Soumission son Pre dans les cieux, sa Douceur cleste, son Innocence et sa Puret, ainsi que son loignement, pour la Gloire de Dieu, de tout ce qui est terrestre, se manifestent. Et les instructions de ses derniers jours Š leves et saintes Š ne nous sont-elles pas d'autant plus chres qu'elles taient les dernires, comme si elles contenaient les dernires volonts d'un pre mourant ? Quel fils ne chrirait-il pas les dernires paroles de son pre ? Quel disciple ne garderait-il pas au plus profond de son me les instructions d'un noble prcepteur qui prend cong de lui pour toujours ?
Avec cela, je suis convaincu, mes auditeurs, que, cause de votre amour respectueux pour la Passion du Sauveur, vous allez, avec ardeur et amour, couter l'explication de l'vangile dcrivant ces souffrances pendant le saint jene du Grand Carme.
Autant que notre entendement nous le permet, nous vous montrerons, les uns aprs les autres, les enseignements et les vnements, dans leur ordre chronologique, d'aprs les saints vanglistes. Et en expliquant les paroles nobles des vangiles, nous n'allons pas nous en tenir nos opinions arbitraires, mais aux enseignements des saints pres et docteurs de l'glise.
Tout d'abord, nous allons expliquer l'ultime Prophtie du Sauveur concernant sa mort sur la Croix et l'appel de Judas la trahison.
"Lorsque Jsus eut achev tous ces discours, Il dit ses disciples :" (Mt 26,1).
Quelle tait la substance des discours prcdents ? Ils concernaient la Venue du Christ pour juger le monde entier (Mt 24,4-25).
C'tait l'ultime instruction du grand Illuminateur du monde. Cet enseignement au sujet de la fin du monde est la conclusion naturelle de l'oeuvre du Docteur du monde. Le ministre du Prophte sans prcdent, de l'Exemple des prophtes, s'tait poursuivi pendant trois ans et demi. La Lumire du monde, le grand Prophte (Jn 8,12, Lc 7,16) avait achev son oeuvre. Aprs cela, si Jsus Christ n'avait t que le docteur d'Isral, Il n'aurait eu rien d'autre faire au monde. Ce qu'il Lui fallait proclamer au peuple, Il l'avait proclam. La Volont de Dieu pour le peuple avait t rvle par le Fils de Dieu de faon complte, comme jamais avant. Elle a t expose avec une grande clart, et accessible l'entendement de tout un chacun, comme elle n'avait jamais t rvle par les prophtes. Mme les ennemis de Jsus tmoignrent en disant : "Jamais homme nÕa parl comme cet Homme". (Jn 7,46). Mais Jsus fut appel le Saveur du monde ds sa Naissance; ds sa Naissance le ciel avait proclam qu'avec Lui apparatrait la paix sur la terre et la bonne volont du ciel parmi les hommes. Il est clair qu'Il est plus que le Docteur d'Isral, plus que l'Illuminateur du monde. De plus, aurait-il suffi au pauvre genre humain d'entendre proclamer la Volont de Dieu son intention, mme dans toute sa plnitude ?
Non ! Š pour son salut, il tait ncessaire que la Justice cleste ft rconcilie avec l'humanit pcheresse. Et maintenant, le Sauveur, attendu depuis des sicles, ayant proclam la Volont de Dieu en tant que Prophte, accomplit la rconciliation du ciel et de la terre en tant que grand-prtre. C'est de cela qu'Il parle maintenant ses disciples.
"Il dit ses disciples : Vous savez que la Pque a lieu dans deux jours, et que le Fils de lÕhomme sera livr pour tre crucifi." (Mt 26,1-2).
Plus d'une fois, le Sauveur avait parl de sa Mort sur la croix de faon symbolique : ainsi Il avait expliqu Mose qui leva le serpent dans le dsert (Jn 3,14); ainsi Il avait parl de la destruction du temple de son Corps par les Juifs (Jn 2,19). Et Il leur avait, plus d'une fois, fait savoir clairement qu'Il devait souffrir et mourir Jrusalem (Mt 16,21; 17,22; 20,18). Et maintenant de nouveau, mais pour la dernire fois, deux jours l'avance, Il prophtise sa Mort sur la Croix. N'est-il pas clair que sa Mort est un acte de la Volont spciale de Dieu ? N'est-il pas clair que Jsus Christ va la mort de manire totalement libre, selon le dcret de la Volont de Dieu ? Il dit mme plus tt : "JÕai le pouvoir de la donner [ma Vie], et jÕai le pouvoir de la reprendre : tel est lÕordre que jÕai reu de mon Pre". (Jn 10,18). Et maintenant, ses oeuvres elles-mmes indiquent la mme chose.
