Bulletin des vrais chrétiens orthodoxes

sous la juridiction de S.B. Mgr. André

archevêque d'Athènes et primat de toute la Grèce

NUMÉRO 78

NOVEMBRE 1997

Hiéromoine Cassien

Foyer orthodoxe

66500 Clara (France)

Tel : 00 33 (0) 4 68 96 1372

SOMMAIRE
Nouvelles

Le grand commandement

Le sens et le but de la vie de l'homme

La question de la vie

Ne laissez pas la pornographie pourrir vos enfants

Sommes-nous devenus des zombies

Quelques remarques

Vision de saint Niphon (suite et fin)


NOUVELLES

Après avoir passé deux semaines en Grèce, me voilà de retour et m'empresse de boucler le bulletin. J'ai eue juste le temps de voir l'archevêque André, quelques autres personnes qui me tiennent à coeur, faire mes courses à Athènes, terminer chez le relieur le livre que Georges Vlachos a écrit et que j'avais imprimé ici au foyer et peindre quelques fresques dans l'église de Kératéa.

Nous venons de publier le deuxième volume de saint Jean Chrysostome sur les explications des psaumes. Il en restera encore deux autres à publier.

Notre doyen parmi les lecteurs, Joseph Gorgorio (89 ans !), vient de nous céder le terrain sur lequel se trouvent nos quarante ruches, après nous l'avoir prêté gracieusement pendant des années. À cette occasion, nous le remercions de même que pour toute la générosité qu'il nous a octroyés durant les années passées.

J'ignore quand ce bulletin arrivera, vu la grève des routiers qui continue. Mais je termine la publication et dès que la situation se normalise, je l'enverrai.

Dans l'Amour du Christ, votre
hm. Cassien


LE GRAND COMMANDEMENT

 

Saint Grégoire le Grand (homélie 27)

 

Prononcée devant le peuple en la basilique de saint Pancrace, martyr, le jour de sa fête.

Lecture du saint Évangile selon saint Jean : (Jn 15,12-16)

 

En ce temps là, Jésus dit à ses disciples : "Voici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres comme Je vous ai aimés. Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime. Vous êtes mes amis si vous faites ce que Je vous commande. Je ne dis pas que vous êtes mes serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Mais J'ai dit que vous étiez mes amis parce que tout ce que J'ai appris de mon Père, Je vous l'ai fait connaître. Ce n'est pas vous qui M'avez choisi mais c'est Moi qui vous ai choisi et vous ai établis pour que vous alliez et portiez du fruit et que votre fruit demeure et que, quoique vous demandiez à mon Père en mon Nom, Il vous le donne."

 

1. Comme toutes les paroles sacrées sont pleines des préceptes du Seigneur, que veut-Il dire à propos de l'amour pris comme un commandement unique : "Voici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres", sinon que tout commandement relève de l'amour seul et que tous sont un seul et même commandement, car tout ce qui est commandé par Dieu est basé sur la seule charité ? Comme les nombreux rameaux d'un arbre poussent d'une seule racine, ainsi toutes les vertus sont produites par la seule charité. Et un rameau de bonnes oeuvres n'a aucune verdeur s'il n'est pas enraciné dans la charité. Les préceptes du Seigneur sont donc à la fois nombreux et un; nombreux par la diversité des oeuvres, un dans la racine de l'amour. Mais comment doit être pratiqué cet amour ? Le Seigneur l'indique dans un grand nombre de sentences de l'Écriture sainte en ordonnant d'aimer ses amis en Lui et d'aimer ses ennemis à cause de Lui. Car quelqu'un possède véritablement la charité, s'il aime son ami en Dieu et en même temps aime son ennemi à cause de Dieu. Car quelques uns aiment leurs proches, mais seulement d'un sentiment naturel d'affinité ou de parenté sans être pour cela en opposition avec les paroles sacrées. Mais une chose est de se dévouer spontanément par un sentiment naturel, une autre de devoir obéissance au précepte du Seigneur fondé sur la charité. Ils aiment beaucoup leur prochain, mais cependant ne méritent pas les récompenses sublimes de l'amour, parce qu'ils donnent leur amour d'une façon non spirituelle mais humaine. C'est pourquoi le Seigneur après avoir dit : "Voici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres", a aussitôt ajouté "comme Je vous ai aimé." Comme s'Il disait clairement : Aimez-vous pour la raison même pour laquelle Je vous ai aimés.

2. En tout cela, frères très chers, il faut considérer avec sagacité que l'antique ennemi, tout en poussant notre coeur à l'amour des choses temporelles, suscite contre nous un proche moins riche que nous qui s'efforce de nous prendre ces biens que nous aimons. En faisant cela, ce n'est pas que l'antique ennemi ait pour but de nous priver des dits biens terrestres, mais il veut tuer la charité en nous. De fait, nous nous enflammons aussitôt de haine et pendant qu'à l'extérieur, nous désirons avoir le dessus, nous sommes à l'intérieur fortement frappés. Alors que nous réclamons à l'extérieur les petits biens volés, nous en perdons de plus importants à l'intérieur, parce que l'amour d'un bien temporel nous fait perdre le vrai amour. De fait, tout individu qui vole nos biens est un ennemi. Mais si nous nous mettons à haïr cet ennemi, c'est un bien intérieur que nous perdons. Lorsque à l'extérieur nous souffrons quelque mauvais procédé d'un parent, veillons à l'intérieur contre le voleur caché qui n'est jamais mieux vaincu que lorsque l'ennemi extérieur est aimé. Car la première et la plus grande preuve d'amour, c'est d'aimer celui qui s'oppose à nous. La Vérité elle-même n'a-t-elle pas supporté le gibet de la croix et cependant aimé ses persécuteurs eux-mêmes en disant : "Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font." (Luc 23,34). Qu'y a-t-il d'étonnant à ce que les disciples aiment leurs ennemis pendant leur vie quand le Maître a aimé des ennemis qui le faisaient mourir ? Il exprime l'essentiel de l'amour en ajoutant: "Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis." Le Seigneur qui était venu mourir même pour ses ennemis, disait cependant qu'Il donnerait sa vie pour ses amis, certainement pour nous montrer ceci : nous pouvons gagner des mérites grâce à nos ennemis en les aimant; ceux qui nous persécutent deviennent eux-mêmes ainsi des amis.

3. Mais actuellement chez nous personne n'est persécuté à mort. Comment pouvons-nous donc prouver que nous aimons nos ennemis ? Mais il y a une chose à faire dans l'état de paix de la sainte Église pour montrer que nous serions capables de mourir pour l'amour de Dieu au temps de la persécution. De fait saint Jean dit ceci : "Celui qui, ayant des biens dans le monde, voit son frère dans la nécessité et lui ferme son coeur, comment l'amour de Dieu resterait-il en lui ?"(1 Jn 3,17). Saint Jean Baptiste dit aussi : "Celui qui a deux tuniques, qu'il en donne une à celui qui n'en a pas." (Luc 3,12). Donc celui qui au temps de la tranquillité ne donne pas sa tunique pour l'amour de Dieu, comment donnerait-il sa vie au temps de la persécution ? La vertu de charité, pour rester forte au temps des troubles, doit donc être nourrie par la miséricorde dans le temps de calme. Ainsi elle apprendra à donner au Dieu tout-puissant d'abord ses biens et ensuite soi-même.

