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sous la juridiction de S.B. Mgr. Nicolas archevêque d'Athènes et primat de toute la Grèce
SOMMAIRE
NOUVELLES
LA FOI DES SAINTS (suite)
CHRISTIANISME OU ÉGLISE ?
LES PÈRES DE L'ÉGLISE (suite) : Saint Hilaire de Poitiers
HOMÉLIE DU IIe SIÈCLE
NOUVELLES
En octobre j'étais pour quelques semaines en Grèce, afin de me présenter devant notre nouvel archevêque et d'organiser la mission au Cameroun. On essaye d'avancer mais là-bas les néo-calendaristes font tout pour entraver notre mission. Enfin, si ceux-là ont l'Esprit de Dieu, que craignons nous ? et s'ils ne l'ont pas que peuvent-ils faire, tant que nous marchons droit.
Ici au Foyer c'est calme pour le moment et il n'y a rien de particulier à signaler.
Vôtre en Christ,
hiéromoine Cassien
notre monastère des moniales à Kératéa
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Évêque Nicolaï D. Velimirovitch
LA FOI DES SAINTS (suite)
Catéchisme de l'Église Orthodoxe
CHAPITRE 3
LES SEPT SAINTS MYSTÈRES
Q. Qu'appelle-t-on un saint Mystère ?
R. Un saint Mystère ou sacrement est une performance rituelle visible, par laquelle l'invisible Force qui sauve, la Grâce de Dieu, confère des Dons merveilleux aux participants.
Q. Qu'est-ce que la Grâce de Dieu ?
R. C'est les Dons divins que le Père accorde aux hommes par l'Esprit saint, à cause des mérites du Fils.
Q. Quels sont ces Dons ?
R. Tous les Dons possibles nécessaires à notre régénération, sanctification et salut.
Q. Sommes-nous donc sauvés seulement par la Grâce de Dieu ?
R. Oui, si nous acceptons de plein gré la Grâce de Dieu par la foi exprimée en bonnes Ïuvres.
Q. Combien y a-t-il de Mystères dans notre Église orthodoxe ?
R. Il y en a sept : le baptême, la chrismation, la communion, la confession, la prêtrise, le mariage et l'onction.
Q. Quels sont les Mystères que l'on ne peut répéter et lesquels que l'on ne peut pas ?
R. On ne peut répéter le baptême et la prêtrise. Les autres, on peut les répéter.
1. LE MYSTÈRE DU SAINT BAPTÊME
Q. Qu'est-ce que le saint baptême ?
R. C'est un saint Mystère par lequel la personne baptisée est purifiée de tout péché, originel et personnel, et est incorporée comme un enfant nouveau-né de Dieu dans l'Église du Christ.
Q. Qu'est-ce qui est le plus important dans la performance de ce saint Mystère ?
R. La triple immersion dans l'eau au Nom de la sainte Trinité : du Père, du Fils et du saint Esprit, avec les prières et supplications appropriées du prêtre.
Q. D'après quelle autorité tenons-nous le baptême indispensable pour tous les membres de l'Église ?
R. D'après l'Autorité du Christ :
Premièrement, en suivant son propre Exemple,
Deuxièmement, en suivant le commandement précis qu'Il a donné à ses disciples : "Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du saint Esprit." (Mt 28,19),
Troisièmement, en suivant son avertissement catégorique : "Ési un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu." (Jn 3,5)
Q. Quel est le sens de l'immersion et du relèvement trois fois répétés de la personne baptisée ?
R. Les trois immersions signifient la mort aux péchés contre la sainte Trinité, et les trois relèvements la vie dans et consacrée à la sainte Trinité.
Q. Quelles sont les trois choses que le prêtre demande à la personne baptisée ?
R. Renonciation à Satan, repentance et profession de foi correcte (Crédo).
Q. Dans le cas de petits enfants, qui parle en leur nom, pour renoncer, se repentir et professer la foi ?
R. Le parrain qui est le responsable dans ce cas.
Q. Quel est le devoir du parrain ?
R. D'instruire ou aider à instruire l'enfant baptisé dans toutes les vérités et la conduite chrétiennes.
Q. Comment le parrain est-il respecté ?
R. Le parrain est très respecté comme un père spirituel chez les orthodoxes.
Q. Pourquoi doit-on baptiser les enfants ?
R. Premièrement, de crainte que l'enfant non-baptisé, s'il mourait, ne soit exclu de la famille chrétienne et n'apparaisse au dernier Jugement parmi les païens.
Deuxièmement, parce que baptiser des enfants était une pratique apostolique. (cf. Ac 10,44; 16,15; 1 Cor 1,16)
Troisièmement, parce que le Seigneur Jésus aimait tant les enfants qu'Il donna le commandement suivant : "Laissez venir à Moi les petits enfants". (Mc 10,14)
Q. Comment sont donc considérés les parents qui, par négligence, laissent mourir leur petits sans baptême ?
R. Comme meurtriers de leurs propres enfants.
Q. Que faut-il faire quand il n'y a pas de prêtre tout près et qu'un enfant est très malade ?
R. Dans des cas aussi graves, l'Église permet que n'importe quel chrétien laïc, homme ou femme, fasse le baptême dans sa forme la plus simple, c'est-à-dire en plongeant l'enfant dans de l'eau, disant : "Le serviteur (ou : la servante) de Dieu est baptisé au Nom du Père, du Fils et du saint Esprit. Amen." Si l'enfant reste en vie, le prêtre complétera le baptême et procédera à la chrismation.
2. LE MYSTÈRE DE LA SAINTE CHRISMATION
Q. Qu'est-ce que la sainte Chrismation ?
R. C'est un Mystère divin par lequel la personne baptisée est armée par l'Esprit saint de force et de sagesse et d'autres dons pour garder la foi juste et pour vivre une sainte vie.
Q. Comment ce Mystère est-il conféré à la personne baptisée ?
R. Le prêtre oint du saint chrisme certaines parties du corps de la personne baptisée, en prononçant les paroles suivantes : "Sceau du Don du saint Esprit. Amen."
Q. D'où viennent ces paroles ?
R. De saint Paul qui disait : "Celui qui nous affermit avec vous en Christ, et qui nous a oints, c'est Dieu, lequel nous a aussi marqués d'un sceau et a mis dans nos cÏurs les arrhes de l'Esprit." (2 Cor 1,21-22)
Q. Pourquoi le front est-il oint ?
R. Pour sanctifier l'intellect afin qu'il pense à Dieu et à sa loi.
Q. Et la poitrine ?
R. Pour sanctifier le cÏur afin qu'il aime Dieu.
Q. Et les yeux ?
R. Pour les sanctifier afin qu'ils voient ce qui est bon dans toutes les créatures.
Q. Et les oreilles ?
R. Pour les sanctifier afin qu'elles écoutent la Parole de Dieu.
Q. Et les narines ?
R. Pour les sanctifier afin qu'elles respirer la bon odeur de l'Espit divin.
Q. Et la bouche ?
R. Pour la sanctifier afin qu'elle puisse magnifier le Seigneur et dire toujours ce qui est vrai et bon.
Q. Et les mains ?
R. Pour les sanctifier afin qu'elles soient toujours prêtes à faire des Ïuvres bonnes et charitables devant Dieu.
Q. Et les pieds ?
R. Pour les sanctifier afin qu'ils marchent toujours sur le droit chemin chrétien qui mène au Royaume de Dieu.
Q. Comment pouvons-nous le dire brièvement ?
R. Pour sanctifier l'homme entier, l'âme et le corps pour qu'il soit saint comme Dieu est saint.
Q. Est-ce une chose juste que de conférer la chrismation tout de suite après le baptême ?
R. C'est juste, également selon la sainte Écriture et la sainte Tradition. Car le baptême d'eau signifie la purification et la chrismation signifie la sanctification par l'Esprit saint. (cf. 1 Jn 2,20-27; 2 Cor 1,21-22; Ac 7,14-16.) Ils ne doivent pas être séparés. (cf. Ex 29,4-7)
Q. Est-ce le prêtre qui confère la chrismation ?
R. Oui, mais non sans la participation de l'évêque, qui prépare et consacre le chrême, sans lequel le prêtre ne peut chrismer.
Q. Y eut-il un usage préfigurant la chrismation dans l'Ancien Testament ?
R. Oui. Les anciens rois étaient oints (1 Rois 10,1; 16,13, Ps 89,20). Et maintenant nous, chrétiens, sommes oints parce que le Christ "a fait de nous un royaume, des sacrificateurs pour Dieu son Père" (Ap 1,6)
3. LE MYSTÈRE DE LA SAINTE COMMUNION
Q. Qu'est-ce que la sainte Communion ?
R. C'est un saint Mystère dans lequel les chrétiens fidèles prennent le vrai Corps et le vrai Sang de notre Seigneur Jésus Christ sous la forme visible du pain et du vin.
Q. Qui a institué le Mystère de la sainte Communion ?
R. Notre Seigneur Jésus Christ, à la veille de sa Crucifixion et Passion lors de la dernière Cène avec ses disciples.
Q. Comment l'a-t-Il institué ?
R. C'est décrit dans l'évangile : "Pendant qu'ils mangeaient, Jésus prit du pain; et, après avoir rendu grâces, Il le rompit, et le donna aux disciples, en disant : Prenez, mangez, ceci est mon Corps. Il prit ensuite une coupe; et, après avoir rendu grâces, Il la leur donna, en disant : Buvez-en tous; car ceci est mon Sang, le sang de l'alliance, qui est répandu pour beaucoup, pour le pardon des péchés. (Mt 26,26)
Q. À quel office la sainte Communion est-elle préparée et utilisée ?
R. Au plus important des offices de l'Église, la divine Liturgie.
Q. Pourquoi la divine Liturgie est-elle le plus important des offices de l'Église ?
R. Parce qu'elle réactualise le drame entier de la vie du Christ depuis sa Naissance jusqu'à son Ascension dans les cieux.