"Vous savez que la Pque a lieu dans deux jours" (Mt 26,2).
Et quel jour tait-ce o c'tait dit aux disciples ? Six jours avant la Pque, le Seigneur Jsus avait t Bthanie, o Marie avait oint ses Pieds avec le parfum prcieux, et cela avait eu lieu le sabbath (Jn 12,1-3). Le jour suivant, c'tait son entre triomphale Jrusalem (Jn 12,12). Lundi, en allant Jrusalem, Jsus avait maudit le figuier strile, et le soir il tait retourn Bthanie (Mt 21,18, Mc 11,13-14,19). Mardi, la remarque de Pierre concernant le figuier dessch, Il avait parl du pouvoir de la foi, et plus tard Jrusalem Il avait convers avec les scribes (Mc 11,21-27). Ainsi, le mercredi de la semaine de la Passion, le Seigneur parle ses disciples de ses Souffrances, qui doivent s'accomplir la Pque.
"La Pque a lieu dans deux jours, et le Fils de lÕhomme sera livr pour tre crucifi". (Mt 26,2). Quel est le sens de la concidence de ces deux circonstances ? La Pque tait la plus grande solennit des Hbreux. Elle unissait deux commmorations : premirement, le sauvetage des premiers-ns d'Isral de l'pe destructive du ciel, qui dtruisit les premiers-ns d'gypte; et deuximement, le sauvetage de toute la nation d'Isral du pharaon, qui se noya dans la mer Rouge. Quelle que ft la grandeur de ces vnements dans la destine d'Isral, l'importance la plus grande chut la clbration pascale par la signification archtypale de l'agneau pascal. Quand le Seigneur Jsus dit ses disciples qu'Il allait tre livr tre crucifi la Pque, il n'est pas vident s'ils avaient compris son indication leur adresse de la concidence mystique de sa Passion avec les jours de la Pque. Plus tard, cependant, clairs par l'Esprit saint, ils firent remarquer clairement et continuellement cette corrlation mystique des vnements.
"Christ notre Pque a t immol", dit l'Aptre Paul (I Cor 5,7), et Il nous a command de clbrer une nouvelle Pque, "non avec du vieux levain, non avec un levain de malice et de mchancet", comme les Hbreux l'avaient clbre, "mais avec les pains sans levain de la puret et de la vrit" (cf. I Cor 5,7-8). "Nous sommes sauvs", enseigna l'aptre Pierre, "par le prcieux Sang du Christ, comme dÕun agneau sans dfaut et sans tache" (I Pi 1,19), et par consquent nous n'avons pas besoin de l'agneau pascal d'gypte.
"Alors les principaux sacrificateurs et les anciens du peuple se runirent dans la cour du souverain sacrificateur, appel Caphe; et ils dlibrrent sur les moyens dÕarrter Jsus par ruse, et de Le faire mourir." (Mt 26,3-4).
Selon le rcit de saint Jean, lorsque Jsus eut ressuscit Lazare, le sanhdrin dcida de Le tuer. Ensuite, ils donnrent l'ordre de saisir le Matre nazaren ; mais le Seigneur, ne Se soumettant pas au danger prmaturment, Se cacha. Cela se passa une semaine avant la Pque (Jn 11,53-57; 12,1). Maintenant le sanhdrin s'tait assembl pour dlibrer comment raliser leur dcision de faire mourir Jsus. Ils proposrent, premirement, d'agir contre Lui en secret. Deuximement, ils dcidrent que sa mort ne devait en aucun cas avoir lieu lors des festivits de la Pque (Mc 14,2). Pourquoi le sanhdrin a-t-il dcid d'agir contre le Christ de cette faon ? "afin quÕil nÕy ait pas de tumulte parmi le peuple" ... "car ils craignaient le peuple" (Mc 14,2, Lc 22,2). Une conscience tranquille n'a peur de rien, mais une sans honneur fuit mme quand personne ne la poursuit (cf. Ps 13,6). Le sanhdrin craignait le peuple, qui rvrait Jsus, bien que cette crainte ft entirement infonde, comme le prouvrent les vnements ultrieurs. Une conscience tranquille agit ouvertement; elle ne ddaigne pas la circonspection de la prudence, mais elle ne se cache pas non plus du peuple par crainte des gens, ni elle ne prend de mesures d'astucieuse ruse. Le sanhdrin sentit que son agissement tait loin d'tre celui d'une conscience pure, et ils taient forcs d'agir avec subtilit, en employant des mthodes de ruse basse. Ainsi le sanhdrin a formul un plan d'action. Leurs intentions seraient-elles ralises ? tait-il possible que, comme des gens ayant dans leurs mains une autorit puissante, ils ne pourraient pas mener bien quelque chose qui, selon leur raisonnement, tait absolument ncessaire ? Cependant, tout se passa de faon contraire. Pourquoi cela ? Parce que, avant que le peuple ait fait sa dcision, Celui qui avait t envoy par le Pre cleste avait dit : "La Pque a lieu dans deux jours, et le Fils de lÕhomme sera livr pour tre crucifi". (Mt 26,2). C'est ainsi que sont dtruits les projets des hommes, ds qu'ils ne correspondent pas ceux de Dieu. Contre leur volont, au dtriment de leur honneur, les gens font quelque chose qu'ils avaient auparavant jug dsavantageux pour eux, quelque chose qu'ils n'avaient pas souhait faire. Et ils le font parce que la Volont de Dieu en a dispos ainsi.