4. Viennent ensuite ces mots : "Vous êtes mes amis." Qu'elle est donc grande la Miséricorde de notre Créateur ! Nous ne sommes même pas de bons serviteurs et Il nous appelle ses amis ! Qu'elle est donc grande la dignité des hommes d'être les amis de Dieu ! Mais vous avez entendu la gloire de cette dignité, sachez aussi les souffrances du combat spirituel : "Si vous faites ce que je vous ai commandé." Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous ai commandé; c'est-à-dire réjouissez-vous de votre dignité mais pensez à quel prix on parvient à cette dignité. En effet lorsque les fils de Zébédée, sur l'intervention de leur mère, demandèrent que l'un pût s'asseoir à la Droite de Dieu et l'autre à sa Gauche, ils s'entendirent répondre : "Pouvez-vous boire le calice que Je vais boire ?" (Mt 20,22). Comme ils recherchaient la place correspondant à leur dignité, la vérité leur rappelle par quelle voie ils obtiendront cette dignité; c'est-à-dire : Vous vous préoccupez de votre future dignité, mais occupez-vous d'abord de la voie semée de souffrances qui vous permettra de l'atteindre. C'est par l'amertume qu'on parvient à la majesté. Si votre esprit recherche ce qui plaît, buvez d'abord le calice qui fait souffrir. Ainsi c'est par la potion amère qu'on arrive à la joie du salut. "Maintenant Je ne vous appelle plus mes serviteurs. Car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Mais Je vous appelle mes amis parce que tout ce que J'ai reçu du Père Je vous I'ai transmis." Quelles sont ces paroles qu'Il a reçues de son Père et qu'Il a voulu faire connaître à ses serviteurs pour en faire ses amis, sinon les joies de la charité intérieure, sinon ces fêtes de la patrie céleste qu'Il a imprimées chaque jour dans nos coeurs par le souffle de son Amour ? En effet quand nous aimons entendre parler des choses célestes, nous connaissons depuis longtemps ces choses aimées parce que l'amour est connaissance. Jésus a donc fait connaître ces choses à ceux qui, dégagés des désirs terrestres, brûlaient d'un grand amour. Ces amis de Dieu, le prophète les avait vus lorsqu'il disait : "Il m'apparaît que tes amis sont extrêmement honorés, ô Dieu !" (Ps 138,17). Car il est appelé ami comme protecteur de l'âme. Parce que le psalmiste a vu d'avance que les élus de Dieu, séparés de ce monde par l'amour de Dieu, gardent sa Volonté dans les commandements célestes, il a admiré ces amis de Dieu quand il disait : "Il m'apparaît que tes amis sont extrêmement honorés ô Dieu." Et comme si nous lui demandions de nous expliquer les raisons d'un si grand amour, il a aussitôt ajouté : "Leur dignité est extrêmement grande." Voici que les élus de Dieu dominent leur chair, fortifient leur esprit, commandent au démon, brillent par leurs vertus, regardent avec mépris les choses terrestres, prêchent à haute voix la patrie éternelle par leurs bonnes moeurs. En mourant même ils l'aiment et l'atteignent par leurs tourments. Ils peuvent être tués mais ne fléchissent pas. "Leur dignité est extrêmement grande." Dans cette passion même qui s'est achevée par leur mort, voyez combien grande a été la force de leur âme. Comment cela est-il possible ? C'est que leur force d'âme a été confortée. Mais ces privilégiés sont peut-être peu nombreux ? Le prophète ajoute : "Je les compterai et ils se multiplieront sur la terre." (Ps 138,18). Regardez le monde entier, frères, il est rempli de martyrs. Les témoins de la vérité sont plus nombreux que nous ne sommes à les voir. Avec l'aide de Dieu, ceux que nous pouvons compter se sont multipliés sur la terre et leur nombre est tel que nous ne pouvons l'imaginer.

5. Mais quiconque arrive à cette dignité d'être appelé ami de Dieu se considère lui-même, et voit ainsi que les dons qu'il a reçus le dépassent. Il ne doit rien attribuer à ses mérites pour ne pas être entraîné vers des puissances ennemies. C'est pourquoi il est ajouté : "Ce n'est pas vous qui M'avez choisi mais c'est Moi qui vous ai choisis et Je vous ai établis pour que vous alliez et portiez du fruit." Je vous ai établis par grâce, Je vous ai plantés pour que vous alliez en le voulant, que vous portiez du fruit en travaillant. En effet J'ai dit que vous alliez en le voulant, parce que vouloir faire quelque chose, c'est déjà y aller en intention. Il est ajouté quels fruits doivent-ils porter : "et que votre fruit demeure." Tout ce que nous faisons pour la vie présente suffit à peine jusqu'à la mort. En effet la mort survenant, coupe le fruit de notre travail. Mais ce qu'on fait pour la vie éternelle est conservé même après la mort et commence à être visible lorsque le fruit de nos travaux terrestres commence à disparaître. Là-haut cette récompense commence au moment où le travail se termine. Pour quiconque connaît déjà les choses éternelles les fruits temporels paraissent sans valeur. Travaillons pour de tels fruits qui demeurent; produisons des fruits qui au moment où la mort interrompt tout, prennent d'eux-mêmes leur commencement. Le fait que les fruits de Dieu commencent à la mort, le prophète l'atteste en disant : "Lorsqu'Il aura donné à ses amis le sommeil, ils auront l'héritage du Seigneur." (Ps 126,2-3). Tout homme qui meurt perd en mourant son héritage terrestre, mais lorsque le Seigneur aura donné à ses amis le dernier sommeil, ils auront de Lui l'héritage, puisque les élus de Dieu parvenus à leur mort trouvent alors leur héritage.

6. Vient ensuite : "Quoique vous demandiez à mon Père en mon Nom, Il vous le donnera." Voici qu'Il dit : "Quoique vous demandiez à mon Père en mon Nom, Il vous le donnera ! " En un autre endroit Il dit par le même évangéliste : "Si vous demandez quelque chose à mon Père en mon nom, il vous le donnera. Jusqu'à présent vous n'avez rien demandé en mon nom." (Jn 16,23-24). Si tout ce que nous demandons au Nom du Fils, le Père nous le donne, que signifie la demande faite par trois fois par saint Paul au Seigneur, demande qui ne fut pas exaucée, mais obtint la réponse suivante : "Ma Grâce te suffit car ma Force se montre dans ta faiblesse." (2 Cor 12,9). Ce si éminent prédicateur n'a-t-il pas fait sa demande au Nom du Fils ? Pourquoi sa demande n'a pas été exaucée ? Comment peut-il être vrai que ce que nous demandons au Père au Nom du Fils, le Père l'accorde alors que la demande faite par l'apôtre au nom du Fils que l'ange de Satan s'éloigne de lui, cette demande n'a pas été exaucée ? Mais parce que le Nom du Fils est Jésus et que Jésus signifie Sauveur celui qui procure le salut, celui-là demande au Nom du Sauveur qui demande ce qui convient véritablement au salut. Mais si la demande n'est pas utile au salut, elle n'est pas faite au Père au Nom de Jésus. C'est pourquoi aussi le Seigneur dit à ses mêmes apôtres encore faibles : "Jusqu'à présent vous n 'avez rien demandé en mon nom." Comme s'Il voulait dire : Vous ne demandez pas au Nom du Seigneur, car vous ne savez pas demander le salut éternel. Ainsi donc saint Paul n'a pas été exaucé parce que, s'il avait été délivré de la tentation, cela n'aurait pas été utile à son salut éternel.

7. Nous voyons, frères très chers, que vous êtes venus nombreux à la solennité du martyr, que vous fléchissez les genoux, que vous vous frappez la poitrine, que vous inondez votre visage de larmes. Mais réfléchissez, je vous en supplie, à vos demandes; voyez si vos demandes sont faites au Nom de Jésus, si vous demandez les joies du salut éternel. Car vous ne cherchez pas Jésus dans sa demeure si, dans ce temple d'éternité, vous priez de façon inopportune pour des biens temporels. Voilà que dans sa prière l'un demande une épouse, un autre une maison, un autre un vêtement, un autre de quoi manger. Et pourtant, lorsque ces biens manquent, ils doivent être demandés au Dieu tout-puissant. Mais nous devons sans cesse nous rappeler le commandement reçu de notre Rédempteur : "Cherchez d 'abord le royaume de Dieu et sa justice et tout cela vous sera donné ensuite par surcroît." (Mt 5,44). Demander ces choses à Jésus n'est pas une faute, si la demande n'est pas trop pressante. Mais ce qui serait très grave, ce serait que quelqu'un demande la mort de son ennemi et qu'il poursuive par la prière celui qu'il ne peut poursuivre par son épée. Et celui qui est maudit garde la vie corporelle pendant que celui qui a maudit est déjà condamné pour avoir souhaité cette mort. Quiconque prie ainsi combat son Créateur par ses demandes. D'où il est dit dans le cas de Judas : "Que sa prière est un péché", (Ps 108,7) si la demande concerne quelque chose qu'interdit celui qui est prié.