Q. Quel est le point culminant de la divine Liturgie ?
R. La consécration du pain et du vin par l'évêque ou le prêtre.
Q. Pourquoi ce Mystère est-il perpétué dans l'Église ?
R. À cause du Commandement du Christ : "Faites ceci en mémoire de Moi". (Lc 22,19)
Q. Pourquoi devons-nous communier ?
R. Parce que notre vie éternelle en dépend. Car le Christ a dit : "Celui qui mange ma Chair et qui boit mon Sang a la vie éternelle; et Je le ressusciterai au dernier jour." (Jn 6,54)
Q. Que se passe-t-il si nous ne communions pas ?
R. Dans ce cas, nous sommes en danger mortel. Car le Seigneur a dit avec force : "Si vous ne mangez la Chair du Fils de l'homme, et si vous ne buvez son Sang, vous n'avez point la Vie en vous-mêmes." (Jn 6,53)
Q. Comment devons-nous nous préparer à la sainte Communion ?
R. Par le jeûne et par la prière, par la confession de nos péchés et par le pardon des péchés des autres envers nous.
Q. Quel bienfait obtenons-nous de la sainte Communion ?
R. Nous prenons le Christ vivant en nous-mêmes et, étant ainsi unis à Lui, nous avons la Vie éternelle, selon ses Paroles : "Celui qui mange ma Chair et qui boit mon Sang a la Vie éternelle" (Jn 6,54), et "celui qui Me mange vivra par Moi" (Jn 6,57).
Q. Pouvons-nous expliquer cela par quelque analogie ?
R. Les enfants prennent le lait de leur mère qui est sa chair et son sang, et cette nourriture fait grandir leur corps. De la même manière, nous, enfants de Dieu, prenons la Chair et le Sang du Christ-Dieu dans la communion et cette nourriture fait grandir et mûrir notre âme.
Q. Que pouvons-nous dire d'autre de cette nourriture de notre âme ?
R. Notre corps est fait de la terre, il a donc besoin de nourriture terrestre; mais notre âme est de substance céleste, elle doit donc être nourrie de nourriture céleste. Et le Christ dit de Lui-même : "C'est ici le Pain qui est descendu du ciel" (Jn 6,58)
Q. Combien souvent devons-nous recevoir la communion ?
R. Au moins quatre fois par an, lors des quatre carêmes. Mais il est recommandé de la recevoir plus souvent, si l'on est préparé et particulièrement en temps de maladie.
Q. Quelle prière devons-nous dire avant de recevoir la sainte communion ?
R. "Je crois et je confesse, Seigneur, que Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant, venu en ce monde sauver les pécheurs dont je suis le premier. Je crois aussi que ceci est ton Corps très saint et très pur, que ceci est ton Sang vénérable et précieux.
Je T'en supplie, aie pitié de moi et pardonne mes fautes, volontaires et involontaires, commises en paroles, en actions, en conscience ou par ignorance et fais-moi digne de participer sans condamnation à tes immaculés Mystères, pour la rémission de mes péchés et la vie éternelle. Amen."
3. LE MYSTÈRE DE LA SAINTE PÉNITENCE
Q. Qu'est-ce que la sainte Pénitence ?
R. C'est le mystère par lequel nos péchés confessés sont pardonnés et notre réconciliation avec Dieu peut s'accomplir.
Q. Quels sont les péchés qui sont pardonnés dans le mystère de la pénitence et lesquels ne le sont pas ?
R. Tous nos péchés que nous commettons après notre baptême et que nous confessons à un prêtre et dont nous nous repentons.
Le péché originel est remis lors du baptême sans confession, mais quelques péchés mortels ne seront pardonnés "ni dans ce siècle ni dans le siècle à venir" (Mt 12,31).
Q. Quelles sont les conditions d'accès à ce mystère ?
R. La confession des péchés à un prêtre, suivie de la prière d'absolution du prêtre, qui accorde ainsi, par la sainte Trinité, la rémission de ses péchés au pénitent.
Q. Comment savons-nous que les péchés sont pardonnés au pénitent ?
R. De l'Écriture sainte et de la sainte Tradition. Le Christ pardonnait aux pénitents et les apôtres faisaient de même. De la Tradition nous connaissons beaucoup de cas de pécheurs qui se sont repentis de leurs péchés, ont corrigé leur vie et devinrent des saints.
Q. Qui a donné l'autorité aux évêques et aux prêtres de pardonner les péchés ?
R. C'est Jésus Christ Lui-même qui dit à ses apôtres : "Recevez l'Esprit saint. Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés; et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus". (Jn 20,22-23)
Q. Quand l'offensant est pardonné par l'offensé, est-il toujours nécessaire pour lui d'aller se confesser au prêtre ?
R. C'est recommandé. Car chaque péché que nous commettons contre les hommes, nous le commettons aussi contre Dieu. Car il n'y a pas de péché qui ne blesse pas Dieu. Nous devons donc aller voir les prêtres de Dieu pour la confession et le pardon.
Q. Dans quelle disposition psychique irons-nous voir le prêtre pour la pénitence ?
R. Avec un profond repentir et un cÏur contrit, avec le sentiment sincère du pardon envers ceux qui nous ont offensés et avec la volonté d'obéir au prêtre concernant la pénitence prescrite.
Q. Quelle pénitence le prêtre peut-il nous imposer ?
R. La pénitence varie selon la gravité de nos péchés, cela peut être le jeûne, la prière, la réparation des dommages faits à autrui, l'exercice de la charité, et même la privation de la sainte Communion pour un certain temps.
Q. Combien souvent irons-nous à la confession ?
R. Le plus souvent possible. La confession est indispensable avant la sainte Communion, et il est urgent en cas de maladie, car nous ne connaissons pas l'heure de notre mort. Nous devons donc être prêts, parfaitement prêts à rejoindre la famille de Dieu au ciel, en enfants repentis, pardonnés et bénis de Dieu.
5. LE MYSTÈRE DU SAINT ORDRE
Q. Qu'est-ce que le Mystère du saint Ordre ?
R. C'est le Mystère dans lequel le saint Esprit, par l'imposition des mains d'évêques, donne la grâce et l'autorité à l'ordinand d'accomplir d'autres mystères et de conduire la vie religieuse du peuple.
Q. Quels sont les degré du saint Ordre ?
R. Il y en a trois : évêque, prêtre et diacre.
Q. Quelle est la différence entre ces trois charges ?
R. L'évêque peut administrer tous les sept saint Mystères, le prêtre tous sauf celui du saint Ordre, et le diacre prête assistance au prêtre et à l'évêque, mais tout seul ne peut accomplir aucun des saint Mystères.
Q. Quels sont les degrés inférieurs de l'hiérarchie orthodoxe ?
R. Lecteurs, sous-diacres et diaconesses.
Q. Qui ordonne l'évêque ?
R. Il faut au moins deux évêques pour administrer ce mystère.
Q. Qui ordonne le prêtre ?
R. Un évêque suffit.
Q. Qui ordonne le diacre ?
R. Un évêque.
Q. De qui sont les évêques les successeurs ?
R. Des apôtres.
Q. Qui a institué l'hiérarchie de l'Église ?
R. C'est le Christ Lui-même en tant que vrai grand-prêtre. (He 5,4-6) Lui, en tant que source de tout pouvoir et de toute autorité dans son Église, donna le pouvoir aux apôtres d'enseigner, de guérir et de pardonner les péchés des hommes.
Q. Quelle est donc l'échelle entière de la hiérarchie ?
R. D'abord le Christ, comme éternel grand-prêtre et la tête de l'Église, ensuite du Christ les apôtres, puis des apôtres les évêques, et des évêques les prêtres et les diacres.
Q. Pourquoi l'imposition des mains est-elle indispensable dans ce Mystère ?
R. Telle était la pratique des apôtres (cf. 1 Tm 4,14; 5,22). Car dans ce Mystère c'est par l'imposition des mains que le pouvoir spirituel est communiqué à l'ordinand et c'est ainsi que la continuité légitime de l'autorité et du ministère est assurée.
Q. Pourquoi appelons-nous les prêtres "pères" ?
R. Parce que ce sont eux qui nous font naître à nouveau dans le saint Baptême, comme enfants de Dieu, qui nous nourrissent de la nourriture céleste (le Corps et le Sang du Christ) dans la sainte Communion, qui nous libèrent du péché par la sainte Pénitence et qui nous enrichissent par les dons particuliers de l'Esprit saint dans d'autres Mystères. De plus, ils prient constamment pour nous, nous enseignent, nous consolent, nous exhortent et nous guident. Ils sont donc réellement nos pères spirituels. Mais bien sûr, ils doivent être dignes de ce nom et de leur grand ministère.
6. LE MYSTÈRE DU SAINT COURONNEMENT
Q. Qu'est-ce que le saint Couronnement ?
R. Le saint Couronnement ou Mariage est un Mystère par lequel l'Esprit saint unit en une seule chair un homme et une femme, qui s'engagent devant le prêtre à rester attachés l'un à l'autre leur vie durant dans l'amour mutuel et la fidélité, et reçoivent la bénédiction pour engendrer et éduquer des enfants.
Q. Quand le premier couple a-t-il été béni par Dieu ?
R. Au paradis, le Seigneur Dieu a béni nos premiers parents, Adam et Ève, "et leur dit : Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre." (Gn 1,28).
Q. Combien étroite est-elle, cette union de l'homme et de la femme mariés ?
R. C'est la plus étroite de toutes les relations humaines. Car il est dit : "L'homme quittera son père et sa mère, et s'attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair" (Gn 2,24).
Q. Le Seigneur Christ a-t-Il confirmé cette ancienne loi du mariage ?
R. Oui. Il répéta ces mêmes mots de l'Écriture et, parlant contre le divorce, Il ajouta cette mise en garde : "Que l'homme donc ne sépare pas ce que Dieu a uni" (Mt 19,6).
Q. A-t-Il Lui-même sanctifié le mariage ?
R. Oui, par sa Présence aux noces de Cana en Galilée et par le miracle de la transformation de l'eau en vin.
Q. Donna-t-Il de la sorte un sens plus profond au mariage ?
R. Oui. De la même manière que l'eau changea en vin, l'amour charnel change aussi en amour spirituel des deux âmes à travers Lui dans le mariage.
Q. Le Nouveau Testament a-t-il apporté quelque chose de nouveau concernant la procréation des enfants ?
R. La procréation dans le mariage pré-chrétien avait pour but de "remplir la terre", tandis que le but du mariage chrétien est de remplir l'Église du Christ sur la terre et au ciel. Finalement, de remplir le paradis.
Q. Le mariage chrétien a-t-il un sens symbolique plus profond ?
R. Oui. Saint Paul compare le lien conjugal d'un homme et d'une femme au lien du Christ et de l'Église : "car le mari est le chef de la femme, comme Christ est le chef de l'Église". Comme un homme et une femme deviennent un dans le mariage, ainsi le Christ et son Église sont un et inséparable.
7. LE MYSTÈRE DE LA SAINTE ONCTION
Q. Qu'est-ce que la sainte Onction ?
R. Dans le Mystère de la sainte Onction, le prêtre récite des prières et oint des malades avec de l'huile bénite par laquelle la Grâce de Dieu effectue la guérison des souffrants.