"Alors lÕun des douze, appel Judas Iscariot, alla vers les principaux sacrificateurs, et dit : Que voulez-vous me donner, et je vous Le livrerai ?" (Mt 26,14-15).
Judas tait ncessaire au sanhdrin afin qu'il puisse, comme il l'avait dcid, prendre Jsus par ruse. Ainsi, il n'y a pas de doute que Judas offrit sa trahison peu de temps avant la deuxime runion du sanhdrin. Judas apprit qu'ils cherchaient une occasion de prendre Jsus en secret, et il s'empressa d'offrir ses services au puissant sanhdrin.
Qu'est-ce qui a oblig Judas se rsoudre un acte aussi sombre ? Certains pensent que Judas, cause de sa foi en le Messie-Roi, souhaitait voir son royaume terrestre apparatre plus vite. Les Canites1 vnraient Judas pour sa trahison et disaient que lui seul parmi les aptres tait dou de prvision dans le mystre du salut de l'homme par la mort de Jsus.2 Certains nouveaux hrtiques disent des choses semblables. Mais les vanglistes n'indiquent ni par parole, ni par suggestion, qu'il y avait en Judas un dsir d'introniser son Matre plus rapidement, mme si une telle pense son sujet avait soulag leur chagrin caus par leur frre tratre. Au contraire, ils ont partout indiqu en Judas une me avide de gain, d'argent. Le Fils de l'homme en tmoigne : "Malheur lÕhomme par qui le Fils de lÕhomme est livr !" (Mt 26,24). Et, de toute vidence, un jugement aussi svre ne saurait s'appliquer un prophte du royaume du Messie. Judas, ds le dbut de sa trahison, exprima son me : "Que voulez-vous me donner", dit-il, "et je vous Le livrerai ?" (Mt 26,15). Il dit lui-mme qu'il a besoin d'argent et qu'il est prt livrer son Matre pour de l'argent. Il dit la mme chose dans sa confession avant sa mort : "JÕai pch, en livrant le sang innocent." (Mt 27,4); et il rend les fatales pices d'argent. C'tait donc la passion de l'argent qui poussa Judas la trahison. Elle avait germ depuis longtemps dans l'me de Judas, y fut cultive et poussa peu peu, tant jalousement nourrie. Augmentant progressivement, elle finit par obscurcir les penses lumineuses dans son me concernant son Matre cleste et ses oeuvres. Le Sauveur, par sa Vie, veilla la conscience de Judas la lutte contre les passions et exposa clairement son manque de foi en paroles (Jn 6,64).
Mais la passion augmentait, et les penses pures sur l'amour et la vrit, sur la vnration et la gratitude, furent caches la vue de Judas. Elle le conduisit secrtement devenir voleur (Jn 12,6) et finalement mme tratre. Et maintenant il marchande avec des mchants le prix pour lequel il est prt leur livrer le grand Matre, l'Ami et l'Envoy de Dieu.
Il est effrayant de voir o peut mener la passion de l'argent. Elles sont vraies, les paroles de l'Aptre : "Mais ceux qui veulent sÕenrichir tombent dans la tentation, dans le pige, et dans beaucoup de dsirs insenss et pernicieux qui plongent les hommes dans la ruine et la perdition". (I Tim 6,9). Par le remords final de Judas, on peut voir que, dsirant avidement avoir l'usage des pices d'argent, il n'avait pas vu les consquences de son acte, ou en avait mis de ct la pense, croyant que son Matre trouverait le moyen de Se librer des mains du sanhdrin, comme Il l'avait fait plus d'une fois. La puissance de la passion couvrit son me d'paisses tnbres. "Comme un ivrogne, pendant qu'il se remplit de vin," dit st Jean Chrysostome, "n'y voit pas de mal, mais apprend plus tard par exprience combien c'est nocif Š ainsi est le pch. Avant d'tre commis, il obscurcit l'intellect, plaant devant lui un nuage pais, et la conscience ne s'veille que plus tard."