8. La Vérité dit : "Lorsque vous êtes en prière, pardonnez si vous avez quelque grief dans votre coeur." (Mc 11,25). Nous expliquons mieux cette vertu du pardon en apportant un seul témoignage de l'Ancien Testament. Sans doute la Judée ayant offensé la justice de son Créateur par ses fautes criantes, le Seigneur refusant d'exaucer la prière de son prophète lui dit : "Ne te charge pas de louanges et de prières en leur faveur." (Jer 7,16). "Même si Moïse et Samuel se tiennent en prière devant Moi mon coeur n'est pas pour ce peuple." (Jer 15,1). Que veut dire que tant de pères ayant été envoyés comme intercesseurs et rejetés, seuls Moïse et Samuel apparurent au grand jour avec leur admirable puissance d'intercession et que même eux, dit l'histoire, n'ont pas pu intercéder ? Comme si le Seigneur disait clairement : Je n'écoute même pas ceux que Je ne dédaigne nullement à cause du grand mérite de leur demande. Pourquoi donc Moïse et Samuel sont-ils préférés à tous les autres pères pour intercéder ? C'est qu'eux seuls, dans tous les textes de l'Ancien Testament, sont dits avoir prié même pour leurs ennemis. L'un est lapidé par le peuple (cf. Ex 17,4) et cependant prie le Seigneur pour ceux qui Le lapident; I'autre est rejeté loin du pouvoir et, invité à prier y consent : "Loin de moi ce péché dans le Seigneur que je cesse de prier pour vous." ( I Roi 12,23). "Même si Moïse et Samuel se tiennent en prière devant Moi, mon âme n'est pas pour ce peuple." (Jer 15,1). Comme s'Il disait ouvertement : Je n'écoute même pas les prières que me font en faveur de leurs amis ceux dont je sais qu'ils prient même pour leurs ennemis avec le mérite de leurs grandes vertus. C'est donc la perfection de la charité qui fait la force de la vraie prière. Et ainsi quiconque demande quelque chose de juste, l'obtient, si son âme dans sa demande n'est pas assombrie par la haine d'un ennemi. Et nous surmontons la plupart du temps notre esprit de contestation si nous prions même pour nos ennemis. Si la bouche forme une prière pour nos ennemis il faut que le coeur contienne l'amour. En fait souvent nous prions même pour nos ennemis, mais nous le faisons plus par devoir que par amour. Car en demandant la vie pour nos ennemis, nous craignons tout de même d'être exaucés. Mais puisque le juge des consciences tient compte de l'esprit plutôt que des mots, celui qui ne prie pas pour ses ennemis avec charité ne demande en fait rien pour eux.

9. Mais voici qu'un ennemi a gravement péché contre nous, nous a causé des dommages, nous a offensés nous qui l'aidions, nous a persécutés nous qui l'aimions. Ses méfaits devraient être retenus, si les retenir ne nous était pas défendu. Notre avocat en effet nous a préparé une prière concernant notre cause et lui-même est le juge de cette cause dont il est aussi l'avocat. Mais dans la prière qu'Il a composée Il a mis une condition : "Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés." (Mt 6,12). Puisque c'est notre futur juge, qui s'est constitué notre avocat, c'est Lui qui exauce la prière que Lui-même a composée. Donc ou bien nous disons et ne faisons pas : "pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés"(Mt 6,12) et alors nous ne sommes pas du tout pardonnés en disant cela; ou bien peut-être nous négligeons cette condition dans la prière et notre Avocat ne reconnaît pas la prière qu'il a composée et Il se dit aussitôt à lui-même : Je sais bien ce que J'ai enseigné, cette prière n'est pas celle que j'ai faite. Frères, que devons-nous donc faire, sinon accorder à nos frères l'affection d'une vraie charité ? Que nulle malice ne demeure dans nos coeurs ! Que le Dieu tout-puissant voit bien notre charité envers notre prochain pour pouvoir accorder sa Bienveillance à nos fautes. Rappelez-vous I'avertissement : "Pardonnez et il vous sera pardonné." (Luc 6,17). On nous doit et nous devons. Remettons donc ce qui nous est dû et ce que nous devons sera remis, mais l'esprit résiste à cela, il veut accomplir ce qu'il a entendu et cependant il résiste.

Nous nous tenons devant la tombe du martyr et nous savons par quelle mort il est parvenu au ciel. Nous, même si nous ne donnons pas notre vie pour le Christ, triomphons au moins de notre âme. Dieu est apaisé par ce sacrifice et il approuve par un jugement de miséricorde la victoire qui nous donne la paix intérieure. Car il voit la lutte de notre coeur; et celui qui récompensera ensuite ceux qui se vainquent eux-mêmes, aide maintenant ceux qui luttent. Il le fait par notre Seigneur Jésus Christ son Fils qui avec Lui vit et règne dans l'unité du saint Esprit, Dieu dans tous les siècles des siècles, amen.

 

Dans :
Saint Grégoire le Grand
40 Homélies sur l'Évangile
Traduit et publié par
Pierre Devilliers
23, avenue du Bois
59650 Villeneuve d'Ascq

 

LE SENS ET LE BUT DE LA VIE DE L'HOMME

C'est très important que tous les hommes sachent d'abord pourquoi ils vivent, quel est le sens et le but de leur vie sur terre. Si, par exemple, pendant qu'on dort, quelqu'un venait et nous portait inconsciemment dans une cabine de bateau ou dans un compartiment de train, au moment du réveil nous nous poserions sûrement des questions comme : "Pourquoi suis-je là ? Qui m'a apporté là ? Qu'est-ce qu'on veut de moi ? Où aboutira ce voyage ?"

De la sorte, notre présence sur terre nous pousse à des questions extrêmement sérieuses : Qu'est-ce que l'homme ? Quel est le sens et le but de sa vie ? Qu'est-ce que le bien et le mal ? Quelle est l'origine de la souffrance et quel est son sens ? Quelle est la voie qui va au bonheur ? Qu'est-ce que la mort, le Jugement dernier et la récompense après la mort ? Et finalement quel est le dernier mystère indicible, immense et ineffable qui entoure notre existence d'où tout surgit et vers lequel nous tous aspirons ? Seul Dieu qui a crée l'homme et l'a sauvé du péché peut entièrement répondre à ces questions.

Dieu signifie amour, "car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en Lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle". (Jn 3,16).

Notre Dieu et Sauveur Jésus Christ, devenu homme est "la vraie lumière qui illumine tout homme." (Jn 1,9). La lumière de vérité se trouve en Jésus Christ et dans son Église par laquelle Il continue sa mission. L'Église croit que Jésus, mort et ressuscité pour tous, offre à l'homme par son Esprit, lumière et puissance pour lui offrir la possibilité de répondre à sa haute vocation. Elle croit que sous le ciel il n'existe pas d'autre nom donné aux hommes par lequel ils soient sauvés. Elle croit de même que la clé, le centre et le but de l'histoire humaine toute entière, se trouve en Dieu qui est son Chef et son Maître.

Quant l'apôtre Philippe disait à Nathanaël qu'il a trouvé le Messie, le fils de Joseph de Nazareth, celui-ci lui répondit : "De Nazareth peut-il surgir quelque chose de bon ?" Alors Philippe fit appel à un seul argument : "Viens et vois !" Et Nathanaël, en reconnaissant Jésus, a cru en Lui et L'a aimé.

Donc, obéissons à Jésus qui nous invite en permanence et nous dit : Venez voir, chercher pour trouver, frappez et on vous ouvrira. Moi, Je suis la lumière du monde. Moi, Je suis la voie, la vérité, la vie.

Père Olivian.

LA QUESTION DE LA VIE

L'homme doit chercher toute sa vie la vérité, doit avoir un esprit toujours vif, tout prêt à recevoir la vérité quoi qu'il arrive et n'importe d'où cela provient. À la rencontre de la vérité, il faut aller le coeur ouvert.

L'homme doit suivre la vérité malgré les sacrifices exigés. Dans l'évangile de Jean il est dit : "La lumière étant venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs oeuvres étaient mauvaises. Car quiconque fait le mal haït la lumière, et ne vient point à la lumière, de peur que ses oeuvres ne soient dévoilées; mais celui qui agit selon la vérité vient à la lumière, afin que ses oeuvres soient manifestées, parce qu'elles sont faites en Dieu." (Jn 3,1-22).