Q. De quelle maladie s'agit-il ici ?
R. De la maladie du corps ou de l'âme.
Q. Comment la Grâce de Dieu agit-elle dans ce saint Mystère ?
R. Elle guérit le corps de ses infirmités et purifie l'âme de ses péchés.
Q. Depuis quand ce Mystère est-il pratiqué dans l'Église ?
R. Depuis le temps du Christ. Instruits par le Christ, les apôtres allèrent annoncer l'évangile, et, entre autres miracles, "ils oignaient d'huile beaucoup de malades et les guérissaient" (Mc 6,13).
Q. Comment l'administration de ce Mystère a-t-elle été transférée aux évêques et aux prêtres ?
R. Par l'ordre des apôtres. Saint Jacques écrit très clairement : "Quelqu'un parmi vous est-il malade ? Qu'il appelle les anciens de l'Église, et que les anciens prient pour lui, en l'oignant d'huile au nom du Seigneur; la prière de la foi sauvera le malade, et le Seigneur le relèvera; et s'il a commis des péchés, il lui sera pardonné" (Jacques 5,14-15).
Q. Le Mystère de la sainte Onction est-elle administrée seulement aux malades mortels et aux mourants ?
R. Non, mais ce merveilleux Mystère est administré aussi à ceux qui sont légèrement souffrants.
à suivre.
Béni soit tu Seigneur, car celui qui marche avec Toi ne s'arrête jamais;
il va de commencement en commencement, par des commencements qui n'ont pas de fin. saint Grégoire de Nysse |
CHRISTIANISME OU ÉGLISE ?
écrit de l'archevêque Hilarion Troïtsky
Sommaire :
INTRODUCTION
L'ÉGLISE FUT CONÇUE POUR REFLÉTER L'UNITÉ PARFAITE DU DIEU-TRINITÉ
ÊTRE CHRÉTIEN VEUT DIRE FAIRE PARTIE DE L'ÉGLISE
LA CONFUSION DE L'ÉGLISE AVEC LE CHRISTIANISME
CONCLUSION
INTRODUCTION
En général, les gens préfèrent garder le silence sur un sujet auquel ils ne connaissent rien et qu'ils ne comprennent pas et c'est tout à fait compréhensible. Imaginons, par exemple, quelqu'un qui ne connaît rien à la chimie, mais qui insiste pourtant à se mêler des affaires des chimistes sans arrêt. Il corrige leurs formules scientifiques obtenues au prix de grosses difficultés, changeant leur ordre ou les échangeant l'une contre l'autre. Nous serions tous d'accord pour dire que cette personne agit avec beaucoup d'imprudence et qu'elle ne mérite que notre mépris.
Il existe cependant un sujet, où trop de gens se considèrent comme des maîtres accomplis, et presque comme législateurs; ce sujet est celui de la foi chrétienne et de l'Église. Dans ce domaine aussi, il existe des formules claires et explicites, construites avec de grands efforts de pensée théologique, de direction spirituelle, de foi et de piété. Ces formules sont établies et doivent être acceptées avec foi. Sans égard à ce fait, beaucoup de gens entrent dans les questions de la foi et de l'Église uniquement comme des réformateurs audacieux et sûrs d'eux-mêmes, qui veulent tout refaire selon leurs propres désirs personnels. Plus ces gens ont une connaissance ou une compréhension insuffisantes, plus ils refusent de se taire. Au contraire, ils se mettent non seulement à parler, mais à crier. De telles vociférations sur les questions de la foi et de l'Église remplissent généralement les colonnes de journaux et les conversations ordinaires de gens qui la plupart du temps ne pensent que très rarement à la foi et à l'Église. Quand ils pensent à ces choses, ils préfèrent s'exprimer exclusivement d'un ton autoritaire et accusateur.
C'est dans un tel atmosphère que naissent une multitude de différentes opinions perverses, qui deviennent ensuite à la mode parce que personne ne prend la peine de les considérer pour les soumettre à l'examen. Lorsque de telles opinions prévalent, il peut arriver facilement qu'elles soient assimilées inconsciemment même par des gens qui, dans leur âme, sont dévoués à la foi et à l'Église.
Une des plus répandues de ces opinions prévalantes et "acceptées" est ce que nous pourrions appeler "la séparation entre la chrétienté et l'Église". Nous voudrions l'examiner avec l'aide de la parole de Dieu et les écrits des pères saints.
L'ÉGLISE FUT CONÇUE POUR REFLÉTER
L'UNITÉ PARFAITE DU DIEU-TRINITÉ
La vie du Christ-Sauveur présente au lecteur des saints évangiles de nombreux moments illustres qui remplissent l'âme d'un sens particulier de grandeur. Mais peut-être le plus grand moment dans la vie de toute l'humanité était celui où dans l'obscurité d'une nuit méridionale, sous les arches suspendues d'arbres à peine reverdis à travers lesquels le ciel lui-même semblait regarder la terre pécheresse avec des étoiles clignotantes, le Seigneur Jésus Christ, dans sa prière de grand-prêtre, proclama :
"Père saint, garde en ton Nom ceux que Tu M'as donnés, afin qu'ils soient un comme nousÉ Ce n'est pas pour eux seulement que Je prie, mais encore pour ceux qui croiront en Moi par leur parole, afin que tous soient un, comme Toi, Père, Tu es en Moi, et comme Je suis en Toi, afin qu'eux aussi soient un en Nous" (Jn 17,11; 20-21)
On doit prêter une attention particulière à ces paroles du Christ, car elles contiennent l'essence de la foi chrétienne qui y est clairement définie. La foi chrétienne n'est pas une quelconque doctrine abstraite acceptée par l'intellect et trouvée par chaque personne séparément. Au contraire, elle est une vie dans laquelle des personnes séparées sont si étroitement unies entre elles que leur unité peut être comparée à celle des Personnes de la sainte Trinité. Le Christ n'a pas prié seulement pour que sa doctrine soit préservée et répandue à travers l'univers. Il a prié son Père céleste pour l'établissement, ou plus exactement, pour la restauration sur terre de l'unité naturelle du genre humain, puisque l'humanité fut créée à partir d'une origine commune et d'une seule source (cf. Ac 17,26).
Selon les paroles de saint Basile le Grand, "L'humanité n'aurait connu ni scissions, ni discordes, ni guerres si le péché n'avait pas divisé sa nature" ; et, "c'est le point principal de l'économie salvatrice de l'incarnation de Dieu de ramener la nature humaine à l'unité avec Lui-même et le Sauveur. Puis, ayant détruit la partie mauvaise, de rétablir l'unité originelle comme un médecin extraordinairement habile rétablit, par un traitement curatif, le corps qui a été coupé en morceaux." L'Église est formée de cette unification d'individus; non seulement des apôtres, mais de tous ceux qui croient en Christ selon leur enseignement. Aucune institution terrestre qui puisse être comparée à la communauté nouvelle des gens sauvés. Il n'existe pas de forme d'unité sur terre comparable à l'unité qui est l'Église. Une telle unité n'existe qu'au ciel. Au ciel, l'amour incomparable du Père, du Fils et du saint Esprit unit les trois Personnes en un seul Être, de sorte qu'elles ne sont pas trois êtres, mais un seul Dieu vivant en une vie trinitaire. Ceux pour qui le Christ a prié le Père céleste : "afin que l'amour dont Tu M'as aimé soit en eux, et que Je sois en eux" (Jn 17,26), sont appelés aussi à un amour semblable, qui seul peut souder la multiplicité des personnes humaines dans un état d'unité.
Les paroles sus-mentionnées du Christ placent la vérité de l'Église dans une union étroite avec le mystère de la toute sainte Trinité. Ceux qui entrent dans l'Église et l'aiment deviennent comme les trois Personnes de la sainte Trinité, dont l'amour mutuel les unit en un seul Être. L'Église est comme une essence unique composée de personnes multiples, créée par l'initiation morale à l'amour. C'est précisément le thème que de très nombreux pères et docteurs éminents de l'Église saint Cyprien de Carthage, saint Basile le Grand, saint Grégoire de Nysse, saint Ambroise de Milan, saint Hilaire de Poitiers, saint Cyrille d'Alexandrie, saint Augustin d'Hippone and saint Jean Cassien ont perçu dans la première prière sacrée du Christ-Sauveur. Je me suis permis d'incorporer ici de courts extraits sur ce sujet des écrits de quelques-uns de cette grande et illustre assemblée des pères.
Saint Cyprien de Carthage, dans sa lettre à Magnus, dit : "Le Seigneur, nous enseignant que l'unité prend sa source dans l'Autorité divine, affirme : «Moi et le Père, Nous sommes un» (Jn 10,30)". Dans son écrit "La prière du Seigneur", Cyprien dit aussi : "Non content de nous avoir rachetés par son Sang, Il a aussi intercédé pour nous. Ce faisant, voici ce qu'Il désirait : que nous vivions dans la même condition d'unité dans lequel le Père et le Fils sont un."
Voici ce que dit saint Cyrille d'Alexandrie : "Le Christ, ayant pris comme exemple et image de cet amour, de cette concorde et de cette unité indivisibles, concevables seulement dans l'unanimité, l'unité d'essence que le Père a avec Lui et que Lui, de son côté, a avec le Père, désire que nous aussi nous unissions les uns avec les autres; évidemment de la même façon dont la sainte Trinité consubstantielle est unie, de sorte que le Corps entier de l'Église est conçu comme un, s'élevant en Christ par la fusion et l'union de deux personnes pour composer une nouvelle et parfaite plénitude. L'image de l'unité divine et de la nature consubstantielle de la sainte Trinité comme une interpénétration parfaite doit être reflétée dans l'unité des croyants qui sont d'un seul cÏur et d'un seul esprit." Saint Cyrille souligne aussi : "l'unité naturelle par laquelle nous sommes tous liés ensemble, et à Dieu, ne peut exister sans l'unité corporelle."
Toutes les Ïuvres terrestres du Christ, par conséquent, ne doivent pas être conçues seulement comme un enseignement. Il n'est pas venu sur terre pour annoncer quelque nouvelle proposition théorique à l'homme. Non ! Il est venu pour créer pour l'humanité une vie totalement nouvelle, c'est-à-dire l'Église. Le Christ Lui-même a dit qu'Il bâtirait l'Église (cf. Mt 16,18).