"Aprs lÕavoir entendu, ils furent dans la joie" (Mc 14,11).
Voyez, des gens se rjouissent mme de l'infamie ! Oh, toutes les joies qu'prouvent les gens ne sont pas dignes de joie ! Ils se rjouissent du fait qu'une occasion gratuite s'est ouverte eux de faire le mal; un moyen facile a t trouv de commettre un crime; un homme a apparu, prt les assister dans leur malfaisance. Quelle joie effrayante ! Cependant, les gens n'ont-ils pas beaucoup de joies qui ne sont pas de meilleure valeur ?
"Et ils lui payrent trente pices dÕargent." (Mt 26,15).
On promit Judas trente pices dÕargent. Trente pices dÕargent, ou trente shekels, ne valent pas plus de quinze roubles d'argent en notre monnaie.3 Selon la loi, trente shekels taient le prix d'un esclave (Ex 21,32). Voyez-vous combien peu cher Judas a estim Celui qui lui a fait tant de bien ? L'vangliste Matthieu parle du prix auquel les Juifs ont estim le Christ Jsus, avec les paroles du prophte Zacharie. Par le prophte, le Seigneur dit avec lamentation : "Et ils pesrent pour mon salaire trente sicles dÕargent." (Zach 11,12). Ainsi le Seigneur, le Messie Lui-mme, est valu par les Juifs au prix d'un esclave. Ainsi fut le Sauveur du monde estim par le monde, selon la parole de la prophtie.
"Aprs sÕtre engag, il cherchait une occasion favorable pour leur livrer Jsus lÕinsu de la foule." (Lc 22,6).
Judas fit sa promesse et se mit chercher un moment qui convienne pour trahir Jsus Christ hors de la vue du peuple. tait-ce seulement cause du dsir du sanhdrin que Judas voulait livrer Jsus en secret ? Bien sr, le sanhdrin, comme nous l'avons vu, craignait le peuple. Mais Judas craignait aussi pour lui-mme. Ce n'est que la nuit qu'il s'aventura pour accomplir sa tche. Ne voyez pas de fermet ou de courage dans le pch. Il est aussi bas qu'il est aveugle. Judas, aprs avoir vu tant d'exemples de la Toute-Puissance de Jsus, pensa maintenant qu'il pourrait trouver un moment et un endroit o Jsus Christ ne Se cacherait pas de ses ennemis, mme s'Il le voulait. Mais s'exposer devant le peuple en tant que tratre de son Matre Š c'tait trop pour Judas.
O Divine Lumire ! O Amour, qui Te livres la souffrance pour nous ! claire les yeux de notre me, que nous puissions voir la ruine cause par les dsirs de notre cĻur pcheur ! Insuffle une crainte sacre en nous, que nous puissions frmir du pch ds qu'il s'approche de notre me. Fortifie notre volont par une puissance remplie de grce pour la lutte contre l'impit.
Mes auditeurs ! Terrible est le pch de Judas; terrible est son appel de livrer le Sauveur pour de l'argent. Mais la passion de l'amour du gain augmenta peu peu en Judas. Notre travail est de lutter contre le pch, et il nous est facile de le vaincre si nous matrisons la passion qui est en nous tant qu'il est encore son stade embryonnaire. Pourquoi cette lgret d'esprit, pourquoi cette imprudence Š de considrer l'une ou l'autre de nos passions comme une bagatelle, et par l lui laisser toute libert de gagner de plus en plus de pouvoir sur nous ? Oh ! Ne laissons pas notre cĻur trouver des excuses pour nos faiblesses ! Avec toute notre fermet, avec toute notre rigueur, levons-nous contre le pch ds qu'il touche notre me. Nous avons reu l'ordre de lutter contre le pch jusqu'au sang, au point de sacrifier notre force et tout ce qui nous est cher. Si cela signifie que nous devons rompre nos liens nocifs avec des gens, "ne marchons pas selon le conseil des mchants, ne nous arrtons pas sur la voie des pcheurs" (Ps 1,1). Le salut ternel de l'me vaut les luttes temporelles les plus difficiles. Gardons-nous pour la gloire du Nom de Dieu.
"Prtez l'oreille, vous tous, amoureux de l'argent, qui souffrez de la maladie de Judas," enseigne st Jean Chrysostome. "Gardez-vous de la passion de l'avarice. Si celui qui demeurait avec le Christ, oprait des miracles et bnficiait de tels enseignements tomba dans un tel abme parce qu'il n'tait pas libre de cette maladie Š alors ne pouvez-vous pas, vous qui n'coutez pas les critures est tes toujours occups du prsent, tre encore plus facilement sduits par cette passion si vous tes ngligents ? Comment pouvez-vous esprer chapper cette maladie quand vous n'usez pas d'un remde fort et que vous ne faites pas un effort de zle ? Cette passion est la plus terrible de toutes les passions.