Et Moïse dit : "Tu chercheras le Seigneur, ton Dieu, et tu le trouveras, si tu le cherches de tout ton coeur et de toute ton âme". (Dt 4,1,29). Dieu a mis aussi des signes dans ses oeuvres pour Se faire connaître à ceux qui Le cherchent humblement et sincèrement. Mais ceux qui sont insatisfaits risquent de devenir aveugles et de ne plus voir.

Pendant son Activité, Jésus a rencontré aussi des incroyants. Le saint évangile dit : "C'est pourquoi Je leur parle en paraboles, parce qu'en voyant ils ne voient point, et qu'en entendant ils n'entendent, ni ne comprennent. Et pour eux s'accomplit cette prophétie d'Ésaïe : "Vous entendrez de vos oreilles, et vous ne comprendrez point; Vous regarderez de vos yeux, et vous ne verrez point". (Mt 13,15).

Voilà la raison de leur pétrification : ils ne veulent pas être guéris. Ils ne veulent pas comprendre qu'ils doivent changer leur vie. Ils préfèrent plutôt rester en état de péché que d'avoir l'âme pure et libre, être de véritables fils de Dieu.

Dans une prière au Père du ciel, Jésus S'exprimait ainsi : "Je Te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que Tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et de ce que Tu les as révélées aux enfants". (Mt 11,25).

Il faut purifier notre coeur et nos yeux pour découvrir la lumière des vérités divines et pour rencontrer Dieu qui nous cherche plus encore que nous même nous Le cherchons. Et pour trouver Dieu il faut que nous priions sans cesse.

père Olivian


NE LAISSEZ PAS LA PORNOGRAPHIE POURRIR VOS ENFANTS ET ENRICHIR LES RÉSEAUX DE PÉDOPHILIE
POUR RÉAGIR ET VOUS DÉFENDRE, UTILISEZ LA LOI

- Loi n° 92.684 du 22 juillet 1992 : De la mise en péril des mineurs, avec notamment son article 227-24 :

"Le fait, soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d'un tel message, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 500 000 francs d'amende lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur."

"Lorsque les infractions au présent article sont soumises par voie de la presse écrite ou audio-visuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables".

- Décret n° 93.726 du 29 mars 1993, portant réforme du code pénal, avec notamment l'article R.624-2 : De la diffusion des messages contraires à la décence.

"Le fait de diffuser sur la voie publique ou dans des lieux publics des messages contraires à la décence est puni d'amende prévue pour les contraventions de 4° classe."

"Est puni de la même peine le fait d'envoyer ou de distribuer à domicile de tels messages, sans demande préalable du destinataire."

"Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement des infractions définies au présent article".

Lorsque vous constatez une contravention, vous pouvez :

Indiquer aux contrevenants qu'ils sont en infraction avec les dispositions législatives et réglementaires.

Prévenir le maire de la commune concernée, en sa qualité d'officier de police judiciaire et en tant que responsable de la police municipale et du maintien de l'ordre public.

Saisir l'Union Départementale des Associations Familiales (UDAF), qui est habilitée à se porter partie civile devant le juge pour des faits de nature à nuire aux intérêts moraux et matériels de la famille.

Pour plus d'information, vous pouvez commander à "La Cité Vivante", B.P. 4.424 Poissy Cedex, le "Nouveau Vade-mecum, guide juridique et pratique contre la pornographie et l'incitation à la perversion des murs" (85 F + 30 F de port par colis).


La pornographie est source de la violence,

destructrice d'une humanité

cyanure du peuple.

Les pervertis d'aujourd'hui

risquent d'être les suicidés de demain.

Les dépravés d'aujourd'hui

les épaves de demain.

P. Daniel-Ange


Sommes-nous devenus des zombies ?

En cette fin de XXe siècle, nous vivons, paraît-il, dans une société de communication. Radio, téléphone, télévision, fax, ordinateur, GSM, Internet... de plus en plus d'outils performants sont à notre disposition pour "mieux communiquer" et nous ouvrir les portes d'un monde meilleur. Soyons sérieux. Nous entendons ressasser ces mêmes âneries depuis si longtemps que nous ne sommes plus bien nombreux à être assez naïfs pour croire encore à toutes ces prothèses. Si la puissance des instruments de communication a permis de raccourcir les distances le Web en est l'exemple récent le plus spectaculaire elle n'a pas pour autant transformé, comme le prophétisait Mac Luhan, notre monde en un petit "village mondial". Bien au contraire, l'humanité vit à présent dans une mégapole monstrueuse et démente, un monde où la promiscuité se conjugue avec l'anonymat et où le nombre de personnes qui souffrent d'une solitude extrême ne cesse d'augmenter. Et je ne parle pas de cette solitude bénéfique nécessaire à l'ermite en quête de sagesse, mais de celle tant redoutée qui ronge et ravage une vie pour transformer celui qui la subit en véritable loque humaine ! Voila un paradoxe pour le moins surprenant : si les outils de communication réduisent les distances géographiques, tous ces fantastiques instruments modernes, au lieu de rapprocher les hommes, semblent avoir le plus souvent pour effet de les isoler les uns des autres. Les programmes de télévision se substituent aux conversations pendant le repas familial, et nous nous sommes à présent habitués à trouver sur notre route des "zombies", le baladeur vissé sur la tête. Chacun, replié sur lui-même, lové dans sa bulle, est dans l'incapacité de tout contact avec son voisin. C'est un peu comme si l'on assistait à une sorte d'épidémie de comportements autistiques. Pour comprendre cette apparente contradiction, il est nécessaire de garder à l'esprit le fait que les problèmes de communication n'ont pas pour source première l'outil technologique mais l'utilisation qui en est faite. Bien entendu, si l'on désire écrire, il est absolument nécessaire d'avoir au moins une feuille de papier et un crayon. Mais ce minimum n'a jamais fait défaut à l'être humain. Quand la nécessité de communiquer se fait sentir, quand son besoin devient trop fort, la marche de l'homme se transforme alors en danse, son cri devient vocalise et l'homme des cavernes couvre les murs de sa grotte de peintures. La communication n'est pas un luxe : c'est une urgence, une nécessité, un désir si profond qu'il s'apparente à la respiration. Depuis toujours et dans toutes les civilisations, l'homme, loin de se contenter de consommer passivement les objets matériels du monde qui l'entouraient, a toujours tenté de découvrir le sens qui se cachait en eux. Derrière l'apparente réalité des choses se profilait un mystère, une vérité sans commune mesure avec leur objectivité matérielle, que chacun pouvait pressentir, mais que seuls les "initiés" étaient capables de percevoir et de comprendre. "L'important est invisible pour les yeux...", note Antoine de Saint-Exupéry. Dans cette quête incessante du "pourquoi", dans ce désir de relier chaque chose les unes aux autres dans une totalité qui lui devienne intelligible, l'homme s'était révélé une "fantastique machine à découvrir ou à inventer du sens". En communiquant, il inventait, il donnait forme à l'univers qui l'entourait. Mais, comme nous le rappellent les sociologues Max Weber et Emile Durkheim, "avec la modernité, le monde est devenu désenchanté". La magie du monde a déserté nos civilisations pour laisser place à l'absurde, "nous sommes dans une période d'anomie", les règles sociales s'affaiblissent pour laisser place à des attitudes égoïstes. Les liens sociaux se distendent et chacun se retrouve seul. Enfin, nous sommes tous en compétition contre tous, "les autres sont devenus notre enfer" et les technologies de la communication sont utilisées comme d'effroyables machines de guerre pour nous combattre les uns les autres ou bien nous exiler dans un monde onirique. Ayant perdu toute valeur absolue de référence notre quête effrénée du plaisir et notre refus de la souffrance deviennent les uniques déterminations de nos comportements, seules nos pulsions et nos répulsions gouvernent nos décisions. Ce tableau certes légèrement noirci de l'homme du XXe siècle porterait à croire que celui-ci aurait en quelque sorte "pété les plombs". Internet comme l'informatique ne sont que des outils puissants qu'il ne convient ni de diaboliser ni d'idéaliser. Ils provoquent de profondes transformations dans nos sociétés. Si nous laissons ces instruments aux mains d'une poignée de multinationales sans scrupules, nous pouvons craindre de voir l'humanité basculer dans le pire régime totalitaire qui soit. En revanche, versés au service de "valeurs humanistes", ils pourraient être d'une grande utilité pour nous aider à surmonter ses crises et à instaurer une démocratie où il ferait bon vivre.