Selon la conception du Créateur Lui-même, il y a une différence vitale entre cette nouvelle communauté humaine et toutes les autres associations de gens dans les diverses sociétés. Le Christ Lui-même appela souvent son Église comme le Royaume de Dieu et dit que ce Royaume n'est pas de ce monde, c'est-à-dire que sa nature n'est pas de ce monde, n'est pas temporelle; il n'est pas comparable aux royaumes terrestres (cf. Jn 14,27; 15,19; 17;14-16; 18,36).
L'idée de l'Église en tant que nouvelle communauté parfaite et distincte d'une communauté d'organisation étatique est exprimée d'une façon profonde et admirable dans le kondakion pour la fête de la Descente de l'Esprit saint où l'Église commémore sa naissance : "Quand le Très-Haut descendit sur terre, Il confondit les langues et dispersa les nations. Maintenant Il distribue les langues de feu et nous appelle tous à l'unité. Glorifions donc d'une voix unanime le très-saint Esprit." Ici, la création de l'Église est placée en opposition à la Tour de Babel, et la "confusion des langues", lorsque Dieu, le Très-Haut, est descendu, confondit les langues et divisa les nations.
La narration biblique de la Tour de Babel a un sens extrêmement profond. C'est juste avant cet événement que la Bible relate les premiers succès de l'humanité déchue dans les domaines de la culture et de la société. C'est à cette époque que l'homme se mit à construire des villes en pierre. À ce moment, le Seigneur a confondu les langues de ceux qui vivaient sur terre de sorte qu'ils cessèrent de se comprendre et furent dispersés sur toute la terre (cf. Gn 11,4,7-8). Dans cette "construction de la Tour babylonienne", nous sommes en face d'un certain type universel de société civile ou étatique, basée sur une norme extérieurement légale.
Le philosophe russe V. S. Soloviev définit la loi ainsi : "La loi est une imposition obligatoire pour la réalisation d'un minimum défini de bien et d'ordre en vue d'empêcher certaines manifestations du mal". Même si nous acceptions cette définition de la loi, il est évident qu'elle ne correspondrait jamais à la morale chrétienne. La loi touche l'aspect extérieur et passe à côté de l'essence de l'homme. Une société créée sur une base légale ne peut jamais fondre les gens en une unité. L'unité est brisée par l'amour-propre et l'égoïsme, et la loi ne peut rien contre l'égoïsme. Au contraire, la loi ne fait que le garantir, en le préservant de l'empiètement de l'égoïsme des autres. L'objectif d'un état basé sur la loi consiste à créer, autant que possible, un ordre tel que l'égoïsme de chaque personne soit satisfait sans que l'intérêt d'autres personnes soit violé. L'unique chemin vers la création d'un tel ordre ne peut être que l'établissement d'une limite à l'égoïsme des membres individuels. Nous avons ici la contradiction insoluble de la loi : tout en protégeant l'égoïsme, elle lui impose des limitations. Par conséquent, une société basée sur la loi porte toujours en elle-même les semences de sa propre corruption, puisqu'elle soutient l'égoïsme, qui ne cesse de ronger toute unité. Le sort de la Tour de Babylone est celui de la société légaliste. Dans une telle société, il doit arriver souvent une "confusion des langues", où les gens cessent de se comprendre, tout en parlant la même langue. L'ordre légal donne souvent lieu à un désordre terrible.
La société chrétienne l'Église est en contraste directe avec une telle société légale purement temporelle. "Maintenant Il distribue des langues de feu et nous appelle tous à l'unité". L'Église n'a pas été créée par le Christ pour être un instrument de la préservation de l'égoïsme humain, mais au contraire, pour être celui de sa destruction totale.
La base de l'unité au sein de l'Église n'est pas un ensemble de principes légalistes garantissant l'égoïsme de chaque membre, mais l'amour, qui est juste le contraire de l'égoïsme individuel.
Dans ses paroles d'adieu, le Christ dit à ses disciples : "Je vous donne un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres; comme Je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres." (Jn 13,34-35)
C'est ce "nouveau principe" de l'unité ecclésiastique qui crée une unité organique, plutôt qu'une unification mécanique de personnes qui sont intérieurement divisées entre elles. Christ Lui-même compara l'unité de l'Église à l'unité organique d'un arbre avec ses branches (cf. Rm 11,17-24).
L'Apôtre Paul parle en détail concernant l'unité organique de l'Église. Il compara également l'église à un arbre, mais le plus souvent, il se réfère à ÔÉglise comme à un "corps" soma. Identifier l'Église à un Corps implique son unité, car deux corps ne peuvent être organiquement unis l'un à l'autre. Ce terme indique aussi le caractère particulier de l'unification des membres qui entrent dans la composition de l'Église. L'image du "corps" appliquée à l'Église est révélée de façon magnifique par l'Apôtre Paul. Tous ceux qui entrent dans l'Église sont séparément des membres, mais ensemble forment un seul corps en Christ (cf. Rm 12,5; 1 Co 12,20). Le corps est un, mais il a beaucoup de membres et tous sont membres d'un seul corps; bien qu'ils soient nombreux, ils composent un corps. "Ainsi le corps n'est pas un seul membre, mais il est formé de plusieurs membres. Si le pied disait : ÔParce que je ne suis pas une main, je ne suis pas du corps' ne serait-il pas du corps pour cela ? Et si l'oreille disait : ÔParce que je ne suis pas un Ïil, je ne suis pas du corps', ne serait-elle pas du corps pour cela?" (1 Co 12,14-16)
Dieu a arrangé chaque membre du corps comme il Lui a plu (cf. 1 Co 12,12; 12,16-18) exactement comme nous avons plusieurs membres dans un corps, tous n'ont pas la même fonction (cf. Rm 12,4). L'Ïil ne peut pas dire au bras, "Je n'ai pas besoin de toi," ni la tête ne peut dire une telle chose aux jambes. Dieu a assemblé le corps de parties interdépendantes, mais tous les membres sont également sensibles aux autres. Ainsi, si un des membres souffre, tous les membres souffrent avec; si un des membres devient grand, tous les membres s'en réjouissent (1 Co 12,21,24-26,27; cf. Rm 12,6,9).
Mais comment est-il possible de mettre en pratique une telle unité des gens dans une communauté ecclésiastique ? L'état naturel de l'homme correspond davantage à la création d'une société purement légale, puisque le péché est l'affirmation et l'amour de soi qui sont protégés par la loi civile. En effet, tant que l'homme garde son état pécheur, l'unité complète restera un rêve vide qui ne peut pas être réalisé.
Une telle réalisation est rendue possible cependant par le concept de l'Église. Christ a donné le commandement de nous aimer les uns les autres, mais le commandement seul est insuffisant. Comme chaque proposition théorique, elle ne peut rien créer si le pouvoir d'accomplissement n'est pas assuré. Si la doctrine chrétienne se limitait à un enseignement théorique de l'amour, elle ne servirait à rien, puisque le pouvoir pour la réalisation d'une telle doctrine n'est pas à la portée de la nature humaine, qui est déformée par le péché. La raison reconnaît que ce commandement d'amour est bon, mais l'homme rencontre constamment en lui-même une loi différente qui combat la loi spirituelle et qui le rend captif de la loi du péché (Rm 7,22-23).
Le genre humain reçoit une nouvelle force et ainsi la nouvelle unité de l'Église devient possible pour lui. Il y a un nouveau départ, une nouvelle source de vie le saint Esprit. Le Christ Lui-même a dit que celui qui ne naît pas d'eau et d'Esprit ne ne peut entrer dans le royaume de Dieu. (Jn 3,3). Lorsque l'apôtre Paul parle de l'unité du peuple dans l'Église, il parle toujours de l'Esprit saint comme la source de cet unité.
Pour l'Apôtre, l'Église n'est pas seulement un "Corps unique", mais aussi un "seul Esprit". (1 Co 12,11,13; Éph 4,3-4,7). Ici nous entendons non pas une conformité d'idées ou une unité de convictions religieuses, comme veulent croire certains penseurs occidentaux, mais un seul Esprit de Dieu qui pénètre le corps entier de l'Église, comme en témoignent les saints pères et docteurs de l'Église.
Quelle est l'unité de l'Esprit, demande saint Jean Chrysostome, et il répond : "C'est exactement comme l'esprit, dans le corps, contrôle tout et communique une sorte d'unité à la diversité qui surgit des différents membres corporels. Mais l'Esprit est donné aussi afin d'unir les gens qui sont divers entre eux quant à leur ascendance et leur manière de penser." "Avec ces mots (un seul esprit) il (l'Apôtre) a désiré d'implanter en eux un accord mutuel, comme s'il disait : puisque vous avez reçu un Esprit et bu d'une Source, il ne doit pas y avoir de désaccord entre vous."
Le bienheureux Théodoret dit : "Vous êtes tous considérés dignes d'un Esprit commun; vous composez un Corps." Le bienheureux Jérôme décrit : Un Corps au sens du Corps du Christ, qui est l'Église; et un saint Esprit, un seul dispensateur et sanctificateur de tous." Le bienheureux Théophylacte le Bulgare écrivit : "Comme l'esprit dans le corps est la fondation qui lie et unit tout, bien que les membres soient divers, ainsi l'Esprit saint qui vit dans les croyants les unit tous bien qu'ils soient différents par la naissance, le tempérament et les occupations."
Selon l'enseignement de l'Apôtre, toute vie d'Église est une manifestation du saint Esprit de Dieu; chaque manifestation d'amour, chaque vertu est un acte du don de l'Esprit saint. Selon les paroles de l'apôtre Pierre, les fidèles ne sont que les "dispensateurs des diverses Grâces de Dieu" (1 Pi 4,10). L'Esprit de Dieu a, par sa propre Puissance, pénétré tout le Corps de l'Église et distribué divers dons spirituels à chacun de ses membres, rendant possible une nouvelle vie pour le genre humain. Il unit tous dans le même corps, unifiant de telle sorte qu'il instille une sorte d'amour dans le cÏur des hommes, qui, dans leur état naturel, ne peut être un principe de leur vie et de leur relation avec d'autres.
Dieu est amour ce dit de l'Apôtre Jean peut être conçu comme le thème général de toute une série de discours apostoliques. L'Amour est donné comme titre à Dieu. L'Amour du Christ étreint les membres de l'Église (2 Co 5,14). L'Amour est le fruit de l'Esprit (Ga 5,22). L'Amour de Dieu est versé dans nos cÏurs par l'Esprit saint qui nous est donné (Rm 5,5). Dieu nous a sauvé par le renouvellement du saint Esprit qu'Il a répandu sur nous avec abondance par Jésus Christ notre Sauveur (Tit 3,5-6).