Elle engendre des meurtres, elle engendre des guerres et des combats, elle engendre tout mal, quel que soit son nom. Il n'y a pas du tout de bnfice qui provienne de l'argent lorsque l'me est pauvre, et il n'y a pas de perte lorsque l'me est riche."
Gloire Dieu. Amen.
REClT DU PAPE ET PATRIARCHE JOACHIM D'ALEXANDRIE
Il y avait en gypte un certain roi circassien du nom de Gabriel, de religion turque, trs mchant pour les chrtiens, plus que les Turcs actuels, et qui avait auprs de lui un mdecin juif fort rus. (Merveilleux est le rcit du glorieux pape et patriarche Joachim d'Alexandrie et, celui de sa patience !)
Ce mdecin juif voulait faire prir et extirper tous les chrtiens d'gypte, mais il n'y parvint pas; il se rendit chez le roi d'gypte, Gabriel, et lui dit : ĒRoi, il y a des chrtiens chez toi en gypte; ils ne font pas dignes de vivre sur ton territoire, car ils sont impurs et leur foi n'est pas la bonne; ordonne-leur de prendre la foi turque ou la juive.Č Le roi rpondit : ĒJ'aurais fait d'eux des Turcs avant ce soir, s'ils n'avaient pas un vieux patriarche ce qu'ils appellent saint; c'est lui que je crains.Č Le Juif reprit : ĒNe crains pas ce vieillard, roi, livre-le entre mes mains, et je lui donnerai un tel poison que, mme s'il en prend une demi-cuiller, il ne vivra pas plus d'une heure.Č Alors le roi lui dit : ĒSi tu tes la vie ce vieillard, j'amnerai tous les chrtiens la foi turque, ou bien je les livrerai la mort.Č Et le roi ordonna au patriarche de le rendre chez lui.
Le patriarche vint chez le roi et le mdecin juif lui dit : ĒVieillard, quitte ta foi, et prends la foi turque ou notre foi juive qui est la vraie, tandis que votre foi chrtienne ne l'est pas.Č Le patriarche rpondit au roi en disant : ĒNous ne censurons pas votre foi turque, ni la juive, roi ! mais notre foi chrtienne orthodoxe est la bonne.Č Le juif dit alors au patriarche : ĒEst-il vrai qu'il est crit dans vos livres : ĒS'ils boivent quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal ?Č (Mc 16,18). Ne peux-tu pas boire un poison mortel pour [prouver] ta foi ?Č Le patriarche rpliqua : ĒJe suis prt mourir aussitt pour mon Christ et pour la foi orthodoxe; donne-moi immdiatement ce que tu veux.Č Le mdecin
juif dit alors au roi : ĒDonne-moi du temps jusqu' tel jour, roi ! et je lui prparerai un poison mortel.Č Cette discussion avait eu lieu un dimanche en prsence du roi, qui ordonna au patriarche de paratre le dimanche suivant devant lui.
Le patriarche, de retour chez lui, assembla tous les chrtiens et leur raconta qu'il avait discut de la foi chrtienne, en prsence du roi, avec le mdecin juif, et qu'il devait recevoir de les mains un poison mortel. ĒPres et frres ! leur dit-il, priez le Seigneur Dieu et l trs sainte Mre de me sauver, pour la foi orthodoxe, [des mains] du juif impie. Je serai avant vous auprs du Roi cleste et le supplierai pour vous, et vous recevrez tous des couronnes de martyrs des mains du Seigneur et souffrirez des tourments, et serez les nouveaux martyrs du tide prsent; car vous ne pouvez, frres, renier la foi orthodoxe; et vous changerez ma douleur en joie.Č Ils se jetrent ses pieds avec des larmes en disant :ĒNe nous quitte pas, seigneur ! afin que nous buvions la mme coupe mortelle que toi; ne pense pas, seigneur ! que nous allions renier la vraie foi orthodoxe; si tu es livr la mort, pas un seul de nous ne quittera le palais du roi sans l'avoir aussi bue.Č Rentrs chez eux, ils s'enfermrent pour toute la semaine, priant Dieu avec des larmes, et ne quittrent pas une seule fois leurs maisons. Quant au patriarche, il jena toute la semaine et gota peu de sommeil. Le dimanche de Pques, s'tant rendu pour les matines dans la sainte glise du thaumaturge Nicolas, debout sa place ordinaire, il s'affligeait de devoir
boire cette boisson mortelle et tait trs troubl. Au neuvime verset, appuy sur sa crosse, il sommeillait lgrement, lorsqu'il vit, comme dans un rve, une femme vtue de blanc qui sortait de l'autel avec deux adolescents. Cette femme s'approcha de lui et lui dit : ĒVieillard ! ose et ne crains pas, car je suis avec toi.Č Il ouvrit les yeux, et vit devant lui le sacristain avec une lampe. Il s'approcha alors de l'image de la trs sainte Vierge, et,
s'tant prostern jusqu' terre, loua Dieu avec des larmes. Au mme instant sa tristesse se dissipa, et une grande joie remplit son coeur. Les matines finies, il clbra lui-mme la divine liturgie et communia. Beaucoup de chrtiens, hommes et femmes, ayant reu de les saintes mains la divine eucharistie, se prparaient la mort avec lui. Le patriarche les bnit de ses mains, et les supplia en pleurant de ne pas renier le Christ, notre vrai Dieu. Ils l'embrassrent avec des larmes et de grandes lamentations, et lui promirent de boire avec lui la coupe mortelle et de verser leur sang pour le Christ.