Manuel Aries, journaliste
dans Macworld (Novembre 1997)


QUELQUES REMARQUES

Dans le choix des articles, je dois présenter un menu équilibré et varié comme pour la nourriture. Si je ne publie que les écrits de saint Jean Chrysostome, par exemple, ce serait comme si je ne vous donnais à manger que du gruyère. Après une semaine, vous me le jetteriez à la figure, car vous auriez envie de quelques patates et d'un bout de pain malgré le fait que le gruyère est plus cher et meilleur en lui-même. Il faut donc que je présente aussi des auteurs moins géniaux et des sujets autres. L'essentiel est que ce soit un menu sain, c'est-à-dire orthodoxe. Je ne peux pas non plus me tenir à vos goûts personnels qui risquent d'être capricieux. C'est comme pour les enfants qu'il faut forcer à manger aussi des épinards et de la soupe et non seulement des sucreries. Il faut que je pense aussi à tous les lecteurs qui n'ont pas forcément les mêmes besoins que vous. Il y en a qui ont encore besoin de lait, comme dit l'Apôtre, et d'autres ont déjà perdu les dents. Bref, il faut que je voie un peu plus loin que vos aspirations.

Pour changer de sujet : Pour ceux qui gémissent et se lamentent à cause des difficultés qui se posent en allant aux offices à l'hermitage.

Je sais qu'on pourrait arranger le chemin et même installer un périphérique. Et pourquoi ne pas aussi mettre un chauffage central au lieu de geler tout le temps, et pour vous mettre tout à fait à l'aise, mettre à votre disposition des fauteuils et des pantoufles. Mais je crains qu'une Orthodoxie en pantoufles ne nous profitera aucunement.

Cela me fait penser à ce moine qui voulait rapprocher sa cellule plus près du fleuve afin de ne plus peiner autant en cherchant de l'eau. Mais l'ange lui apparut et lui faisait comprendre que chaque pas, qu'il faisait pour l'amour de Dieu, sera compté. Alors il construisit sa cellule encore plus loin.

hm. Cassien

Que votre vie soit comme une voix retentissante qui proclame les mêmes enseignements que votre bouche, et alors même que garderiez le silence, vous serez comme une trompette éclatante dont les sons se feront entendre, non seulement de ceux qui sont près de vous, mais de ceux qui sont au loin.

saint Jean Chrysostome
(Explication des psaumes)

Nous sommes dans un monde où il n'y a plus à espérer grand-chose de ceux qui acceptent ce monde, qui acceptent d'y installer et ne cherchent qu'à s'y installer davantage.
Georges Bernanos

Regretter et avoir à regretter, ce n'est pas la même chose. Parfois, on regrette ce qu'il ne faudrait pas regretter et quelquefois on s'abstient de ce qu'il faudrait regretter. Dans le premier cas, le discernement fait défaut et dans le second cas, c'est l'humilité. De n'avoir rien à regretter suppose une vie irréprochable et de ne rien regretter montre un orgueil démesuré. Il y a un regret stérile, qui est lié au désespoir, et il y a un regret fructueux qui est prêt au changement, prêt à recommencer mieux.
Il y a un silence plein de vie et inversement des paroles creuses qui ne veulent rien dire. Mieux vaut une vie en silence qu'une vie qui ne consiste qu'en paroles. Parfois la communication, le message suppose le silence, car la parole serait déplacée. Pourtant, le silence n'est pas un absolu comme la parole n'est pas un vice. Leur valeur dépend du discernement et de la qualité de vie. Il y a un silence qui témoigne d'une incapacité de parler. Le silence n'est pas simplement absence de paroles et de bruit mais une manière de communiquer et communier plus profondément.
Trébucher est humain. Trébucher sans se relever est le propre d'un sot. Trébucher sans plus tomber suppose de l'expérience.
Il y a rire, rire et rire. Le premier est celui du sot qui s'arrête aux apparences comiques. Le second celui de l'enfant et de celui qui est sans malice. Le troisième celui du sage qui est au-dessus des apparences et qui saisit la raison des êtres.
hm. Cassien

L'abbé Pambo avait envoyé son disciple à Alexandrie pour y vendre le produit de son travail. Il y passa, comme il nous disait, seize jours, dormant la nuit dans le narthex de l'église, au sanctuaire du saint apôtre Marc. Après avoir vu l'acolouthie 1 de l'église, il s'en retourna chez le vieillard; il avait même appris des tropaires. Le vieillard lui dit donc : "Je te vois troublé, mon enfant, te serait-il arrivé une tentation dans la ville ?" Le frère répond : "Parbleu, abbé, nous gaspillons nos journées en ce désert dans la nonchalance, sans chanter ni canons ni tropaires. Pendant mon séjour à Alexandrie, j'ai vu les clercs de l'église, comment ils chantent, et j'en ai une grande tristesse. Pourquoi ne chantons-nous pas, nous aussi, des canons et des tropaires ?" Le vieillard lui dit : "Malheur à nous, mon enfant, les temps sont proches où les moines abandonneront la nourriture solide, parole du saint Esprit, pour s'adonner à des hymnes et à des tons. Quelle componction, quelles larmes peuvent naître de ces tropaires, lorsqu'on se tient dans l'église ou dans sa cellule et qu'on élève la voix comme un boeuf ? Car si c'est devant Dieu que nous sommes debout, nous devons nous tenir en sa Présence avec beaucoup de componction et non pas avec de grands airs. Les moines ne sont pas venus dans cette solitude pour se tenir devant Dieu en se rengorgeant, pour chanter des cantiques, rythmer des mélodies, agiter les mains et sauter d'un pied sur l'autre; mais nous devons, dans la crainte de Dieu et dans le tremblement, dans les larmes et les gémissements, avec une voix pleine de révérence et prompte à la componction, contenue et humble, offrir nos prières à Dieu. Je t'en préviens, mon enfant, il viendra des temps où les chrétiens corrompront les livres des saints apôtres et des divins prophètes, où ils gratteront les saintes Écritures pour écrire des tropaires et des discours helléniques; leur esprit se pâmera de ceci et il se dégoûtera de cela. C'est pourquoi nos Pères nous ont dit que les habitants de ce désert ne devaient pas écrire les Vies et les Paroles des Pères sur des parchemins mais sur des papyrus, car la génération à venir s'apprête à gratter les Vies des Pères pour écrire à la place selon ses caprices. Grande sera la calamité qui vient." Le frère lui dit : "Quoi donc ? Les coutumes et les traditions des chrétiens seront changées ? N'y aura-t-il donc plus de prêtres dans les églises pour que cela se produise ?" Le vieillard dit : "En ces temps-là l'amour de beaucoup se refroidira" (Mt 24,12) et il y aura une tribulation qui ne sera pas minime, des incursions de nations et des mouvements de peuples, un bouleversement des royaumes, le relâchement des prêtres et la négligence des moines. Les higoumènes 2 mépriseront leur salut et celui de leur troupeau; tous auront de l'ardeur et de l'exactitude pour la table; ils seront batailleurs, mais lents à la prière; prompts à la médisance, toujours prêts à juger de haut, sans vouloir imiter ni même entendre les Vies et les Paroles des Vieillards; bien plutôt ils les invectiveront et diront : " Si nous avions vécu en leur temps, nous aurions lutté, nous aussi." En ces jours-là les évêques auront des égards pour les grands personnages, jugeant par vénalité, ne prenant pas la défense des pauvres en jugement, opprimant les veuves, accablant les orphelins. Alors se répandront dans le peuple l'incrédulité, la haine, l'inimitié, la jalousie, les intrigues, les vols et l'ivrognerie." Le frère dit : "Alors que fera-t-on dans de telles conditions et en ces temps-là ?" Et le vieillard répondit : "Mon enfant, en ces jours-là celui qui sauvera son âme la sauvera, et il sera appelé grand dans le royaume des cieux (cf Mt 5,19)."