Ainsi, l'Esprit saint qui vit dans l'Église donne à chacun de ses membres la force de devenir une nouvelle créature, dont la vie est guidée par l'amour. L'enseignement de l'Apôtre Paul concernant l'Église est inséparablement lié à son enseignement sur l'amour en tant que principe fondamental de la vie chrétienne. Cette relation est rarement observé par les commentateurs érudits contemporains, mais les pères saints de l'Église la font remarquer. En ce qui concerne la comparaison apostolique de l'Église avec le corps, le bienheureux Théodoret dit : "Cette comparaison est appropriée dans l'enseignement de l'amour." Saint Jean Chrysostome, en interprétant les mots : "un seul corps", dit : "Paul nous demande un amour qui nous lie ensemble, nous rendant inséparables les uns des autres, et d'une unité si complète que nous semblions être les membres d'un seul corps. Seul un tel amour produit du vrai bien."
En lisant les épîtres de l'Apôtre Paul, on peut observer qu'il parle d'habitude de l'Église et de l'amour côte à côte. C'est, de toute évidence, parce que ces deux idées sont inséparablement liées ensemble dans sa pensée. Toute son éthique chrétienne est basée sur l'enseignement dogmatique concernant l'Église. Ainsi, dans les derniers chapitres de son épître aux Romains, l'Apôtre parle en détail de la morale chrétienne. Ce discours commence au neuvième verset du douzième chapitre, et dans les cinq versets qui précèdent (4-8), l'Apôtre expose l'enseignement de l'Église en tant que corps. Dans la première épître aux Corinthiens, après l'enseignement concernant l'Église au douzième chapitre, le "Chant d'amour du Nouveau Testament" suit directement (12,31-13,13). On peut remarquer aussi quelque chose de semblable dans les épîtres aux Éphésiens et aux Colossiens.
Que s'ensuit de tout ce qui vient d'être dit ? L'enseignement du Christ est une doctrine non seulement sur la ré-création d'une personne morale séparée, mais aussi celle d'une société parfaite, c'est-à-dire l'Église. L'Esprit de Dieu, demeurant dans l'Église, donne la force pour la réalisation de la doctrine chrétienne dans la vie. Puisque cet enseignement concerne la charité, sa réalisation crée aussi une communauté parce que la charité est un fondement qui lie et ne divise pas.
En dehors de l'Église et sans l'Église, une vie chrétienne est impossible. Sans l'Église, la seule doctrine chrétienne reste comme un son vide, car la vie chrétienne est une vie d'Église. Une personne ne peut vivre et se développer que dans la vie de l'Église. Dans l'organisme humain, les membres séparés ne grandissent ni se développent jamais de façon indépendante les uns des autres, mais toujours et uniquement en rapport avec l'organisme entier. La même chose s'applique à l'Église. Car la croissance de l'Église est en même temps celle de ses membres.
Dans les écrits du Nouveau Testament, le but de l'existence de l'Église est révélée en tant que perfectionnement morale de la nature humaine. Selon saint Paul, les dons et services spirituels existent en général dans l'Église pour l'accomplissement des saints, c'est-à-dire, pour la re-naissance morale des chrétiens, jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus à l'unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme fait, à la mesure de la stature parfaite de Christ (cf. Éph 4,13).
C'est pourquoi l'Apôtre décrit le processus par lequel l'humanité re-née atteint la pleine maturité du Christ. Sans entrer dans une analyse détaillée du texte grec de Éph 4,16, nous nous bornerons à expliquer la pensée qu'exprime l'Apôtre. Le corps entier de l'Église est uni en une harmonie qui augmente de façon permanente au moyen de la perception des dons abondants de l'Esprit saint qui agissent dans chaque membre d'une manière particulière. Ainsi, le Corps de l'Église atteint la perfection dans tous ses membres. Toute la croissance de l'organisme ecclésiastique entier dépend de chaque membre observant la loi de l'amour. La perception du don de l'Esprit n'est possible que par l'amour et en unn avec l'Église.
C'est la manière dont les paroles du saint Apôtre mentionnées plus haut sont comprises par saint Jean Chrysostome, le bienheureux Théodoret, ssaint Jean Damascène, le bienheureux Théophylacte. Leurs pensées sont rassemblées par l'évêque Théophane le Reclus, que nous citons : "La foi chrétienne unit les fidèles avec le Christ et compose ainsi un corps harmonieux à partir d'individus séparés. Le Christ façonne ce corps en Se communicant Lui-même à chaque membre et en leur dispensant l'Esprit de Grâce d'une manière effective et tangible. Ainsi, l'Esprit de Grâce descendant sur chacun en fait ce qu'il doit être dans le corps de l'Église du Christ. Le Corps du Christ étant harmonieusement réuni par ce don de l'Esprit, se construit en proportion de la mesure de laquelle chaque membre répond à son but ou agit pour le bien-êtree de l'Église dans la plénitude du don de Grâce reçu."
De cet enseignement de l'apôtre Paul et son interprétation par les saints pères citée plus haut, il est évident que, selon le Nouveau Testament, la perfection de la personnalité humaine dépend de son appartenance à l'Église en tant qu'organisme vivant, croissant sous l'influence bénéfique et abondante de l'Esprit saint. Si le lien avec le corps de l'Église est coupé, alors la personnalité qui est de ce fait isolée et enfermée dans son propre égoïsme sera privée de l'influence bénéfique et abondante de l'Esprit saint qui vit dans l'Église.
"Effectivement, s'il arrivait que la main devienne séparée du corps, l'esprit venant du cerveau, cherchant la continuation et ne l'y trouvant pas, ne sortirait pas du corps pour entrer dans la main coupée. Si la main n'y est pas, elle ne reçoit plus aucune communication. La même chose s'applique icisi nous ne sommes plus liés ensemble par la charité." "Tout ce qui s'est séparé de la sourec vitale ne peut, en raison de la perte de l'essence salvatrice, vivre et respirer d'une vie spéciale." "Enlève le rayon du soleil de sa source son unité ne lui permettra pas d'exister comme une lumière séparée; casse une branche d'un arbre la partie cassée perdra sa capacité de pousser; sépare une rivière de sa source la partie séparée se desséchera. De la même façon, l'Église, illuminée par la Lumière du Seigneur, répand ses rayons sur le monde entier, mais la Lumière qui se diffuse partout est une et l'unité du corps reste indivise. Elle étend ses branches, lourdes de fruits, sur le monde entier; ses rivières coulent loin; et toujours, la Tête reste Une. Un commencement, une mère, riche de fructification mûrissante."
Ces paroles animées et poétiques expriment clairement l'idée qu'un individu ou même une communauté chrétienne isolés ne sont vivants que pour autant qu'ils vivent la vie du Christ, qu'ils sont unis à l'Église catholique. Rester à l'écart ou s'enfermer en soi-même placent l'individu ou même l'Église locale dans la même position que serait un rayon séparé du soleil, une rivière de sa source, une branche du tronc d'un arbre. La vie spirituelle ne peut exister que dans une unité organique avec l'Église catholique; si cette unité est rompue, la vie chrétienne va se dessécher.
Nous espérons avoir rendu suffisamment clair que le concept de l'Église a une signification suprême dans l'enseignement du Nouveau Testament.
Le christianisme ne concerne pas les intérêts de la raison, mais seulement le salut de l'homme. Par conséquent, il n'y a pas en lui des données purement théoriques. Les vérités dogmatiques ont une signification morale et la morale chrétienne est fondée sur les dogmes. Le concept de l'Église comprend que l'Église est ce point où le dogme devient enseignement moral et la dogmatique chrétienne devient vie chrétienne. L'Église ainsi comprise donne la vie et pourvoit à la mise en pratique de l'enseignement chrétien. Sans l'Église, il n'y a pas de christianisme; il y a seulement l'enseignement chrétien, qui, par lui-même, ne peut "renouveler Adam déchu".
Si maintenant nous nous tournons de la doctrine de l'Église telle qu'elle est révélée dans le Nouveau Testament aux faits de l'histoire de la chrétienté, nous verrons que c'est précisément ce concept qui était fondamental à la vision chrétienne et qui a formé sa réalité. Avant toute autre chose, les chrétiens prirent conscience d'eux-mêmes en tant que membres de l'Église. La communauté chrétienne se référait à elle-même comme à une "Église", de préférence à tout autre nom. Le mot "Église" (ekklésia) apparaît 110 fois dans le Nouveau Testament, tandis que des mots comme "chrétienté" et des termes semblables y sont totalement inconnus. Après la descente de l'Esprit saint sur les disciples et apôtres du Christ, l'Église s'est créée comme une communauté visible, aveec une relation spirituelle réciproque entre ses membres.
Au début, il n'y avait pas d'enseignement systématique complet. La foi du Christ fut établi par quelques-uns dogmes généraux. Il n'y avait rien à apprendre dans le christianisme et peu de commun accord était exigé dans de quelconques propositions abstraites. Que signifiait-il, à cette époque, être chrétien ?
En nos temps, nous entendons beaucoup de réponses différentes comme : "Être chrétien signifie reconnaître l'enseignement du Christ, essayer d'obéir à ses commandements."
Cela, bien sûr, est la meilleure de ces réponses. Les premiers chrétiens, cependant, répondaient à cette question d'une manière tout à fait différente. Depuis les premières pages de son histoire, le christianisme apparaît devant nous sous la forme d'une communauté harmonieuse et uinanime. En dehors de cette communauté il n'y a pas eu de chrétiens. Être amené à croire au Christ, devenir chrétien signifiait s'unir à l'Église. C'est exprimé de façon répétée dans le livre des Actes des Apôtres, où nous lisons que "le Seigneur ajoutait chaque jour à l'Église ceux qui étaient sauvés" (cf Actes 2,47, 5,13-14). Tout nouveau croyant était comme une branche greffée sur l'arbre de la vie ecclésiastique.