Le patriarche fut rempli de joie et le prsenta chez le roi par pour la mort de tous les vtements sacerdotaux. Les chrtiens, hommes, femmes et enfants, se rendirent avec lui au palais royal, qui est trois ventes environ de l'glise du grand thaumaturge Nicolas. Une multitude de peuple les suivait : des Turcs, Arabes, Latins, Coptes, Maronites, Ariens, Nestoriens, Jacobites, Ttrodytes et gens de diffrentes religions, pour voir ce qui arriverait aux chrtiens. Le patriarche parut avec les chrtiens dans le palais, devant le roi; la salle tait pleine de gens du roi; [il y avait] des pachas, des santschaks, et le maudit
Juif. Une coupe pleine d'un breuvage empoisonn tait pose sur la fentre. En entrant dans la salle, le patriarche salua trois fois du ct de l'orient, et dit au roi : ĒOrdonne de me donner ce que tu as command, je fuis prt boire la coupe mortelle pour mon Christ.Č Le roi rpondit : ĒVieillard ! ce n'est pas avec nous que tu as discut de la foi, et ce n'est pas nous qui te donnons la coupe.Č Le Juif prit alors la coupe, l'apporta au
patriarche, pleine d'un breuvage fortement empoisonn et couvert d'cume, et lui dit : ĒPrends cette coupe et bois ! si ta foi est la vraie, tu n'auras aucun mal; si elle ne lÕest pas, tu auras bu la mort.Č Le saint patriarche prit la coupe, les larmes aux yeux, dit l prire, fit le ligne de la croix au-dessus, et, ayant souffl, du vin rouge apparut aussitt sous l'cume. Les chrtiens prsents s'crirent avec des pleurs : ĒSeigneur ! aie piti des chrtiens !Č Er ils le mirent rpter : ĒDieu, aie piti de nous !Č
Quant au patriarche, il vida la coupe jusqu'au bout et le breuvage lui parut du vin trs doux et bon, et il relia sain et sauf. Alors il dit au roi : ĒOrdonne de me a donner un peu d'eau.Č Et son visage s'claircit comme le soleil et tous furent merveills de la beaut de son visage. On lui apporta un peu d'eau; il la versa dans la coupe, et, l'ayant lgrement rince, il la prsenta au Juif avec ces paroles :ĒJ'ai bu un poison mortel servi par ta bonne foi, et toi bois un peu d'eau de ma mauvaise foi.Č Le Juif ne voulut pas boire, sur quoi le patriarche dit : ĒRoi ! juge quitablement entre moi et le Juif; nous avons bu de les mains le poison qu'il a voulu et qu'il a pass une semaine prparer, et moi j'ai vers devant toi de l'eau dans la coupe, et non du poison.Č Tout le peuple prsent s'mut contre le Juif. Le roi lui ordonna de boire et l'y contraignit grand'peine. Il but un peu de cette eau et son corps commena aussitt enfler. Il s'enfuit du palais dans sa maison, et le roi envoya un janissaire sa suite pour voir ce qui lui arriverait. Une demi-heure aprs le janissaire revint et dit : ĒLe maudit Juif a rendu l'me, roi ! son ventre s'est fendu et dvers.Č Alors le roi dit : ĒDemande-moi ce que tu veux, vieillard ! et ne sois pas fch contre moi; ce n'est pas moi qui t'ai donn le poison; celui qui te l'a donn a pri. Le patriarche lui rpondit : ĒIl ne faisait ce que que tu lui avais ordonn,Č et ajouta : ĒDonne-moi les chrtiens qui habitent l'gypte, afin qu'ils ne dpendent que de moi et que je les juge, que tes commissaires n'entrent pas chez eux, et qu'ils ne puissent tre vendus.Č Le roi lui abandonna les chrtiens et commanda de lui donner un rescrit, et il le retira.