VISION

de saint Niphon sur le Jugement futur

(suite et fin)

Je jugerai tous les moines qui ont négligé leurs devoirs et ont renié les promesses qu'ils ont faites devant Dieu, les anges et les hommes. Autre chose ils ont promise et autre chose ils ont accomplie. De la hauteur des nuages, Je les précipiterai dans l'abîme. Ils ne se sont pas contenté de leur propre perte mais ils ont provoqué un horrible scandale abominable à d'autres. Il aurait été mieux pour eux de ne pas avoir renié le monde, au lieu de le renier et de vivre mal dans la prodigalité. "À Moi la vengeance, à Moi la rétribution" pour ceux qu'ils n'ont pas voulu se repentir. Moi, Je vais les juger comme un juge juste.

Ces paroles que le Seigneur a tonné à l'archange Michel, ont rempli de peur les innombrables puissances des anges.

Après, Il ordonna de Lui apporter les sept siècles (il s'agit des millénaires) de la création du monde. Michel assuma l'exécution de l'ordre. Pour cela, il s'en alla vite à la maison du Testament et il les apporta. Ils étaient comme de grands livres et il les plaça devant le Juge. Après, il se mit de côté en observant avec respect comment le Seigneur tourne les pages de l'histoire.

Lui, Il prit le premier siècle, Il l'ouvrit et dit :

Il est écrit premièrement : "Le Père, le Fils et le saint Esprit, un Dieu en trois personnes. Du Père est né le Fils et Créateur des siècles. Parce qu'avec le Verbe du Père, le Fils, ont été créées les Forces immatérielles, ont été affermis les cieux, la terre, les profondeurs, la mer, les fleuves et tous ce qui est en eux."

Après, lisant un peu plus bas, Il dit :

Ici il est dit : "Le premier homme est l'image de Dieu invisible, Adam avec sa femme Ève. À Adam a été donné un ordre par Dieu tout-puissant, Créateur de toutes choses visibles et invisibles. C'est une loi qui doit être observée avec certitude et précision, pour qu'il se souvienne de son Créateur et qu'il n'oublie pas qu'il existe un Dieu au-dessus de lui.

De nouveau, Il S'avança :

L'image de Dieu (l'homme) a violé le commandement par tromperie ou plutôt par négligence. L'homme est tombé et a été chassé du paradis par Jugement et Décision justes de Dieu. Il ne pouvait pas rester parmi tant de biens, l'abominable délinquant !

Plus bas, Il lut :

Caïn s'est jeté sur Abel et l'a tué selon la volonté du diable. Il doit être brûlé par le feu de la géhenne 3 parce qu'il ne s'est pas repenti. Tandis qu'Abel vivra éternellement.

De la même façon, Il feuilleta les six livres des siècles. À la fin, Il prit le septième et Il dit :

Le début du septième siècle signifie la fin des siècles. Commencent à se généraliser la méchanceté, la perversité, l'insensibilité. Les hommes du septième siècle sont envieux, menteurs, hypocrites, aimant le pouvoir, asservis à des péchés sodomites.

Il avança un peu, Il lut quelque chose et Il dirigea ses Regards tristes en haut, posa une main sur le genou et avec l'autre couvrit le visage et resta pensif pendant longtemps.

Après Il murmura :

Vraiment le septième siècle a dépassé en injustice et en perversité tous les précédents.

Il lut plus bas :

Les Grecs et leurs idoles se sont écroulés avec le bois, la lance et les clous qu'ils ont enfoncés dans mon Corps vivifiant.

Il se tut quelques instants et Il se pencha sur le livre.

Douze princes du Grand Roi (les apôtres) blancs comme la lumière ont perturbé la mer, ont fermé la gueule des fauves, ont noyé les dragons spirituels, ont donné la vue aux aveugles, ont rassasié les affamés, ont appauvri les riches. Ils ont repêché plusieurs âmes mortes en leur redonnant la vie. Grand est leur salaire !

Et peu après :

Moi le Bien-aimé, J'ai choisi des témoins athlètes (les saints) pour mon plaisir. Leur amitié a atteint le ciel et leur amour mon trône. Leur tension vers mon Coeur et leur adoration Me réchauffe fortement. Ma Gloire et ma Puissance sont avec eux !

Après avoir tourné plusieurs pages, Il murmura avec un sourire de satisfaction :

L'homme qui a tenu avec piété le gouvernail de la ville bâtie sur sept collines ( il s'agit de Constantinople) et est devenu son roi fut esclave de mon Amour. Il mérite le royaume des cieux parce qu'il est resté attaché et imitateur de son Seigneur.

Après, en omettant plusieurs pages, Il S'écria :

Ô très belle et précieuse Épouse ! (Il est question de l'Église) Combien d'ennemis ont peiné pour te salir ! Mais tu ne M'a pas trahi, Moi ton Époux ! D'innombrables hérésies t'ont menacée mais le roc sur lequel tu es bâtie n'a pas bougé, parce que "les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle".

Plus bas étaient écrits les péchés des hommes que la mort a rencontrés parce qu'ils n'étaient pas lavés dans la repentance.

Et ils étaient aussi nombreux que les sables de la mer ! Le Seigneur lisait mécontent et Il remuait sa Tête en soupirant.

La foule innombrable des anges se tenait effrayée par la peur de la juste Colère du Juge.

Lorsque le Seigneur arriva au milieu de ce siècle, Il observa :

Cette fin est pleine de la puanteur des péchés des actions humaines qui sont toutes sales et fausses : Haines, meurtres, rancunes, hostilités. Cela suffit ! Je l'arrêterai au milieu. Que cesse le pouvoir du péché ! Et en disant ces paroles coléreuses, le Seigneur donna au général en chef, Michel, le signal pour le jugement. Immédiatement, celui-ci avec son armée enlevèrent l'indescriptible et suréclatant trône et s'en allèrent. L'armée était si nombreuse que la terre ne la contenait pas. En partant ils crièrent :

"Saint, saint, saint, terrible, grand, miraculeux et glorieux le Seigneur dans les siècles des siècles".

Ensuite Gabriel s'en alla avec son armée en chantant :

"Saint, saint, saint le Seigneur Sabaoth, la terre est remplie de sa Gloire. Raphaël, le troisième grand général en chef, suivit avec son armée en chantant :

"Un Saint, un Seigneur Jésus Christ pour la Gloire de Dieu le Père. Amen".

Enfin, la quatrième armée se mit en marche. Son chef était blanc et éclatant comme la neige avec un visage doux. En partant, il chanta lui aussi :

"Le Seigneur notre Dieu a parlé et a invité la terre de l'est à l'ouest. De Sion sa Beauté. Dieu viendra à la vue de tous et Il ne Se taira pas. Devant Lui marche le feu et autour de Lui un grand orage".

Ensuite il chanta le reste du psaume et ses dignitaires répondirent :

"Lève-Toi, ô Dieu jugeant la terre car c'est Toi qui hériteras de toutes les nations."

Le général en chef de cette armée s'appelait Uriël.

Peu après, on amena devant le Seigneur sa croix glorieuse qui brillait comme un éclair terrible et qui répandait du parfum. Le spectacle était magnifique. Les forces armées nombreuses chantaient en harmonie :

Il y en avait un qui disait avec crainte :

"Je vais T'exalter mon Dieu et mon Roi et je loue ton Nom dans les siècles."

D'autres disaient :

"Exaltez le Seigneur notre Dieu et prosternez-vous devant son marchepied car Il est saint. Alléluia, alléluia, alléluia."

Ensuite l'ordre me fut donné pour qu'il vienne de nouveau, le puissant archistratège 5 Michel pour qu'il se tienne à côté du trône du Seigneur. À ce moment là, apparut un ange avec une trompette puissante. Le Juge la saisit, sonna trois fois et prononça trois paroles. Après, Il la donna à Michel.

"Va au Golgotha où J'ai étendu mes saintes Mains pour que tu sonnes là aussi par trois fois.