Voici un exemple plus éclatant, une illustration de ce fait de rejoindre l'Église. Le persécuteur Saül qui respirait des désirs menaçants et assassins contre les disciples du Seigneur, subit une conversion sur la route de Damas et devint disciple du Christ. Voilà devant nous une révélation spéciale de Dieu à l'homme. À Damas, le Seigneur envoya Ananias pour baptiser Saül. Puis Saül partit pour Jérusalem afin de se joindre aux disciples de là-bas. Après que Barnabé eut informé les apôtres à son sujet, "il restait avec eux"
L'Esprit de Dieu vit dans l'Église. Ce n'est pas une thèse d'une sécheresse théorique, préservée seulement par respect de son ancienneté. Non, c'est la vérité; une vérité qui peut être expérimentée et connue par quiconque s'est laissé pénétrer de conscience ecclésiale. Cette Église remplie de Grâce ne peut être l'objet d'une recherche scolastique stérile, car elle n'est accessible à l'étude qu'à travers l'expérience. La langue humaine n'est capable de parler de cette vie pleine de Grâce que de façon vague et peu claire.
Saint Hilaire de Poitiers parlait correctement quand il dit : "C'est la vertu caractéristique de l'Église le fait qu'elle devient compréhensible lorsqu'on l'adopte".
Lorsque nous aurons quitté cette terre, il n'y aura plus de progrès possible.
saint Jean et Barsanuphe |
LES PÈRES DE L'ÉGLISE (suite)
Saint Hilaire de Poitiers
L'histoire a très souvent rapproché les noms de saint Hilaire et de saint Athanase. Non sans raison. Le premier, comme le second, s'illustra dans le combat pour l'Orthodoxie et contre l'arianisme. Ils subirent les mêmes persécutions, de la part des ennemis de la foi. Hilaire, lui aussi, souffrit l'exil et il y demeura longtemps, loin de son troupeau. La science a pu comparer, en les rapprochant, leurs deux personnalités mais, en oubliant leur qualité de théophores, elle a limités leurs vies et laissé un vide que l'histoire de l'Église vient de combler.
L'histoire de l'Église, en nous décrivant ces deux contemporains l'un de l'autre, nous instruit de cette vérité fondamentale qui repose sur des faits : pendant presque un millénaire, l'orthodoxie était alors la seule réalité chrétienne présente aussi bien en Orient qu'en Occident. La foi défendue par Athanase dans la partie orientale de l'Église, l'y était aussi dans sa partie occidentale : en Gaule, en Bretagne insulaire, en Armorique, dans les pays germaniques et partout ailleurs. La foi orthodoxe avait fleuri à Lyon avec saint Irénée et tant d'autres illuminateurs qui ont souvent laissé leurs noms aux terres qu'ils ont évangélisées.
Contrairement aux idées reçues d'après le schisme romano-papal, le conflit qui devait aboutir à la séparation de l'Église de l'ancienne Rome d'avec les autres patriarcats orthodoxes n'était pas le choc ultime d'un combat entre deux cultures chrétiennes : l'une d'Occident et l'autre d'Orient qui, avec le temps, auraient cessé de se comprendre, mais la conclusion d'une lutte interne à l'Occident.
Ainsi dans l'histoire de la résistance à l'arianisme, on rencontre saint Hilaire comme saint Athanase.
Le célèbre Venance Fortunat (auteur de la Vie de saint Hilaire) nous apprend que le grand hiérarque, dont il retraça les vertus, naquit au 4e siècle, au sein d'une noble famille des gaules vivant au pays des Pictaves. Il reçut du seigneur une intelligence supérieure qu'agrandit encore une éducation conforme à sa naissance.
Il fut élevé dans les superstitions du polythéisme, mais dès qu'il put réfléchir, son esprit pencha vers la foi chrétienne qui brillait dans le monde de tout son éclat. Après avoir étudié la philosophie, il passa aux livres religieux des chrétiens. Son cour y adhéra et il reçut ainsi de Dieu le don de la foi. Il parla de sa conversion dans le premier livre de son célèbre traité "De la Trinité".
Ayant revêtu le Christ par le baptême, Hilaire exprima la vérité confessée avant la triple immersion, par toutes ses actions. Il était devenu un si bon chrétien que les prêtres eux-mêmes dit Fortunat désiraient marcher sur ses traces. N'étant encore que laïque, il possédait déjà le zèle d'un apôtre et était le modèle de l'Église de Poitiers. Il était marié et père d'une fille nommée Abra. On conserve une lettre de lui, ainsi qu'un hymne : les deux écrits pour Abra précisément. Lorsqu'il devint évêque, sa vertueuse épouse lui laissa la liberté de se consacrer tout entier à l'Église.
Vers 350, l'évêque de Poitiers mourut. Nous ne connaissons pas son nom avec certitude, mais ils Ôagissait sans doute de Maxence, frère de Maximin, l'évêque de Trèves chez qui se réfugia saint Athanase. C'est en tout cas, l'ordre des anciennes listes épiscopales. Hilaire fut élu évêque par le clergé et le peuple fidèle par acclamation. Il accepta cette charge avec humilité et sens du service de Dieu dans la pastauration des brebis à lui confiées.
Le nouvel évêque se consacra en premier lieu à la prédication. Nous possédons encore son "Commentaire de l'évangile de saint Matthieu". Comme tous les évêques des premiers siècles chrétiens, Hilaire avait auprès de lui plusieurs disciples qui se formaient par ses leçons et ses exemples, à la vie consacrée par la pratique des vertus. On connaît saint Justus, le prêtre Léonius et saint Lupianus, qui mourut peu de jours après son baptême; mais le plus illustre de ceux qui assistèrent saint Hilaire est, sans contredit, le grand saint Martin, l'un des illuminateurs de la Gaule. Ce fut d'ailleurs saint Hilaire qui l'ordonna diacre.
Dès le début, Dieu destina saint Hilaire, à devenir l'un des plus intrépides adversaires de l'hérésie arienne et de Constance son protecteur. Comme saint Athanase, il devient une colonne de l'Orthodoxie par sa défense de la Divinité du Christ. Il sut aider à dissiper toutes les ruses des ariens. les hérétiques, comme toujours, voulaient tromper, présenter l'hérésie tellement enveloppée sous les dehors de la vérité qu'il soit possible de la prendre pour elle.
Hilaire s'était tenu à l'égard des conciliabules d'Arles (353) et de Milan (355) provoqués par l'empereur arien Constance, lesquels avaient à nouveau "déposé" Athanase et rallié l'Occident à la cause arienne. Constance avait aussitôt initiée une véritable persécution contre les chrétiens. Ceux qui refusaient l'arianisme étaient dépouillés de leurs biens, exilés, jetés en prison. Les vierges chrétiennes, qui voulaient conserver leur foi aussi pure que leur cÏur, étaient honteusement insultées, frappées de verges.
Témoin de ces infamies, éleva la voix pour s'adresser à l'empereur lui demandant de mettre un terme à toutes ces violences. Mais le zèle d'Hilaire et son éloquence ne servirent qu'à exciter contre lui la haine des sectaires. Il ne s'en émut pas et, sur son conseil, les évêques gaulois retranchèrent de leur communion, par un acte public, Saturnin d'Arles et Paternus de Périgueux qui adhéraient à l'hérésie.
Les deux excommuniés ne pardonnèrent point cet acte à Hilaire et, avec l'appui de Constance, ils assemblèrent à Béziers, un concile composé presqu'exclusivement d'ariens. Hilaire y fut cité. Il s'y rendit. Les hérétiques craignaient sa science orthodoxe et, plutôt que d'engager une discussion avec lui, ils l'accablèrent de cris et de calomnies les plus stupides. À tel point que Julien lequel devient plus tard empereur et apostat prit sa défense. Mais l'empereur d'alors, Constance, prit en mains la cause des ses amis ariens pour condamner Hilaire à l'exil en Phyrigie (Asie mineure).
Tout tourne à l'avantage de ceux qui aiment Dieu. Il en fut de même pour l'exil d'Hilaire qui, malgré ses peines, lui permit de s'abreuver aux sources théologiques et liturgiques de la partie orientale de l'Église. Il visita les paroisses, les diocèses, interrogea les évêques et prit encore plus conscience de la situation religieuse d'alors, comme de la perfidie et des ravages de l'arianisme. Il se décida à écrire afin de défendre la doctrine orthodoxe et rédigea alors son principale ouvrage "De la Trinité". C'est un monument de théologie comme l'Occident n'en possédait point.
Le grand Hilaire pénètre comme jusqu'au Sein de Dieu pour parler avec crainte et tremblement de ce que l'on peut connaître concernant l'opération éternelle par laquelle Il engendre son Verbe.
C'est ce traité qu'Hilaire envoya à sa chère Église en Gaule qu'il continua de gouverner par ses clercs fidèles.
Aux conciles de Rimini et de Séleucie (qui se tinrent en même temps, le premier en Occident et le second en Orient), Constance essaya à nouveau de faire triompher l'hérésie d'Arius. À Rimini, les évêques se laissèrent séduire par les formules captieuses des ariens. Hilaire, lui, assistait au concile de Séleucie où il confondit les ariens et semi-ariens qui parvinrent malgré tout à faire triompher leur doctrine confuse et indécise. Saint Hilaire accompagna les députés à Constantinople où ils rencontrèrent ceux du concile de Rimini. Constance essaya de faire adopter la captieuse formule. Hilaire s'y opposa et Constance força son concile de Constantinople à adopter la formule de Rimini qui était un chef d'Ïuvre de tromperie. Alors le grand évêque exhala sa juste indignation dans son "Discours contre Constance". Selon Sulpice Sévère, Constance pris de repentir, permit à Hilaire de retourner dans les Gaules. Son Église locale reçut avec amour cet athlète. On date la fin de son exil en 359.
Hilaire Ïuvra à pacifier l'Église des Gaules, toute agitée de ce qui s'était passé à Rimini.
Tout le monde dit Sulpice Sévère reconnut que notre gaule fut débarrassée de l'hérésie criminelle par le zèle d'Hilaire de Poitiers."
Dans ce même temps, il reçut une lettre de plusieurs évêques d'Orient qui l'avaient connu pendant son exil, et qui réclamaient le témoignage des évêques gaulois en faveur de la foi orthodoxe. À la prière du saint évêque de Poitiers, les évêques gaulois s'assemblèrent à Paris en 361 et écrivirent une lettre synodale, dans laquelle ils exposent avec netteté et précision la vraie foi.
En 364, averti par saint Martin, du triste état de l'orthodoxie en Italie du Nord lors de l'avènement de Valentinien, il organisa à Milan une réunion d'évêques italiens pour éloigner de son siège épiscopal l'arien Auxence. Hélas, par son habileté, l'hérétique sut se maintenir jusqu'à sa mort en 373. Ses méfaits étaient encore sensible lorsque saint Ambroise fut choisi pour lui succéder. Après cet échec, Hilaire rédigea un écrit "Contre Maxence", et dénonça avec véhémence les interventions de l'empereur en matière religieuse.