Les chrtiens l'emportrent dans leurs bras en louant Dieu, et donnrent un grand et abondant repas aux plerins et aux pauvres. Depuis ce jour les Turcs commencrent vnrer le patriarche et le craindre grandement. De retour dans sa cellule, le saint patriarche perdit toutes ses dents, une une, sans souffrance, cause du violent poison. Les moines lui font tous les jours du pain blanc et tendre, et le nourrissent ainsi. Il fut patriarche en gypte, pendant seize ans, aprs avoir pris cet affreux poison.
Le sultan turc Soliman vint de Constantinople au Caire et prit [cette ville] en l'anne sept mille vingt-deux, ainsi que le roi Gabriel, qui avait donn le poison, et le fit pendre dans ses vtements royaux aux portes de fer qui sont au bout de la grande place.
On nous dit que le saint patriarche occupe le sige patriarcal depuis quatre-vingt-cinq ans. Il prit les ordres dans le Couvent du Sina, y passa douze ans, et officia pendant trois ans Jrusalem, au Saint Spulcre de notre Seigneur.
Dans : LE PéLERINAGE DU MARCHAND BASILE POSNIAKOV AUX SAINTS LIEUX DE L'ORIENT (1558-1561)
Si nous voulons quitter ce monde en de bonnes dispositions et aller au paradis, tout en appelant notre Dieu amour et pre, nous devons avoir deux amoursŹ: l'amour de Dieu et l'amour de notre prochain. Il nous est naturel d'avoir ces deux amours, et il est contraire la nature de ne pas les avoir. De mme qu'une hirondelle a besoin de deux ailes pour voler, de mme avons-nous besoin de ces deux amours, car sans eux nous ne pouvons tre sauvs. Saint Cosmas dÕtolie |
ĒLa contrition est la peine parfaite du cĻur qui envahit la personne qui, cause des pchs commis, a du Dieu et transgress sa loi divine. Cette contrition ne vient qu' ceux qui sont parfaits et ceux qui sont enfants de Dieu, car elle provient uniquement de l'amour de Dieu, tout comme un fils se repent simplement parce qu'il a du son pre, et non parce qu'il a t dshrit ou chass de la maison paternelle. Au sujet de cela, le divin Chrysostome ditŹ:ŹĒGmissez aprs que vous ayez pch, non pas parce que vous serez puni (car cela n'est rien), mais parce que vous avez offens votre Matre, celui qui est si gentil, qui est si bon, celui Qui vous aime tant et dsire ardemment votre salut au point d'avoir donn son Fils pour vous. En raison de tout cela, gmissezČ (Homlie de Saint Jean Chrysostome sur II Corinthiens). [Ź...] Afin d'acqurir la contrition, considrez combien vous avez trait Dieu de faon injuste par vos pchs. [...]
1) Par vos pchs, vous avez offens et dshonor le Trs Haut et Grand Dieu Š vous qui n'tes qu'un ver avez dshonorez le Tout Puissant, vous qui n'tes que de l'argile avez offens et dshonor le Crateur de tout, vous qui n'tes rien avez offens et dshonor l'ętre Infini Š car vous avez transgress sa loiŹ: ĒTu dshonores Dieu par la transgression de la loiČ (Rom 2,23).
2) Par vos pchs, vous vous tes rvl tre un esclave et un fils ingrat l'gard d'un Matre si bon et d'un Pre rempli d'affection, qui vous a aim avant les sicles; ce n'est pas cause de votre valeur, mais uniquement cause de sa bont qu'il a dcid en sa divine pense de vous crer alors qu'il aurait pu en crer d'autres votre place. Vous l'avez dshonor car vous vous tes montr ingrat l'gard du Dieu qui vous a men l'tre, qui vous a cr son image et ressemblance, qui vous a donn un corps contenant tous les sens et une me avec toutes les facults, qui vous a fait roi de toutes les cratures, qui vous a donn la nourriture ncessaire, les vtements ncessaires, une maison, qui a command ses cratures senses de vous servir, qui vous a sauv de tant de dangers, maladies et de la pauvret dont tant d'autres personnes souffrent, qui vous a donn un ange pour demeurer vos cts et vous garder.