Lorsque Michel s'en alla, le Seigneur convoqua l'armée des Puissances et dit à son chef :

"Je t'ordonne d'amener la sainte armée et de vous disperser dans le monde entier pour transporter sur des nuages les saints, de l'est à l'ouest, du nord et du sud. Tu les rassembleras tous pour qu'ils aperçoivent ma Présence lorsque la trompette sonnera.

Après, Il regarda la terre, le juste Juge et Il vit : brouillard, obscurité, pleurs et ordures en raison de la terrible tyrannie de Satan. Il était déchaîné, le dragon.

Il a tout détruit comme de l'herbe. Parce qu'il a vu les anges de Dieu qui lui préparaient le feu éternel.

Lorsqu'Il vit tout cela, le Seigneur convoqua un ange enflammé au visage sévère, sans pitié - il était le chef des anges qui surveillaient le feu de l'enfer - et Il lui dit :

Prends avec toi mon bâton qui ligote et brise. Prends aussi d'innombrables anges de son régiment, les plus terribles qui ont été désignés pour punir les voués à l'enfer. Vous irez dans la mer imaginaire pour trouver les traces du terrible Seigneur.

Saisis-le avec force et frappe-le sans merci avec le bâton jusqu'à ce qu'il rende le régiment des esprits malins.

Et après les avoir ligotés fermement tous avec la force de mon bâton, suivant mon ordre, tu les jetteras dans les enfers les plus sauvages et impitoyables."

Et alors que tout était prêt, il fut fait signe à l'archange qui tenait la trompette, de sonner fort. Tout de suite un silence mortel s'établit.

Alors la trompette sonna et les morts ressuscitèrent et ils dépassaient en nombre le sable de la terre. En même temps les armées angéliques chantaient fort :

"Saint, saint, saint le Seigneur Sabaoth", la terre est pleine de peur et de terreur.

S'ensuivirent des tonnerres, des éclairs dans la vallée du Jugement. Alors le firmament du ciel se retira et apparut la sainte Croix, brillant comme le soleil et tenue par les anges devant notre Seigneur Jésus Christ Juge de l'univers qui arrivait.

On entendit une hymne : "Béni soit Celui qui vient au Nom du Seigneur : le Seigneur Dieu", Juge, Archonte de la Paix.

Alors apparut le Juge sur les nuées, assis sur un trône flamboyant. Tous les ressuscités tombèrent à genoux devant le Juge. Toute la foule se rassembla autour du trône du Jugement. Il regarda ceux qui se trouvaient à sa droite et il sourit. Mais lorsqu'Il regarda ceux qui étaient à sa gauche, Il S'irrita, Il Se mit en colère et détourna tout de suite son visage.

Et Il dit à ceux qui étaient à sa droite (Mt 25,34) :

Venez les bénis de mon Père, prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde. Car J'ai eu faim et vous M'avez donné à manger;J'ai eu soif et vous M'avez donné à boire; J'étais étranger et vous M'avez accueilli; j'étais nu et vous M'avez vêtu; J'étais malade et vous M'avez visité; J'étais en prison et vous êtes venus vers Moi.

Les justes Lui répondirent : "Seigneur, quand T'avons-nous vu avoir faim et T'avons donné à manger; ou avoir soif et T'avons-nous donné à boire ? Quand T'avons-nous vu étranger et T'avons-nous accueilli; ou nu et T'avons-nous vêtu ? Quand T'avons-nous vu malade, ou en prison, et sommes-nous allés vers Toi ? Et Il leur répondit : Je vous dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à un de mes petits frères, c'est à Moi que vous l'avez faites.

Ensuite, Il dit à ceux qui étaient situés à sa gauche :

Retirez-vous de Moi, maudits, allez dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et ses anges. Car J'ai eu faim et vous ne M'avez pas donné à manger; J'ai eu soif et vous ne M'avez pas donné à boire; J'étais étranger et vous ne M'avez pas accueilli; J'étais nu et vous ne M'avez pas vêtu; J'étais malade et en prison et vous ne M'avez pas visité.

Ils répondirent, étonnés : "Seigneur, quand T'avons-nous vu ayant faim ou ayant soif, ou étranger, ou nu, ou malade ou en prison et ne T'avons-nous pas assisté ?

Je vous dis en vérité, leur répondit le Seigneur, toutes les fois que vous n'avez pas fait ces choses à l'un des plus petits de mes frères, c'est à Moi que vous ne les avez pas faites. Disparaissez de ma vue, maudits de la terre ! Allez en enfer, au châtiment éternel, au grincement des dents ! Là où sera le tourment et les pleurs interminables !"

Après que le Juge eut pris cette décision, un énorme fleuve de feu se déversa de l'est vers l'ouest. Et Il ordonna que tous traversent ce fleuve pour être éprouvés.

Ceux qui se tenaient à droite, le traversèrent et en sortirent étincelants comme de l'or. Ils sortirent indemnes de l'épreuve. Mais ceux qui se tenaient à gauche, leurs oeuvres furent brûlées comme de la paille, tandis que leurs corps flambaient éternellement avec le diable et les démons. Ensuite, le Juge Se leva de son trône et Se dirigea vers son palais divin avec tous ses saints. Toutes les puissances célestes L'entourèrent en chantant : - Ouvrez les portes éternelles, afin qu'Il entre, le Roi de gloire, le Seigneur et le Dieu des dieux, avec tous ses saints qui jouiront de l'héritage éternel.

Une autre armée chantait :

"Béni soit Celui qui vient au Nom du Seigneur", avec tous ceux que sa Grâce a nommé fils de Dieu, "le Seigneur est Dieu", avec les fils de la nouvelle Sion, "et Il nous est apparu".

Et les archanges qui précédaient le Seigneur, Le glorifièrent en chantant une mélodie céleste à voix alternées :

"Venez, réjouissons-nous dans le Seigneur, exultons en Dieu notre Sauveur, présentons-nous devant sa Face en confession et en psaumes, poussons vers Dieu des cris de joie! "

Une autre armé chanta : "Car Dieu est un grand Seigneur et un grand Roi sur toute la terre. Car dans sa Main sont les extrémités de la terre et les sommets de ses montagnes !"

Les saints anges chantèrent cette mélodie harmonieuse et d'autres aussi pour réjouir de façon indescriptible tous ceux qui les écoutaient.

En chantant ainsi, les saints entrèrent avec le Seigneur Jésus Christ dans la chambre nuptiale céleste du palais divin avec le cour qui bondissait de joie. Et aussitôt s'ouvrirent les portes de la chambre nuptiale.

Alors, dans le divin palais, le Roi céleste invita les chefs des anges, Michel, Gabriel, Raphaël, Uriel et les chefs des armées.

Suivaient les douze lumières du monde, les apôtres, qui prirent place à côté de leur maître le Christ avec honneurs, et ont été couronnés de douze couronnes en cristal et en pierres précieuses.

Ensuite furent amenés devant le Seigneur les 70 apôtres.

Puis vint le tour des martyrs qui furent transformés en anges et chefs des armées célestes, couronnés de couronnes lumineuses comme le soleil.

Après fit son entrée le choeur divin des hiérarques, prêtres, diacres et autres ecclésiastiques. Ils furent couronnés eux aussi selon leur zèle, leur patience et leur action pastorale.

On leur accorda une église pour offrir un sacrifice spirituel, parfait et agréable à Dieu.

Ensuite fit son entrée le saint choeur des moines. Le Seigneur les orna de six ailes et ils devinrent, avec la force du saint Esprit, comme des chérubins et des séraphins. Ils commencèrent à chanter : "Saint, saint, saint le Seigneur Sabaoth, toute la terre est pleine de sa gloire."(Is 6,3)

Suivit le choeur des prophètes. Le Roi leur donna le Cantique des Cantiques, le psautier de David, tympans et danses, lumière éclatante, ineffable joie extrême pour la doxologie.

Alors entra tout le choeur des hommes qui ont été sauvés dans le monde : pauvres et seigneurs, rois et personnes privées, esclaves et libres. Ils se tenaient tous devant le Seigneur et Lui départagea entre eux les miséricordieux et les purs et leur donna les délices du paradis d'Eden, des palmes célestes et lumineux, couronnes luxueuses, sanctification, allégresse, trônes, sceptres et anges pour les servir.