En même temps qu'il prenait avec tant de zèle la défense de l'Église entière, ce saint évêque ne négligeait pas son Église de Poitiers qu'édifiaient par leurs vertus, son épouse et Abra sa fille, qui, d'après son conseil avait conservé à Dieu sa virginité. Lui parlant un jour des perfections du Dieu qu'elle avait choisi pour époux, il lui demanda si elle ne désirait pas bien le voir et s'unir à Lui. Abra lui répondit que c'était son unique désir. Alors Hilaire se mit en prière et l'âme chaste et pure d'Abra s'envola au ciel. Sa mère envia le même bonheur. Le saint pria aussi pour elle, et lui obtint de rejoindre sa fille dans le Sein de Dieu. Lui-même les rejoignit en l'an 367, et son nom brille, parmi les plus grands confesseurs de la foi, au firmament de l'Église.
BIBLIOGRAPHIE
Aux Sources chrétiennes
"De la Trinité tome 1 n° 443 (32 euros); tome 2 n° 448 (38 euros) et tome 3 n° 462 (46 euros).
"Commentaires sur le psaume 118 n° 344 (27 euros) et n° 347 (34 euros)
Contre Constance" n° 334 (33 euros)
Sur Matthieu" n° 254 (44 euros) et n° 258 (49 euros)
Traité des mystères n° 19 bis (16 euros)
Dans l'édition DDB :
La Trinité Le mystère de Dieu
La Trinité Le Fils de Dieu
La Trinité Le Christ et l'histoire
C'est la vertu caractéristique de l'Église
le fait qu'elle devient compréhensible lorsqu'on l'adopte.
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HOMÉLIE DU IIe SIÈCLE
I, 1. Frères, nous devons regarder Jésus Christ comme nous regardons Dieu, comme " le juge des vivants et des morts" (Ac 10,42); et nous ne devons pas estimer peu notre salut. 2. Car si notre estime est médiocre, médiocre aussi est notre espérance. Ceux qui n'entendent là que de médiocres promesses sont en état de péché; et nous péchons nous-mêmes si nous ne savons pas d'où nous avons été appelés, par qui, et pour quelle destinée, ni toutes les souffrances que le Christ a endurées pour nous. 3. Avec quoi le paierons-nous de retour, quel fruit lui offrirons-nous qui soit digne de lui ? Combien grande est envers lui notre dette ? 4. La lumière est un don de sa grâce; comme un père il nous a appelés ses fils; alors que nous périssions, il nous a sauvés. 5. Comment le louer dignement, comment lui payer de retour tous ses bienfaits ? 6. Notre esprit était si infirme que nous adorions des pierres, du bois, de l'or, de l'argent, du bronze, toutes Ïuvres faites de main d'homme; et notre vie tout entière n'était rien autre que mort. Nous étions enveloppés de ténèbres, un voile épais obscurcissait notre vue, et voilà que nos yeux se sont ouverts; nous avons dissipé, par son libre vouloir, le nuage qui nous environnait. 7. Car il a eu miséricorde de nous, ses entrailles se sont émues et il nous a sauvés, ayant vu notre égarement et notre ruine; et que nous n'avions d'espérance qu'en lui pour notre salut. 8. Il nous a appelés quand nous n'étions pas; c'est son libre vouloir qui nous a faits passer du néant à l'être.
II, 1. "Réjouis-toi, stérile, qui n'enfantes pas, éclate en cris de joie et d'allégresse, toi qui ne connais pas les douleurs, car plus nombreux sont les fils de l'abandonnée que les fils de l'épouse, dit le Seigneur" (Is 54,1). Ces paroles : "Réjouis-toi, stérile, qui n'enfantes pas" s'adressent à nous; car notre Église était stérile avant que des enfants lui fussent donnés. 2. Ces mots : " Pousse des cris, toi qui ne connais pas les douleurs " signifient les prières que nous devons faire monter vers Dieu, en toute simplicité, et non pas avec un accent déchirant comme les femmes qui sont dans les douleurs. 3. Et ces mots : " Car les fils de l'abandonnée seront plus nombreux que ceux de l'épouse ", voici ce qu'ils signifient : Votre peuple semblait d'abord abandonné du Seigneur, mais maintenant que nous avons cru, nous sommes plus nombreux que celui qui semblait posséder Dieu. 4. Un autre passage de l'Écriture dit : "Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs" (Mt 9,13; Mc 2,17; cf. Lc 5,32). 5. Ce qui veut dire : c'est ceux qui se perdent qu'il faut sauver. 6. C'est là, en effet, une Ïuvre grande et admirable, d'affermir non les édifices solites, mais ceux qui croulent. C'est ainsi que le Christ a voulu sauver ce qui périssait, et Il a été le salut te beaucoup, Lui qui est venu et qui nous a appelés alors que déjà nous périssions.
III, 1. Voici quelle grande miséricorde Il a eu envers nous. D'abord, en nous donnant, à nous vivants, de ne pas sacrifier à des dieux morts; de ne pas les adorer, mais de connaître grâce à Lui le Père de vérité. Qu'est-ce, en effet, que le connaître, sinon refuser de renier celui par qui nous l'avons connu ? 2. Lui-même dit : "Celui qui M'aura confessé parmi les hommes, Je le confesserai devant mon Père" (Mt 10,32; Lc 12,8). 3. Voilà notre récompense, si nous confessons celui qui nous a sauvés. 4. Et comment le confessons-nous ? En faisant ce qu'Il dit, en ne désobéissant pas à ses commandements, en L'honorant non pas des lèvres seulement, mais de toute notre pensée. 5. ll dit en effet dans Isaïe : "Ce peuple ne m'honore que des lèvres, tandis que leurs cÏurs restent loin de Moi " (Is 29,13).
IV, 1. Qu'il ne nous suffise pas de l'appeler : Seigneur; car ce n'est pas cela qui nous sauvera. 2. Il dit en effet : "Ce n'est pas en me disant : Seigneur, Seigneur, qu'on sera sauvé, mais c'est en pratiquant la justice" (Mt 7,21). 3. Aussi, frères, confessons-le par nos Ïuvres, en nous aimant les uns les autres. Ne soyons pas adultères, fuyons la médisance et la jalousie; soyons chastes, miséricordieux, faisons le bien. Nous devons aussi prendre part à la peine des autres et ne pas trop aimer l'argent. C'est en pratiquant ces Ïuvres que nous confesserons le Seigneur, et non en pratiquant le contraire. 4. Ce n'est pas aux hommes, mais à Dieu que doit aller d'abord notre crainte. 5. Si nous prenons le premier parti, le Seigneur nous dit : "Même si vous êtes avec Moi rassemblés sur mon Sein, et que vous n'observiez point mes commandements, Je vous repousserai et vous dirai : Éloignez-vous de Moi, je ne vous connais pas et ne sais d'où vous êtes, ouvriers d'iniquité."
V, 1. C'est pourquoi, frères, laissant le séjour de ce monde, accomplissons la volonté de ce Dieu qui nous a appelés et ne craignons point de sortir de ce monde. 2. Le Seigneur dit en effet : "Vous serez comme des agneaux au milieu des loups" (Lc 10,3). 3. Pierre, alors : " Et si les loups déchirent les agneaux ? " (Aut. inc.). 4. Jésus répondit à Pierre : "Les agneaux après leur mort n'ont plus à redouter les loups; vous non plus, ne redoutez pas ceux qui veulent vous mettre à mort et ensuite ne peuvent rien vous faire; mais craignez celui qui a la puissance, après votre mort, de jeter votre âme et votre corps dans la géhenne de feu." 5. Et vous savez, frères, que le séjour de cette chair en ce monde est bref et de peu de durée; tandis que la promesse du Christ est grande et merveilleuse, comme aussi le repos du royaume à venir et de la vie éternelle. 6. Quel est donc le moyen de l'obtenir, sinon de mener une vie sainte et juste, de considérer les biens de ce monde comme nous étant étrangers et de ne point les désirer ? 7. Car, dès que nous désirons les acquérir, nous quittons la voie de justice.
VI, 1. Le Seigneur dit : "Nul serviteur ne peut servir deux maîtres" (Lc 16,13; Mt 6, 24). Si nous voulons à la fois servir Dieu et Mammon, nous ne faisons qu'y perdre. 2. "Que sert-il de gagner le monde entier si l'on ruine son âme ?" (Mt 16,26; cf. Mc 8,9; Lc 9,25). 3. Oui, ce siècle présent et le siècle à venir sont ennemis. 4. Le premier ne parle que d'adultère, de corruption, d'avarice, de tromperie; le second rompt avec toutes ces choses. 5. Nous ne pouvons donc être ami de tous les deux, mais il nous faut rompre avec le premier et tenir avec le second. 6. Nous estimons qu'il vaut mieux haïr les biens d'ici-bas, parce qu'ils sont médiocres, éphémères et corruptibles, et aimer les autres, les biens qui ne peuvent périr. 7. Si nous faisons la volonté du Christ, nous trouverons le repos; autrement, rien ne nous préservera du châtiment éternel, si nous désobéissons à ces commandements. 8. Car l'Écriture dit dans Ézéchiel que "même si Noé, Job et Daniel ressuscitaient, ils ne délivreraient point leurs fils de la captivité" (Ez 14,14; 18,20). 9. Si des hommes aussi justes ne peuvent, par leur propre justice, secourir leurs enfants, que dire alors de nous, si nous ne gardons pas pur et immaculé notre baptême; comment pourrons-nous entrer avec confiance dans le royaume des cieux ? Qui plaidera pour nous, si nous ne sommes pas trouvés avec des Ïuvres saintes et justes ?
VII, 1. C'est pourquoi, frères, luttons, sachant que déjà le combat s'engage. Or, pour les combats périssables bien des participants traversent les mers, toutes voiles déployées; cependant tous ne sont pas couronnés; au contraire, on réserve les couronnes à ceux qui ont pris de la peine et glorieusement combattu. 2. Eh bien ! nous, combattons de façon à être tous couronnés. 3. Courons dans la voie droite au combat impérissable, embarquons-nous en grand nombre, et, alors, combattons de façon à remporter la couronne; ou du moins, si nous ne pouvons tous y parvenir tout à fait, tâchons d'en approcher. 4. Il nous faut savoir en effet qu'aux combats périssables celui qui s'avère tricheur est battu de verges, exclu du jeu et chassé du stade. 5. Qu'en pensez-vous ? Quel sera alors le châtiment que devra subir celui qui n'aura pas été loyal dans le combat impérissable ? 6. En effet, il est dit à propos de qui n'a pas gardé le sceau : "Leur ver ne mourra point, leur feu ne s'éteindra point, ils seront en spectacle à toute chair " (Is 66, 24).