Vous avez dshonor Dieu car vous vous tes montr ingrat vis--vis de votre grand Bienfaiteur, qui a ordonn que vous naissiez de parents chrtiens, qui vous a reu tant de fois ses Mystres, qui a fait de vous son enfant par le saint baptme, qui vous a rachet des mains des dmons, qui s'est fait homme pour votre salut, qui a rpandu son sang jusqu' la dernire goutte pour faire de vous l'hritier de son royaume, qui tant de fois a attendu votre repentance aprs que vous ayez pch, alors qu'il en condamnait beaucoup d'autres qui avaient commis des pchs moindre, qui vous a suivi quand vous vous loigniez de lui, qui vous a parl, vous a aim, vous a suppli, dsirant votre salut.
En somme, vous avez dshonor Dieu parce que vous vous tes montr ingrat l'gard d'un tel Matre, qui a rpandu sur vous tant de bndictions et de grce, en partie et en totalit, de faon cache et manifeste, et la pire chose de toutes est qu'au moment o vous receviez toutes ces grces sous vos yeux, vous, crature ingrate, avez os Lui offrir en retour vos actes mauvais.
ļ mon frre pcheurŹ! Si jamais quelqu'un vous donnait seulement une seule de ces bndictions, vous ne sauriez comment le remercier. Mais quand ce n'est pas un homme, mais le Dieu tout puissant, le Crateur de tous les anges vous a accord tant de grces, comment se fait-il qu'au contraire, vous faites preuve d'ingratitude son gardŹ? Demandez-vous, mon frre, demandez-vous comment se fait-il que la terre vous porte encore et ne se soit pas encore ouverte pour vous avaler vivant. Demandez-vous comment se fait-il que le ciel ne vous ait pas frapp d'clairs pour vous carboniser; comment se fait-il que l'air que vous avez pollu de vos pchs, n'ait pas encore mis des vents toxiques afin de vous empoisonner, et comment se fait-il que tous les lments ne se soient soulevs contre vous comme des btes afin de vous avaler vivant, incapables de supporter de vous voir vous, l'apostat et leŹ fourbe, montrer une telle ingratitude par vos pchs l'gard de leur Crateur, qui est aussi votre plus grand BienfaiteurŹ: ĒRace perverse et retorse, est-ce le Seigneur que vous en rendrez responsableČ (Dt 32,5).
3) Vous avez dshonor Dieu car par vos pchs vous avez commis une injustice et une moquerie inoues contre la rdemption que le Fils de Dieu a accompli pour vous, parce que vous l'avez plac une seconde fois sur la Croix, vous avez foul au pied son amour, vous avez profan son trs saint Sang, vous avez insult la grce de son Esprit, vous avez ouvert ses plaies, vous avez renouvel les crachats, les soufflets, la couronne d'pines, la flagellation, les clous, la lance et toutes les souffrances et humiliations, vu que vous avez commis le pch, qui fut la cause de sa CrucifixionŹ:ŹĒils crucifient de nouveau, pour leur part, le Fils de Dieu et le dshonorent publiquementČ (Heb 6,6), dit le divin Paul.
ļ mon frre, si vous considrez ces trois lances par lesquelles vous avez bless Dieu en pchant, je suis certain que vous rugirez et gmirez comme un lion cause de vos pchsŹ: ĒJe gmis cause du trouble de mon cĻurČ (Ps 37,8-9), et vous harez le pch et vous en serez dgots, et votre cĻur sera bris en un millier de morceaux, mme s'il tait insensible et dur comme la pierre; vous le ferez verser des larmes de sang. Ainsi, autant que possible, concentrez-vous et mditez sur ces trois points en vu d'acqurir la sainte contrition, qui est la plus noble et la plus prcieuse partie de la repentanceŹ: il s'agit d'tre triste pour le seul motif que vous avez pch contre Dieu et attrist le saint Esprit, selon la parole de l'AptreŹ: ĒN'attristez pas le saint Esprit de DieuČ (Eph 4,30).
Saint Nicodme de lÕAthos (Manuel de la Confession)
Question :
Qu'est-ce que cela veut dire "cacodoxe" ?
Rponse :
Cacodoxe vient de caco (mauvais) et doxa (glorification); Ce nÕest pas ncessairement lÕhrsie ni le schisme.
Htrodoxe veut dire (autre glorification).
Les ĒnosČ ne sont pas encore condamns par notre Synode comme hrtiques quoiquÕils les sont vue leur Ļcumnisme. Le Synode attend encore. La mme chose pour les florinens.
Les cacodoxes sont videment en dehors de lÕglise et il nÕy a des sacrements valables que dans lÕglise. Autre chose la foi dÕun cacodoxe que Dieu seul juge, qui connat les cĻurs de chacun et autre chose les sacrements.
Le commencement de la chastet, cÕest un esprit qui ne flchit pas devant les penses ou rveries adultres; la perfection de la chastet, cÕest la puret qui voit Dieu.
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