Ensuite vinrent ceux qui devinrent "pauvres en esprit" pour l'amour du Christ. Maintenant, ils furent élevés. Il leur fut donné de la Main du Christ une couronne lumineuse et ils héritèrent le royaume des cieux.

Après arrivèrent ceux qui étaient dans le deuil pour leurs péchés et ils reçurent la consolation de la sainte Trinité.

Ensuite ceux qui procurent la paix, qui héritèrent la terre céleste parfumée de l'Esprit de Dieu.

Ensuite "ceux qui ont faim et soif de justice"(Mt 5,6) Il leur fut donné le salaire de la justice pour qu'ils soient rassasiés.

Après "ceux qui sont persécutés pour la justice"(Mt 5,10) Il leur fut donné la sainte doxologie 6 et vie merveilleuse.

Après eux entra une foule d'idôlatres qui ne connaissaient pas la loi du Christ, mais l'ont observé naturellement en obéissant à leur conscience.. Beaucoup brillaient comme le soleil à cause de leur pureté. Et le Seigneur leur donna le paradis et de belles couronnes tressées de roses et de lys. Mais parce qu'ils étaient privés du saint baptême, ils étaient aveugles. Ils ne voyaient pas du tout la Gloire de Dieu. Car le saint baptême est la lumière et l'il de l'âme. Pour cette raison celui qui ne le reçoit pas, même s'il accomplit des bonnes oeuvres multiples, hérite certes l'aisance paradisiaque et goûte un peu de sa douceur et de son parfum, mais il ne voit rien.

Après ceux-là, saint Niphon vit une rangée de saints. C'étaient les enfants des chrétiens. Tous avaient l'air d'avoir à peu près trente ans.

L'Époux les regarda avec un regard hilard, et dit : "La tunique de votre baptême est sans tâche, mais je ne vois d'oeuvres nulle part ! Que dois-je donc faire de vous ?"

Alors, ils Lui répondirent avec courage :

Seigneur, Tu nous a privés de tes biens terrestres, au moins ne nous prive pas des célestes.

L'Époux sourit et leur donna les biens célestes. Ils reçurent aussi les couronnes de la chasteté, de la bonté et toutes les armées immatérielles admirèrent tout cela.

C'était admirables d'entendre les saints anges qui, très satisfaits en voyant les rangés de tous les saints, chantaient des doux cantiques.

Après toutes ces choses, Niphon vit venir devant l'Époux une Épouse illuminée de la lumière divine, couronnée sur sa belle tête d'une couronne royale incomparable qui brillait. Les anges la regardaient, étonnés et les saints étaient éblouis.

En entrant dans la divine chambre nuptiale, elle était suivie d'une foule innombrables de vierges qui chantaient avec des doxologies et des cantiques les grandeurs de Dieu.

Quand elle arriva près de l'Époux, la grande reine s'inclina trois fois avec toutes les vierges. Alors Le "Beau en beauté" la vit et il se réjouit. Il inclina la tête et l'honora en tant que sa mère immaculée. Elle s'approcha avec beaucoup de respect et de grâce, et elle embrassa ses Yeux immortels ainsi que ses Mains miséricordieuses.

Alors l'époux se leva de son trône et ayant à sa droite sa Mère et à sa gauche le grand et admirable prophète et son précurseur, il sortit de la chambre nuptiale et entra dans la salle divine où se trouvent les biens "que l'oeil n'a pas vu et l'oreille n'a pas entendu et qui ne sont pas montés dans le coeur de l'homme", préparés pour tous ceux qui ont aimé Dieu. Lorsque le Seigneur distribua à ses saints tous ces biens inexprimables et inouïs, il ordonna aux Chérubins d'entourer la salle éternelle comme une ville entoure une muraille. Il ordonna ensuite aux Séraphins d'entourer les Chérubins, les Trônes les Séraphins, les Puissances les Trônes, les Autorités les Puissances, les Pouvoirs les Autorités et enfin les Forces des cieux les Puissances.

Comme une muraille entoure une ville, ainsi les régiments entourèrent l'un l'autre.

Quand tout cela fut accompli, Lui aussi le Dieu-Homme Jésus se soumit à "celui qui s'est tout soumis" et il lui transmit tout pouvoir et domination qu'il avait reçu de Lui. Tandis que Lui (le Christ) pénétra dans la salle impénétrable, héritier de Père, Roi et Grand-Prêtre avec tous ses cohéritiers, les saints.

À la fin de ces mystères qui sont apparus à saint Niphon, il vit l'apocalypse le plus terrible : le Père Lui-même du Fils unique, l'Geniteur, la lumière irréprochable et incompréhensible, se leva soudainement éclatant au-dessus de cette énorme salle, au-dessus des immaculées puissances, au-dessus de tous les cercles et rangées. Il éclairait la salle propre comme le soleil éclaire le monde. Ainsi brillait le Père des miséricordes. Et, comme l'éponge absorbe et retient le vin, ainsi les saints furent inondés par l'inneffable Divinité du Père et régnèrent sans cesse avec Lui dans les siècles. Depuis, il n'y eut plus pour eux ni nuit ni jour. Seul existait Dieu et Père, Fils et Esprit, lumière et délice, vie et plaisir.

Quand le bienheureux Niphon eut vu vu toutes ces choses, il se trouva dans une grande extase et contemplation, il entendit la Voix de Dieu lui disant : " Niphon, Niphon, belle était ta vision prophétique. Mais tout ce que tu as vu et entendu, écris-le avec détail parce qu'ils se réaliseront ainsi. Je te l'ai révélé à toi, parce que tu es un fidèle ami, mon fils aimé et héritier de mon royaume. Rassure-toi donc maintenant que je t'ai fait digne de devenir témoin oculaire des mystères terribles pour ma grande Bonté en faveur de ceux qui s'inclinent avec humilité devant ma Royauté et mon Pouvoir. Parce que Moi, Je me réjouis "d'avoir le regard sur l'homme qui aime la paix et la tranquillité et il tremble en écoutant mes paroles."

Après avoir dit cela, le Seigneur le délivra de la vision terrible et merveilleuse qui l'avait absorbé pendant deux semaines.

Quand il revint à lui, il était assis, terrifié et il pleurait. Ses larmes coulaient comme une rivière et il disait : "Malheur à moi le prodigue ! Qu'est-ce qu'il attend mon âme misérable ! Malheur à moi le misérable ! Dans quel état serai-je là, moi le pécheur ! Quelle apologie présenterai-je au Juge ? Quelle raison donnerai-je pour mes péchés ? Et où cacherai-je la multitude de mes iniquités ? Ah, le profanateur et le misérable ! Je n'ai ni soupirs, ni larmes. Et la repentance ne se trouve pas en moi ! La bienfaisance non plus ! Ni la prière ! Amour zéro ! La bonté reste loin de moi ! Malheur ! Que ferai-je, le misérable et le souillé ? D'où puis-je me tenir pour sauver mon âme ? J'ai sali ma tunique ainsi que mon baptême, mon âme je l'ai plongée dans la boue. J'ai troublé mon esprit, ma vie, je l'ai chargée "en débauche et en ivresse". Ah ! le pécheur, je ne sais pas ce que je fais ! Mes yeux voient les turpitudes. Mon visage est plein de honte. Mes oreilles se plaisent à des chansons démoniaques. Mon odorat désire des parfums. Ma bouche tend à la gloutonnerie. Mes mains se plaisent au péché. Mon corps désire se rouler dans la boue de l'immortalité et poursuit les lits confortables et la bonne table. Qui va me tirer de là ? du grincement des dents ? Mieux vaut que je ne fusse pas né. Quelle honte éprouverai-je au regard de Jésus ! Avec quels yeux regarderai-je son doux visage ?

Malheur à toi mon âme ! Tu hériteras le feu éternel.

Mais mon Seigneur, Seigneur, sauve moi du feu, du grincement des dents,de l'abîme,"

Avec ces paroles se contrôlait le bienheureux.

Souvent en songeant sa vision, il s'enflammait par la présence du saint Esprit et s'écriait :

"Oh quelle joie, quelle gloire attend les saints au ciel. Combien je crains de m'en priver !"

Il soupirait profondément et ajoutait :

"Seigneur, aide et sauve mon âme troublée."