VIII, 1. Tant que nous sommes encore sur terre, faisons pénitence. 2. Nous sommes de l'argile dans la main de l'artisan. Le potier, quand le vase qu'il fabrique se déforme ou se brise entre ses mains, le façonne de nouveau; mais si le vase a déjà passé dans le four embrasé, il ne pourra plus le mettre en état Nous aussi, pendant que nous sommes en ce monde, faisons de tout cÏur pénitence du mal que nous avons commis en cette chair, tant que nous avons le temps pour nous repentir. 3. Car une fois que nous serons sortis de ce monde, nous ne pourrons plus, là-bas, confesser nos fautes et faire pénitence. 4. Ainsi, frères, c'est en faisant la volonté du Père, en conservant pure notre chair, en gardant les commandements du Seigneur que nous obtiendrons la vie éternelle. 5. Le Seigneur dit en effet dans l'Évangile : " Si vous n'avez pas été fidèles pour des choses de peu, qui vous en confiera de grandes ? Je vous le dis, qui est fidèle pour très peu de choses est fidèle aussi pour beaucoup" (Lc 16, 10-12). 6. Or, ceci veut dire : Gardez votre chair pure, sans tache votre sceau, afin que nous recevions la vie éternelle.
IX, 1. Que nul d'entre vous ne dise que cette chair ne sera pas jugée et qu'elle ne ressuscitera pas. 2. Reconnaissez-le. Comment avez-vous été sauvés, comment avez-vous recouvré la vue sinon alors que vous étiez revêtus de cette chair ? 3. Il nous faut donc garder notre chair comme un temple de Dieu. 4. En cette chair, vous avez été appelés, en cette chair vous irez à qui vous appelle. 5. Si le Christ, le Seigneur, notre Sauveur, d'esprit qu'il était s'est fait chair pour nous appeler, c'est que c'est dans cette chair que nous recevrons notre récompense. 6. Aimons-nous donc les uns les autres afin d'entrer tous ensemble dans le Royaume des Cieux. 7. Pendant que nous avons le temps de guérir, remettons-nous à Dieu pour qu'il nous soigne, et donnons-lui ses honoraires. 8. Quels honoraires ? La pénitence faite d'un cÏur sincère. 9. Car il sait toutes choses d'avance et il pénètre les secrets des cÏurs. 10. Donnons-lui donc les louanges, non seulement avec notre bouche, mais aussi de notre cÏur, afin qu'il nous accueille comme des fils. 11. Car le Seigneur a dit : " Mes frères sont ceux qui font la volonté de mon Père" (Mt 12,50; Mc 3, 36; Lc 8,21).
X, 1. Aussi, frères, faisons la volonté du Père qui nous a appelés, afin de vivre et de pratiquer, avec plus de zèle, la vertu. Rejetons la malice qui marche en tête de tous les péchés et fuyons l'impiété de peur que tous les vices ne s'emparent de nous. 2. Mais si nous nous appliquons à faire le bien, c'est la paix qui s'attachera à nous. 3. Voilà pourquoi il n'y a point de bonheur pour qui nourrit des craintes humaines et préfère la jouissance ici-bas à la promesse à venir. 4. Ils ne savent pas quels tourments il y a dans la jouissance d'ici-bas ni quelle félicité dans la promesse à venir. 5. Si encore ils étaient seuls à agir de la sorte, on pourrait le supporter, mais ils persistent à enseigner le mal à des âmes innocentes, sans savoir qu'ils encourent ainsi un double châtiment, eux et ceux qui les écoutent !
XI, 1. Pour nous, servons Dieu avec un cÏur pur, et nous serons justes. Mais si nous ne le servons pas parce que nous ne croyons pas à sa promesse, alors malheur à nous ! 2. Il est dit en effet dans les prophètes : " Malheur à ceux dont l'âme est partagée et le cÏur hésitant, à ceux qui disent : il y a longtemps que nous entendons dire ces choses, depuis le temps de nos pères, nous avons attendu jour après jour et nous n'en avons vu se réaliser aucune. 3. Insensés, comparez-vous à un arbre: prenez la vigne, d'abord ses feuilles tombent, puis naît le bourgeon, puis le raisin vert et enfin la grappe mûre. 4. C'est ainsi que mon peuple supporte des troubles et des tribulations, mais ensuite lui viendra le bonheur" ( Aut. inc.). 5. Aussi, mes frères, ne soyons pas partagés, mais persévérons dans l'espérance afin de remporter la récompense. 6. Car il est fidèle celui qui a promis de rendre à chacun selon ses Ïuvres. 7. Si nous pratiquons la justice sous le regard de Dieu, nous entrerons dans le Royaume des Cieux et nous recevrons ce qui a été promis et " ce que l'oreille n'a pas entendu, ni l'Ïil cru, ce qui n'est pas monté au cÏur de l'homme" (1 Co 2, 9).
XII, 1. Soyons tonc à toute heure dans l'attente du Royaume de Dieu, dans la charité et la justice, puisque nous ne savons pas le jour de la manifestation de Dieu. 2. En effet, en réponse à quelqu'un qui lui demandait quand viendrait son Royaume, le Seigneur lui-même a déclaré : " Lorsque les deux seront un, l'extérieur comme l'intérieur, et que l'homme sera avec la femme comme s'il n'y avait ni homme ni femme" (Aut. inc,). 3. " Les deux sont un" quand nous nous disons la vérité et qu'en deux corps habite une seule âme, sans aucune hypocrisie. 4. " L'extérieur est l'intérieur" signifie ceci : l'intérieur, c'est l'âme, l'extérieur, le corps, et de même que l'on peut voir ton corps, il faut que ton âme se montre dans tes bonnes Ïuvres. 5. " L'homme avec la femme, mais ni homme ni femme", c'est-à-dire qu'un frère voyant une sÏur ne pense point qu'elle est une femme, ni la sÏur que son frère est un homme. 6. C'est quand vous agirez ainsi, veut-il dire, que le Royaume de mon Père viendra.
XIII, 1. Dès aujourd'hui, frères, faisons pénitence : jeûnons pour faire le bien, car nous sommes repus de déraison et de malice. Effaçons nos péchés passés, et sauvons-nous en nous repentant du fond de l'âme. Ne soyons pas des flatteurs, cherchons à plaire non seulement aux nôtres, mais encore à ceux du dehors, en vue de la justice, pour éviter que le nom de Dieu ne soit blasphémé, à cause de nous. 2. Le Seigneur dit en effet : " Sans cesse mon nom est blasphémé parmi toutes les nations" (Is 52, 5). Et ailleurs : " Malheur à celui par qui mon nom est blasphémé" (Aut. inc.). En quoi est-il blasphémé ? En ce que vous ne faites pas ce que je veux. 3. Les païens, en effet, lorsqu'ils entendent de notre bouche la parole de Dieu, en admirent la beauté et l'élévation; mais lorsque, par la suite, ils apprennent que nos Ïuvres ne répondent pas à nos paroles, ils se mettent à blasphémer et à dire qu'il n'y avait là que fable et aberration. 4. Lorsqu'ils nous entendent dire : " A aimer vos amis, vous n'avez pas de mérite, mais si vous aimez vos ennemis et ceux qui vous haïssent, alors on vous en saura gré..." (Lc 6,32-35). Oui, lorsqu'ils écoutent ces paroles, ils sont pleins d'admiration pour cette extrême bonté. Mais lorsqu'ils voient que nous n'aimons pas ceux qui nous haïssent, et pis encore, que nous n'aimons pas même nos amis, ils se moquent de nous et le nom de Dieu est blasphémé.
XIV, 1. Ainsi donc, frères, si nous faisons la volonté de Dieu, nous appartiendrons à la première Église, à celle qui est spirituelle, et qui fut créée avant le soleil et la lune. Mais si nous ne faisons pas la volonté du Seigneur, notre part sera ce passage de l'Écriture qui dit : " Ma maison est devenue une caverne de voleurs" (Jr 7, 11). Préférons donc appartenir à l'Église de Vie, afin d'être sauvés. 2. Je ne pense pas, en effet, que vous ignoriez que " l'Église" vivante " est le corps du Christ" (Ep 1, 22-23). L'Écriture dit en effet : " Dieu créa l'homme, homme et femme il le créa" (Gn 1, 27). L'homme, c'est le Christ la femme, c'est l'Église. Or, les écrits des prophètes et des Apôtres portent aussi que l'Église n'est pas de ce siècle, mais qu'elle est née au commencement; elle était spirituelle comme notre Jésus et elle s'est manifestée dans les derniers jours pour nous sauver. 3. Or, cette Église qui était spirituelle est devenue visible dans la chair du Christ, nous montrant que si nous la gardons intacte dans notre chair, nous la recevrons dans le saint Esprit, car la chair est l'image de l'esprit. Nul ne peut, après avoir corrompu l'image, participer à l'original. Et tout ceci veut dire, frères : Gardez intacte la chair, pour avoir part à l'Esprit. 4. Or, si nous disons que la chair est l'Église et que l'Esprit est le Christ, c'est donc qu'à outrager la chair, on outrage l'Église. Commettre une telle action, c'est s'exclure de l'Esprit, c'est-à-dire du Christ. 5. Oui, c'est à une telle vie, à une telle incorruptibilité que cette chair peut avoir part lorsqu'elle est unie à l'Esprit saint, et nul ne peut expliquer, nul ne peut dire les biens " que le Seigneur a préparés " pour ses élus (1 Co 2, 9).
XV, 1. Je ne pense pas avoir donné là un conseil négligeable sur la continence, Celui qui le suivra n'aura pas à s'en repentir, mais il sera sauvé, et moi avec lui pour le lui avoir donné. Car il n'y a pas peu de mérite à ramener au salut une âme égarée. 2. Et c'est ainsi que nous pouvons payer de retour celui qui nous a fait, en mettant toute notre foi et notre charité à prêcher si notre rôle est de prêcher, à écouter s'il est d'écouter. 3. Ne cessons donc de nous appuyer sur les promesses que nous avons crues, et de pratiquer la justice et la sainteté afin de pouvoir prier sans contrainte le Dieu qui dit : " Tu parlais encore que je t'ai répondu : Me voici" (Is 58,9). 4.
Cette parole est une grande promesse puisque le Seigneur se dédare plus prêt à donner qu'on ne l'est à le supplier.